"Quand on aime, on aime toujours trop". "Quand on aime on voit les belles choses".
samedi 30 juillet 2011
LEGITIME DEFENSE
de Pierre Lacan. 2010. France. 1h25. Avec Jean-Paul Rouve, Claude Brasseur, Olivier Gourmet, Marie Kremer, Gilles Cohen, Michel Ardouin, Franck Tiozzo
Sortie en salle le 16 Mars 2011.
FIMOGRAPHIE: Pierre Lacan est un acteur, scénariste et réalisateur français
1999: Combien tu m'aimes (court)
2000: Sommeil Profond (court)
2002: Les Corsps solitaires (court)
2004: Frédérique amoureuse (court)
2011: Légitime Défense
Hommage subjectif d'un puriste amateur de polar.
Pour son premier long-métrage, tiré du roman Terminus Plage de Alain Wagneur, Pierre Lacan renoue avec le polar des années 80 avec un ton réaliste sans esbroufe, dans le sillage du cinéma de Alain Corneau, Pierre Granier-Deferre ou encore Maurice Pialat. Il ose confier à son interprète principal, Jean Paul Rouve, un rôle dramatique à contre-emploi d'une surprenante sobriété naturelle.
Un père de famille inhibé va se retrouver embarqué dans une intrigue criminelle depuis que son paternel, ancien détective privé, a mystérieusement disparu. Recherché par une bande de malfrats véreux, il va devoir faire face à de lourdes responsabilités et découvrir le passé d'un père corrompu.
Baignant dans une atmosphère réaliste et blafarde, Légitime Défense est un louable polar qui tente de renouer avec les ambiances naturalistes d'antan dans une mise en scène froide, sans fioriture, d'une violence tranchante, rehaussant ainsi son caractère austère et abrupt.
L'histoire morose de ce novice père de famille qui va au fil de son cheminement découvrir le sombre passé de son géniteur putassier ose ancrer un récit tortueux, laissant large part au profil de personnages indociles anti conventionnels. Des protagonistes en apparence aimables et dociles mais bonimenteurs, sans scrupule, baignant dans l'illégalité au profit de l'orgueil et la cupidité. Le trio de mafieux incarné par des acteurs au charisme prégnant exacerbe aussi la tension entretenue durant la conduite narrative avant leurs accès de violence incontrôlée d'une brutalité laconique (la cause animale est aussi largement réprimandée !).
Le scénario à l'intérêt constant est suffisamment ordonné pour surprendre en intermittence dans les rebondissements assénés alors que le personnage principal va lentement s'octroyer d'un certain aplomb au fil des déconvenues endurées pour se transformer contre son gré en héros vaillant impromptu. Ce qui permet de culminer vers un point d'orgue haletant, couillu (la scène du nouveau-né en offusquera plus d'un !) particulièrement éprouvant dans les exactions tolérées d'un mafieux cynique prêt à tout pour s'approvisionner d'un butin fructueux.
Il y avait de quoi être dubitatif face au choix fortuit d'un acteur de la trempe de Jean-Paul Rouve, habitué aux rôles de comique saugrenu dans des comédies légères bon enfant. Il trouve ici une composition naturelle surprenant de tempérance dans son esprit flegmatique et semble même rappeler dans sa physionomie candide un monstre du cinéma, Patrick Dewaere. Peu affirmé, discret et effacé face à un monde d'adultes mécréants, il endosse au fil de son initiation une personnalité davantage valeureuse face aux révélations dramatiques qui empiètent sans outrance l'intrigue. On retrouve avec plaisir l'ancien briscard Claude Brasseur endossant le personnage solitaire d'un retraité alcoolique entouré d'animaux de compagnie dans une maison précaire. Bouffi, buriné et lassé d'une vie monotone, son aide fraternelle (implicitement suicidaire) parmi notre héros perplexe amplifie l'ambiance nonchalante, grisonnante qui émane de son identité meurtrie. Enfin, Olivier Gourmet est absolument remarquable dans celui du leader crapuleux sans aucune éthique pour parvenir à ses fins dans la quête frauduleuse d'une valise contenant un budget de 900 000 euros. Impassible, narquois et insidieux, il impressionne avec véracité innée un personnage ordurier avec une foi inébranlable.
Correctement réalisé malgré une inexpérience dans l'action spectaculaire (la course poursuite automobile horriblement mal filmée est dévalorisée par un montage hasardeux), caractérisé par de formidables acteurs à la trogne inflexible, Légitime Défense séduit et surprend dans son caractère rugueux, éludé d'ornement. Le genre de petit polar passé inaperçu qui mérite pourtant que l'on s'y attarde tant il renoue avec respect et sincérité à une époque révolue de film noir ancré dans l'authenticité austère et la verdeur succincte. Et on peut dire que Jean Paul Rouve détonne admirablement dans un rôle en demi-teinte de père discrédité renouant favorablement avec dignité avec l'amour parental.
30.07.11
Bruno Matéï.
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