lundi 1 août 2011

STAKE LAND


de Jim Mickle. 2010. U.S.A/Australie. 1h38. Avec Connor Paolo, Nick Damici, Michael Cerveris, Danielle Harris, Kelly McGillis...

FILMOGRAPHIE: Jim Mickle est un réalisateur américain.
2002: The Underdogs (court)
2006: Mulberry Street
2010: Stake Land

                            

Quatre ans après son premier essai superficiel mais prometteur, Mulberry Street, Jim Mickle s'inspire d'une ambiance post-apocalyptique pour retracer la destinée d'une poignée de survivants, contraints de combattre une horde de vampires et tenir tête à une secte fondamentaliste. Ou quand La Route se serait affilié avec Near Dark. 

Dans un monde à l'agonie régi par des vampires, Martin est témoin du massacre de ses parents commis par ces créatures. Il est sauvé in extremis par un briscard solitaire, voyageur autonome circulant en véhicule au hasard des routes. Ensemble, ils vont parcourir différentes contrées bucoliques jusqu'à envisager de rejoindre le canada, nouvelle terre d'accueil pour les autres survivants.

                           

Jim Mickley avait déjà séduit avec son précédant métrage, Mulberry Street, première bande fauchée, maladroite mais pleine de bonnes intentions et privilégié par des personnages à la densité humaine probante. En 2010, il rempile derrière la caméra pour s'allouer d'un budget un peu plus conséquent et d'acteurs mieux confirmés pour livrer un road movie désenchanté auquel des vampires mutants ont envahi notre monde en phase de déclin.
Avec son ambiance nonchalante continuelle, ses décors désolés de paysages naturels blafards et d'un score élégiaque aux accords de piano timoré, Stake Land joue la carte de la compassion et de la désillusion. Autant avertir de suite ceux qui s'étaient envisagés d'assister à un film d'horreur bourrin dans le simple but de choquer et divertir, même si certains moments échevelés déploient sans concession des scènes gores bien sanglantes.
Cette série B modestement réalisée compense la maigreur de son budget par une habile utilisation de ces décors décharnés accentué par un climat maussade en clair obscur superbement photographié.
En suivant le cheminement d'un duo de survivants téméraires et courageux, le réalisateur souhaite retranscrire avec réalisme et poésie funèbre une hostile aventure humaine riche en imprévus et moults dangers face à deux menaces distinctes. Mister et le jeune Martin vont devoir s'allier pour combattre de prime abord les meutes de vampires planqués à n'importe quel abri et continuer leur voie au hasard des itinéraires envisagés. La mort putride suinte son odeur nauséeuse dans l'atmosphère impure, des cadavres calcinés jonchent les trottoirs de villages fantômes où certains survivants retranchés dans leur foyer tentent encore de repousser l'antagoniste fétide, incarnation du Mal occulte. Durant leur trajet, nos deux fuyards vont faire la rencontre de quelques quidams esseulés avec qui ils vont s'unir pour faire un bout de chemin commun. En prime de la menace perpétuelle des créatures voraces de la nuit, ils vont également devoir faire face à une communauté fondamentaliste fustigeant la vie humaine et ses voyageurs égarés qui osent empiéter sur leur territoire. Dès lors, le danger omniprésent est incessamment provoqué par notre groupe de fuyants, dépêchés de retrouver une terre nouvelle: le Canada.

                             

Avec une louable attention sur l'humanité de ses personnages, accentuée par la prestance tempérée de comédiens à la trogne naturelle,  Jim Mickle s'attarde avec empathie sur le destin de ces survivants qui iront jusqu'au bout de leur ambition pour retrouver un semblant de vie un peu plus paisible et moins délétère. La narration simple et sans surprise réussit pourtant à séduire dès son cruel préambule (les parents sacrifiés) et maintenir l'intérêt par la caractérisation des protagonistes. En intermittence, le réalisateur n'oublie pas pour autant d'accentuer un rythme plus frénétique émaillé de quelques scènes-chocs techniquement bricolées mais adroites et assez bien maîtrisées (en dehors de la vaine représaille d'un vampire vindicatif, ancien membre de la secte religieuse). On peut être quelque peu rebuté par le look insalubre des vampires monstrueux, sortes de mutants vulgairement burinés par un faciès défiguré couleur charbonnée. Mais leur esprit carnassier et la sauvagerie à laquelle ils font preuve pour décimer leur proie impressionne le spectateur convaincu de son caractère surnaturel. Mais c'est surtout son ambiance apocalyptique dans le sillage du superbe film, La Route, qui réussit facilement à immerger son public fidèlement rattaché au destin précaire de nos héros lamentés.
En prime, le portrait établi envers le jeune Martin (interprété par l'attachant Connor Paolo), orphelin endeuillé mais furtivement entraîné par son mentor chevronné, est une forme de parcours initiatique au vu de l'évolution finale de sa personnalité épaulée par une nouvelle recrue impromptue. Alors que son comparse éprouvé par ce climat morbide semble épris d'une autonomie drastique pour fuir égoïstement les régions contaminées, tel un nouveau fantôme errant. 

                          

Totalement orienté sur la dimension humaine de ces personnages chétifs autant que pugnaces, Stake Land traite fatalement de l'espoir, du courage et de l'union fraternelle pour tenter d'échapper à un monde en dégénérescence. De surcroît, si la violence qui en résulte engendre la violence, elle forge l'esprit devenu inflexible de celui qui a tenté de l'appliquer au nom de sa propre survie. Traversé de quelques scènes chocs spectaculaires, cette série B à la mélancolie prégnante réussit à toucher par l'amertume de son sujet. Un tableau noir dédié à l'humanité de notre civilisation davantage déshumanisée quand la fin du monde nous laisse songeur face à l'incertitude.

01.08.11
Bruno Matéï.

                                       

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