mercredi 21 septembre 2022

Pacte avec un tueur / Best Seller

                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site chroniqueducinephilestakhanoviste.blogspot.com

de John Flynn. 1987. U.S.A. 1h35. Avec James Woods, Brian Dennehy, Victoria Tennant, Allison Balson, Paul Shenar, George Coe.

Sortie salles France: 13 Janvier 1988. U.S: 25 Septembre 1987

FILMOGRAPHIE: John Flynn est un réalisateur et scénariste américain, né le 14 Mars 1932 à Chicago, décédé le 4 Avril 2007 en Californie. 1968: Le Sergent. 1972: The Jerusalem File. 1973: Echec à l'Organisation. 1977: Légitime Violence. 1980: Les Massacreurs de Brooklyn. 1980: Marilyn, une vie inachevée. 1983: Touched. 1987: Pacte avec un Tueur. 1989: Haute Sécurité. 1991: Justice Sauvage. 1992: Nails (télé-film). 1993: Scam (télé-film). 1994: Brainscan. 1999: Meurtres très ordonnés. 2001: Protection.

Un excellent polar des années 80 aux éclairs de violence étonnamment brutaux au sein de cette série B retorse eu égard de l'originalité de son scénario concocté par le maître Larry Cohen qu'on ne présente plus. Un flic écrivain acceptant de négocier avec un tueur à gages afin de faire tomber un sénateur corrompu pour qui ce dernier exerçait. Le récit s'avérant beaucoup plus substantiel et sombre, notamment si je me réfère au passé de Dennis ayant failli trépasser lors d'un cambriolage sanglant alors que quelques années après c'est sa femme qui mourra d'un cancer. Ainsi, à travers son concept à la fois original et audacieux, Pacte avec un Tueur tire parti de son efficacité dans les rapports antinomiques entre le flic et le tueur collaborant mutuellement avec une constante ambiguïté (entre fascination / répulsion et une certaine forme de reconnaissance morale quant à l'épilogue dramatique). 

Tant pour les motivations du tueur déterminé à se substituer en héros, et donc à se racheter une conduite tout en perdurant ses exactions punitives sans une once de vergogne, alors qu'à plusieurs reprises il sauvera la vie de son acolyte de l'ordre et la fille de celui-ci, que pour le laxisme du flic, témoin voyeur de règlements de compte sanglants entre les sbires du sénateur à l'affut de leurs faits et gestes à interroger les témoins capitaux. James Woods excellant comme de coutume dans la peau du tueur à lunette noire et costard avec un flegme méthodique à la fois tranquille et détaché puisque motivé notamment par la rancoeur d'avoir été trahi par son supérieur. Quant à Brian Dennehy, il lui partage la vedette avec une audace morale assez étrange durant leur parcours investigateur semé de cadavres, entre confidences intimes et soutien mutuel déconcertant. 

Un solide polar marginal donc n'ayant rien perdu de son aura de souffre à travers cette quête de célébrité, de renaissance, d'héroïsme (hétérodoxe) et de rédemption. 

*Bruno
3èx

mardi 20 septembre 2022

American Gigolo

                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Paul Schrader. 1980. U.S.A. 1h57. Avec Richard Gere, Lauren Hutton, Hector Elizondo, Nina Van Pallandt, Bill Duke

Sortie salles France: 11 Juin 1980. U.S: 8 Février 1980

FILMOGRAPHIE: Paul Schrader est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 22 Juillet 1946 à Grand Rapids (Michigan). Blue Collar: 1978. 1979: Hardcore. 1980: American Gigolo. 1982: La Féline. 1985: Mishima. 1987: Light of Day. 1988: Patty Hearts. 1990: Etrange Séduction. 1992: Light Sleeper. 1994: Witch Hunt (télé-film). 1997: Touch. 1997: Affliction. 1999: Les Amants Eternels. 2002: Auto Focus. 2005: Dominion. 2007: The Walker. 2008: Adam Resurrected. 2013 : The Canyons. 2014 : La Sentinelle. 2016 : Dog Eat Dog. 2017 : Sur le chemin de la rédemption. 2021 : The Card Counter. 


"L'amant le mieux payé d'Hollywood pris dans une affaire de moeurs et de meurtre."
42 ans ! C'est le temps qu'il m'eut fallu attendre pour découvrir (au bon moment) American Gigolo si bien que lorsque j'étais ado à l'époque de "la Cinq", le sujet sulfureux ne m'intéressait guère, avec en prime de s'y coltiner en tête d'affiche l'acteur bellâtre Richard Gere consacré du jour au lendemain star bankable à la suite de ce retentissant succès (même si en France American Gigolo ne cumule que 691 163 entrées). A titre d'anecdotes subsidiaires, on peut d'ailleurs révéler que John Travolta devait initialement camper ce gigolo bon chic bon genre qu'il refusa à la suite d'un commun accord avec son agent, faute de ses récents échecs commerciaux. Quand bien même Christopher Reeve réfuta également le rôle pour des raisons que j'ignore. A l'arrivée, et à ma grande surprise (même si je n'ai jamais vraiment douté de sa qualité cinégénique), American Gigolo est venu à moi comme par enchantement afin de bouleverser mes attentes de spectateur en total éveil. J'avoue même sans ambages, et donc le plus sincèrement, avoir reçu un coup de coeur à reluquer la quotidienneté triviale de ce gigolo vendant son corps aux femmes huppées (surtout les plus âgées !) avant d'être pris pour cible par la police à la suite d'une découverte macabre qu'il fréquenta une nuit. Histoire simpliste ok, mais d'une efficacité imparable lorsque Paul Schrader offre toute sa conviction en son personnage assez gérontophile que Richard Gere transcende à la perfection dans son profil de prostitué masculin bientôt rattrapé par une romance aléatoire (que campe divinement la trop rare Lauren Hutton exquise de sensualité, en mode ténuité réservée). 

Et pour rester honnête, je connais bien mal la filmo de Richard Gere même s'il est parvenu à me traumatiser dans l'éprouvant Hatchi. Mais je ne serai guère surpris si la plupart s'accorde à clamer qu'il s'agit ici de son meilleur rôle tant l'acteur, à la démarche distinguée si naturelle, se voue corps et âme à donner chair à son personnage illégal avec un art consommé du style et de l'aplomb. Et ce juste avant d'afficher un ton autrement tendu et renfrogné lorsque la police est sur le point de le déférer à la suite d'un complot perfide. Mais si American Gigolo m'a autant séduit et captivé en la présence symptomatique de Gere constamment dans tous les plans, c'est également à travers la capacité innée de Schrader à susciter une véritable ambiance à la fois charnelle, trouble et parfois sensiblement inquiétante à travers ses nuits récursives filmées sans complaisance dans son parti-pris d'opter pour un réalisme tantôt documenté. On peut d'ailleurs même songer à Ferrara pour certains plans urbains un tantinet glauques ou insécures et à Friedkin lors d'une séquence musicale confinée en boite de nuit "gay". Le tout étant scandé du tube "call me" de Blondie que Giorgio Moroder reprendra en intermittence lors de tonalités remixées. Quand bien même lors de moments plus opaques et anxiogènes il opte pour une musicalité électro (typique des eighties !) autrement lourde et lugubre afin de renforcer l'aspect psycho-killer de sa seconde partie thriller. 

En optant pour un 1er degré assumé dénué de prétention à dresser le portrait évolutif d'un gigolo que son entourage vénal et sournois fuira depuis l'avancement de sa culpabilité, Paul Schrader injecte une étonnante dimension humaine à son potentiel coupable que seul l'amour pourrait sauver de sa condition à la fois recluse et soumise. Tout en magnifiant en filigrane la ville insidieuse de Los Angeles du côté des quartiers branchés et bourgeois d'une haute société adepte de la coke et de la prostitution de haut standing. Impeccablement narré à travers sa façon modeste de raconter son histoire dénuée de fioritures, American Gigolo hypnotise sobrement nos sens sous l'impulsion d'un Richard Gere au diapason car littéralement habité par son rôle racoleur peu à peu en proie au doute, à la peur, à la remise en question, à la maturité. Un vrai film de cinéma donc (qu'on ne peut plus façonner de nos jours) doublé d'un film d'ambiance quasi indicible dans sa subtile disparité des tonalités contradictoires. A revoir sans l'ombre d'une hésitation puisque ce métrage plein de sobriété me semble donc inaltérable dans ma condition néophyte du 1er visionnage. Vrai classique au demeurant. 

*Bruno

lundi 19 septembre 2022

Ne dis rien / Speak no Evil

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Christian Tafdrup. 2021. Danemark. 1h38. Avec Morten Burian, Sidsel Siem Koch, Fedja van Huêt, Karina Smulders, Liva Forsberg. 

Sortie en VOD et Dvd le 23 Septembre 2022. Danemark: 17 Mars 2022.

FILMOGRAPHIE: Christian Tafdrup est un réalisateur, acteur et scénariste né le 8 April 1978 à Copenhagen, Danemark. 2022: Ne dis rien. 2017: En frygtelig kvinde. 2016: Forældre. 

Top 2022 ! Le malaise perpétuel au sens littéral (tant éthéré puis tangible) dépeint ici avec un vérisme si tranché qu'il est en permanence incommodant. Jusqu'au final incongru en mode dépression..

Un choc que ce suspense horrifique impeccablement tendu et malaisant au possible si bien que le réalisateur, en pleine capacité de sa maîtrise alchimique, nous saisit à la gorge 1h33 durant jusqu'au climax traumatique. Ainsi, à partir d'un pitch linéaire ultra simpliste (un couple de touristes danois et leur fille sont aimablement invités chez un couple hollandais préalablement rencontré en villégiature), Christian Tafdrup (dont il s'agit de son 3è long) parvient à tailler un suspense au cordeau quant au désarroi moral de ses invités accorts en proie à l'incompréhension, le doute, l'appréhension et surtout la gêne eu égard du comportement à la fois lunatique, impudent, erratique de ces propriétaires hollandais fallacieux. Toute l'intensité du récit résidant dans l'interrogation de ces protagonistes (et nous même !) avant d'y prendre la poudre d'escampette en lieu et place du malaise cuisant qui empoisonne leur fébrile quotidienneté. Tant et si bien que s'il ne se passe pas grand chose durant les 3/4 quarts du récit, on reste pour autant captivé, hypnotisé, sur le qui-vive car profondément inquiet de la tournure inévitablement dramatique de ce huis-clos où le malaise suffocant n'aura jamais été aussi perméable que dans ce métrage hollandais d'un vérisme à couper au rasoir. 

Tant auprès de l'ossature du récit imprévisible, de son aura malsaine toujours plus imposante que de la direction d'acteurs où chaque comédien se fond dans le corps de leur personnage avec un art consommé du naturel expressif. Le spectateur s'identifiant d'autant mieux aux victimes que leurs visages ne nous paraissent guère familiers auprès de leur identité danoise. C'est donc un scrupuleux voyage au bout de l'enfer moral que l'on nous dépeint ici, avant d'amorcer une horreur crue qui explosera lors des 5 ultimes minutes assez pénibles à regarder de par l'intensité de sa cruauté requise éludée de lueur d'espoir. Mais ce qui ébranle avant tout selon moi avec Ne dis rien, c'est sa capacité infaillible d'avoir su distiller la fibre du malaise le plus perfide et insidieux auprès des victimes et du spectateur attentif à leurs faits et gestes eu égard du sentiment d'insécurité les agressant au compte-goutte. Et ce sans s'embarrasser d'effets de manche grossiers qu'on a coutume de se coltiner dans les prods standard, la subtilité étant ici de rigueur pour mettre en exergue un jeu psychologique de soumission/domination à travers les valeurs familiales, le civisme et la pédagogie parentale.


"Parce que tu m'as laissé faire"
Huis-clos délétère d'une tension oppressante parfois insoutenable, Ne dis rien mise sur l'horreur éthérée, les non-dits (ce que l'on n'ose pas répondre à son interlocuteur par politesse), les regards équivoques, les postures outrées pour provoquer une angoisse incommode derrière une hospitalité insidieuse trop flegme pour être honnête. Outre l'interprétation exemplaire (c'est peu de le dire) de sobriété, le récit étant renforcé d'une partition faisant écho à Shining lors de moult séquences laconiques ou mutiques où la nature semble vampirisée par un ectoplasme démonial. Toujours dérangeant car souvent déstabilisant et embarrassant, Ne dis Rien explose son potentiel horrifique lors d'un épilogue abrupt faisant office de dépression traumatique. 
Pour public averti. 

*Bruno

Ci-joint la critique de Merej

vendredi 16 septembre 2022

Emily the Criminal. Prix du Public, Deauville 2022.

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de John Patton Ford. 2022. U.S.A. 1h37. Avec Place Aubrey, Théo Rossi, Megalyn Echikunwoke, Gina Gershon

Sortie salles France: 9 Septembre 2022 uniquement à Deauville. Sortie salles U.S/Canada: 12 Août 2022

FILMOGRAPHIEJohn Patton Ford est un acteur, scénariste et réalisateur américain. 
2022: Emily the Criminal. 

Encore un métrage passé par la trappe Vod alors qu'il aurait tant mérité une sortie salles en bonne et due forme. Première réalisation de John Patton Ford, Emily the Criminal est une claque comme on en voit si peu en cours d'année dans le paysage cinématographique. Tout du moins une oeuvre indépendante apte à trôner dans le classement d'un Top 10 annuel tant le réalisateur maîtrise son matériau sous l'impulsion d'une actrice au diapason: Place Aubrey. Personnellement, je ne connais pas encore cette actrice (non plus en vagues souvenirs) alors qu'elle approche déjà près de 30 métrages dans son curriculum vitae. Irradiant l'écran de sa présence naturelle sans fard, Place Aubrey compte sur la sobriété de ses expressions quelque peu introverties (mais affirmées !) pour nous captiver en nous suscitant une appréhension tangible à travers son cheminement illégal d'escroc à la p'tite semaine exploitant de fausses cartes bleues pour empocher un pactole toujours plus juteux. 

Savamment mis en place par un trio de malfrats retors, Emilie finit par se retrouver projetée dans un engrenage indélébile avec toutefois un courage et une audace que l'on ne voit jamais arriver tant l'actrice déploie une palette de sentiments équivoques dans sa condition de frondeuse partagée entre l'espoir de s'en sortir en dépit d'une société capitaliste à la fois arbitraire et cupide et la tentation de se laisser dériver toujours plus loin vers l'illégalité. John Patton Ford filmant la ville avec un brio vériste quasi documenté pour mieux nous immerger dans sa scénographie urbaine insécure disséminant les trafics en tous genres. Superbe portrait de femme forte donc dénuée de manichéisme, tant et si bien que son final imprévisible te fera grincer des dents avec une stupeur finalement fascinatoire, Emily the Criminal ne cesse de surprendre et de nous titiller les nerfs (certaines séquences effrénées demeurent d'une tension extrême sans anticiper l'évènement) avec en background une diatribe cinglante sur les laissés pour compte, les marginaux et les chômeurs contraints de survivre dans une jungle capitaliste aussi fourbe que déloyale. Alors que sa réflexion patente sur la contagion du vice porte à réfléchir sur notre propre condition éthique si bien que l'on s'identifie à l'anti-héroïne avec une fascination à double tranchant. 

Percutant et hypnotique (d'autant plus atmosphérique par moments), trouble et oppressant à travers sa mise en scène studieuse étonnamment maîtrisée pour un 1er essai, Emily the Criminal nous plonge dans une descente aux enfers latente. Dans la mesure où les quelques affrontements sur le fil du rasoir et les situations de transaction attisent notre curiosité avec une inquiétude dénuée de repères. Place Aubrey monopolisant l'écran anxiogène avec un aplomb davantage oppressant eu égard de son évolution morale à s'opposer contre l'autorité et l'injustice quitte à y perdre son âme pour un alléchant enjeu pécuniaire. Outre sa présence à la fois envoûtante et étrangement lascive, elle est accompagnée de son manager Théo Rossi résolument inné pour se fondre dans le corps du leader peu recommandable avec une force d'expression lui aussi laconique et mesurée. A eux deux ils improvisent un tandem davantage compromettant dans leur stratégie autonome de se mesurer à une provocation félonne afin d'asseoir et d'affirmer leur libre arbitre. Scandé d'un score électro lestement punchy, Emily the Criminal est une révélation à tous niveau (réal, écriture, interprétation) comme le confirment ses récompenses à Deauville et à Annapolis. Quand bien même le bouche à oreille fait son bonhomme de chemin comme je le fus soumis à travers les réseaux sociaux et certains youtubeurs. Tu sais donc ce qu'il te reste à faire... 

*Bruno

Récompenses: Prix du Jury, Meilleur long-métrage, Meilleure Actrice Aubrey Plaza au Festival du film d’Annapolis 2022.

Prix du Public, Deauville 2022. 

lundi 12 septembre 2022

Les Enquêtes du Département V: Miséricorde / Kvinden i buret

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site  Imdb.com

de Mikkel Nørgaard. 2013. Danemark/Norvège/Suède/Allemagne. 1h37. Avec Nikolaj Lie Kaas, Fares Fares, Sonja Richter, Mikkel Boe Følsgaard, Søren Pilmark, Peter Plaugborg, Lucas Lynggaard Tønnesen

Sortie en France en Vod le 27 Mars 2015 

FILMOGRAPHIE: Mikkel Nørgaard est un réalisateur et scénariste suédois. 2010: Klovn: The Movie. 2013: Les enquêtes du Département V: Miséricorde. 2014: Les enquêtes du Département V: Profanation. 2015: Klovn Forever. 2020: Klovn the Final. 


Un excellent thriller que cette première enquête danoise du Département V d'après un illustre roman écrit par Jussi Adler-Olsen. Photo monochrome léchée, mise en scène studieuse (aucun plan inutile ne déborde), intrigue solide, climat malaisant auprès de la claustration de la victime mise à rude épreuve de survie, complémentarité attachante d'un duo de flics antinomiques apprenant à se connaître au fil de leurs investigation épineuse. Tout est donc réuni pour nous parfaire un thriller criminel redoutablement efficace par ces rebondissements au compte-goutte alors que le réalisateur Mikkel Nørgaard s'applique à conter scrupuleusement son histoire à l'aide d'un réalisme blafard pour mieux nous susciter les sentiments d'inquiétude, de peur et de tension. A l'instar de son haletant suspense final que l'on redoute avec une appréhension à la fois craintive et oppressante. Tant et si bien que l'on est constamment captivé et passionné par cette langoureuse affaire sordide sous l'impulsion de ce duo de policiers francs-tireurs convergeant à une poignante conclusion d'une sobre pudeur. A voir absolument pour tous les fans de thriller poisseux où toute forme de complaisance en est louablement bannie.  


*Bruno

Récompenses
Bodil (Bodil Awards) 2014
Rasmus Thjellesen
Zulu Awards 2014
Meilleur Film ; Mikkel Nørgaard et Louise Vesth

vendredi 9 septembre 2022

Mission Impossible 3

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de J.J Abrams. 2006. U.S.A/Chine/Allemagne/Italie. 2h05. Avec Tom Cruise, Philip Seymour Hoffman, Ving Rhames, Michelle Monaghan, Jonathan Rhys Meyers

Sortie salles France: 3 Mai 2006 

FILMOGRAPHIE: J.J Abrams est un réalisateur, producteur, compositeur, acteur et scénariste américain pour le cinéma et la télévision, né le 27 Juin 1966 à New-york. Il est en outre le créateur des séries TV, Lost, Alias, Felicity, Fringe, Undercovers, Alcatraz et Obb Jobs. 2006: Mission Impossible 3. 2009: Star Trek. 2011: Super 8. 2013: Star Trek into the Darkness. 2015: Star Wars, épisode VII : Le Réveil de la Force. 2019: Star Wars, épisode IX : L'Ascension de Skywalker


Monstrueux et complètement Mad !
Peut-être le meilleur film d'action des années 2000 tant J.J Abrams pousse le bouchon très loin dans l'action ostentatoire d'une efficacité et d'une tension optimales. Tant et si bien que nous avions rarement le temps de souffler au fil d'une intrigue, certes simpliste (quoique parfois complexe, faute d'un rythme trop furtif), mais redoutablement prenante et surprenante quant aux rebondissements disséminés à juste dose. Quand bien même Tom Cruise et son équipe émérite foncent dans le tas lors de missions à risque toujours plus impossibles que l'on savoure comme des gosses émerveillés. Souvenez vous: "plus le méchant est réussi, meilleur le film sera". Et à ce jeu délétère le regretté Philip Seymour Hoffman rivalise de sadisme, perversité et cruauté misogyne avec un flegme tranquille en mégalo vénal. Bref, c'est du cinéma de divertissement décoiffant redorant ses lettres de noblesse à l'action festoyant quand bien même les effets numériques irréprochables demeurent d'un réalisme à couper au rasoir. Plein la vue 2h durant donc à travers son concentré d'émotions fortes (tant pour le sens aigu de son intensité effrénée que pour l'expression de la tendresse des sentiments) et de tension ardue gravitant auprès du sempiternel thème de l'appréhension d'y perdre l'être aimée que Cruise (tout en expressivité viscérale !) s'efforce de déjouer avec une hargne limite erratique (en s'inspirant notamment de Snake Plissken sous couvert d'un détail narratif explosif !). L'acteur demeurant rigoureusement impliqué (tant physique que moral) dans sa vélocité d'héros de dernier ressort cumulant à rythme (trop) métronome les bravoures les plus folingues hyper jouissives. 
Indispensable que ce modèle d'action et d'efficacité. 

*Bruno
2èx; vf

Box-Office France: 1 918 786 entrées


Récompenses:
California on Location Awards 2006 : prix COLA de la Société de production et équipe de site de l'année décerné à Ted Alvarez, Becky Brake, Michael Chickey, Martin J. Cummins, Douglas Dresser, Ronald M. Haynes, Jonathan Hook, Michelle Latham, David B. Lyons, Jennifer O'Rourke Smith, Kyle Oliver, Rachel Swenson, Scott Trimble et Matthew Wersinger.
Golden Trailer Awards 2006 :
Golden Trailer du meilleur spectacle,
Golden Trailer du meilleur film d’action,
Golden Trailer du Blockbuster de l'été 2006.
Satellite Awards 2006 : Satellite Award des meilleurs extras DVD.
ASCAP Film and Television Music Awards 2007 : ASCAP Award des meilleurs films au box-office pour Michael Giacchino.
Empire Awards 2007 : Empire Award de la meilleure scène pour l'attaque du pont.



jeudi 8 septembre 2022

Goldfinger

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Guy Hamilton. 1964. Angleterre. 1h50. Avec Sean Connery, Honor Blackman, Gert Fröbe, Shirley Eaton, Tania Mallet, Harold Sakata, Bernard Lee, Martin Benson, Cec Linder. 

Sortie salles France: 18 Février 1965. U.S: 22 Décembre 1964

FILMOGRAPHIEGuy Hamilton, né le 16 septembre 1922 à Paris (France) et mort le 20 avril 2016 à Majorque (Espagne), est un réalisateur britannique. 1952 : L'assassin a de l'humour. 1953 : Le Visiteur nocturne. 1954 : Un inspecteur vous demande. 1955 : Les Indomptables de Colditz. 1956 : Charley Moon. 1957 : Manuela. 1959 : Un brin d'escroquerie. 1959 : Au fil de l'épée. 1961 : Le Meilleur Ennemi. 1964 : L'Affaire Winston. 1964 : Goldfinger. 1965 : The Party's Over. 1966 : Mes funérailles à Berlin. 1969 : La Bataille d'Angleterre. 1971 : Les diamants sont éternels. 1973 : Vivre et laisser mourir. 1974 : L'Homme au pistolet d'or. 1978 : L'Ouragan vient de Navarone. 1980 : Le miroir se brisa. 1982 : Meurtre au soleil. 1985 : Remo sans arme et dangereux. 1989 : Sauf votre respect. 

                 Erwan Desbois | 31 octobre 2020. Critique reprise sur ECRAN LARGE.

L'OR EST ETERNEL

C'était la troisième aventure de James Bond, et la troisième avec Sean Connery. C'était Goldfinger, sorti en 1965, où 007 affrontait un mystérieux milliardaire, et offrait quelques une des scènes les plus cultes de toute la saga. Et si Goldfinger était l'un des plus grands James Bond ?

LA TROISIÈME EST LA BONNE

Troisième aventure de 007 après Dr. No et Bons baisers de Russie, Goldfinger a fait entrer de plein pied l'agent secret dans la postérité. Il aurait difficilement pu en être autrement, étant donné le niveau de quasi-perfection atteint par cet épisode dans le créneau du divertissement populaire. D'ailleurs, au vu des nombreux atouts du film et de sa résistance au temps qui passe, l'hypothèse selon laquelle celui-ci restera un monument du cinéma même lorsque la popularité de James Bond se sera éteinte est loin d'être farfelue.

Goldfinger a en effet cela de particulier qu'il ne profite pas de la légende de l'agent secret, mais qu'il la (re)crée devant nos yeux. Pour faire un jeu de mots facile  mais approprié  en rapport avec son titre, tout ce que le film touche, il le transforme en or. Le scénario retors, qui enchaîne avec délectation les fausses pistes et les retournements soudains, est digne de l'âge d'or des films noirs hollywoodiens. Les ennemis de Bond atteignent la quintessence perverse de leur rôle de méchants, tant au niveau du cerveau dérangé et sans pitié (le monstrueux Auric Goldfinger, et sa réplique devenue culte « I don't expect you to talk, Mr. Bond, I expect you to die ! ») que de l'homme de main mortel et indestructible, le muet Oddjob, dont Jaws restera à tout jamais une pale imitation.

LE BON BOND

La mise en scène de Guy Hamilton (qui fera ensuite trois autres James Bond : Les Diamants sont éternels, Vivre et laisser mourir, L'Homme au pistolet d'or) est elle aussi remarquable. L'utilisation faite des maquettes, et encore plus des effets sonores, déploie des trésors d'inventivité qui font que le film n'a pas à rougir en terme de spectacle, malgré des moyens somme toute limités. On retrouve là encore l'efficacité magique des séries B de science-fiction et des films noirs de l'époque (En quatrième vitesse, par exemple), qui parviennent à vous faire croire à la fin du monde avec pour seuls ingrédients un compte à rebours, quelques bruitages et un montage sec.

Et puis bien sûr, Goldfinger ne serait pas Goldfinger sans Sean Connery dans le rôle de 007. Après les multiples digressions subies par le personnage au fil des décennies, on est presque surpris par la profondeur et le trouble que celui-ci possédait lors des premiers épisodes. Son humour à froid n'était alors pas gratuit, mais une couverture pour masquer un comportement constamment sur le fil du rasoir dans lequel les sentiments personnels (désir de vengeance, attirance pour les femmes) interfèrent à plus d'une reprise.

Adulte et complexe, confronté à des ennemis à sa hauteur et muni pour la première fois de sa mythique Aston Martin DB5 « personnalisée », ce James Bond au faîte de sa gloire est définitivement insurpassable.

Résumé : 4.5/5

Scénario, mise en scène, bad guys, Sean Connery... Goldfinger frôle la perfection et reste l'un des plus grands films de la saga James Bond, symbole d'une grande époque.

ECRAN LARGE.

Récompenses:
Oscars 1965 : meilleur montage de son15
Goldene Leinwand 1965 pour United Artists
Laurel Awards 1965 : meilleur film action-dramatique, meilleure performance d'un acteur de film d'action pour Sean Connery

mardi 6 septembre 2022

Là où chantent les écrevisses / Where the Crawdads Sing

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Olivia Newman. 2022. U.S.A. 2h05. Avec Daisy Edgar-Jones, Taylor John Smith, Harris Dickinson, Sterling Macer Jr, Michael Hyatt, David Strathairn 

Sortie salles France: 17 Août 2022. U.S: 15 Juillet 2022

FILMOGRAPHIE: Olivia Newman est une réalisatrice, scénariste et productrice américaine. 2018: Mon premier combat. 2022: Là où chantent les Ecrevisses. Prochainement: Untitled Roe v. Wade Project. 

"Désormais, je suis le marais. Je suis la plume d'une aigrette. Je suis chaque coquillage échoué sur le rivage. Je suis une luciole. Vous en verrez des centaines clignotées jusqu'au plus profond du marais. Et c'est à cet endroit que vous me trouverez. Loin là bas, où chantent les écrevisses."

Tiré d'un illustre roman de l'écrivaine et zoologiste Delia Owens et produit par l'actrice Reese Whiterspoon, Là où chantent les Ecrevisses est une oeuvre terriblement émouvante et attachante. De par la sobriété candide de l'actrice Daisy Edgar-Jones (révélée dans la série irlandaise Normal People) nous extériorisant un tsunami d'émotions lors des 56 premières minutes, et pour la prestance criante de vérité démunie de la petite Jojo Regina incarnant Kya à son âge infantile à travers les flash-back d'un 1er acte relatant sa cruelle condition orpheline après avoir été molestée puis abdiquée par son père abusif. Livrée à elle même, cette dernière tentera de survivre dans son lieu naturel reculé grâce à sa passion des insectes et des crustacés qui environnent le marais. Ces instants de plénitude et de quiétude demeurant d'autant plus tangibles par la beauté de sa photo scope et par cette nature sensorielle que l'on aimerait effleurer du bout des doigts. Ainsi, en magnifiant ce cadre singulier d'une Louisiane isolée d'urbanisation, Olivia Newman possède ce talent inné de nous narrer son histoire parmi l'attention scrupuleuse du traitement de ses personnages vus à travers les yeux de Kya lors de son enfance puis lors de sa maturité. 

La réalisatrice conjuguant sans l'outrance de sentiments programmés (à l'exception près d'une seule séquence pour la posture trop empathique de l'épicier Jumpin pour Kya) romance et onirisme dans une harmonie édénique eu égard de la puissance émotionnelle que nous suscite le duo d'amants en étreinte. Des instants de pureté parfois rehaussés d'une poésie enchanteresse (les feuilles tournoyant autour d'eux) nous donnant le vertige d'un amour fusionnel inscrit dans la passion de sentiments idéalistes. Bref, on croit à fond à leur passion incandescente sous l'impulsion de ces acteurs vibrants d'humanité pudibonde. Alors que la seconde partie nous rappellera à la réalité d'un fait aussi tragique que morbide (même si dès le prologue nous étions déjà avertis) en incluant un second personnage masculin que nous fréquenteront lors des flash-back explicatifs du triangle amoureux. Or, dès l'instant où Kya établit la rencontre de ce jeune prétendant trop loquace et désinvolte pour être honnête, on ne retrouve plus l'émotion fulgurante qui irriguait sa première partie de par sa puissance romantique brutalement estompée. Pour autant, grâce au soin de la mise en scène, du jeu toujours aussi investi des acteurs, de la présence magnétique de Daisy Edgar-Jones et de la façon studieuse de nous relater l'histoire en suspens, on reste à la fois intrigué et attentif au déroulement narratif cédant un peu plus de place à la tension de séquences de procès entre 2/3 flash-back que l'on observe dans l'expectative. Et c'est là où le cheminement d'apparence conventionnel et prévisible finit par nous surprendre de plein fouet au gré d'un final bouleversant (pour ne pas dire "crève-coeur" auprès des + sensibles) que nous ne voyons pas arriver. 


Le Cycle de la Vie.
Si bien que d'après l'acuité de ces images oniriques (toutes en suggestion !) défilant à travers la valeur des mots utilisés par une Kya transie de grâce; Là où chantent les Ecrevisses retrouve ses lettres de noblesse auprès de son hymne à la nature et de son sens existentiel (avec un discours assumé sur la métempsychose) quant aux êtres qui nous sont chers inévitablement destinés à disparaître. Un très beau conte donc, délicat, très sensible par sa tendresse sans fard, actuel (le sempiternel traitement des enfants et des femmes battus, le droit à la différence auprès des êtres marginaux pointés d'un doigt médisant), à découvrir sans se laisser influencer par l'ombre de préjugés et par son intrigue fallacieuse. 

*Bruno

Info Wikipedia: "Là où chante les Ecrevisses", le roman, a dominé le New York Times Fiction Best Sellers de 2019 pendant 25 semaines non consécutives. Le livre a figuré sur la New York Times Best Seller list pendant plus d'un an. Il est paru en France en 2020.

vendredi 2 septembre 2022

Soeurs de Sang / Sisters

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemachoc.canalblog.com

de Brian De Palma. 1972. U.S.A. 1h33. Avec Margot Kidder, Jennifer Salt, Charles Durning, William Finley, Mary Davenport, Barnard Hughes.

Sortie salles France: 2 février 1977 (Int - 18 ans). U.S: 27 Mars 1973

FILMOGRAPHIE: Brian De Palma, de son vrai nom Brian Russel DePalma, est un cinéaste américain d'origine italienne, né le 11 septembre 1940 à Newark, New-Jersey, Etats-Unis. 1968: Murder à la mod. Greetings. The Wedding Party. 1970: Dionysus in'69. Hi, Mom ! 1972: Attention au lapin. 1972: Soeurs de sang. 1974: Phantom of the paradise. 1976: Obsession. Carrie. 1978: Furie. 1980: Home Movies. Pulsions. 1981: Blow Out. 1983: Scarface. 1984: Body Double. 1986: Mafia Salad. 1987: Les Incorruptibles. 1989: Outrages. 1990: Le Bûcher des vanités. 1992: l'Esprit de Cain. 1993: l'Impasse. 1996: Mission Impossible. 1998: Snake Eyes. 2000: Mission to Mars. 2002: Femme Fatale. 2006: Le Dahlia Noir. 2007: Redacted. 2012: Passion. 2019 : Domino - La Guerre silencieuse

C'est en 1972 que Brian De Palma, alors méconnu à l'orée de sa carrière cinématographique, décide de frapper un grand coup pour le genre horrifique avec Soeurs de Sang interdit aux moins de 18 ans lors de sa sortie tardive chez nous (1977 !). Le récit glaçant de 2 soeurs siamoises impliquées dans un meurtre d'une rare sauvagerie que la première partie nous structure avec un réalisme clinique redoutablement pervers. Le désir sexuel s'affiliant soudainement au goût du sang de la façon la plus brutale, fortuite et inconsciente. Ainsi, à travers ses thèmes favoris du voyeurisme, du désir sexuel, de l'obsession et du faux semblant, Brian De Palma nous entraîne dans une véritable descente aux enfers culminant vers une ultime demi-heure aussi traumatisante que malsaine. Le réalisateur usant d'images bougrement dérangeantes à travers ses étreintes imposées sans consentement de la victime, et par le biais d'expérimentations monochromes d'images d'archive pour susciter, ou plutôt décupler, malaise, dégoût, ad nauseam quant à l'étrange romance qui s'esquisse face à nous entre un chirurgien et sa dulcinée ébranlée d'une réminiscence chirurgicale. Margot Kidder, littéralement habitée par sa schizophrénie bicéphale demeurant tantôt terrifiante en tueuse diabolique, tantôt douce et sensuelle en maîtresse avinée d'un soir, tantôt troublante en victime démunie manipulée par un amant éperdument amoureux d'elle au point d'en omettre tout scrupule. 

Outre la science du suspense subtilement imposée en split screen auprès de la disparition du corps qu'une des voisines de l'immeuble, témoin du meurtre, tente de percer avec l'aide de 2 policiers obtus, De Palma télescope adroitement thriller et épouvante avec un art consommé du malaise viscéral quant au secret de ses soeurs siamoises dont nous ne connaitrons les véritables mobiles que lors de l'ultime demi-heure anthologique. Pour ce faire, et pour nous instiller un vertige irréductible, De Palma recourt aux images cauchemardesques ou inquiétantes, telle sa cicatrice corporelle que Daniele accuse sur le flanc tout en se culpabilisant du terrible drame dont elle demeure à la fois complice et victime si je me réfère au vrai responsable de cette romance nécrosée que De Palma ose filmer de manière crue et documentée. Typiquement la marque de fabrique des Seventies se permettant d'autre part des audaces graphiques et formelles pour mieux secouer le spectateur, tant d'un aspect psychologique que sanglant. Mais le moteur du récit davantage fascinant émane véritablement du traitement cérébral réservé aux personnages peu recommandables (mais aussi à la journaliste !) communément manipulés, drogués, hypnotisés par une liaison amoureuse dénuée d'éthique. Si bien qu'à travers le point de vue moral de la journaliste (impeccablement endossée avec aplomb et pugnacité suicidaire par Jennifer Salt au point de presque voler la vedette à Margot Kidder !), Soeurs de Sang dégage une rare intensité horrifique méphitique pour sa présence désespérément soumise et les tenants et aboutissants impartis à une gémellité pathologique. Soeurs de sang possédant notamment plusieurs grilles de lecture si j'ose dire (dont celle de la possession pourquoi pas surnaturelle !) afin de saisir le profil psychotique de ses soeurs siamoises où jalousie, absence de reconnaissance, viol, perte/trouble identitaire et possessivité en seront les catalyseurs d'une effroyable tragédie criminelle. 

Hitchcock au vitriol.
Chef-d'oeuvre mortifère d'un réalisme documenté qui n'appartient qu'à cette décennie historique, Soeurs de Sang n'a rien perdu de son aura malsaine, perverse, malaisante, nécrosée plus de 50 ans après sa sortie. Car il reste en l'état toujours aussi intense, effrayant, malaisant et aliénant à travers son imagerie horrifique que De Palma manipule au gré d'une diabolique technicité expérimentale. 

*Bruno
5èx

Ci-joint la chronique de son splendide remake: STRANGE VOMIT DOLLS: SISTERS (brunomatei.blogspot.com)

mercredi 31 août 2022

Times Square

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Allan Moyle. 1980. U.S.A. 1h51. Avec Trini Alvarado, Robin Johnson, Tim Curry, Peter Coffield, Herbert Berghof, David Margulies

Sortie salles France: 23 Septembre 1981. États-Unis : 17 octobre 1980

FILMOGRAPHIEAllan Moyle est un réalisateur, acteur, scénariste et producteur canadien, né en 1947 à Shawinigan (Canada). 1977 : The Rubber Gun. 1980 : Times Square. 1990 : Pump Up the Volume. 1992 : The Gun in Betty Lou's Handbag. 1995 : Empire Records. 1999 : New Waterford Girl. 2000 : XChange. 2000 : Jailbait (TV). 2001 : Le Piège d'une liaison (Say Nothing). 2004 : Michael Jackson : du rêve à la réalité (TV). 2006 : Weirdsville. 

"Je suis un fichu clébard. Je lèche le visage. Ou je mords la joue. J'ai aussi la rage. C'est mon cadeau pour vous. Nourrissez moi. Vous m'entendez hurler ? Je suis un fichu clébard. J'aime la chair fraîche. J'aime le danger. Alors je bave et je mords les mains des étrangers."

Parfois, il y a des OFNI surgis de nulle part qui vous abordent sur votre cheminement aléatoire pour vous cueillir par la main au moment opportun et avec l'intuition gratifiante ce que film a quelque chose a nous dire (oserait-il nous susurrer à l'oreille). Times Square est de cette race inusitée de petit film subversif de par son invisibilité chez nous et de sa faible réputation alors qu'il s'agit d'une oeuvre contestataire comme on n'ose plus en faire aujourd'hui (le séquence des téléviseurs lancés du haut des toits d'immeuble seraient sucrées de nos jours par dame censure). Brouillonne, certes, improvisée et quelque peu désordonnée (sans être péjoratif), mais tellement chaleureuse, sémillante et intègre si bien qu'elle finit par vous toucher au coeur au fil d'un récit musical davantage attachant en dépit de l'ombre de sa dramaturgie finale. Il faut dire que le duo méconnu (chez nous) Trini Alvarado / Robin Johnson fait des étincelles à travers leur spontanéité expansive, leur complémentarité amicale, leur folle escapade à se foutre du tout politiquement correct que le spectateur éprouve comme de vraies amies qu'on aimerait côtoyer à travers leur fureur irrépressible de vivre au jour le jour en toute autonomie.

Et ce en y bravant les interdits à condition toutefois de ne pas se brûler les ailes si je me réfère à la haine davantage incontrôlable de Nicky qu'elle éructe auprès d'une société grégaire réfractaire à la différence et à la tolérance. Times Square décrivant avec souci documenté (les moult figurants sont filmés dans l'improvisation) les tribulations de 2 jeunes paumées en quête de rédemption existentielle au sein d'une faune marginale plutôt amicale, décomplexée, uniforme dans leur esprit libertaire. L'une, Nicky, punkette destroy dans l'âme, l'autre, Pamela, fille de bourge d'un papa à la fois castrateur et conservateur. Ainsi, durant leur maigre séjour en psychiatrie, elles décident sur un coup de tête de quitter leur cellule médicale pour rejoindre le quartier de Times Square et décrocher quelques petits boulots du moment qu'elles puissent danser et chanter dans la liberté d'expression (de nos jours proscrite). D'autre part, une station de radio locale (dirigée par l'acteur Tim Curry !) leur prêtera main forte afin que Pam et Nicky puissent s'exprimer dans leur musicalité punk/new-wave au point de les sacraliser idoles de jeunes émules aussi assoiffées de liberté et de provocation qu'elles. On peut d'ailleurs rappeler que le réalisateur Allan Moyle abordera à nouveau tous ces thèmes susnommés d'une jeunesse malaisante 10 ans plus tard avec le cultissime Pump up the Volume


Radio Rebel.
Scandé d'une superbe BO symptomatique des années 80, avec des numéros de danse résolument stimulants (le concert bondé de citadins implanté sur le toit d'un immeuble face à une police renfrognée restera dans les esprits), Times Square est une vibrante surprise toujours plus expressive et attachante au fil d'un récit mi-figue, mi-raisin quant à l'évolution personnelle de ces anti-héroïnes en herbe. Fans de rareté indépendante adeptes de la culture punk/new-wave livrée dans l'insouciance, ce petit film plein de peps et de charme est à découvrir sans hésitation possible. 

*Bruno

jeudi 25 août 2022

Inexorable

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Fabrice Du Welz. 2021. France/Belgique. 1h38. Avec Benoît Poelvoorde, Mélanie Doutey, Alba Gaïa Bellugi, Janaïna Halloy Fokan, Anaël Snoek, Jackie Berroyer, Sam Louwyck. 

Sortie salles France: 6 Avril 2022

FILMOGRAPHIE: Fabrice Du Welz est un réalisateur et scénariste belge, né le 21 Octobre 1972. 2004: Calvaire. 2008: Vinyan. 2014: Colt 45. 2014: Alleluia. 2017 : Message from the King. 2018 : Des cowboys et des indiens : Le Cinéma de Patar et Aubier (documentaire télévisuel). 2019 : Adoration. 2022 : Inexorable. En préparation : Maldoror. 

Un choc thermique d'une intensité davantage éprouvante. Un traumatisme dont il est impossible de sortir indemne sitôt le générique clôt. Voilà ce que nous illustre sans ambages Fabrice Du Welz, réalisateur franc-tireur réfractaire au cinéma polissé et riche d'une passionnante filmo aux influences des Seventies (notamment auprès de son parti-pris de tourner - fréquemment - en 16 mm). Tant et si bien qu'Inexorable est une claque furibonde comme on en subi que trop peu dans le paysage du thriller horrifique de par son brio géométrique à instiller un climat d'inquiétude allant crescendo au point de saisir la gorge du spectateur (littéralement asphyxié) jusqu'au climax à la limite du soutenable. Et si la 1ère demi-heure nous caractérisant dans l'insouciance ses personnages accords d'une cellule familiale potentiellement unie, qui plus est accueillant à bras ouvert une jeune étrangère surgie de nulle part, Inexorable dévoile peu à peu son potentiel (psychologiquement) terrifiant en dévoilant les fêlures morales de ses protagonistes gagnés par une appréhension aliénante. Et ce en abordant les sombres thématiques de la culpabilité, de la frustration sexuelle (2 séquences torrides, contradictoires dans les ruptures de ton, demeurent particulièrement crues au point d'y provoquer la gêne), du mensonge, du faux-semblant, de la quête identitaire et du non-dit auprès de personnages tous à la fois équivoques, interlopes, dépressifs. De toute évidence, à travers son pitch que l'on voit venir à 100 kms, l'impression de déjà vu se fait rapidement ressentir alors que l'habileté de Du Welz est de nous faire progressivement omettre cette gênante impression standard en faisant perdre nos repères et la raison au gré d'une intensité anxiogène franchement malaisante, pour ne pas dire fétide, malsaine, putride qui ne nous lâchera plus d'une semelle.  


Le thriller tendu se permutant peu à peu en dérive horrifique (en éludant le plus possible la complaisance gore) même si la saturation d'éclairages oniriques nous eut déjà averti de son climat baroque adepte des ambiances cauchemardesques insidieuses (on pense même parfois à Argento et Suspiria alors que son ultime plan quelque peu onirique est un clin d'oeil patent à Possession de Zulawski). Comme quoi, auprès d'une trajectoire narrative connue, on peut encore surprendre le spectateur grâce au brio d'une mise en scène intègre au service de son atmosphère hostile et de ses personnages torturés emportés dans une spirale infernale. Le réalisateur exploitant notamment à merveille la nature si respirable et le cadre beaucoup trop vaste pour ses occupants d'une immense demeure bucolique auquel un illustre écrivain, son épouse et sa fille cohabitent dans la quiétude. La photo particulière car granuleuse étant par ailleurs fastueuse auprès de ses couleurs subtilement disparates. Et ce jusqu'à l'adoption d'un chien et de leur hospitalité pour une jeune introvertie que Du Welz a le don de nous ausculter auprès de ses expressions timorées implicitement délétères. Tous les acteurs demeurant parfaits de naturel rigoureux alors que Benoît Poelvoorde habité par ses démons inconcevables, la gueule tuméfiée, striée, fatiguée, nous réserve le rôle de sa vie (peut-être avec C'est arrivé près de chez vous si j'ose dire). Outres les prestances aussi fermes, péremptoires et véridiques de Mélanie Doutey et d'Alba Gaïa Bellugin  progressivement en opposition morale dans leur règlement de compte domestique, on reste notamment stupéfiait du jeu criant de vérité de la petite Janaïna Halloy Fokan suscitant sans fard des moments de joie expansives avant l'emprise des crises de larmes et de rébellion (sa danse improvisée sur du metal demeure anthologique !) face à une injustice que le spectateur conçoit avec plus de clarté que les personnages compromis par leur désarroi, leur doute, leur incompréhension puis leur colère haineuse (surtout le duo Marcel/Gloria). 


Possession
Grand moment de péloche marginale résolument malaisante (au point même d'influer sur notre organisme corporel pour les + sensibles dont je fais parti) par son climat dépressif de plus en plus inquiétant et terrifiant, Inexorable parvient véritablement à faire PEUR de la façon la plus absolue et insidieuse en misant principalement sur le développement cérébral des personnages torturés compromis par un horrible secret (bicéphale !). Probablement l'oeuvre la plus brutale, flippante (oubliez tous les films d'horreur innocents de cette année) et maîtrisée de ce véritable auteur que symbolise Fabrice Du Welz depuis la bombe (néophyte) Calvaire. Je précise enfin qu'afin de préserver tout effet de surprise j'ai sciemment omis quelques thèmes majeurs du script trop préjudiciables pour l'identité obscure des personnages (même si après le générique nous restons toutefois dans l'interrogation à travers ses divers niveaux de lecture). 

P.S: En dépit de son interdiction aux - de 12 ans (?!), le film est clairement destiné à un public averti. 

*Bruno

mercredi 24 août 2022

Dangereusement Votre / A View to a Kill

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de John Glenn. 1985. U.S.A/Angleterre. 2h11. Avec Roger Moore, Christopher Walken, Tanya Roberts, Grace Jones, Patrick Macnee, Patrick Bauchau, David Yip.

Sortie salles France: 11 Septembre 1985

FILMOGRAPHIE: John Glen, né le 15 mai 1932 à Sunbury-on-Thames (dans le comté de Surrey, en Angleterre), est un réalisateur anglais. 1981 : Rien que pour vos yeux. 1983 : Octopussy. 1985 : Dangereusement vôtre. 1987 : Tuer n'est pas jouer. 1989 : Permis de tuer. 1990 : Checkered Flag. 1991 : Aigle de fer 3. 1992 : Christophe Colomb : La découverte. 1995 : Épisodes de la série télévisée britannique Space Precinct, 2001 : The Point Men.

Il s'agit du dernier Bond qu'endosse Roger Moore toujours sous la houlette de John Glen, spécialiste bien habitué de la franchise puisqu'il réalisa également parmi son acteur fétiche Octopussy et le génial Rien que pour vos yeux (à mes yeux une des références de la saga pour rester diplomate). Quand bien même il mit en scène un peu plus tard Tuer n'est pas jouer et Permis de tuer avec Timothy Dalton. Ainsi, pour clore en beauté quoi de mieux que de recruter l'illustre Christopher Walken dans le rôle du mégalo Zorin délibéré à provoquer un double tremblement de terre à Sillicon Valley. Et bien que j'étais de prime abord perplexe à l'idée de voir Walken jouer dans un film de James Bond (qui plus est affublé d'une chevelure blonde), quelle ne fut ma surprise de constater que l'acteur demeure tout à fait à l'aise en propriétaire d'une obscure société industrielle n'hésitant jamais à supprimer ses rivaux, témoins gênants mais également confrères afin de parfaire son dessein cataclysmique. Particulièrement sadique donc, Christopher Walken s'en donne à coeur joie lors d'un final apocalyptique (juste avant la confrontation sur le Golden Gate !) si bien qu'il s'adonne à un véritable jeu de massacre à la fois cruel, sanglant et débridé eu égard de son rictus sardonique à supprimer ses pions sans faire preuve d'une once de vergogne. Outre la valeur sûre de ce dernier jouant de manière spontanée et décomplexée, il est entouré de l'étrange  Grace Jones. Actrice afro véritablement à part, pour ne pas dire atypique, dans sa posture musclée de féline à la fois sexy, garçonne et primitive puisque maîtresse de Zorin auquel elle semble éperdument amoureuse en accomplissant ses moult caprices. 

Quant à Roger Moore que j'ai toujours affectionné (tant auprès de la saga que de son rôle iconique dans la série Amicalement Votre), il demeure d'un héroïsme agréablement retors à se dépêtrer des dangers sans que l'on est le fâcheux sentiment d'improbabilité. Le réalisateur n'abusant point de surenchère, l'action étant toujours au fil narratif, alors que les trucages à l'ancienne sont exécutées par de véritables cascadeurs. Ainsi, là encore on reste bluffé par le réalisme spectaculaire des nombreuses séquences d'action n'ayant pas pris une ride quelques décennies plus tard. Si bien que tout ce que l'on contemple est vrai à l'époque où le numérique n'existait pas encore pour monopoliser le genre et le niveler souvent par le bas (à quelques exceptions autrement réfléchies et bien employées). Pour terminer, là ou le (petit) bât blesse émane de l'interprétation aseptique de Tanya Roberts, véritable cruche (osons l'avouer) en faire-valoir cumulant les maladresses et les cris effarouchés lorsqu'elle se compromet au danger parmi l'assistance investigatrice de 007 s'efforçant de lui sauver fréquemment la mise. Pour autant, de par son éblouissante beauté (des yeux d'émeraude sont à damner un saint !), elle ne tire pas trop Dangereusement Votre vers le bas, notamment grâce au professionnalisme de John Glenn dosant efficacement un récit bien construit au gré d'un rythme suffisamment haletant et captivant quant à sa notion latente de suspense catastrophiste.  

Un excellent divertissement donc, en bonne et due forme, peut-être même meilleur qu'à sa sortie, nostalgie aidant auprès de la génération 80 adepte de l'illusion artisanale. Car une fois de plus, ici, nous sommes constamment impressionnés par son action en règle à la fois originale, homérique et débridée. En d'autres termes, on croit à ce que l'on voit. Et puis j'allais omettre en filigrane le tube de Duran Duran, "A view too a kill" (titre d'origine du film) qui ouvre et clôt le générique de façon toujours aussi entrainante. 

*Bruno