mardi 20 septembre 2022

American Gigolo

                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Paul Schrader. 1980. U.S.A. 1h57. Avec Richard Gere, Lauren Hutton, Hector Elizondo, Nina Van Pallandt, Bill Duke

Sortie salles France: 11 Juin 1980. U.S: 8 Février 1980

FILMOGRAPHIE: Paul Schrader est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 22 Juillet 1946 à Grand Rapids (Michigan). Blue Collar: 1978. 1979: Hardcore. 1980: American Gigolo. 1982: La Féline. 1985: Mishima. 1987: Light of Day. 1988: Patty Hearts. 1990: Etrange Séduction. 1992: Light Sleeper. 1994: Witch Hunt (télé-film). 1997: Touch. 1997: Affliction. 1999: Les Amants Eternels. 2002: Auto Focus. 2005: Dominion. 2007: The Walker. 2008: Adam Resurrected. 2013 : The Canyons. 2014 : La Sentinelle. 2016 : Dog Eat Dog. 2017 : Sur le chemin de la rédemption. 2021 : The Card Counter. 


"L'amant le mieux payé d'Hollywood pris dans une affaire de moeurs et de meurtre."
42 ans ! C'est le temps qu'il m'eut fallu attendre pour découvrir (au bon moment) American Gigolo si bien que lorsque j'étais ado à l'époque de "la Cinq", le sujet sulfureux ne m'intéressait guère, avec en prime de s'y coltiner en tête d'affiche l'acteur bellâtre Richard Gere consacré du jour au lendemain star bankable à la suite de ce retentissant succès (même si en France American Gigolo ne cumule que 691 163 entrées). A titre d'anecdotes subsidiaires, on peut d'ailleurs révéler que John Travolta devait initialement camper ce gigolo bon chic bon genre qu'il refusa à la suite d'un commun accord avec son agent, faute de ses récents échecs commerciaux. Quand bien même Christopher Reeve réfuta également le rôle pour des raisons que j'ignore. A l'arrivée, et à ma grande surprise (même si je n'ai jamais vraiment douté de sa qualité cinégénique), American Gigolo est venu à moi comme par enchantement afin de bouleverser mes attentes de spectateur en total éveil. J'avoue même sans ambages, et donc le plus sincèrement, avoir reçu un coup de coeur à reluquer la quotidienneté triviale de ce gigolo vendant son corps aux femmes huppées (surtout les plus âgées !) avant d'être pris pour cible par la police à la suite d'une découverte macabre qu'il fréquenta une nuit. Histoire simpliste ok, mais d'une efficacité imparable lorsque Paul Schrader offre toute sa conviction en son personnage assez gérontophile que Richard Gere transcende à la perfection dans son profil de prostitué masculin bientôt rattrapé par une romance aléatoire (que campe divinement la trop rare Lauren Hutton exquise de sensualité, en mode ténuité réservée). 

Et pour rester honnête, je connais bien mal la filmo de Richard Gere même s'il est parvenu à me traumatiser dans l'éprouvant Hatchi. Mais je ne serai guère surpris si la plupart s'accorde à clamer qu'il s'agit ici de son meilleur rôle tant l'acteur, à la démarche distinguée si naturelle, se voue corps et âme à donner chair à son personnage illégal avec un art consommé du style et de l'aplomb. Et ce juste avant d'afficher un ton autrement tendu et renfrogné lorsque la police est sur le point de le déférer à la suite d'un complot perfide. Mais si American Gigolo m'a autant séduit et captivé en la présence symptomatique de Gere constamment dans tous les plans, c'est également à travers la capacité innée de Schrader à susciter une véritable ambiance à la fois charnelle, trouble et parfois sensiblement inquiétante à travers ses nuits récursives filmées sans complaisance dans son parti-pris d'opter pour un réalisme tantôt documenté. On peut d'ailleurs même songer à Ferrara pour certains plans urbains un tantinet glauques ou insécures et à Friedkin lors d'une séquence musicale confinée en boite de nuit "gay". Le tout étant scandé du tube "call me" de Blondie que Giorgio Moroder reprendra en intermittence lors de tonalités remixées. Quand bien même lors de moments plus opaques et anxiogènes il opte pour une musicalité électro (typique des eighties !) autrement lourde et lugubre afin de renforcer l'aspect psycho-killer de sa seconde partie thriller. 

En optant pour un 1er degré assumé dénué de prétention à dresser le portrait évolutif d'un gigolo que son entourage vénal et sournois fuira depuis l'avancement de sa culpabilité, Paul Schrader injecte une étonnante dimension humaine à son potentiel coupable que seul l'amour pourrait sauver de sa condition à la fois recluse et soumise. Tout en magnifiant en filigrane la ville insidieuse de Los Angeles du côté des quartiers branchés et bourgeois d'une haute société adepte de la coke et de la prostitution de haut standing. Impeccablement narré à travers sa façon modeste de raconter son histoire dénuée de fioritures, American Gigolo hypnotise sobrement nos sens sous l'impulsion d'un Richard Gere au diapason car littéralement habité par son rôle racoleur peu à peu en proie au doute, à la peur, à la remise en question, à la maturité. Un vrai film de cinéma donc (qu'on ne peut plus façonner de nos jours) doublé d'un film d'ambiance quasi indicible dans sa subtile disparité des tonalités contradictoires. A revoir sans l'ombre d'une hésitation puisque ce métrage plein de sobriété me semble donc inaltérable dans ma condition néophyte du 1er visionnage. Vrai classique au demeurant. 

*Bruno

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