mercredi 17 décembre 2014

Gone Girl

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de David Fincher. 2014. U.S.A. 2h29. Avec Ben Affleck, Rosamund Pike, Carrie Coon, Kim Dickens, Neil Patrick Harris, Tyler Perry, Scoot McNairy, Boyd Holdbrook, Lee Norris.

Sortie salle France: 8 Octobre 2014. U.S: 3 Octobre 2014

FILMOGRAPHIE: David Fincher est un réalisateur et producteur américain, né le 28 Août 1962 à Denver (Colorado). 1992: Alien 3. 1995: Seven. 1997: The Game. 1999: Fight Club. 2002: Panic Room. 2007: Zodiac. 2008: L'Etrange histoire de Benjamin Button. 2010: The Social Network. 2011: Millénium. 2014: Gone Girl.


P.S: Il est préférable d'avoir vu le film avant de lire cet article (surtout auprès de sa conclusion incluant toutefois un avertissement).

Nouvelle pièce maîtresse de Fincher (en jouant aussi sur le "jeu de mots"), Gone Girl s'inspire d'un best-seller de Gillian Flynn pour mettre en exergue l'investigation de longue haleine d'une énigme criminelle redoutablement vénéneuse. Tant auprès de sa satire invoquée à la célébrité, au mariage, à la possessivité, et aux apparences qu'à l'amertume d'un épilogue terriblement pervers, Gone Girl exploite avec beaucoup d'ironie le jeu de massacre d'un échec conjugal, une guerre des sexes qu'un mari et une femme vont se déclarer sous les feux de projecteur des médias avides de potins. Le pitch: Patron de bar et ancien journaliste, Nick rentre chez lui pour retrouver sa femme. Sur place, il s'étonne de son inexplicable absence et s'aperçoit que la table de salon est brisée. Craignant une disparition, il s'empresse d'appeler la police. Après des jours d'enquête infructueuse, Amy reste introuvable. Les soupçons se portent rapidement sur le mari infidèle. 


Que les amateurs de romance à l'eau de rose frelatée se réjouissent, Gone Girl transpire l'iconoclasme à travers son aura perverse redoutablement pernicieuse, quand bien même le caractère ubuesque du pugilat conjugal effleure la parodie (de mauvais goût) de par sa peinture caustique impartie à l'amour possessif. La majorité de l'intrigue se résumant à un affrontement machiste et féministe entre une femme déchue de sa passion amoureuse et un époux meurtri de sa potentielle culpabilité criminelle. Au centre de leurs stratégies de défense, les médias s'emparent de l'affaire tels des reptiles insatiables alors que la police piétine à assembler les puzzle d'une disparition jonchée d'indices ludiques ! Si on imagine rapidement que l'époux ne peut-être l'instigateur de cette machination, la suite s'avère plus retorse pour mettre en évidence l'aspect sournois du faux semblant auquel nous avons coutume de croire parmi la complicité des médias. Comme le disait Nick Carter, la vérité est ailleurs, Gone Girl ne cessant de gratter le vernis de l'Amérique puritaine pour dévoiler au grand jour la face cachée de notre égoïsme et la manipulation des sentiments, notamment notre rapport sournois face à l'échec amoureux et à l'infidélité. Alors que l'opinion public avide de sentiments contradictoires se console dans la réalité factice d'un happy-end imposteur.  


Le Venin de la femme-reptile 
Farce corrosive sur la déontologie du mariage, bijou de perversité macabre dans son dernier tiers aléatoire Spoil ! (notamment cette exaction à retourner l'estomac !) Fin du Spoil, Gone Girl attise l'expectative du dénouement avec une diabolique rigueur tout en distillant une ambiance trouble subtilement malsaine à travers les rapports de sentiments compromis par la rancune, la possessivité et la soumission. L'intrigue ne cessant de jongler avec les états d'âmes insidieux du couple infortuné en quête insoluble de rédemption. Captivant, voir ensorcelant de manière éthérée, ce thriller licencieux n'a en prime aucun scrupule pour nous placer en position de voyeur auprès de ces liens défaitistes d'amour et de sang. 

*Bruno
11.07.22. vf. 2èx
17.12.14

mardi 16 décembre 2014

LES ENVOUTES (The Believers)

                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site fan-de-cinema.com

de John Chlesinger. 1987. U.S.A. 1h50. Avec Martin Sheen, Robert Loggia, Helen Shaver, Richard Masur, Harris Yulin, Harley Cross, Jimmy Smits.

Sortie salles France: 23 Septembre 1987. U.S: 10 Juin 1987

FILMOGRAPHIE: John Chlesinger est un réalisateur, acteur, scénariste et producteur anglais, né le 16 Février 1926 à Palm Springs, décédé le 25 Juillet 2003
1962: Un Amour pas comme les autres. 1963: Billy le menteur. 1965: Darling. 1967: Loin de la foule déchaînée. 1969: Macadam Cowboy. 1971: Un Dimanche comme les autres. 1975: Le Jour du Fléau. 1976: Marathon Man. 1979: Yanks. 1981: Honky Tonk Freeway. 1984: Le Jeu du Faucon. 1987: Les Envoûtés. 1988: Madame Sousatzka. 1990: Fenêtre sur Pacifique. 1993: L'Innocent. 1995: Au-delà des lois. 2000: Un Couple presque parfait.


Première incursion dans le genre horrifique de John Chlesinger, inoubliable réalisateur de Macadam Cowboy et de Marathon Man, Les Envoûtés relate la difficile investigation d'un éminent psychiatre venu prêter main forte à la police après la découverte de sacrifices d'enfants. Depuis diverses recherches, les fidèles de la Santeria seraient à l'origine de cette macabre mise en scène. Pour rappel, cette croyance philosophique venue des caraïbes (et lointainement inspirée de la religion Yoruba) est principalement instaurée à Cuba, en Colombie et au Venezuela. Cette doctrine catholique aux croyances africaines a notamment inspiré le culte des voduns puis s'est exportée sur le sol américain et caribéen durant la traite des nègres. On peut notamment la comparer au culte antillais du vaudou dans son alliage de sorcellerie, magie et rituels chrétiens. 


L'histoire qui nous intéresse ici se concentre d'abord sur le difficile deuil d'un père et de son fils après qu'ils eurent été témoins d'un accident domestique. C'est d'ailleurs par ce prologue choc, plutôt intense dans sa dramaturgie horrifiée, que l'intrigue débute pour mettre en exergue la mort cinglante d'une mère de famille électrocutée sous les yeux de ses proches. Partis s'exiler à New-York, Cal et son fils Chris tentent d'oublier cette tragédie au moment même où ils vont s'improviser témoins oculaires face au rituel d'un sacrifice d'enfant. Incessamment inquiétant dans son climat surnaturel fondé sur le culte du vaudou, et émaillé de séquences chocs particulièrement impressionnantes dans leur aspect viscéral, Les Envoûtés réussit à nous immerger dans une insidieuse descente aux enfers où forces du Mal et doctrine religieuse communient au nom d'une divinité orgueilleuse. Sans faire preuve d'esbroufe car préconisant le mystère insondable d'une investigation opaque, John Chlesinger privilégie la dimension humaniste de ces personnages en initiation irrationnelle, principalement l'épreuve de force subie entre Cal, sa nouvelle concubine et son fils sévèrement ébranlés d'une série d'incidents aussi macabres qu'inexpliqués. En traitant des thèmes du sacrifice d'enfants, de la superstition, de la quête du pouvoir et des dérives sectaires, les Envoûtés provoque une intensité anxiogène lorsqu'un père rationnel finit par se laisser convaincre de l'intrusion du surnaturel dans sa réalité quotidienne. Outre l'empathie que l'on accorde pour la condition démunie de nos protagonistes et l'angoisse éprouvée face à l'emprise des sectes profitant d'une détresse parentale, le cinéaste met en exergue une réflexion sur le sacrifice humain (notamment le sort des enfants martyrs impliqués dans les guerres) que chaque religion a osé imposer pour tenir lieu de leur traditon divine !


Mis en scène avec brio et subtilité dans son traitement d'un fantastique trouble, impeccablement campé par des comédiens dépouillés (Martin Sheen fait preuve d'une sobriété pertinente dans la peau d'un père charitable et celui d'un psychiatre studieux !), les Envoûtés réussit à allier angoisse et inquiétude grandissante autour d'un enseignement perfide fondé sur l'égotisme. Il en émane un solide thriller fantastique particulièrement captivant dans son cheminement nébuleux où le surnaturel prédomine un peu plus le désarroi psychologique des témoins-clefs. 

Bruno Matéï


lundi 15 décembre 2014

REVEIL DANS LA TERREUR (Wake in Fright/Outback)

                                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site allstarvideo.blogspot.com

de Ted Kotcheff. 1971. Australie. 1h54. Avec Donald Pleasance, Gary Bond, Chips Rafferty, Sylvia Kay, Jack Thompson, Peter Whittle, Al Thomas, John Meillon, John Armstrong.

FILMOGRAPHIE: Ted Kotcheff est un réalisateur, producteur, acteur et scénariste canadien d'origine bulgare, né le 7 avril 1931 à Toronto (Canada).
1971: Réveil dans la Terreur. 1974: l'Apprentissage de Duddy Kravitz, 1978: La Grande Cuisine, 1982: Rambo, 1983: Retour vers l'Enfer, 1988: Scoop, 1989: Winter People, Week-end at Bernie's, 1992: Folks !


Film méconnu resté invisible pendant des décennies mais néanmoins sorti chez nous en Vhs sous le titre Savane et plus récemment dans nos salles, Réveil dans la Terreur retrace le périple impossible d'un instituteur pour rejoindre Sydney lorsqu'il décide de faire escale dans une petite bourgade australienne. Au fil de ses rencontres amicales dans divers bars miteux, il finit par se laisser entraîner dans moult beuveries et une étreinte sentimentale jusqu'à l'improvisation d'une chasse aux kangourous. 


Road movie au vitriol sous le soleil écrasant d'une cité minière australienne, Réveil dans la Terreur est une invitation au bout des ténèbres, l'introspection de la dépravation humaine sous l'oeil complice d'un touriste respectable. A la manière d'After Hours de Scorsese, Ted Kotcheff utilisant la bonhomie de son héros afin de le confronter à un concours de circonstances désastreuses pour sa propre morale ! Celles de l'influence sympathique d'une bande d'alcoolos noyés dans leur médiocrité. Ce qui frappe dans la déliquescence humaine de ce solitaire en perdition, c'est la manière sensitive dont son auteur s'y emploie pour infiltrer le malaise par le biais d'une réalisation documentée, d'un climat presque surréaliste et de la spontanéité de comédiens en roue libre (Donald Plesance et Gary Bond insufflant un jeu viscéral dans leur complicité faussement affable !). L'omniprésence de la bière coulant à flot, le tableau mesquin imparti à ces trognes mal rasées et la place inconsidérée de la femme réduite à l'isolement laissent distiller une atmosphère suffocante et oppressante devant le témoignage impuissant de l'instituteur. Tour à tour confrontés à leurs beuveries quotidiennes car n'ayant pas la virilité pour refuser un verre, il finira par céder à l'euphorie de l'ébriété après avoir été endoctriné par leurs bas instincts. Outre son constat social sur la régression, la précarité, l'avilissement de l'alcoolisme et l'influence de l'effet de groupe, Réveil dans la Terreur se porte notamment en défenseur de la cause animale lorsqu'il s'attarde à souligner les effets pervers (le plaisir de tuer dans une ferveur communicative !) d'une chasse aux kangourous ! 


Bad-trip insolite faisant office d'ovni quasi expérimental, Réveil dans la Terreur improvise la journée en enfer d'un aimable citoyen perdant peu à peu ses facultés intellectuelles et humaines face à l'influence de mauvaises rencontres. Déstabilisant, malsain, hyper réaliste et parfois éprouvant, nous sortons de la séance avec le sentiment aigri d'avoir été ébranlé par une méchante gueule de bois.  

Dédicace à Adrien Pennequin
Bruno Matéï

vendredi 12 décembre 2014

Maniac Cop

                                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinema.jeuxactu.com

de William Lustig. 1988. U.S.A. 1h25. Avec Tom Atkins, Bruce Campbell, Laurene Landon, Richard Roundtree, William Smith, Robert Z'dar, Sheree North.

Sortie salles France: 22 Juin 1988

FILMOGRAPHIE: William Lustig est un réalisateur américain né le 1er février 1955 dans Le Bronx à New York. Il est le neveu du boxeur Jake La Motta. 1980: Maniac. 1983: Vigilante. 1988: Maniac Cop. 1990: Maniac Cop 2. 1993: Maniac Cop 3. 1997: Uncle Sam.


Habile franc-tireur responsable du mythique Maniac et d'un classique de l'auto-défense, Vigilante, William Lustig continue de verser dans la série B horrifique avec Maniac Cop, d'après un scénario du célèbre Larry Cohen. Justement, c'est bien là la qualité première de cet efficace slasher dont l'intrigue adroitement écrite juxtapose judicieusement péripéties, course-poursuites, cascades, rebondissements en pagaille et crimes en série autour de l'itinéraire meurtrier d'un flic psychopathe. Qui plus est, pour intensifier l'enjeu dramatique, un faux coupable est sévèrement malmené par la police et le tueur afin que ce dernier puisse librement continuer ses exactions lors d'une unité de temps. En empruntant au thème du zombie inscrit dans notre réalité du quotidien, Larry Cohen réussit à crédibiliser son intrigue bâtie sur la vengeance meurtrière de l'officier Matt Cordel, préalablement condamné à tort pour abus de pouvoir et donc enfermé en prison parmi les assassins qu'il avait autrefois alpagué. 


Spoiler !!! Après avoir été laissé pour mort lors d'une sordide altercation dans les douches de la prison et après s'être échappé de la morgue, il décide d'accomplir une vengeance méthodique pour tenir lieu de son innocence auprès des citadins de son quartier. Maintenu en vie grâce à sa rancoeur et ses pulsions de haine, il est aujourd'hui incarné en monstre invincible sous une panoplie d'agent impérieux. Fin du Spoil. Avec une dose d'ironie macabre et d'humour potache, la première partie s'alloue d'un pied de nez intenté au corps policier lorsque ce flic déchu de ses fonctions se planque sous son insigne pour mieux se fondre dans la peau d'un psychopathe et semer une zizanie urbaine ! Du coup, les quidams gagnés par une paranoïa collective n'osent plus aborder l'insigne de l'ordre de peur de finir égorger, quand bien même certains d'entre eux finissent par se laissent gagner par une justice individuelle ! Car c'est affublé d'une arme blanche que le maniac accomplit ses méfaits en sillonnant les ruelles crépusculaires de New-York. Sur ce point, l'atmosphère d'insécurité qui émane des sombres quartiers renvoie un peu au climat envoûtant magnifiquement dépeint dans son premier chef-d'oeuvre, Maniac. Alors qu'aujourd'hui les actualités récentes nous énumèrent certaines bavures des forces de l'ordre intentées sur les noirs américains, on peut déceler dans Maniac Cop une métaphore sur la corruption policière lorsqu'un flic zélé n'hésite plus à sortir son arme pour abattre un quidam désarmé. Epaulé d'une poignée de comédiens de seconde zone, Tom Atkins et Bruce Campbell en tête, le film fait preuve d'une patine Bis dans la manière rustre et naïve dont les interprètes font preuve pour s'exprimer avec machisme. Du point de vue musical, William Lustig fait de nouveau appel à son compositeur fétiche, Jay Chataway, pour soutenir une partition tantôt percutante, tantôt entêtante dans sa mélodie lancinante se prêtant bien à l'onirisme-macabre reflétant les états d'âme du justicier d'outre-tombe rongé par la haine et l'injustice. 


Efficace et carré, nerveux et haletant, inventif mais aussi naïf, Maniac Cop assure le quota d'un psycho-killer de série B parmi l'originalité d'un script affûté et la sympathie attachante de seconds couteaux du ciné Bis. 

*Bruno
3èx

jeudi 11 décembre 2014

MAD-MAX 2 (Mad-Max 2: The Road Warrior). Grand Prix, Avoriaz 82.

                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Moviecovers.com

de George Miller. 1981. Australie. 1h35. Avec Mel Gibson, Bruce Spence, Mike Preston, Max Phipps, Vernon Wells, Kjell Nilsson, Emil Minty, Virginia Hey.

Récompense: Grand Prix au Festival du Film Fantastique d'Avoriaz, 1982

Sortie salles France: 11 Août 1982. U.S: 21 Mai 1982. Australie: 24 Décembre 1981

FILMOGRAPHIE: Georges Miller est un réalisateur, scénariste et producteur australien, né le 3 Mars 1945 à Chinchilla (Queensland).
1979: Mad-Max. 1981: Mad-Max 2. 1983: La 4è Dimension (dernier segment). 1985: Mad-Max : Au-delà du dôme du Tonnerre. 1987: Les Sorcières d'Eastwick. 1992: Lorenzo. 1997: 40 000 ans de rêve (documentaire). 1998: Babe 2. 2006: Happy Feet. 2011: Happy Feet 2. 2014: Mad Max 4; Fury Road.


"Ma vie s’éteint, la vue se brouille, il ne reste plus que le souvenir. Je m’souviens d’un temps ou régnait le chaos, un temps de rêves brisés, de terres dévastées... Mais par-dessus tout, je me souviens du guerrier de la route. L’homme que nous appelions Max. Pour comprendre qui était cet homme, il faut revenir à une autre époque. Quand le monde tournait au carburant noir et que florissaient dans les déserts de grandes cités de tubes et d’acier... Disparues, maintenant, balayées... Pour des raisons aujourd’hui oubliées, deux puissantes tribus entrèrent en guerre allumant un brasier qui les dévora toutes les deux. Sans carburant, elles n’étaient rien. Leur empire était de paille. Le grondement des machines hoqueta et s’éteignit. Les chefs parlèrent, et parlèrent... Et parlèrent encore. Mais rien ne pouvait endiguer le désastre. Leur monde s’écroula... Les villes explosèrent provoquant une tornade de pillages. Un vent brûlant de terreur ; L’homme commença à se nourrir de l’homme. Sur les routes régnait le cauchemar de la ligne blanche. Seuls les flibustiers les plus mobiles, les pillards les plus impitoyables survivaient... Les bandes prirent le contrôle des routes prêtes à se faire la guerre pour un bidon de carburant. Dans ce maelström de pourriture, le commun des mortels était brisé, écrasé. Des hommes comme Max, Max le guerrier. Dans le rugissement d’un moteur, il avait tout perdu... Et il devint un homme vidé, consumé, ravagé, un homme hanté par les démons de son passé, un homme qui errait sans but par les terres désolées. Ce fut ici, dans ce lieu maudit, qu’il réapprit à vivre..."
 

Phénomène planétaire alors que le premier volet eut été boudé par les américains, Mad-Max 2 s'est rapidement taillé au fil des années la réputation d'archétype du film d'action, les poursuites et cascades inédites s'enchaînant à un rythme effréné. Revoir Mad-Max 2 pour la seconde ou dixième fois sans éprouver un soupçon de lassitude prouve à quel point le génie de la mise en scène de George Miller reste insurpassable en la matière, et que son habile dosage d'humour, d'action et de violence renvoit au spectacle populaire malgré ses éclairs de brutalité ! L'impression de vitesse vertigineuse que nous procure ces bolides échevelés nous laisse les mains moites dans leurs affrontements routiers à la manière jouissive d'un roller coaster. Sans l'emploi d'effets numériques, les cascades insensées jamais vues au préalable sont ici transcendées par la vigueur d'un montage à couper au rasoir et le professionnalisme de cascadeurs infaillibles. Nos véhicules endiablés se pourchassant sans relâche jusqu'au crash improvisé de ferrailles et tôles froissées, alors que certains passagers erratiques s'extraient de leur bolide pour bondir sur le véhicule ennemi avec une hargne incontrôlée ! Durant cette offensive sur bitume, les dommages meurtriers de corps calcinés ou déchiquetés sont éjectés dans les airs, voirs piétinés sous les roues ! L'hyper réalisme de ces morceaux de bravoure s'avère d'autant plus incisif lorsque l'orchestration épique de Brian May marque la cadence afin de scander les poussées d'adrénaline ! L'extravagance vestimentaire de la tribu des gladiateurs accoutrés de cuir noir, de fusils et d'armes médiévales sert également à illustrer de façon débridée leur éthique primitive inscrite dans la déshumanisation ! Mais ce lot d'affrontements barbares et de courses automobiles n'approuve pas la surenchère puisque subordonné à l'efficacité d'un script prônant opérations de communication, stratégies d'attaques et de défense pour l'enjeu du pétrole, et cohésion humaine d'une communauté pacifiste prise à parti avec le clan d'Humungus. Alors que ces derniers tentent par tous les moyens de dérober l'essence confinée dans leur raffinerie, Max, le guerrier solitaire, s'improvise en sauveur pour imposer aux survivants une transaction avant d'essuyer l'échec d'une bravoure esseulée et de leur prêter main forte en dernier ressort ! Dominé par la présence iconique de Mel Gibson dans la peau de l'ancien flicard meurtri, Max s'impose comme un nouvel héros déchu hanté par ses démons avant de regagner l'humanisme du regain d'empathie pour cette communauté loyale. 


Fury Gladiators
Western dystopique filmé en plein désert australien, Mad-Max 2 renouvelle donc le cinéma d'action dans sa scénographie post-apo auquel les derniers survivants de l'humanité tentent, parmi l'autorité d'un guerrier sans foi, de rejoindre la nouvelle horizon d'une terre dévastée ! Furieusement excitant car mené à un rythme frénétique et diablement attachant dans la mythologie du héros et la fantaisie altruiste de certains seconds-rôles (le pilote de l'autogire mangeur de serpent, l'enfant sauvage en quête paternelle), ce modèle d'efficacité réussit à insuffler un souffle épique proprement inédit pour le genre ! Car condensé en une interminable course-poursuite, Mad-Max 2 iconise sans prétention l'actionner post-nuke le plus intense et jouissif de l'histoire du cinéma. 

P.S: Hommage rédigé avant la sortie de Mad-Max: Fury Road !

La critique de (l'incompris) Mad Max 3http://brunomatei.blogspot.fr/2013/09/mad-max-au-dela-du-dome-du-tonnerre-mad.html

Bruno Matéï
6èx

mercredi 10 décembre 2014

MIRACLE EN ALABAMA (The Miracle Worker). Oscar de la Meilleure Actrice, Anne Bancroft, 1963.

                                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site fan-de-cinema.com

d'Arthur Penn. 1962. U.S.A. 1h37. Avec Anne Bancroft, Patty Duke, Victor Jory, Inga Swenson, Andrew Prine.

Sortie salles U.S: 23 Mai 1962

Récompenses: Oscar de la Meilleure Actrice, Anne Bancroft, 1963
Oscar du Meilleur Second Rôle Féminin, Patty Duke, 1963
Festival de San Sebastian: Meilleur Actrice, Anne Bancroft

FILMOGRAPHIE: Arthur Penn est un réalisateur américain, né le 27 Septembre 1922 à Philadelphie, décédé le 28 Septembre 2010 à Manhattan, New-York.
1958: Le Gaucher. 1962: Miracle en Alabama. 1965: Mickey One. 1966: La Poursuite Impitoyable. 1967: Bonnie and Clyde. 1969: Alice's Restaurant. 1970: Litlle Big Man. 1975: La Fugue. 1976: Missouri Breaks. 1981: Georgia. 1985: Target. 1987: Froid comme la Mort. 1989: Penn and Teller get killed. 1995: Lumière et Compagnie (segment).


D'après l'histoire vraie d'Helen Adams Keller (27 Juin 1880 - 1er Juin 1968), Miracle en Alabama dépeint avec souci documenté la leçon d'apprentissage d'une fillette sourde, muette et aveugle sous l'enseigne d'une éducatrice préalablement atteinte de cécité. Vivant comme un animal sauvage et profitant de la charité de ces parents de manière capricieuse, Anne Sullivan va tenter de l'instruire et la sortir de sa condition erratique en emménageant quelques temps au sein de son cocon familial. Après diverses expériences infructueuses, fautes de l'omniprésence de parents trop envahissants et impatients du résultat, elle décide de s'isoler avec Helen dans une grange durant deux semaines. Devant l'autorité castratrice du père de famille, Anne sera renvoyé illico si l'expérience se solde par une défaite. Débute alors pour les deux alliées l'épreuve de force de la dernière chance.


C'est une véritable leçon de tolérance et de pédagogie (persévérante !) que nous initie Arthur Penn en adaptant l'étonnant récit d'une jeune infirme réduite à l'état animal avant de se transfigurer en diplômée universitaire devenue romancière ! Elle deviendra d'ailleurs la première qualifiée handicapée à obtenir cette prestigieuse récompense ! La puissance de l'histoire émane de la relation impérieuse liée entre l'élève et l'enseignante, leurs rapports de force (domination/soumission) s'avérant au départ d'une grande violence pour leur conflit de divergence où crises d'hystéries, provocations et caprices s'accumulent du point de vue du disciple. L'intensité psychologique qui s'y dégage, la manière chirurgicale dont Arthur Penn ausculte leur relation orageuse avant l'accalmie d'une prise de confiance nous sont d'autant mieux exprimées par le brio de comédiennes en roue libre. Anne Bancroft et Patty Duke s'avérant transies d'émoi et de véhémence dans leur tempérament volcanique conçu sur la prise de conscience d'un nouveau mode de vie. Ce qui donne lieu à des moments d'émotion parfois bouleversants lorsqu'elles réussissent à trouver un terrain d'entente par la signification des mots bâtis sur le principe d'obéissance, de respect et enfin de compréhension. Sur ce dernier point, la séquence éloquente illustrant à haute voix la prononciation du mot E.A.U risque d'en ébranler plus d'un dans sa puissance d'émotion libératrice ! Au niveau du portrait parental n'ayant aucune notion d'éducation, Arthur Penn met en exergue l'orgueil d'un paternel conservateur dans ses théories de jugement et d'intolérance, quand bien même la mère protectrice s'apitoie sur la compassion pour la précarité de sa fille handicapée. 


Eloge à l'étymologie des mots (ici, par le langage des signes !) afin d'apprendre et de comprendre leur véritable sens, ode à l'éducation parentale, au respect d'autrui et à la rédemption de l'amour, Miracle en Alabama exploite intelligemment les expériences de la jalousie, de la provocation, de la correction et de la punition afin d'enseigner auprès de l'élève inculte une leçon de connaissance (s'ouvrir au monde pour accéder à la réussite). Profondément passionnant, immersif et souvent éprouvant, de par le cheminement initiatique d'Helen et par l'énergie viscérale déployée avec la complicité de la gouvernante, Miracle en Alabama libère une explosion d'émotions afin de parfaire le miracle de l'existence. Un chef-d'oeuvre sensitif d'une rare puissance de suggestion. 

Remerciement à Gilles Vannier
Bruno Matéï 

mardi 9 décembre 2014

FURY

                                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site ropeofsilicon.com

de David Ayer. 2014. Chine/U.S.A. 2h14. Avec Brad Pitt, Shia LaBeouf, Logan Lerman, Michael Pena, Jon Bernthal, Jim Parrack, Brad William He.

Sortie salles France: 22 Octobre 2014. U.S: 17 Octobre 2014

FILMOGRAPHIE: David Ayer est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 18 Janvier 1968 à Champaign, Etats-Unis. 
2005: Bad Times. 2008: Au bout de la nuit. 2012: End of Watch. 2014: Sabotage. 2014: Fury


Pendant la seconde guerre mondiale, les tanks américains étaient moins bien armés et blindés que les tanks allemands. Les tanks américains ont subi des pertes dévastatrices face à des véhicules bien supérieurs. 
Nous sommes en Avril 1945. Les alliés se battent au coeur de l'Allemagne nazie et rencontrent la résistance la plus fanatique. Désespéré, Hitler déclare la guerre totale et mobilise chaque homme, femme et enfant... 

Réquisitoire contre l'absurdité et la barbarie de la guerre, Fury nous narre l'équipée héroïque d'une escouade de soldats américains combattant l'ennemi sur le sol allemand à bord d'un char d'assaut. Dirigé par le sergent Don Collier, ils vont devoir user de bravoure, constance et subterfuge pour remporter des missions à haut risque jusqu'à l'ultime point de non retour. Sous couvert de ses actions homériques illustrées de manière poisseuse dans le surréalisme d'une atmosphère mortifère (chant religieux à l'appui intoné de manière gutturale !), David Ayer retransmet avec une rare puissance psychologique l'anxiété de la mort lorsque des soldats US sont incessamment confrontés à bombarder les nazis ou de riposter sans sommation avant leur ultime baroud d'honneur. 


Parmi cette division américaine, une jeune recrue n'ayant jamais participé au front observe avec impuissance et répulsion les charniers de cadavres déchiquetés ou putréfiés avant d'apprendre à tuer sous l'allégeance de son mentor, Don Collier. Ce qui donne lieu à des séquences éprouvantes lorsque ce dernier va par exemple lui ordonner d'exécuter lâchement un prisonnier allemand d'une balle dans le dos. Outre l'impact funeste de sa scénographie belliqueuse à la reconstitution historique criante de vérité, David Ayer ne sombre pas dans la complaisance pour dénoncer la barbarie de l'homme endoctriné à tuer au nom de sa survie ! En dépit de son ultra violence parfois rigoureuse mais néanmoins concise, Fury dégage surtout une atmosphère désespérée de décrépitude au travers de sa nature crépusculaire proprement cauchemardesque, et par le biais du comportement frigide de tirailleurs assoiffés de haine et de rancoeur. De manière subtile et sans effet de racolage, nous nous portons témoins de leur dégénérescence morale où la part du bien et du mal n'a plus lieu de signification et avant de mesurer l'étendue de leur épuisement après avoir à nouveau massacré l'ennemi lors d'une stratégie de défense suicidaire. Afin de mettre en relief l'absurdité de leur guerre et leur crainte innée de trépasser au moment le plus impromptu, la dernière partie nous déploie un morceau de bravoure d'une éprouvante intensité dramatique quand à la destinée précaire de ces 5 héros gagnés par l'honneur du sacrifice ! Avec leur gueule burinée suintant la sueur, les larmes et la poussière, les comédiens s'avèrent communément épatants de vérité déshumanisée dans leur condition meurtrie de machines à tuer. Outre la performance viscérale d'un Brad Pitt hanté par la désillusion et la corruption, ainsi que la prestance austère d'un Shia LaBeouf encore plus affligé dans sa conscience commotionnée, on saluera notamment l'interprétation du jeune Logan Lerman (le Monde de Charlie), étonnant dans la peau d'un bleu couard en pleine propagande meurtrière ! 


Cauchemardesque et ténébreux par l'aura de son onirisme macabre, brutal, désespéré et sans compromis (la séquence du repas s'avère subtilement tendue lors du comportement machiste de soldats brimant l'hospitalité de deux otages allemandes !), Fury est une épreuve de force jusqu'au-boutiste, le requiem d'une croisade méprisable parmi le portrait vérité de cinq (anti)héros condamnés à se racheter dans une idéologie sacrificielle ! Un gros morceau de cinéma encore plus tragique et évocateur qu'un certain soldat Ryan. 

Bruno Matéï