vendredi 13 janvier 2012

PRESUME COUPABLE


de Vincent Garenq. 2011. France. 1h42. Avec Philippe Torreton, Wladimir Yordanoff, Noémie Lvovsky, Raphael Ferret, Michelle Goddet, Farida Ouchani, Olivier Claverie, Jean-Pierre Bagot.

Récompenses: Valois d'Or et Valois Magélis au Festival du film francophone d'Angoulême pour Présumé Coupable.
Prix du Meilleur Film européen lors de la 68è Mostra de Venise.

Sortie en salles en France le 7 Septembre 2011

FILMOGRAPHIE: Vincent Garenq est un réalisateur, scénariste, dialoguiste, adaptateur français.
2008: Comme les Autres
2011: Présumé Coupable


Ce film est la fidèle adaptation du journal écrit en détention par Alain Marécaux paru chez Flammarion en 2005.
D'après le livre Chronique de mon erreur judiciaire, Présumé Coupable revient sur le procès d'une des plus incongrues erreurs judiciaires de France à travers l'affaire d'Outreau. Et en particulier sur le calvaire imposé à cet huissier de justice, accusé en 2001 de viols sur mineur et finalement acquitté le 1er Décembre 2005.

En 2001, en pleine nuit, les forces de l'ordre arrivent en renfort chez le domicile d'Alain Marécaux pour l'appréhender envers des accusations de pédophilie. Sa femme également dénoncée est placée en détention alors que les enfants sont envoyés dans un foyer spécialisé. Sur une durée étalée de 5 années d'affaire pénale, c'est le début d'un calvaire insensé pour un homme de droit annihilé par la machine judiciaire. 


Epaulé par la performance cinglante du comédien Philippe Torreton pour incarner avec souci de vérité le rôle d'un avocat brisé par l'équité, Vincent Garenq nous illustre son calvaire improbable émanant d'une machine judiciaire castratrice, délibérée à le réprimander derrière les barreaux.
Avec sobriété d'une réalisation introspective au plus près de son personnage déchu, Présumé Coupable nous entraîne dans la descente aux enfers de ce père de famille accusé au grand jour d'une sordide affaire d'abus sexuel sur mineur. La cause primordiale de ce procès maladroitement géré en est surtout attribuée à l'arrogance d'un juge néophyte particulièrement prétentieux car déterminé à envoyer en prison nombre de témoins inéquitablement accusés à tort de faits crapuleux.
Dans un souci d'authenticité proche du documentaire, nous allons suivre le cheminement abrupt d'Alain Marécaux, de son arrestation et celle de sa famille durant une nuit à son propre domicile. S'ensuit ses interrogatoires et gardes à vue prolongées d'une police arrogante et inflexible pour tenter de lui faire avouer des actes licencieux de pédophilie. Alors que du côté de la cellule familiale, les questions perfides octroyées à ces enfants juvéniles sont tolérées sans vergogne afin d'accumuler les preuves d'inculpation. Place ensuite à ses différentes détentions en établissement carcéral mais aussi son internement en hôpital psychiatrique, faute de tentatives de suicide récurrentes puis de sa grève de la faim. Le réalisateur souligne également les conséquences psychologiques allouées à son entourage, à ses beaux parents, à sa mère décédée par désespoir meurtri, à la séparation de sa femme dépitée et humiliée, à la négligence de ses enfants mais aussi à la délinquance de l'aïné révolté.


Philippe Torreton livre une performance criante de vérité humaine dans le portrait avili d'un homme d'honneur fustigé par une police et une magistrature impitoyable. Implacablement et sans concession, nous suivons sa lente dérive psychologique mais aussi sa déficience physique dans son entreprise d'une grève de la faim (l'acteur aura perdu 27 kilos pour mettre en exergue la physionomie décharnée de son corps rendu moribond). Bouleversant dans sa probité sans cesse remise en cause, sa solitude désespérée de ne pouvoir convaincre l'autorité, son amertume et ses désillusions d'une potentielle remise en liberté, l'acteur dégage une dimension humaine d'une acuité rude et éprouvante.

Puissamment interprété par un acteur transi jusqu'aux seconds rôles dépouillés et remarquablement construit dans une réalisation limpide éludée d'artifice, Présumé Coupable est un puissant plaidoyer pour la présomption d'innocence et le respect de la dignité humaine. A travers le récit véridique d'une sordide affaire aux investigations mal gérées par un juge orgueilleux, ce drame humain nous donne à réfléchir sur les rouages d'un système judiciaire totalement anarchique et ébranlé. Glaçant, âpre et effrayant ! 
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Note: Le conseil supérieur de la magistrature a reconnu le manque de rigueur caractérisé du juge burgaud et lui a infligé une simple réprimande le 24 Avril 2009.
Aucun autre magistrat n'a été sanctionné.
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13.01.12
Bruno Matéï

 

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