vendredi 18 mars 2016

MARY REILLY

                                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site pinterest.com

de Stephen Frears. 1996. U.S.A. 1h48. Avec Julia Roberts, John Malkovich, George Cole, Michael Gambon, Kathy Staff, Glenn Close, Michael Sheen

Sortie salles France: 17 Avril 1996. U.S: 23 Février 1996

FILMOGRAPHIE: Stephen Frears, est un réalisateur et producteur britannique, né le 20 juin 1941 à Leicester. 1968 : The Burning. 1971 : Gumshoe. 1979 : Bloody Kids. 1984 : The Hit. 1985 : My Beautiful Laundrette. 1987 : Prick Up Your Ears. 1987 : Sammy et Rosie s'envoient en l'air. 1988 : Les Liaisons dangereuses. 1990 : Les Arnaqueurs. 1992 : Héros malgré lui. 1993 : The Snapper. 1996 : Mary Reilly. 1996 : The Van. 1998 : The Hi-Lo Country. 2000 : High Fidelity. 2000 : Liam. 2002 : Dirty Pretty Things. 2005 : Madame Henderson présente. 2006 : The Queen. 2009 : Chéri. 2010 : Tamara Drewe. 2012 : Lady Vegas : Les Mémoires d'une joueuse. 2014 : Philomena. 2015 : The Program. 2016 : Florence Foster Jenkins.


Honteusement oublié et discrètement reconnu à sa sortie, Mary Reilly aborde le thème éculé de la lutte du Bien et du Mal parmi un jeu d'acteurs à son apogée. Loin de remaker les classiques de Fleming et de Mamoulian, le réalisateur anglais Stephen Frears y apporte sa touche personnelle par le biais d'une romance équivoque qu'entretiennent secrètement Jekyll et sa gouvernante. Traumatisée durant son enfance par les sévices d'un père alcoolique, Mary Reilly tente d'oublier son passé en occupant son poste de gouvernante chez la demeure du Dr Jekyll. Alors que ce dernier est sur le point d'héberger un mystérieux hôte du nom de Mr Hyde, Mary lui confie ses blessures secrètes. Peu à peu, une complicité amicale s'installe entre eux avant que Mr Hyde ne vienne bouleverser la donne dans son instinct dépravé. Baignant dans un climat blafard irrésistiblement envoûtant au sein d'un quartier londonien du 19è siècle, Mary Reilly prend soin d'authentifier sa reconstitution historique parmi le cadre inquiétant d'une vaste demeure occultant de terribles expériences. Entièrement bâti sur la caractérisation psychologique des deux amants galvaudés, Stephen Frears analyse ces portraits torturés, partagés entre la fougue de leurs sentiments et l'instinct de perversité.


Par ces rapports troubles de soumission mêlés de confiance, le réalisateur accorde plus d'intérêt à ausculter les états d'âme de Mary Reilly, sensiblement attirée par le comportement aguicheur de Mr Hyde. Julia Roberts insufflant sobrement dans une posture placide et timorée une dimension humaine ambiguë depuis son parti-pris de protéger un éventuel assassin. Son passé martyr refaisant surface sous les provocations licencieuses de Hyde, Mary se laisse voguer à un jeu implicite de masochisme. Par le biais de son comportement ambivalent oscillant pudeur et fantasme sexuel (notamment à travers la chimère du rêve nocturne), Stephean Frears ose renouveler le célèbre roman de Stevenson sous l'impulsion d'un amour salvateur. Jekyll et Hyde étant tous deux compromis par leurs sentiments amoureux, leur confrontation contradictoire engendre un jeu de pouvoir et de soumission entre les ressorts du Bien et du Mal. Mis en scène de main de maître avec beaucoup de suggestion et une cruauté parfois graphique (les sordides châtiments de Mary infligés durant son enfance, le passage à tabac d'une fillette par Hyde, la mort d'un de ses amis à coup de canne), Mary Reilly dilue une atmosphère anxiogène subtilement diffuse au fil de la dérive destructrice des amants. Outre la prestance aussi fragile que constante d'une Julia Roberts sans fard, le film cultive une intensité vénéneuse autour de la performance virile de John Malkovich. Ce dernier endossant par un habile jeu de regards magnétique la fonction autodestructrice d'un chercheur s'efforçant de dissocier le bien du mal afin d'en démystifier leurs causes.


Jeu de miroir diaphane pour la romance masochiste des amants en quête de rédemption, Mary Reilly continue d'explorer les thèmes sulfureux de l'instinct pervers et la fascination du Mal par le biais d'une trouble complicité que John Malkovitch et Julia Roberts immortalisent fébrilement. Une oeuvre cérébrale passionnante élevant le genre fantastique avec une rare dignité, à redécouvrir d'urgence !  

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