jeudi 25 octobre 2012

MR NOBODY

Photo empruntée sur Google, appartenant au site sexualityinart.wordpress.com

de Jaco Van Dormael. 2009. Belgique/Canada/France/Allemagne. 2h36. Avec Jared Leto, Sarah Polley, Diane Kruger, Linh Dan Pham, Rhys Ifans, Natasha Little, Toby Regbo, Juno Temple, Clare Stone, Thomas Byrne.

Sortie salles France/Belgique: 13 Janvier 2010. Canada: 16 Juillet 2010

FILMOGRAPHIEJaco Van Dormael est un réalisateur belge, né le 9 Février 1957 à Ixelles.
1991: Toto le Héros
1995: Le Huitième Jour
2009: Mr Nobody


Oeuvre fleuve abstraite à bien des égards, que ce soit pour sa réflexion métaphysique ou pour son rythme arythmique, Mr Nobody est une ode flamboyante à la vie et tout ce qui tourne autour... Au-delà de nos planètes... Un loisir récréatif rempli d'imprévus, de dangers, fantaisies et rédemption amoureuse quand un bambin de 9 ans s'imagine les multiples vies qu'il aurait pu avoir. Bien avant de devoir entreprendre le choix draconien de rester avec son père ou sa mère en rupture conjugale.
D'une richesse esthétique prolifique et bourré de poésie gracile, cette hymne à l'existence émeut, enivre, déconcerte et irrite en nous transposant les va-et-vient récursifs de Mr Nobody à travers son présent, passé et futur. En réalisateur ambitieux, Jaco Van Dormael nous rapporte sa thèse sur le sens de la vie et de la mort inéluctable qui nous sépare. De l'importance inhérente du moment présent, du choix décisif que nous devons tous entreprendre pour façonner l'harmonie prochaine de notre postérité. De cette fatalité morbide, bénédiction justifiable si nous avions eu assez de temps pour profiter de l'instant actuel après avoir (re)trouvé l'âme soeur. Mais à travers ce monde futuriste où l'immortalité des êtres humains a engendré une société totalitaire censurant les plaisirs les plus exaltants (sexe, drogue, alcool), le réalisateur aborde non seulement l'éthique de l'autonomie mais aussi l'utopie de la réalité. A savoir que l'être humain n'est peut-être qu'une chimère, un pantin artificiel né de l'imaginaire d'un être supérieur destiné à assouvir son propre destin.


L'Apprentissage de la raison d'être.
En résulte une poésie sensitive de l'envie et l'espoir compromis par nos affres de l'angoisse. Entre soif de découverte sur l'intérêt de subsister et désir inné d'embraser l'amour. Mais ce cheminement d'apprentissage menant vers la plénitude est destiné à être long, tortueux et semé d'obstacles. En attendant une potentielle résurrection si l'immortalité continue de préserver ses secrets, car l'être humain friand de vérité pourrait risquer un jour d'en bafouer ses chartes...

Dédicace à Alexandra Louvet
25.10.12
Bruno Matéï


mercredi 24 octobre 2012

Blade 2

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site dvdsreleasedates.com

de Guillermo Del Toro. 200 . U.S.A. 1h57. Avec Wesley Snipes, Leonor Varela, Kris Kristofferson, Ron Perlman, Luke Goss, Norman Reedus, Thomas Kretschmann, Matt Schulze, Danny John-Jules, Donnie Yen.

Sortie salles France: 19 Juin 2002. U.S: 22 Mars 2002

FILMOGRAPHIE: Guillermo Del Toro est un réalisateur, scénariste, romancier et producteur américain, né le 9 Octobre 1964 à Guadalajara (Jalisco, Mexique). 1993: Cronos. 1997: Mimic. 2001: l'Echine du Diable. 2002: Blade 2. 2004: Hellboy. 2006: Le Labyrinthe de Pan. 2008: Hellboy 2. 2013: Pacific Rim.


Oubliez le premier opus, série B ado mignarde et formatée (pardon pour les fans), et plongez vous dans l'univers destroy de Blade II, concocté par l'omnipotent Guillermo Del Toro. Gigantesque actionner bourrin démesuré et flamboyant, ce second volet des aventures de notre (super)héros technoïde, mi homme, mi-vampire, déploie un florilège de séquences homériques d'une fluidité émoustillante. Ainsi, Blade est aujourd'hui contraint de s'allier avec ses ennemis vampirisés pour déjouer le projet d'un antagoniste encore plus délétère que ces prédécesseurs ! Un vampire invincible puisque doué d'une force imputrescible ! Avec sa clique d'équipiers aux dents longues et lunettes noires, d'un bricoleur et de son vieil ami Abraham, Blade devra se mesurer à ces nouveaux mutants afin d'empêcher la propagation furtive d'un virus irréversible. De par sa photo sépia aux teintes fluos oscillant l'azur et le safran, Blade II illustre avec souci formel la retranscription d'un univers high-tech rubigineux combiné à une architecture gothique dans ces localités ténébreuses. Tant auprès de l'antre du repère des vampires et leur labo sujet à diverses expérimentations sur des foetus ou encore de la planque localisée dans des égouts infestés de goules. Qui plus est, l'attirail des armes à feu de taille disproportionnée et la sophistication des nouveaux gadgets conçus pour ruser nos vampires (les sphères régies par minuterie pour y extraire des flashs aveuglants) demeurent des accessoires en sus afin de permettre à Guillermo Del Toro d'élaborer un univers résolument hybride. 


C'est à dire entre la modernité futuriste (le lieu high-tech de la boite de nuit tendance SM, la texture des sols vitreux en interne de la forteresse de Damaskinos) et l'académisme antique (certains tableaux de peinture mais aussi quelques façades murales ornés de sculpture historique chez le souverain des ténèbres). Ainsi, cette harmonie visuelle prégnante nous dépayse sans fioriture quand bien même les personnages excentriques, perfides et délétères y extériorisent une vigueur téméraire d'après leurs querelles meurtrières. En prime, sa structure narrative compromise à l'action incessante part d'un pitch ironique (Blade doit s'unir avec ses pires ennemis pour mieux parfaire un antagoniste encore plus ravageur !) pour ensuite nous surprendre lors de quelques revirements agréés (subterfuge et rancoeur vindicative viennent relancer l'intrigue avec une efficacité accrue). Mené à train d'enfer et sévèrement violent de par son réalisme percutant, Blade 2 décuple sans rougir de monstrueuses séquences d'action ! Et on peut dire qu'à ce niveau, Guillermo Del Toro nous transcende des combats d'arts martiaux (chanbara à l'appui !) et cascades vertigineuses à la dimension épique littéralement singulière ! Par conséquent, l'habileté des FX numérisés (de façon assez circonspecte) détonne si bien que le réalisateur ne cesse d'alterner ses péripéties explosives à travers un montage géométrique (une rixe renversante est interrompue par une autre baston pour ensuite revenir à sa précédente altercation !). Et pour parachever, l'aspect terrifié imposé au faciès patibulaire de nos nouveaux vampires carnassiers (car pourvus d'une mâchoire entrebâillée !) nous exacerbent une furieuse épopée sanguinaire !


Extrêmement spectaculaire et limpide à travers la lisibilité de l'action héroïque, Guillermo Del Toro fait voler en éclat le conformisme d'une franchise lucrative somme toute aseptisée. Sa richesse visuelle allouée à la société expressionniste de vampires contemporains, sa violence vigoureuse multipliant les estocades aériennes et la trogne virile de nos guerriers renfrognés embrasant toute la pellicule ! Jusqu'au crépuscule rédempteur d'une maîtresse immolée...

Dédicace à Pascal Frezzato
24.10.12. 2èx
Bruno Matéï


mardi 23 octobre 2012

EXCISION

                                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site fountainpop.com

de Richard Bates Jr. 2011. U.S.A. 1h21. Avec AnnaLynne McCord, Traci Lords, Ariel Winter, Roger Bart, Jeremy Sumpter, John Waters, Malcolm McDowell.

Sortie salles France: 12 Septembre 2012. U.S: 21 Janvier 2012

FILMOGRAPHIE: Richard Bates Jr est un réalisateur, scénariste et producteur américain.
2008: Excision (court-métrage)
2012: Excision


Projeté à Sundance et l'Etrange Festival où une partie du public fut en émoi, Excision est la version extensive du premier court-métrage éponyme de Richard Bates Jr. Comédie caustique et horreur clinique se négociant dans une bassine de formol afin de nous illustrer la quotidienneté d'une jeune adulte introvertie (elle vient d'avoir 18 ans), sujette à une fascination pour les organes et la nécrophilie. Raillée par ses camarades de classe et dépréciée par une mère conservatrice obsédée par l'hygiène, Pauline inspire l'indifférence auprès de son entourage. Son visage blême dénué d'un quelconque maquillage est en outre piqueté de boutons d'acné. Livrée à elle même malgré une certaine compassion tolérée par sa petite soeur et son paternel sclérosé, Pauline fuit sa morosité dans des délires fétichistes de dissection chirurgicale à travers ses songes morbides. Jusqu'au jour où elle décide de prendre en main son destin après son éviction scolaire.


Satire corrosive des moeurs américaines, plaidoyer pour le droit à la différence, Excision joue la carte de la provocation avec un esprit sarcastique parfois audacieux, voir aussi déviant (le foetus ensanglanté délicatement maintenu par le bout des doigts d'une infirmière et son épilogue traumatique inéluctable). En réalisateur subversif délibéré à proposer une oeuvre scabreuse fignolée dans un esthétisme léché, Richard Bates Jr adopte les ruptures de ton pour désarçonner le spectateur et l'entraîner dans une sorte de trip semi expérimental incongru. Car ce portrait jusqu'au-boutiste d'une jeune fille extravagante livrée à elle-même, faute d'une négligence parentale et d'une société obsédée par l'apparence et la maladie, joue la carte de l'humour décalé avant de nous confiner vers une tragédie emphatique. Si le film risque de diviser une majorité du public par son insolence inaccoutumée, déployant notamment des séquences de poésie morbide d'une nuance immaculée, l'interprétation innée de la jeune actrice AnnaLynne McCord emporte tout sur son passage ! Excentrique et déficiente dans l'âme par son goût prononcé pour le sang et les organes, la comédienne transcende son profil morbide avec une aisance confondante ! Débridée et intempestive, elle réussit autant à susciter le dégoût viscéral dans ses délires fantasmatiques qu'extérioriser une empathie par son mal-être existentiel émanant d'une société conventionnelle. En mégère hautaine, l'étonnante et rarissime Tracy Lords endosse avec une droiture compacte le profil d'une mère castratrice, incapable d'éprouver une tendresse candide pour sa progéniture. 


Portrait d'une cellule familiale perfectible
Satire corrosive de l'éducation parentale incapable d'assumer la postérité de leur rejeton, Excision met en exergue l'introspection abrupte d'une jeune fille déchue, consciente de sa pathologie mentale mais discréditée par une civilisation formatée. Ovni hybride traversé de séquences sulfureuses d'une audace immorale, cette peinture cynique d'une Amérique qui s'observe le nombril allie humour noir et mauvais goût avec une verve hermétique. Déroutant, viscéral, sensitif et finalement attachant, Excision ne pourra faire l'unanimité mais le jeu halluciné de la jeune AnnaLynne McCord risque fort de laisser une trace indélébile dans l'encéphale d'une majorité de spectateurs.  

23.10.12
B

lundi 22 octobre 2012

PIQUE-NIQUE A HANGING ROCK (Picnic at Hanging Rock). Grand Prix au Festival des Nations à Taormina

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemagora.com

de Peter Weir. 1975. Australie. 1h45 (Director's Cut). Avec Rachel Roberts, Dominic Guard, Vivean Gray, Helen Morse, Kirsty Child, Tony Llewellyn-Jones, Jacki Weaver, Anne-Louise Lambert.

RécompensesGrand Prix au Festival des Nations à Taormina
Prix d'Interprétation Féminine décernée à l'ensemble des comédiennes au Festival du Rex de Paris.

FILMOGRAPHIE: Peter Weir est un réalisateur australien, né le 21 Août 1944, à Sydney, Australie.
1974: Les Voitures qui ont mangé Paris. 1975: Pique-nique à Hanging Rock. 1977: La Dernière Vague. 1981: Gallipoli. 1982: l'Année de tous les Dangers. 1985: Witness. 1986: Mosquito Coast. 1989: Le Cercle des Poètes Disparus. 1990: Green Card. 1993: Etat Second. 1998: The Truman Show. 2003: Master and Commander. 2011: Les Chemins de la Liberté.


Ce que l'on voit et ce que l'on perçoit n'est qu'un rêve... Un rêve dans un rêve.
Grand succès public dans son pays d'origine, Pique-nique à Hanging Rock doit la singularité de son scénario au roman de Joan Lindsay, publié en 1967. Auréolé d'un Grand Prix au Festival des Nations à Taormina (Sicile), ce chef-d'oeuvre aussi rare que précieux, seconde réalisation d'un auteur écolo, tire attrait de son pouvoir hypnotique de par son indicible aura fantasmatique. Le 14 Février 1900, des jeunes filles du collège Appleyard pique-niquèrent à Hanging-Rock dans le Victoria. Au cours de l'après-midi, plusieurs membres du groupe disparurent sans laisser de traces. A partir de cet argument interlope, Peter Weir nous brode une intrigue fantastique imprégnée d'étrangeté, voir de mysticisme écolo. Ainsi, c'est un florilège d'images poétiques qu'il nous façonne de façon épurée pour illuminer durant la sérénité d'un pique-nique la nature solaire et ses filles désireuses, affublées de robes de dentelle et étendues au coeur d'immenses rochers. Son préambule dédié à la beauté lascive de ces collégiennes enivrées par la flore est d'ailleurs transcendé par le score monocorde d'une flûte de pan composé par Bruce Smeaton.


Cette succession de séquences charnelles sont d'autant plus fascinantes par leur aura ensorcelante que la destinée pressentie des disparues nous laissera, comme chacun des protagonistes, dans l'interrogation d'une énigme insoluble ! Après l'annonce de ces disparitions (ou enlèvements) inexpliqués, la tragédie va notamment lourdement influer sur le comportement anxiogène des camarades de classe, tributaires d'une enseignante hautaine et d'un climat scolaire contrariant. Une mégère orgueilleuse incapable de faire preuve de charité face à la bonhomie de ces jeunes filles accablées par la perplexité. De manière dégénérative, cette confrérie généralement féminine (en dépits de quelques occupants dont un amant planqué sous les draps d'une majordome) se confrontera à une succession d'évènements dramatiques fortuits. Comme si une malédiction s'était abattue sur la bannière du pensionnat de prime abord tranquille et réputé. Spoil ! Et ce, en dépit de la découverte miraculeuse de l'une d'entres elles, finalement retrouvée sous la montagne rocheuse par un prétendant. Fin du Spoil.


A travers son ambiance d'étrangeté feutrée et le climat obscur d'un institut académique en proie à une triste fatalité, Peter Weir joue habilement avec la caractérisation psychologique de ces personnages confrontés à une tragédie saugrenue. Tant et si bien que ce drame psychologique en quête de vérité  plongera au final cette hiérarchie autoritaire dans le désarroi. Spoiler !!! A savoir: démission d'un membre du personnel, départ précipité d'une survivante et renvoi d'une collégienne suicidaire vont un peu plus plonger dans l'aigreur destructrice une directrice confinée vers l'éthylisme car convaincue de sa vanité et de sa part de responsabilité. Fin du Spoiler. De cette déchéance morale émane une ambiance ombrageuse laminée par l'amertume. Notamment la détresse fragilisée d'adolescentes confrontées à la perte de leurs camarades et de l'arrogance de leur matriarche. Dans une atmosphère susceptible de préoccupation, le réalisateur véhicule un sentiment de malaise vaporeux et surtout un pouvoir d'envoûtement auprès des sens du spectateur transi. 


Songe d'une nuit d'été.
D'un esthétisme raffiné afin d'épurer sa nature champêtre et la candeur de demoiselles prêtes à s'éclipser vers une horizon inconnue, l'oeuvre séminale de Peter Weir tend à harmoniser la campagne australienne éperdue d'amour pour cette virginité féminine (et vice-versa !). Son aura d'étrangeté imperceptible et sa poésie élégiaque conjuguées à une tendre cohésion entre la femme et la flore laissant le spectateur en état d'apesanteur. Comme si la notion de temps s'était subitement dissoute pour mieux nous immerger dans la volupté d'une idylle spirituelle en concertation funeste. Chef-d'oeuvre auteurisant à la fois fragile, vénéneux, ombrageux, sensuel et ténu, Picnic à Hanging-Rock élève l'art de suggestion avec une acuité de fascination irréelle si bien que cette quintessence du fantastique australien restera inégalée de par sa semence infiniment capiteuse.

* Bruno
22.10.12. 4èx

                                         

vendredi 19 octobre 2012

Vigilante, justice sans sommation !

                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site ledrugstore1968.blogspot.com

de William Lustig. 1982. U.S.A. 1h29. Avec Robert Foster, Fred Williamson, Richard Bright, Rutanya Alda, Don Blakely, Joseph Carberry, Willie Colon, Frank Pesce, Carol Lynley, Joe Spinell, Woody Strode.

FILMOGRAPHIE: William Lustig est un réalisateur et producteur américain, né le 1er Février 1955 dans le Bronx à New-York. 1980: Maniac. 1982: Vigilante. 1988: Maniac Cop. 1990: Maniac Cop 2. 1993: Maniac Cop 3. 1997: Uncle Sam.


En tout homme, il y a un justicier qui veille !
Deux ans après son traumatisant Maniac, William Lustig s'entreprend en 1982 d'explorer le polar urbain, ou plus exactement le Vigilante Movie. Un sous-genre inauguré en 1974 par Michael Winner et Charles Bronson dans le célèbre Un Justicier dans la ville. D'une brutalité nauséabonde par sa violence gratuite jusqu'au boutiste (la mort du bambin filmée en contre champ d'une fenêtre résonne encore dans les esprits !), Vigilante reprend le même canevas que bon nombre de film d'auto-défense. A savoir, la vengeance d'un paternel contre les meurtriers de sa famille. Accusé d'outrage et venant de purger 30 jours de prison, ce dernier va accomplir sa propre justice expéditive en décimant un à un ses agresseurs en liberté. Sous ses allures de série B d'action rondement menée, William Lustig insiste néanmoins à démontrer le laxisme du système judiciaire américain quand juges et magistrats sont débordés par une criminalité galopante.


A travers un pitch éculé, le réalisateur tend à véhiculer une certaine réflexion sur la justice individuelle par le portrait d'un prolétaire préalablement légitime car convaincu de l'efficacité de la police et la loyauté juridique. Ce n'est qu'à partir du massacre perpétré sur sa famille et après sa condamnation injustifiée que notre citoyen va endosser le rôle de victime trahie. Par le biais de sa présence vindicative, le film illustre sans concession l'idéologie fasciste d'un gang de citadins irascibles. A savoir, les exactions sordides d'une milice (les propres collègues du justicier travaillant à la même enseigne industrielle !) délibérée à nettoyer les rues malfamées de voyous sans vergogne. D'un pessimisme proprement nihiliste dans sa description d'un New-York livré à la délinquance quotidienne, William Lustig met en exergue l'impuissance d'une population démotivée ne sachant plus à quel saint se vouer pour retrouver la tranquillité dans leur quartier envenimé par la drogue, la prostitution et la criminalité. Quand bien même les flics en service de routine sont dépassés par les évènements et tentent de montrer un signe d'autorité en circulant de manière apathique dans les rues mal fréquentées.


La noirceur du sujet renforcée par l'ambiance nocturne d'une urbanisation en déliquescence évoque une succession de règlements de compte sanglants proprement dérangeants. Car le réalisateur dépeint de façon nihiliste le ras le bol d'une poignée de quidams délibérés à sortir les flingues pour régir leur propre loi. D'ailleurs, le monologue du prélude énoncé par un leader activiste (Fred Williamson engagé dans une idéologie extrémiste) évoque bien la situation de crise dans lequel les habitants sont confrontés. Ce désespoir tangible d'une humanité en chute libre raisonne comme un cri d'alarme pour dénoncer la déroute de nos sociétés laxistes gangrenées par un système judiciaire sectaire. Les séquences d'actions remarquablement filmées résonnent alors comme des fulgurances putassières car sa violence nauséeuse découle de la révolte aliénante de l'honnête citoyen converti en implacable tueur dénué d'éthique. Le score percutant de Jay Chataway va notamment intensifier ce climat d'insécurité où chaque voyou, dealer, mac et violeur agissent de la manière la plus permissive. Enfin, la conviction des interprètes renforce le caractère autoritaire d'une milice intraitable (même si Fred Williamson cabotine parfois dans ses élans acrobatiques d'expert en art martial). En père endeuillé rongé par la révolte, l'excellent Robert Foster magnétise l'écran de sa trogne renfrognée, un regard détaché en régression humaniste. Sa sombre présence doit autant à l'ambiance défaitiste découlant d'une civilisation urbaine livrée à l'anarchie.


Nous sommes armés, nous sommes prêts
Terriblement pessimiste et sans issue de secours, Vigilante joue autant la carte du cinéma d'action d'exploitation que de la réflexion alarmiste sur les effets pervers de l'auto-justice depuis la démission juridique. Dominée par l'interprétation inflexible de Robert Foster entouré d'une poignée de vétérans de seconde zone (les trognes burinées Woody Stroode et Fred Williamson), Vigilante constitue un archétype du film d'auto-défense, au même titre que son comparse Le Droit de Tuer

Dédicace à Denis Soustre De Condat-Rabourdin
*Bruno
19.10.12. 4èx

Eh ! Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi je commence à en avoir jusqu'ici.
On en est à 40 meurtres par jour dans nos rues, il y a plus de 2 millions d'armes illégales dans cette ville les mecs ! Il y a de quoi envahir un pays avec cet armement. Il tire sur les flics de cette ville comme sur des soldats de plomb.
Alors merde, vous prenez tous le métro non !? Combien de temps allons-nous supporter qu'on nous agresse ? Combien de verrous allons-nous mettre à nos portes ?
Nous n'avons plus de police. Ni de procureur, ni de prison.
Je veux dire que tout ça c'est fini. Y'a deux poids et 2 mesures. Maintenant on est une statistique.
Alors moi j'vous dis: "quand on n'ose plus descendre acheter un paquet de cigarettes le soir parce qu'on sait que la rue appartient aux loubards et aux voyous dès que la nuit tombe et que les autorités ne peuvent pas nous protéger. 
Voilà ce que je vous dis les mecs ! Vous avez une obligation morale, le droit de préserver vous-même vos vies.
Vous pouvez fuir, vous pouvez vous cacher, ou essayer de vivre à nouveau comme des hommes, c'est notre Waterloo mes amis. 
Si vous voulez retrouver votre ville, il faut la prendre ! Compris ! 
La prendre !!"

mercredi 17 octobre 2012

REVENGE: A LOVE STORY (Fuk Sau che chi sei)

Photo empruntée sur Google, appartenant au site a2.moovidadb.com

de Wong Ching-Po. 2010. Hong-Kong. 1h35. Avec Chin Siu-Ho, Juno Mak Chun-Lung, Lam Ling-Yuen, Lau Wing, Sora Aoi, Sun Wai-Lin, Tony Ho Wah-Chiu, Wong Shu-Tong.

FILMOGRAPHIE: Wong Ching-Po est un réalisateur, scénariste, acteur, compositeur, monteur et producteur
2002: Fu bo
2004: La Voie du Jiang Hu
2005: Ah sou
2008: Sup Fun chung ching
2010: Revenge: a love story
2011: Bao wei zhan dui zhi chu dong la ! Peng You !
2013: Once Upon a Time in Shangai


Surfant sur les dernières productions asiatiques compromises dans l'action ultra violente toujours plus rugueuse, Revenge: A Love Story débute à la manière d'un thriller sordide pour se confiner vers le revenge movie bicéphale. Un serial-killer commet une série de meurtres crapuleux sur deux femmes enceintes alors qu'un flic est porté disparu. Le criminel âgé de 23 ans et souffrant d'autisme vient à peine de purger une peine de 6 mois de prison pour une condamnation erronée. Sa vengeance implacable ne fait que commencer...
Ca démarre sec avec le meurtre crapuleux de deux femmes enceintes dont le foetus leur sera extirpé (le hors-champ élude le pire !) tandis qu'un sexagénaire est retrouvé mort noyé dans une baignoire. La disparition d'un flic va venir confirmer aux autorités qu'un tueur en série sévi dans le quartier. Rapidement, le suspect est interpellé ! ATTENTION SPOILER !!! Flash back sur son passé romantique avec une jeune fille déficiente suivi de leur calvaire imposé par une bande de flics corrompus. FIN DU SPOILER. On n'en dira pas plus pour ne pas ébruiter cette glauque histoire de vengeance mais un revirement intéressant va venir inverser les rôles impartis. Là où le bourreau se présentait comme une ordure à exterminer de façon sommaire, son passé traumatique va finalement nous dévoiler les clauses véritables qui ont pu pousser cet homme à commettre l'irréparable.


Ultra violent et gore envers certains actes de torture, règlements de comptes au gunfight, confrontations physiques et autres meurtres d'infanticide, les séquences chocs qui émaillent le récit se voient toutefois épargnées d'une complaisance putassière trop souvent présente dans ce genre de production. Son scénario structuré avec dextérité voue son efficacité grâce à la saveur aigre d'une histoire de vengeance hallucinée auquel un autiste s'empresse d'achever sa besogne. En outre, la romance allouée aux deux protagonistes épris de romance véhicule un intérêt constant dans leur cheminement hasardeux jusqu'au fameux drame inconvenu. Une inévitable empathie nous ait donc accordée pour ces amants déchus, d'autant plus que l'administration policière conçue pour protéger le citoyen est ici reléguée au rang de tortionnaires véreux. La mise en scène inventive et inspirée dans ces angles de vue géométriques multiplie ses fulgurances en adoptant parfois le principe du slow motion. En prime, une certaine poésie découle parfois d'une nature clairsemée étrangement sereine ou d'une nuit féerique quand d'immenses poupées gonflables animées ravivent les coeurs (le cadeau de Kit à sa dulcinée Wing). Jusqu'ici tout va bien dans ce scénario interlope utilisant avec une efficience probable action vindicative compromise par des règlements de compte singuliers (certaines séquences brutales surprennent par leur tonalité insolite).
Seulement voilà, le dernier quart d'heure maladroit dans sa thématique de la rémission tributaire d'une repentance religieuse va accumuler les lourdeurs pour tenter de nous convaincre qu'un leader préalablement licencieux a subitement trouvé la voie de la rédemption. Pire encore, son épilogue ridicule et équivoque se vautre dans une forme de mysticisme fumeux pour harmoniser des retrouvailles spirituelles.


Hormis certaines invraisemblances ou facilités (notamment toute la partie furtivement expédiée, centrée autour de l'hôpital quand notre tueur accoutré d'une blouse blanche va échapper à tout le personnel) et son point d'orgue équivoque, Revenge: A Love Story est un thriller suffisamment bien troussé, haletant et intense pour contenter l'amateur de thriller stylisé ultra violent. D'autant plus que l'interprétation d'ensemble renforce son capital crédule avec une mention probante pour le jeu dense du tueur impassible et mutique. A découvrir.

P.S: A éviter la VF exécrable !

Dédicace à Jenny Winter
17.10.12
Bruno Matéï

mardi 16 octobre 2012

Le Nom de la Rose / The Name of the Rose. César du Meilleur Film Etranger, 1987.

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site thezinfidel.com

de Jean Jacques Annaud. 1986. Italie/France/Allemagne de l'Ouest. 2h11. Avec Sean Connery, Christian Slater, Dwight Weist, Helmut Qualtinger, Elya Baskin, Michale Lonsdale, F. Murray Abraham, Volker Prechtel, Feodor Chaliapin Jr.

Sortie salles France: 17 Décembre 1986. U.S: 24 Septembre 1986. Italie: 17 Octobre 1986

FILMOGRAPHIE: Jean Jacques Annaud est un réalisateur, scénariste et producteur français, né le 1er Octobre 1943 à Juvisy-sur-Orge (Essonne). 1976: La Victoire en chantant. 1979: Coup de Tête. 1981: La Guerre du Feu. 1986: Le Nom de la Rose. 1988: l'Ours. 1992: l'Amant. 1995: Guillaumet, les ailes du courage. 1997: Sept ans au Tibet. 2001: Stalingrad. 2004: Deux Frères. 2007: Sa Majesté Minor. 2011: Or Noir.


5 ans après le césarisé La Guerre du Feu, Jean Jacques Annaud se voit attribuer la même récompense du Meilleur Film (Etranger) pour le Nom de La rose, d'après le livre d'Umberto Eco. Thriller gothique, aventure, suspense, romance et vérité historique sont agencés afin de transcender une intrigue criminelle à l'aura médiévale imprégnée de mystère. Le franciscain Frère Guillaume ainsi que son jeune disciple Adso de Melk sont chargés d'élucider une affaire de morts suspectes au sein d'une abbaye du nord de l'Italie en 1327. Accidents, suicides et meurtres s'enchaînent de manière récurrente parmi l'assemblée de moines bénédictins. Rapidement, Guillaume de Baskerville relève un indice éloquent sur les corps martyrisés. Une tâche noire est imprimée sur la langue et l'un des pouces des sinistrés. En prime, la communauté religieuse est régie par une autorité sectaire sous la hiérarchie de Jorge de Burgos, un prêtre leur interdisant la liberté d'expression du ricanement. Un livre proclamant l'autonomie des bienfaits du rire serait à l'origine de cette vague de crimes morbides. Dans une superbe photo naturelle en clair-obscur, le Nom de la Rose est d'abord une réussite formelle engagée vers un style gothique en interne d'un séminaire diaphane et au delà des plaines étendues. En franciscain des baskerville, notre briscard Sean Connery érige son enquête avec un instinct perspicace dans la peau d'un détective indéfectible. 


Avec la complicité juvénile du novice Christian Slater, en disciple attentif et timoré, secrètement amoureux d'une sauvageonne, ils forment à eux deux un tandem inopiné. D'autant plus que l'intrigue charpentée dans une vérité historique fustigeant l'obscurantisme religieux et sa juridiction inquisitrice ne cesse de jongler avec un suspense passionnant pour élucider nombre de  meurtres sordides (tête écrasée sous une pierre, noyade dans une cuve de sang de cochon, crémation, empoisonnement). L'ambiance pesante, renforcée par ses décors gothiques d'un monastère orné de pièces secrètes (le dédale vertigineux de la librairie) envoûte le spectateur par son environnement tangible proche d'une facture horrifique. D'autant plus que la superstition sataniste inculquée par une doctrine intégriste semble suinter au travers des murs de pierre, quand bien même d'horribles tortures sont perpétrées sur des damnés innocents. Le caractère inquiétant du score musical composé par James Horner agrémente discrètement une certaine tension sous jacente pour accompagner la sinistre investigation de nos deux détectives emmitouflés d'une soutane. Avec sa densité narrative vouée à dénoncer le fondamentalisme, Jean Jacques Annaud se permet notamment d'illustrer une magnifique histoire d'amour à travers la romance candide du jeune Adso de Melk, capucin épris d'affection pour une sauvageonne démunie mais finalement séparés par l'ordre de la piété.  


Le rire est le propre de l'homme
D'une richesse thématique et esthétique probante, Jean Jacques Annaud trouve le juste équilibre d'y combiner le divertissement perspicace et la réflexion historique d'une époque médiévale où l'intolérance religieuse fut tributaire d'une inquisition inculte elle même subordonnée aux croyances superstitieuses. Sobrement incarné par deux illustres comédiens mais aussi d'étonnants seconds rôles à la trogne patibulaire, le Nom de la Rose déroge la doctrine catholique, là où rire, sexe et amour tendent à braver ses fondements. Captivant de bout en bout et immersif, chaque genre est justement agencé avec une fluidité déconcertante, sacre d'un chef-d'oeuvre exhaustif. 

*Bruno
16.10.12. 3èx

Récompense: César du Meilleur Film Etranger en 1987
Prix David di Donatello de la Meilleure Direction Artistique, des Meilleurs Costumes et de la Meilleure Photographie, 1987.
Prix du film Allemand du Meilleur Acteur (Sean Connery) et de la Meilleure Direction Artistique, 1987.
Ruban d'Argent de la Meilleure Photographie, des Meilleurs Costumes et de la Meilleure Direction Artistique, 1987.
BAFTA Awards du Meilleur Acteur (Sean Connery) et du Meilleur Maquillage, 1988

lundi 15 octobre 2012

TERMINATOR 2: LE JUGEMENT DERNIER (Terminator 2: The Judgment Day)

                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site thomas56220.skyrock.com

de James Cameron. 1991. U.S.A. 2h36 (version longue Director's Cut). Avec Arnold Schwarzenegger, Linda Hamilton, Edward Furlong, Robert Patrick, Joe Morton, Earl Boen, S. Epatha Merkerson, Jenette Goldstein, Xander Berkeley.

FILMOGRAPHIEJames Francis Cameron est un réalisateur, scénariste et producteur canadien, né le 16 Août 1954 à Kapuskasing (Ontario, Canada). 1978: Kenogenis (court-métrage). 1981: Piranhas 2, les Tueurs Volants. 1984: Terminator. 1986: Aliens, le Retour. 1989: Abyss. 1991: Terminator 2. 1994: True Lies. 1997: Titanic. 2003: Les Fantomes du Titanic. 2005: Aliens of the Deep. 2009: Avatar


"L'avenir incertain roule vers nous... Pour la première fois je l'aborde avec un sentiment d'espoir. 
Si une machine, un Terminator, a pu découvrir la valeur de la vie, peut-être le pouvons nous aussi."

Nanti du plus gros budget de l'histoire du cinéma à sa sortie en 1991, Terminator 2 est la continuité de la démesure afin de retranscrire les nouvelles vicissitudes de nos héros pris à parti avec un nouvel antagoniste singulier. Et pour cause, Sarah et son jeune fils John Conor sont confrontés au T-1000. Androïde en métal liquide envoyé dans le passé et capable de prendre n'importe quelle apparence humaine pour arriver à ses fins. Quand au Terminator délétère (le T-800 !) prescrit dans le 1er volet, notre cyborg impassible est aujourd'hui projeté en 1995 pour protéger la destinée du futur sauveur de l'humanité. Avec ses effets spéciaux révolutionnaires de l'époque (le procédé du Morphing pour donner chair au T-1000) et son budget pharaonique, James Cameron décuple l'action destroy entrevue dans le 1er volet avec un sens de l'efficacité toujours aussi imparable. La description prégnante de son climat crépusculaire ainsi que la violence brutale préalablement illustrée sont pour autant ici lénifiés à travers cette séquelle dédiée à l'action homérique quasi ininterrompue.


Par le biais du personnage docile d'un Terminator protecteur, le réalisateur privilégie un humanisme perfectible (non exempt d'humour !) pour mettre en exergue une leçon d'apprentissage entre John Connor voué à humaniser son ange gardien. Quand au personnage maternel de Sarah antécédemment fragile et candide, elle est aujourd'hui devenue une véritable guerrière inflexible engagée à supprimer l'ingénieur responsable du prochain cataclysme. Si le scénario sans surprises aurait gagné à être plus étoffé (si bien que tout avait était décrit dans le 1er volet), James Cameron relance l'intrigue parmi l'apport inédit d'un nouveau personnage inoxydable et d'un enjeu planétaire toujours aussi précaire pour l'avenir de notre humanité déclinante. Tant et si bien que nos héros frondeurs doivent retrouver au sein de l'entreprise Skynet une micro puce ainsi qu'un bras robotisé afin de contrecarrer la prophétie nucléaire. D'un point de vue technique, la virtuosité percutante de sa mise en scène et la qualité novatrice des FX réussissent sans réserve à tenir en haleine le spectateur à bout de souffle ! Qui plus est, sans jamais faire preuve d'esbroufe tapageuse, l'action cinglante déployée de façon démesurée reste tributaire du cheminement narratif. On peut également en dire de même pour l'intelligence de ses effets spéciaux littéralement bluffants de réalisme. Tant au niveau des cascades extrêmement spectaculaires que de la physionomie du T-1000, cyborg d'apparence humaine pour tromper ses alliés mais uniquement constitué de métal liquide. 


Jouissif de par son rythme épique et d'une maîtrise technique ébouriffante, Terminator 2 iconise le  Blockbuster pharaonique avec une humble intelligence. Moins sombre, moins grave et moins violent que son modèle parce que plus orienté vers l'action pure avec une certaine dérision, James Cameron tend vers un récit initiatique (les relations fraternelles entre John et le T-800 puis l'enseignement pédagogique qui s'ensuit) en abordant notamment une réflexion sur l'aliénation guerrière, l'inanité des génocides émanant de notre instinct destructeur et le sens du sacrifice (la destinée du Terminator). Enfin, il s'interroge sur notre soif de progrès technologique lorsque le matérialisme abêti un peu plus chaque citoyen au péril de son humanisme.  

15.10.12. 3èx
Bruno Matéï

jeudi 11 octobre 2012

Terminator / The Terminator. Grand Prix Avoriaz, 1985.

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Ecran large

de James Cameron. 1984. U.S.A. 1h47. Avec Arnold Schwarzenegger, Franco Columbu, Michael Biehn, Linda Hamilton, Paul Winfield, Lance Henriksen, Bess Motta, Earl Boen.

Sortie salles France: 24 Avril 1985. U.S: 26 Octobre 1984

FILMOGRAPHIE: James Francis Cameron est un réalisateur, scénariste et producteur canadien, né le 16 Août 1954 à Kapuskasing (Ontario, Canada). 1978: Kenogenis (court-métrage). 1981: Piranhas 2, les Tueurs Volants. 1984: Terminator. 1986: Aliens, le Retour. 1989: Abyss. 1991: Terminator 2. 1994: True Lies. 1997: Titanic. 2003: Les Fantomes du Titanic. 2005: Aliens of the Deep. 2009: Avatar


Schwarzenegger, littéralement indestructible, explose l'écran sans jamais sombrer dans le ridicule. 
Grand Prix à Avoriaz un an après sa sortie internationale triomphante, Terminator est rapidement devenu un classique du film d'action futuriste alors que son antagoniste principal, nouvel archétype du Mal technologique, facilita la notoriété du néophyte Arnold Schwarzenegger ! (il fut découvert par le public deux ans plus tôt avec Conan). Récit d'anticipation crépusculaire préfigurant les dangers inquiétants de nos technologies modernes, film d'action dantesque mené à un rythme trépidant dans le cadre d'une atmosphère franchement horrifique, le second film de James Cameron traverse sans complexe les décennies de par son efficience implacable, la virtuosité de sa mise en scène, son action fulgurante ultra lisible et l'impact de ses saisissantes images funéraires mais aussi romantiques. Attention, pur film d'ambiance funeste à couper au rasoir au sein d'une cité urbaine de tous les dangers, qui plus est magnifiquement photographié à travers ses teintes nocturnes d'un bleu clair argenté. Une ambiance ensorcelante qu'on ne retrouvera jamais plus dans les opus suivants. Le pitch2029. Le monde est à l'agonie après une apocalypse nucléaire amorcée par les machines. Mais un belligérant du nom de John Connor réussit peu à peu à contrecarrer leur stratégie destructrice. Deux soldats du futur sont alors envoyés dans le passé en 1984 pour tenter de retrouver une serveuse de bar, Sarah Connor. Le Terminator, cyborg ultra perfectionné, est destiné à la supprimer. Kyle, soldat rebelle, sera donc chargé de la protéger pour préserver la destinée de John Connor (son futur fils !). Pour la survie de l'humanité, une guerre sans merci est donc livrée entre eux en plein coeur de Los Angeles. Avec un budget modeste mais beaucoup d'astuces artisanales et un savoir-faire infaillible, James Cameron et son équipe de techniciens Stan Winston, Roger George et Frank DeMarco réussissent à créer un univers anxiogène par l'entremise destructrice de machines terrifiantes conçues pour anéantir notre race.


Son impact visuel à l'aura délétère (les pupilles rouges des Terminator perçants l'obscurité, les charniers de cranes humains écrasés sous le poids des chars high-tech, ou encore les exécutions sommaires des ménagères ayant comme patronyme commun "Sarah Connor") renchérissant notre fascination au gré d'images cauchemardesques héritées de génocides nazis. Afin de retranscrire avec souci de vérité le futur de 2029, l'ambiance nocturne en clair-obscur (sous éclairs de néons azur) met en exergue un cataclysme nucléaire où quelques rares survivants faméliques sont parqués dans des sous-sols afin de se prémunir des éclats de bombes et des faisceaux de lasers. Des séquences terriblement marquantes car réalistes à travers leur tonalité désespérée afin de souligner la détresse des rescapés confinés dans la pénombre, derniers résistants d'une fin de civilisation asservie par des robots imputrescibles. Mais en dépit de la grande efficacité de ces séquences d'anthologie en roue libre, Terminator doit notamment son acuité par la dimension humaine des nos protagonistes en fuite, Kyle et Sarah. Un couple en étreinte voué à se rencontrer pour la sauvegarde d'un rejeton prédestiné à sauver l'avenir de l'humanité. Ainsi, en juxtaposant le thème spatio-temporel et l'anticipation pessimiste d'un holocauste imminent, James Cameron exploite un scénario taillé sur mesure où l'efficacité se renouvelle incessamment lors d'un savant dosage d'action, d'ultra violence, d'intensité dramatique et de suspense en crescendo. Les séquences explosives étant réalisées avec une vigueur estomaquante, quand bien même un contraste s'y établit à d'autres instant plus flegmes et intimes quant aux relations empathiques de Kyle et Sarah en incertitude sur notre postérité. Des apartés romantiques magnifiquement dépeintes auprès de leur confidence à la fois ténue, mélancolique et démunie que le score fragile de Brad Fiedel scande avec une discrétion langoureuse.  


Le seul, l'unique Terminator. 
Epique et fascinant, sombre et angoissant, cafardeux et effrayant, poignant et émouvant, Terminator oscille style bourrin et  densité humaine d'un enjeu planétaire en exposant en filigrane une sombre réflexion sur l'avenir de notre technologie perfectible. Sa violence incisive issue d'offensives et de compétitions de survie (à l'amertume désespérée), sa romance contrariée à la fois fébrile et chétive et enfin l'icone Arnold Chwarzenegger en démon de métal font de ce modèle de série B un pur chef-d'oeuvre mortifère dont les images dures, glaçantes, opaques, foudroyantes, ensorcelantes, resteront à jamais gravées dans notre mémoire collective.

Bruno Matéï
20.05.22. 6èx
11.10.12. 

Apport Technique du Blu-ray: 9/10


mardi 9 octobre 2012

LE COUVENT DE LA BETE SACREE (School of the Holly Beast / Sei Ju Gakuen)

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site eiga.wikia.com

de Norifumi Suzuki. 1974. Japon. 1h32. Avec Yumi Takigawa, Fumio Watanabe, Emiko Yamauchi, Maya Takikawa.

FILMOGRAPHIE: Norifumi Suzuki est un réalisateur et scénariste japonais, né le 26 Novembre 1933 à Shizuoka, décédé le 15 Mai 2014. 1971: Girl Boss Blues: Queen Bee's Counterattack. 1972: Girl Boss Blues: Queen Bee's Challenge. 1972: Girl Boss Guerilla. 1973: Girl Boss Revenge: Sukeban. 1973: Sex and Fury. 1973: Le Pensionnat des jeunes filles perverses. 1974: Le Couvent de la Bête Sacrée. 1975: Shaolin Karaté. 1979: Vices et Sévices. 1980: Les Tueurs Noirs de l'Empereur fou. 1982: Le Feu de la Vengeance.


Fleuron de la Nunsploitation, sous-genre inauguré en 1971 avec les Diables de Ken Russel, Le Couvent de la Bête Sacrée brave les interdits de la piété avec un cynisme sarcastique assez extravagant. D'un esthétisme baroque dans sa poésie macabre, cette série B d'exploitation nous emmène au sein d'un séminaire, lieu de débauche véreux auquel une assemblée de religieuses sont incapables de réfréner leurs pulsions sexuelles sous l'effigie de Dieu. Mayumi, jeune fille de 18 ans, pénètre au sein de l'institution dans le but de découvrir qui aurait pu être l'auteur du meurtre de sa mère. Mais derrière cette doctrine religieuse se cache les vices les plus répréhensibles auprès de soeurs endoctrinées sous la hiérarchie de chasteté. Cette abstinence les amenant indubitablement à pratiquer moult relations intimes dans leurs expériences saphiques ou hétéros. En prime, le prêtre particulièrement discret lors de ses visites impromptues est un hérétique délibéré à railler l'impuissance de Dieu. Au milieu de cette débauche où les tortures sont quotidiennement infligées aux nonnes les plus indociles par Mère supérieure, Mayumi se contente d'observer en attendant le moment propice pour accomplir sa vengeance.


Mis en scène avec un brio inspiré et surtout transcendé par la beauté formelle de ces images stylisées, le Couvent de la Bête Sacrée déploie sans modération nombre de séquences érotiques d'une audace blasphématoire. Relations sulfureuses entre lesbiennes douées de pulsions incontrôlées, intrusion illicite de deux marginaux en interne du couvent pour violer l'une d'entre elles, ou encore acte incestueux auprès d'un paternel infidèle. Mais ce libertinage perpétré à l'abri des regards indiscrets est régulièrement épié par des nonnes trop curieuses. En guise de sanction exemplaire d'avoir osé offenser la vertu de chasteté, divers sévices corporels leur sont infligés afin d'exorciser et libérer le démon enfanté ! Ces séquences de tortures épurées sont réalisées avec une élégance singulière pour transcender la beauté macabre d'un érotisme fétichiste. En outre, une séquence de mise à mort pourra rappeler aux amateurs la démesure baroque d'un Argento plutôt inspiré d'avoir sublimé quelques années plus tard un opéra de danse cabalistique. En l'occurrence, le réalisateur préfigure son style novateur avec ce tableau pictural d'un corps suspendu dans le vide par une corde, les jambes ruisselantes de sang aux abords d'une mosaïque décorative !


Etrange film compromis à la tendance fétichiste du Nunsploitation, le Couvent de la Bête Sacrée est un blasphème anti religieux d'une élégance éhontée. Une provocation impudente, un témoignage ironique de l'accoutumance sexuelle innée en chacun de nous et un pied de nez à l'enseignement sectaire du christianisme. D'une sensualité torride et d'une poésie immaculée, cette vendetta en demi-teinte s'obscurcie au fil d'une lourde révélation liée à la filiation parentale. Et l'ange de la vengeance de perpétrer sa douce rancoeur avec une grâce méthodique. 

Dédicace à Nicole Leopoldine Staudigl
09.10.12. 2èx
Bruno Matéï


lundi 8 octobre 2012

APPORTEZ MOI LA TETE D'ALFREDO GARCIA (Bring Me the Head of Alfredo Garcia)

Photo empruntée sur Google, appartenant au site hollywood70.com

de Sam Peckinpah. 1974. U.S.A. 1h52. Avec Warren Oates, Isela Vega, Robert Webber, Gig Young, Kris Kristofferson, Emilio Fernandez, Helmut Dantine.

Sortie salles France: 2 Janvier 1975. U.S: 14 Août 1974

FILMOGRAPHIE: Sam Peckinpah est un scénariste et réalisateur américain, né le 21 Février 1925, décédé le 28 Décembre 1984.
1961: New Mexico, 1962: Coups de feu dans la Sierra. 1965: Major Dundee. 1969: La Horde Sauvage. 1970: Un Nommé Cable Hogue. 1971: Les Chiens de Paille. 1972: Junior Bonner. Guet Apens. 1973: Pat Garrett et Billy le Kid. 1974: Apportez moi la tête d'Alfredo Garcia. 1975: Tueur d'Elite. 1977: Croix de Fer. 1978: Le Convoi. 1983: Osterman Week-end.


Western moderne consacré à une traque sans rémission, Apportez moi la tête d'Alfredo Garcia est une marche funèbre vers la désolation. L'odyssée aride la plus nihiliste et désenchantée de la carrière du cinéaste. Un couple se retrouve imbriqué dans une suite de vicissitudes sordides afin de pouvoir s'approprier la tête humaine d'Alfredo Garcia. La raison de ce décret émane de l'idylle sans lendemain entretenue avec ce séducteur et la fille d'un patriarche véreux. C'est en échange d'une somme d'argent considérable offerte par ce dernier que Bennie décide d'entamer cette sale besogne avec l'entremise de sa concubine. Mais l'individu recherché est déjà mort !


Jusqu'au boutiste et d'un désespoir particulièrement éprouvant, Sam Peckinpah nous illustre ici l'interminable chemin de croix d'un voyou en perte de vitesse, partagé entre l'appât d'un gain faramineux et l'idylle sereine avec sa partenaire amoureuse. Le portrait dérisoire d'un individu corrompu par sa condition marginale mais rattrapé par son empathie amoureuse. Par son instinct cupide lié à sa condition sociale miséreuse, il va devoir faire face à sa responsabilité morale, sa culpabilité après avoir braver ses adversaires dans une dérive meurtrière indigne. C'est au sein d'une contrée mexicaine précaire où les laissés pour compte, bandits et mercenaires mesquins tentent d'y survivre que Bennie décide de retrouver une tombe pour exhumer la tête putréfiée d'un cadavre. Baignant dans une atmosphère solaire irrespirable, l'ambiance malsaine qui s'y dégage résulte notamment de l'insolite présence d'une tête en putréfaction, maladroitement enfouie dans un sac rempli de glace. Par une succession d'altercations malchanceuses et le sacrilège d'avoir osé profaner la sépulture d'une ancienne connaissance, la destinée morbide de bennie est inévitablement impartie aux conséquences de l'indécence et du sang de certains innocents. Dans le rôle crépusculaire de Bennie, Warren Oates promène sa dégaine de cow-boy solitaire à la manière d'un fantôme errant. Il traîne sa silhouette sagouine avec une nonchalance amère suivie d'une rancune vindicative aux accents suicidaires. Secondé par la compagne soumise, éprise d'amour pour ce machiste bourru, Isela Vega apporte la touche romanesque avec autant d'aspiration pour son mariage auguré que de regret pour l'obstination intraitable de son amant. 


Traversé d'éclairs de violence crue et d'un nihilisme radical mais inévitable, Apportez moi la tête d'Alfreda Garcia est le western putride dédié au déclin miséreux d'un marginal galvaudé par son entêtement. Le cri de haine désespéré d'un paumé stoïque, en quête de rédemption et rongé par la culpabilité mais finalement exposé à une vengeance aveugle. Sévère constat d'un marginal discrédité, compromis à une hécatombe impitoyable où aucun des participants ne pourra sortir vainqueur. Un chef-d'oeuvre de nihilisme emportant l'empathie du spectateur vers les méandres de l'aigreur.

Apport technique du Blu-ray: 6,5/10
08.12.12. 3èx
Bruno Matéï