jeudi 30 juin 2016

GINGER SNAPS. Prix Spécial du Jury, Toronto 2000.

                                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

de John Fawcett. 2000. U.S.A. 1h48. Avec Emily Perkins, Katharine Isabelle, Kris Lemche, Mimi Rogers, Jesse Moss, Danielle Hampton

Sortie salles Canada: 11 Mai 2001. Inédit en salles en France.

FILMOGRAPHIE: John Fawcett est un réalisateur américain, né le 5 Mars 1968 à Edmonton, Alberta, Canada. 1997: The Boys Club. 2000: Ginger Snaps. 2001: Lucky Girl (télé-film). 2005: The Dark. 2008: The quality of life. 2006: Issue Fatale.


Inédit en salles en France et directement sorti en Dvd en catiminie, Ginger Snaps aborde le thème de la lycanthropie avec une rare intelligence pour son traitement des personnages. Celui de deux soeurs inséparables partagées entre un goût pour le morbide (elles se mettent en scène pour exprimer diverses tentatives de suicide) et un désir de séduction au prémices de leur puberté. Sauvagement agressée en pleine nuit par un loup-garou à proximité d'un parc, Ginger change peu à peu de comportement face à l'impuissance de sa soeur cadette. Communément soudées par les liens de la fratrie, Brigitte tente de trouver une solution pour enrayer le mal qui ronge Ginger. Si sur le papier, le scénario sans surprises laisse craindre une resucée convenue du film de loup-garou, John Fawcett en décortique une métaphore sur la crise adolescente et le passage à l'âge adulte d'un point de vue féminin. Un parti-pris rarement abordé chez la thématique lycanthrope permettant au récit de renouveler les clichés même si on peut prêter une certaine allusion au personnage infortuné de Carrie de De Palma (notamment lorsque Ginger observe pour la première fois ses menstruations depuis sa transformation corporelle).


Avec tact et une sobre tendresse pour dresser les portraits fragiles de deux ados rebelles, Ginger Snaps adopte une tournure documentée afin de mettre en exergue une tragédie horrifique bâtie sur l'étude de caractère. En portant un regard scrupuleux sur le malaise adolescent et l'angoisse de la mort du point de vue de deux soeurs marginales, cette série B aux allures de télé-film témoigne d'une surprenante vigueur psychologique pour la descente aux enfers d'ados en crise identitaire. Tant pour la victime en proie à des pulsions sanguinaires et sexuelles incontrôlées que du témoignage de sa soeur complice, bouleversée à l'idée d'endurer sa lente mutation et s'efforçant de trouver un antidote. Formidablement incarné par deux actrices juvéniles épatantes de tempérament dans leur complicité affectée et véreuse (notamment leur collaboration meurtrière), Emily Perkins et Katharine Isabelle portent le film à bout de bras avec un naturel expansif. Outre le réalisme du contexte horrifique aussi improbable, on est également surpris de la véracité des crimes perpétrés avec brutalité par une créature indomptable ! Les effets spéciaux artisanaux s'avérant par ailleurs convaincants pour donner chair au loup-garou quand bien même les effets gores insistent à décrire l'agonie haletante des victimes sans un chouia de complaisance.


Délibéré à transcender l'objet de série B sous couvert d'une passionnante étude de caractères, John Fawcett en extrait un documentaire sur l'émoi adolescent sous l'impulsion de deux comédiennes en roue libre. On peut donc aujourd'hui considérer sans réserve Ginger Snaps comme un classique moderne à conserver auprès de La Nuit du Loup-garou, Hurlements et le Loup-garou de Londres

BM. 3èx

Récompenses: Prix spécial du jury, lors du Festival international du film de Toronto en 2000.
Prix du meilleur film, meilleure actrice pour Emily Perkins et meilleurs effets spéciaux, lors de la Semaine du cinéma fantastique de Málaga en 2001.
Prix du meilleur film sorti en DVD, par l'Académie des films de science-fiction, fantastique et horreur en 2002.
Prix du meilleur film, lors des International Horror Guild Awards en 2002.


mardi 28 juin 2016

SALUT L'AMI ADIEU LE TRESOR


                                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"Chi trova un amico, trova un tesoro" de Sergio Corbucci. 1981. Italie. 1h44. Avec Bud Spencer, Terence Hill, Sal Borgese, John Fujoka, Luise Bennett, Terry Moni Papuana.

Sortie salles France: 16 Décembre 1981. Italie: Décembre 1981

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Sergio Corbucci est un réalisateur et scénariste italien, né le 6 Décembre 1927 à Rome, décédé le 1er Décembre 1990.
1962: Romulus et Remus. 1963: Danse Macabre (co-réalisé avec Antonio Margheriti). 1966: L'Homme qui rit. 1966: Django. 1966: Ringo au pistolet d'or. 1966: Navaja Joe. 1968: Le Grand Silence. 1969: Le Spécialiste. 1970: Companeros. 1972: Mais qu'est ce que je viens foutre au milieu de cette révolution ? 1978: Pair et Impair. 1980: Un Drôle de flic. 1981: Salut l'ami, adieu le trésor. 1989: Night Club.


Gros succès en salles à sa sortie, Salut l'ami adieu le trésor est aujourd'hui l'occasion pour moi de rendre hommage à la disparition de Bud Spencer avec un brin de nostalgie depuis que j'ai eu l'opportunité de découvrir le film dans une salle de ciné. Accompagné de mon père un samedi après-midi à l'Apollo Lens, c'est un souvenir d'ado mémorable que je garde en mémoire quand bien même aujourd'hui je le redécouvre pour la 3è fois avec un enthousiasme ému. Tant pour la perte de l'acteur de seconde zone aussi modeste qu'introverti que pour la disparition d'un genre de comédie épique dont les italiens s'étaient faits une spécialité. Car il faut l'avouer, les films du duo Bud Spencer / Terence Hill ne brillaient pas par leur subtilité pour provoquer le rire mais fonctionnaient plutôt sur leur simplicité narrative et surtout sur la bonhomie de nos "gros durs" avec une tendresse et une sincérité qu'on ne retrouve plus (ou rarement) aujourd'hui.

                                       

A la recherche d'un trésor dans une île du pacifique, Alan (Terence Hill) s'invite en passager clandestin sur le bateau de Charlie O'Brien (Bud Spencer). Après leurs récurrentes mésententes qui leur valu d'abandonner le navire, nos deux touristes sont contraints de rejoindre à la nage l'île autrefois résidée par l'armée japonaise de l'après-guerre. Au moment d'amorcer leur chasse aux trésors, ils sont accueillis par les natifs indigènes alors que des pirates et gangsters vont rapidement s'interposer pour la quête du magot. Parmi l'insolence de quiproquos, gags et rebondissements improbables, Salut l'ami, adieu le trésor compte beaucoup sur l'extravagance puérile des personnages secondaires et sur l'inimitié amicale du duo héroïque pour susciter la réjouissance. Terence Hill invoquant un personnage espiègle et chafouin afin de titiller les nerfs de son partenaire autonome ! Fort d'un rythme nerveux ne cédant jamais à l'ennui, l'intrigue alterne les rivalités avec des antagonistes forts en gueule afin que nos héros inflige mandales et grosses baffes avec une inventivité insatiable. Dépaysant par son climat tropical solaire et entêtant sous l'impulsion ringarde d'une partition antillaise, Salut l'ami, adieu le trésor dégage un charme aussi folingue que surréaliste sous l'autorité intègre de Sergio Corbucci (cinéaste notoire affichant à son curriculum les signatures de Django et du Grand Silence !).


Spectacle familial débordant de fantaisie sous le ressort d'une naïveté bon enfant, Salut l'ami, adieu le trésor constitue une perle Bis de la comédie italienne que le duo légendaire Bud Spencer / Terence Hill est parvenu à immortaliser dans leur concours de baffes décoiffantes !

A Bud Spencer (31.10.29 / 27.06.16)

lundi 27 juin 2016

Frogs

  
                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de George Mc Cowan. 1972. U.S.A. 1h32. Avec Ray Milland, Sam Elliott, Joan Van Ark, Adam Roarke, Judy Pace, Lynn Borden, Mar Mercer, David Gilliam.

Sortie salles France: 2 Octobre 1974. U.S: 10 Mars 1972

FILMOGRAPHIE PARTIELLE: George Mc Cowan est un réalisateur canadien né le 27 Juin 1927, décédé le 1er Novembre 1995. 1971: Face-Off. 1972: Frogs. 1972: La Chevauchée des 7 mercenaires. 1974: The Inbreaker. 1974: To kill the King. 1976: Shadow of the Hawk. 1979: Alerte dans le cosmos. 1990: Sanity clause (télé-film).


Série B horrifique réalisée par un artisan de séries TV (l'île Fantastique, Drôle de dames, Shannon, l'Homme à l'orchidée, Starsky et Hutch, Cannon, les Envahisseurs, etc...), Frogs emprunte la thématique des animaux meurtriers sous couvert de manifeste anti-pollution (les pesticides employées ici à outrance par un propriétaire cossu). D'une simplicité narrative, de riches résidents d'une bâtisse insulaire se voient agressés par des animaux à proximité de leurs étangs et de la forêt. Quand bien même un journaliste écolo tente de leur prêter main forte malgré l'intransigeance du patriarche à ne pas céder à l'affolement. Avec son affiche cartoonesque aussi grotesque que pittoresque, Frogs cultive l'esprit Bis d'un nanar ricain assez fallacieux. Dans la mesure où malgré leur omniprésence à l'écran (croassement rébarbatif à l'appui !), ni grenouilles ni crapauds éprouvent une pulsion meurtrière si on excepte l'ultime séquence lorsqu'ils se réunissent en masse pour provoquer une attaque cardiaque chez le propriétaire. Outre cet écart de conduite, nos batraciens occupent leur temps à observer inlassablement les exactions meurtrières de leurs congénères. 


A savoir, serpents, lézards, crocodiles et volatiles communément complices pour se venger de la morale irrévérencieuse de l'homme. Si l'intrigue sans surprises tourne à vide et que la direction d'acteurs est inégale de par l'aspect attachant des personnages parfois crétins dans leur maigre effort à repousser la menace, les séquences chocs qui empiètent le récit font preuve d'une certaine vigueur dans leur mise à mort à la fois viscérale et malsaine. Non pas que le cinéaste ne cède aux effusions de sang mais qu'il insiste à décrire de manière documentée l'agonie cruelle des victimes lorsqu'elles sont sauvagement prises à parti avec les reptiles. Et à ce niveau on ressent bien la patine  insalubre d'une oeuvre plutôt réaliste (tous les animaux, omniprésents et repoussants, sont authentiques !) symptomatique de l'époque des Seventies. En prime, le cadre insécure de l'environnement naturel dans lequel évoluent les animaux insuffle un climat hostile assez envoûtant (bruitages dissonants à l'appui fonctionnant à merveille). Si 1 ou 2 attaques chocs sombrent un peu dans le ridicule, faute du comportement incohérent ou ridicule des protagonistes (une des victimes s'efforçant maladroitement de se défendre contre un alligator au sein d'un étang, une autre se vautrant bêtement dans une fumée toxique au lieu de s'en écarter !), les animaux charismatiques, car bien communément réels, provoquent terreur et répulsion viscérale prégnantes !


Day of the Animals
Série B mineure à la réalisation stérile et à la distribution timorée bien qu'attachante (Ray Milland  cabotine aimablement dans sa prestance patriarcale) mais néanmoins rehaussée d'un climat anxiogène constamment inquiétant, Frogs constitue un fort sympathique divertissement pour les amateurs de relique bisseuse à l'aura génialement licencieuse (marque de fabrique des Seventies pour le genre).  

*Bruno
24.01.23. 5èx
27.06.16
10.03.10

vendredi 24 juin 2016

SEVERANCE

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site aureliehuet.com 

de Christopher Smith. 2006. Angleterre. 1h30. Avec Danny Dyer, Laura Harris, Tim McInnerny, Toby Stephens, Claudie Blakley, Andy Nyman.

Sortie salles France: 18 Octobre 2006. Angleterre: 25 Août 2006

FILMOGRAPHIE: Christopher Smith est un réalisateur et scénariste britannique, né le 16 Août 1970 à Bristol. 2004: Creep. 2006: Severance. 2009: Triangle. 2010: Black Death. 2011: Paris I'll Kill You. 2014: Get Santa.


Empruntant le schéma du survival dans la tradition du genre (chasse à l'homme en milieu forestier), le réalisateur british Christopher Smith (révélé par l'excellent Creep !) parvient à contourner les clichés par le biais d'un humour sardonique particulièrement féroce. Car outre les situations aussi extravagantes qu'inventives et les comportements décalés des personnages, Severance se laisse également influencé par le Tortur'Porn (en vogue) avec un réalisme viscéral. Sept managers partent en week-end pour une partie de Pain-ball en pleine forêt hongroise. Epiés par une présence invisible et sévèrement mis à mal par moult pièges implantés dans les sentiers, ils deviennent la cible d'un groupuscule terroriste délibéré à les pourchasser jusqu'à ce que mort s'ensuive. Satire du milieu de l'entreprise auquel 7 employés n'auront de cesse de tester leur performance morale et physique avec un esprit d'équipe anarchique, Severance amorce la descente aux enfers d'un jeu de massacre où les coups les plus couards seront permis. En comptant notamment sur la spontanéité attachante des personnages (notamment la romance improvisée entre le duo héroïque), Christopher Smith divertit généreusement avec l'habileté d'un script détonnant embrayant avec la montée en puissance d'un rythme homérique. Ce dernier exploitant également habilement les lieux-clos et son espace naturel pour les allés et venus de nos touristes s'efforçant de contourner la mort à travers les chausse-trapes et courses-poursuites.


En dépit de la modestie du réalisateur à façonner un divertissement de série B, Severance constitue un spectacle retors constamment plaisant et haletant dans son lot de gags sardoniques et d'ultra-violence vitriolée.  

jeudi 23 juin 2016

INCASSABLE

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site fmaker.unblog.fr

"Unbreakable" de Night M. Shyamalan. 2000. U.S.A. 1h47. Avec Bruce Willis, Samuel L. Jackson, Robin Wright Penn, Spencer Treat Clark, Charlayne Woodard, Eamonn Walker, Leslie Stefanson

Sortie salles France: 27 Décembre 2000. U.S: 22 Novembre 2000

FILMOGRAPHIE: M. Night Shyamalan est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur américain, d'origine indienne, né le 6 Août 1970 à Pondichéry.
1992: Praying with Angers. 1998: Eveil à la vie. 1999: Sixième Sens. 2000: Incassable. 2002: Signs. 2004: Le Village. 2006: La Jeune fille de l'eau. 2008: Phenomènes. 2010: Le Dernier maître de l'air. 2013: After Earth. 2015: The Visit.


Un an après le succès notoire du 6è SensM. Night Shyamalan recrute à nouveau Bruce Willis pour le glisser dans la peau d'un super-héros hétérodoxe. Car à travers ce thème mythologique, l'intrigue audacieuse fait fi de surenchère homérique afin de privilégier la dimension torturée de deux personnages en discorde morale. David Dunn poursuivant durant son cheminement existentiel une quête identitaire sous l'influence d'un féru de bande dessinée. Miraculeusement indemne après un tragique accident ferroviaire, il rencontre Elijah Price, artiste peintre de BD atteint d'une maladie rare, l'ostéogenèse (grande fragilité des os dû à une anomalie congénitale). Ce dernier tente de convaincre David, agent de sécurité dans un stade de foot, qu'il est affublé de pouvoirs surhumains à l'instar d'un super-héros. Réfutant cette théorie improbable mais hanté par son don pour la survie, David ne cesse de se remettre en question parmi le témoignage de son fils toujours plus intrigué par sa santé prospère. Mais comme tous les personnages super-héroïques, ce dernier pâti d'un point faible qu'Elijah va tenter d'élucider.


Récit d'anticipation émaillé de rebondissements (l'évolution morale de David et Elijah donne lieu à une complicité ambivalente !) et de plages d'intimité d'une pudeur fragile (la complicité autant amicale que paternelle de David avec son fils, ses rapports conjugaux en quête de réconciliation), Incassable prend le contre-pied du divertissement lambda pour transcender le mythe du super-héros avec sobriété imperturbable. Dénué d'aucune prétention, M. Night Shyamalan exploite tous les codes du genre avec une rare subtilité (la prise de conscience surhumaine de David avec la séance des haltères) tout en offrant au passage une déclaration d'amour à la bande dessinée (le générique introductif, l'analyse d'un dessin pictural !). A l'aide d'une réalisation alambiquée, le cinéaste prend son temps pour peaufiner un récit diaphane à travers les profils contrariés de personnages en proie à la délivrance. Réflexion sur l'identité, la rédemption, le but de notre destinée mais aussi celui du sacrifice (sur ce dernier terme, le point de vue est établi par le "méchant"), Incassable oppose les sentiments contradictoires de vengeance et de justice avec singularité. Shyamalan multipliant les rivalités psychologiques avec un humanisme fragile plutôt que la tradition des confrontations musclées (un seul pugilat est à relever !). Tant pour la remise en question de David hanté par sa condition surhumaine (une tare l'empêchant de façonner sa vie de famille), la posture admirative du fils puis sa crise morale à vouloir démasquer l'identité de son père, que de la condition versatile d'Elijah depuis son handicap congénital.


Avec le parti-pris de déconcerter le grand public, M. Night Shyamalan a pris d'énormes risques à traiter sobrement de l'univers des super-héros et de la bande dessinée en misant essentiellement sur la dimension humaine de personnages partagés entre révolte et reconnaissance ou quête de rédemption et quiétude existentielle. Outre le brio technique du cinéaste conteur, on peut également prôner le jeu flegme des comédiens communément impliqués dans la vigueur émotionnelle. Déroutant mais passionnant sous le pilier de ses thèmes universels.  

2èx

mercredi 22 juin 2016

LA SECTE SANS NOM. Prix du jury, prix de la critique, prix du jury jeune et Prix de la découverte, Gerardmer 2000.

                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site papystreaming.com

"Los sin nombre" de Jaume Balagueró. 1999. Espagne. 1h39. Avec Emma Vilarasau, Karra Elejalde, Tristán Ulloa, Toni Sevilla, Brendan Price, Jordi Dauder

Sortie salles France: 23 Août 2000. Espagne: 19 Novembre 1999

FILMOGRAPHIE: Jaume Balaguero est un réalisateur et scénariste espagnol d'origine catalane, né le 2 Novembre 1968 à Lérida.
1999: La Secte sans Nom. 2002: Darkness. 2005: Fragile. 2006: A Louer (moyen métrage). 2007: REC (co-réalisé avec Paco Plaza). 2009: REC 2 (co-réalisé avec Paco Plaza). 2011: Malveillance. 2014: REC Apocalypse.


Premier long-métrage oh combien éprouvant du prodige Jaume Balaguero, la Secte sans nom fut salué à travers le monde par de multiples récompenses. En témoigne son accueil reçu en France lorsqu'il s'est vu attribué le Prix du jury, le Prix de la Critique, le Prix du Jury Jeune et le Prix de la Découverte Ciné-Live au Festival de Gérardmer. Thriller horrifique sans doute influencé par Rosemary's Baby, Seven et le Silence des Agneaux, la Secte sans nom fait parti de ses rares métrages où l'atmosphère putride et la terreur cérébrale nous saisissent à la gorge sans jamais lâcher prise ! A l'instar de son prélude auquel une fillette tuméfiée est retrouvée vitriolée après avoir été plongée dans un bain d'acide ! Une séquence morbide d'un réalisme halluciné d'autant plus dérangeante que le symbole candide est immolé au nom d'une confrérie néo-nazie.


Cinq ans après ce tragique évènement, Claudia reçoit un appel de sa défunte fille lui suppliant de partir à sa recherche. Oh départ dubitative mais gagnée par la curiosité et une soif de vérité, elle se lance à sa recherche avec l'aide d'un ex policier. Au même moment, un journaliste enquête en parallèle pour tenter de lever le voile sur ces sinistres disparitions d'enfants auquel Santini et un médecin nazi en seraient les principaux commanditaires. Prenant pour thème le satanisme (même si le mot n'est jamais ou si peu prononcé me semble t'il !), la pédophilie et le snuff movie, La Secte sans nom baigne dans un climat malsain difficilement respirable. Epaulé d'une photo désaturée et de décors désaffectés où plane une ombre hostile, l'ambiance poisseuse que Jaume Balaguero façonne scrupuleusement nous magnétise l'esprit sans complaisance. En dépit d'une intrigue complexe conçue comme un puzzle à devinettes, le cinéaste sème doute, trouble et confusion pour mieux nous plonger dans le désarroi sous l'impulsion délétère d'un ésotérisme parareligieux en concertation avec le nazisme. Cette secte ayant pour mission de synthétiser la pureté du mal autour des personnages martyrs d'Angela et de sa mère. Remarquablement interprété, les comédiens s'investissent dans leur rôle avec une mine aussi contrariée que sentencieuse. Les protagonistes avides de vérité s'efforçant de résoudre l'énigme avec une foi mêlée d'appréhension et de désespoir.


Une pellicule impure habitée par le Mal. 
Profondément malsain, trouble, dérangeant et réellement terrifiant lors de moments d'intimité chargés d'ambiguïté (l'aparté avec Santini, la posture gouailleuse et viciée du gourou), La Secte sans nom laisse des séquelles psychologiques sitôt le générique écoulé. De par son effrayante conclusion bâtie sur le nihilisme et son réalisme cru conféré aux faits de société tels que les enlèvements d'enfants et le satanisme. Epaulé d'une bande-son stridente, il en émane un chef-d'oeuvre du genre d'une angoisse dépressive dans sa manière capiteuse de susciter l'émoi au coeur d'un surnaturel laissé en suspens. 

3èx

Récompenses: Meilleure actrice pour Emma Vilarasau, meilleure photo pour Xavi Giménez au Festival international du film de Catalogne de Sitges. Prix du meilleur film international au festival FanTasia de Montréal.
Prix du jury, prix de la critique, prix du jury jeune et Prix de la découverte Ciné-Live au festival de Fantastic'Arts 2000 de Gérardmer.
Corbeau d'or au Festival international du film fantastique de Bruxelles.
Prix de la critique et prix du meilleur réalisateur du meilleur film international fantastique au Fantasporto à Porto.

mardi 21 juin 2016

SSSSnake

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Sssssss" de Bernard L. Kowalski. 1973. U.S.A. 1h39. Avec Strother Martin, Dirk Benedict, Heather Menzies-Urich, Richard B. Shull, Tim O'connor.

Sortie salles France: 8 Mai 1974

FILMOGRAPHIE: Bernard L. Kowalski est un réalisateur et producteur américain, né le 2 Août 1929 à Brownsville, Texas, décédé le 26 Octobre 2007 à Los Angeles, Californie. 1958: Hot car girl. 1958: Night of the Blood Beast. 1959: Attack of the Giant Leeches. 1959: Blood and Steel. 1961: Las Vegas Beat. 1968: Krakatoa à l'est de Java. 1969: Stiletto. 1970: Macho Callahan. 1971: Panique en plein ciel (télé-film). 1971: Black Noon (télé-film). 1972: Women in chains (télé-film). 1972: Two for the Money (télé-film). 1972: The New Healers (télé-film). 1972: The Woman Hunter (télé-film). 1973: SSSnake. 1975: The Supercops (télé-film). 1976: Risko. 1977: Flight to holocaust (télé-film). 1978: The Nativity (télé-film). 1979: Marciano (télé-film). 1980: Nick and the Dobermans (télé-film). 1980: Turnover Smith (télé-film). 1980: Patrouille de nuit à Los-Angeles (télé-film). 1983: Johnny Blue (télé-film). 1988: Miracle at Beekman's Place (télé-film). 1989: Nashville Beat (télé-film).

                                            

Autrefois inédit en Vhs et mais diffusé à l'époque sur la chaîne TV6 au coeur des années 80, SSSSnake marqua une génération de téléspectateurs pour ceux ayant eu l'opportunité de le découvrir un dimanche soir. Réalisateur prolifique ayant aussi bien oeuvré au cinéma qu'à la TV (on lui doit des épisodes de Magnum, K2000, Supercopter, Tonnerre de Feu, Mike Hammer, Simon et Simon, les Petits génies, Chips, Barreta, etc...), Bernard L. Kowalski réalise en 1973 une série B horrifique plutôt efficace par son rythme soutenu largement rehaussé du réalisme documenté imparti aux reptiles. Car comme le souligne son avertissement liminaire, tous les serpents sont bel et bien d'authentiques spécimens ramenés de Bangkok (les Cobras royaux) et de Singapour (le Python) et non de vulgaires effets spéciaux façonnés à base de prothèses et latex. 155 étaient d'ailleurs présents sur le tournage dont la moitié venimeux ! Quant à la métamorphose de David en reptile humain, si les effets cheap peuvent timidement prêter à sourire, le réalisme imparti à sa souffrance physique (râles d'agonie à l'appui !) finit rapidement par provoquer l'effroi avec une empathie teintée de désespoir. Certaines séquences fortement dérangeantes insufflant d'ailleurs un climat résolument malsain, tant pour la déchéance humaine des sujets (le héros en mutabilité puis celui exposé dans un cirque !) que du combat réalisé sans trucage entre une mangouste et un cobra royal ! Ainsi, en fustigeant la moralité du cinéaste, on peut donc se scandaliser de cette éventuelle maltraitance animale !

                                         

Prenant pour thème le savant fou délibéré ici à expérimenter du venin reptilien sur un cobaye humain au profit de notre survie (c'est à dire s'immuniser contre la pollution, les fléaux, la famine et l'holocaust), SSSnake emprunte le schéma classique d'une série B horrifique à l'aura de souffre perméable. De par ces quelques situations et clichés éculées (le rival aux gros bras molestant la tranquillité du couple avant une riposte punitive) et ses séquences chocs censées provoquer l'effroi (l'agression sous la douche puis celle dans la cave), SSSnake ne peut laisser indifférent l'amateur de déviance horrifique. Et en dépit de son cheminement inévitablement prévisible entrecoupé d'une situation sentimentale censée dramatiser la romance (la fille du docteur ne doit pas avoir de rapport sexuel avec David au risque d'être contaminée !), SSSSnake insuffle un suspense anxiogène quand au sort de ses amants (sobrement incarnés par Dirk Benedict et Heather Menzies-Urich) soumis à l'influence paternelle de Stoner. Ce dernier rivalisant de cynisme et sournoiserie à parfaire ses expérimentations inhumaines après avoir osé improviser une vendetta meurtrière. Tout un programme expéditif donc dénué de moralité. Strother Martin endossant avec charisme l'archétype du savant faussement affable habité d'un dessein littéralement exubérant pour notre grand bonheur de récit vrillé. Si la première partie n'apporte pas grand chose à l'évolution du récit (en dépit des enjeux humains pour l'idylle du couple), les personnages s'avèrent suffisamment attachants et la mise en scène assez adroite, notamment lorsqu'elle s'efforce de crédibiliser numéros d'exhibition et expérimentations avec les reptiles. Mais c'est lors de son second acte que SSSSnake renchérit dans l'effroi viscéral avec la condition torturée de David réduit à l'état de Cobra royal ! La encore, les effets spéciaux artisanaux parviennent sobrement à transcender l'improbable en insistant sur la dimension humaine de la créature soumise. Le final franchement malsain et audacieux s'avérant par ailleurs d'une grande cruauté dans son refus de compromis, sachant que l'image se fige sur un hurlement insoutenable.

                                           

En dépit de son aspect télévisuel (non dénué de charme) et du manque d'ambition d'un concept aussi saugrenu que débridé (Bernard L. Kowalski survole à mon sens le potentiel de son intrigue), SSSSnake parvient sans peine à fasciner, terrifier, révulser et impressionner par son climat malsain où (l'omniprésence) de réels reptiles se prêtent à la complicité des comédiens avec troublante hostilité ! A l'instar du combat final imparti entre le savant et le cobra domestique. Une authentique perle culte donc rehaussée d'une aura de soufre toujours plus tangible (la dernière demi-heure est immanquable) si bien qu'il m'a aujourd'hui beaucoup plus impressionné que lors de sa diffusion TV dans les années 80. 

*Bruno
02.11.22
21.06.16

"Tous les reptiles montrés dans ce film sont réels. Les cobras royaux ont été importé de Bangkok, le python de Singapour. Nous souhaitons remercier l'équipe et les acteurs pour leur courage... car ils ont été exposés à des conditions très dangereuses."

jeudi 16 juin 2016

EMPRISE. Prix du Meilleur Film, Horror Guild Awards, 2003

                                                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

"Frailty" de Bill Paxton. 2002. U.S.A. 1h39. Avec Bill Paxton, Matthew McConaughey, Levi Kreis, Powers Boothe, Matt O'Leary, Jeremy Sumpter

Sortie salles France: 15 Mai 2012. U.S: 12 Avril 2002

FILMOGRAPHIE: Bill Paxton est un acteur et réalisateur américain, né le 17 mai 1955 à Fort Worth (Texas). 1982: Fish Heads (court métrage). 2002: Emprise. 2005: Un parcours de légende.


Premier et avant-dernier métrage de l'acteur Bill Paxton, Emprise aborde les thématiques de la superstition et du fanatisme religieux avec une ambiguïté dérangeante. Spoil ! A l'instar de son final révélateur à contre emploi de tout ce que le réalisateur semblait nous dénoncer ! Par ce revirement inopiné, le film adopte dès lors une tournure beaucoup plus effrayante pour mettre en exergue une réflexion sur l'existence du Mal et la foi catholique depuis une injonction divine. Fin du Spoil ! Profondément malsain par son climat étouffant souvent régi en vase clos, par son idéologie religieuse rappelant un célèbre précepte de la bible (la tâche d'Abraham et son fils) et la barbarie qui émane des sacrifices humains (même si le hors-champs est louablement prescrit !), Emprise nous immerge dans la mission divine d'un père persuadé de sacrifier des quidams depuis une vision angélique. Selon une liste ciblée de personnes, il est contraint de les assassiner à la hache depuis que les démons les habitent. Dans son délire mystique, il s'efforce d'endoctriner ses deux fils vers l'initiation criminelle afin de contenter la parole de Dieu.


Remarquablement interprété, tant par la prestance parano de Bill Paxton en paternel castrateur, le  flegme rassurant de Matthew McConaughey en narrateur que par le duo infantile que forment spontanément Jeremy Sumpter et (surtout) Matt O'Leary, Emprise honore le genre horrifique sous le pilier du drame psychologique. D'une intensité cruelle, l'intrigue ne cesse de nous déstabiliser lorsque ces enfants candides témoignent impuissants à la gratuité d'une série de crimes sauvages. Ce sentiment anxiogène de fragilité et de perplexité qu'ils nous insufflent se traduit surtout en la présence de Fenton persuadé que son père n'est qu'un charlatan depuis ses exactions barbares. Multipliant vainement les tentatives d'évasion et de révolte alors que son frère cadet se conforte à l'emprise du père, Fenton provoque une digne empathie quant à sa pugnacité et son courage juvéniles (notamment son épreuve de force endurée dans le cachot). Outre ses moments horrifiques où le suspense ne cesse de rebondir quant aux tentatives désespérées de Fenton à s'extraire de la folie homicide (notamment lorsque son père lui ordonne de tuer un otage), Emprise se permet en prime de parachever cette sordide affaire familiale par le biais d'un thriller perfide quant aux tenants et aboutissants des personnages. Sa conclusion délétère s'avérant aussi salvatrice que perturbante !


La Nuit du Chasseur
Onirique (les allers-retours dans le jardin des roses, la reconversion de Fenton au travers de plans chimériques), dérangeant et machiavélique pour son final retors où Bien et Mal se contredisent, et d'une densité psychologique éprouvante quant à la condition soumise d'enfants innocents, Emprise transcende l'horreur réaliste en oscillant les composantes du drame, du fantastique et du thriller. Fort d'un scénario solide bâti sur le sens du sacrifice et la fraternité familiale, il en émane un manifeste (équivoque) sur la foi religieuse et notre conviction morale à tolérer l'obédience divine. 

Récompenses: Prix du meilleur film, lors des International Horror Guild Awards en 2003.
Prix Bram Stoker du meilleur scénario en 2003.

mercredi 15 juin 2016

LES ARDENNES

                                                          Photo empruntée sur Imdb.com, appartenant au site Google

de Robin Pront. 2015. Belgique/Hollande. 1h32. Avec Jeroen Perceval, Kevin Janssens, Veerle Baetens, Jan Bijvoet, Sam Louwyck, Viviane De Muynck

Sortie salles France: 13 Avril 2016. Belgique: 14 Octobre 2015.

FILMOGRAPHIE: Robin Pront est un réalisateur et scénariste belge. 2015: Les Ardennes.


Drame psychologique sur fond de film noir, Les Ardennes relate la relation conflictuelle d'un trio d'amants maudits. Alors que Dave vient d'échapper à une peine de prison pour braquage, son frère Kenny écope de 7 ans de réclusion après avoir été alpagué. Quatre ans plus tard, il retrouve sa liberté mais sa fiancée Sylvie a décidé de rompre leur relation depuis qu'elle entretient une liaison avec Dave. Sévèrement contrarié, Kenny accumule les sautes d'humeur au moment même où le couple s'efforce de lui avouer la vérité.


Une trame convenue que Robin Pront parvient à transcender avec intensité psychologique pour les rapports insidieux du trio d'amants, quand bien même à mi-parcours le réalisateur relance l'intrigue par le biais d'un revirement inopiné. Si la première partie préfigure donc un drame de la jalousie, le second acte adopte une tournure beaucoup plus sordide quant aux règlements de compte en roue libre où les coups les plus couards y seront tolérés. Brossant avec réalisme et sans romantisme le tableau dérisoire de deux marginaux en quête impossible de rédemption, Robin Pront y dénonce l'influence du frère aîné ayant perpétuellement entraîné sa compagne et son frère vers la grande délinquance. Les Ardennes dressant sans concession les conséquences dramatiques de ce personnage aussi influent que perfide si bien que le frère cadet s'efforce désespérément de s'extirper de son emprise. Outre le soin de la mise en scène que le novice Robin Pront maîtrise avec brio, le jeu naturel des comédiens (trognes burinées en sus !) et la justesse des dialogues parviennent à nous familiariser à travers un jeu de massacre où la rigueur dramatique ira crescendo. Ce dernier multipliant rebondissements et situations insolites (seconds rôles excentriques à l'appui !) avec une inventivité insolente.


Prenant pour cadre la Belgique profonde avant de nous confiner dans la moiteur crépusculaire des vallées ardennaises, les Ardennes juxtapose film noir (on peut aussi songer à l'univers sardonique des frères Cohen !) et drame social pour mettre en exergue la déliquescence morale de deux frères incapables de s'extirper de leur médiocrité. Baroque, glauque et poignant, les Ardennes nous laisse dans une impression amère de déchéance criminelle depuis la déroute d'une réinsertion sociale.  

Dédicace à Mylène Lam

mardi 14 juin 2016

Saturn 3

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site saturn3makingof.com

de Stanley Donen. 1980. Angleterre. 1h28. Avec Farrah Fawcett, Kirk Douglas, Harvey Keitel, Ed Bishop, Roy Dotrice.

Sortie salles France: 28 Mai 1980. U.S: 15 Février 1980.

FILMOGRAPHIE: Stanley Donen est un réalisateur américain, né le 13 avril 1924 à Columbia (Caroline du Sud).1949 : Un jour à New York (On the Town). 1951 : Mariage royal. 1952 : Love Is Better Than Ever. 1952 : Chantons sous la pluie . 1952 : L'Intrépide. 1954 : Donnez-lui une chance. 1954 : Les Sept Femmes de Barbe-Rousse. 1954 : Au fond de mon cœur. 1955 : Beau fixe sur New York. 1955 : Kismet (non-credité au générique). 1957 : Drôle de frimousse. 1957 : Pique-nique en pyjama. 1957 : Embrasse-la pour moi. 1958 : Indiscret. 1958 : Cette satanée Lola. 1960 : Chérie recommençons. 1960 : Un cadeau pour le patron. 1960 : Ailleurs l'herbe est plus verte. 1963 : Charade. 1966 : Arabesque. 1967 : Voyage à deux. 1967 : Fantasmes. 1969 : L'Escalier. 1974 : Le Petit Prince. 1975 : Les Aventuriers du Lucky Lady. 1978 : Folie Folie. 1980 : Saturn 3. 1984 : La Faute à Rio.


Quand on pense que derrière Saturn 3 se planque le réalisateur de Chantons sous la Pluie, on peine à le croire tant le spectacle kitchissime s'érige en série B du Samedi soir. De par son intrigue aussi futile que niaise, du jeu cabotin d'acteurs notoires mais attachants et de décors high-tech étonnamment soignées pour l'époque (merci John Barry, décorateur de la Guerre des Etoiles et de Superman alors qu'il quitta ici précipitamment les commandes de la réalisation après seulement 1 semaine de tournage !), Saturn 3 fait office d'ovni saugrenu. A mi-chemin entre l'épigone trivial d'Alien et du précurseur "docile" de Terminator. Visez un peu le pitch d'après un concept de John Barry himself ! Un capitaine sans vergogne s'est invité dans la station de recherche écolo d'Adam et Axelle afin de tester la technologie d'un androïde téléguidé par transmission de pensée. Bien évidemment, le robot finit par échapper à son contrôle et sème le zouc auprès du duo agronome. Diffusé un lundi soir dans le cadre de l'émission culte l'Avenir du FuturSaturn 3 fit son p'tit effet ludique lors de sa diffusion au début des années 80. 


Aujourd'hui encore, et malgré son caractère naïf et obsolète, le film parvient à divertir aimablement d'après son lot de courses poursuites censées susciter l'angoisse depuis que nos deux survivants tentent de contredire l'arrogance d'Hector le robot. Malgré l'aspect redondant de sa narration faiblarde en soubresauts, Saturn 3 nous tient en éveil sous l'impulsion complice (et également improbable !) de Kirk Douglas et Farrah Fawcet. Un couple en étreinte amoureuse que le capitaine James s'efforce de nuire en guise de jalousie et d'érotomanie. Harvey Keitel incarnant à merveille ce rôle antipathique à l'aide d'une gouaille détestable. D'autre part, grâce à l'aspect immersif du décorum futuriste faisant office de cocon domestique et grâce à la posture quelque peu fascinante d'Hector là aussi convaincant de par son anatomie humanoïde truffée de détails techniques, Saturn 3 amuse gentiment avec une fantaisie parfois débridée. Les déplacements atones de celui-ci cultivant un certain charisme hostile à daigner nuire à autrui sous la mainmise de son créateur dénué de vergogne. Le score aux accents horrifiques d'Elmer Bernstein renforçant notamment l'aspect menaçant de la créature de métal lors de ces affrontements bellicistes. On apprécie enfin en guise de cerise sur le gâteau l'intrusion (toutefois) concise d'effets gores assez réussis (le cadavre déchiqueté par les câbles lors du prologue, une main sectionnée ainsi que la tête humaine implantée sur la tête d'Hector !).


Dans l'espace, Hector joue au phallocrate !
Série B relativement plaisante, un tantinet sexy (les tenues frivoles de Farraw, le cul nu de Douglas !) et atmosphérique, Saturn 3 compte sur l'autorité altruiste du vétéran Kirk Douglas, le sex-appeal de Farraw Fawcett et le charisme hiératique d'Hector pour nous divertir sans prétention. Quelque peu loufoque mais aussi fascinant grâce à son esthétisme formel immersif, Saturn 3 saura encore contenter les amateurs de plaisir innocent en prime d'y distraire les passéistes de l'Avenir du Futur marqués à jamais par cette prod hybride, aussi mineur soit son contenu prévisible (à l'instar de son final pas aussi spectaculaire que prévu mais néanmoins avenant). 

*Eric Binford.
14.06.16
07.10.21

lundi 13 juin 2016

THE QUIET

                                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Jamie Babbit. 2005. U.S.A. 1h34. Avec Elisha Cuthbert, Camilla Belle, Edie Falco, Martin Donovan, Shawn Ashmore, Katy Mixon :

Sortie salles: 1er Septembre 2006

FILMOGRAPHIEJamie Babbit, née le 16 novembre 1970 à Shaker Heights dans l'Ohio, est une réalisatrice américaine. 1999 : But I'm a Cheerleader. 2005 : The Quiet. 2007 : Itty Bitty Titty Committee. 2013 : Breaking the Girls. 2014 : Untitled Riddle/Salahuddin Project (téléfilm)
2015 : Addicted to Fresno.


Inédit en salles en France, The Quiet emprunte la thématique de la famille dysfonctionnelle par le biais de l'inceste. Depuis la récente mort de son père, Dot part se réfugier chez son oncle en se faisant passer pour une sourde et muette. Nina, jeune adolescente au physique de poupon est victime d'abus sexuels par ce dernier alors que sa mère dépressive préfère l'ignorer. Si au départ Dot devient le souffre douleur de Nina lors d'incessantes brimades scolaires, une amitié commence à s'instaurer entre elles au fil de confidences tenues secrètes.


Drame psychologique à l'ambiance aussi trouble que vénéneuse, The Quiet a de quoi surprendre sous son aspect ludique de thriller (faussement) commercial. La réalisatrice parvenant à structurer une intensité dramatique au fil d'un cheminement criminel où le suspense latent se télescope avec les apartés des deux ados perturbées. Sans céder à la facilité d'une mécanique à suspense éculée (l'expectative du meurtre), Jamie Babbit préfère souligner les rapports ambigus impartis aux deux ados en quête d'exutoire. Dot endossant depuis la mort de ses parents le rôle d'une sourde/muette afin de se faire oublier alors que Nina tente de tolérer ses pulsions d'amour/répulsion avec son père en humiliant cette dernière. Abordant la sexualité adolescente (tant du point de vue de Dot et de Nina que celui introverti de Connor), The Quiet dérange par son atmosphère malsaine où la déviance morale d'un père va finalement permettre de consolider une étrange histoire d'amitié. Dot et Nina se rapprochant toujours un peu plus au fil de confidences où la haine ose préméditer une stratégie criminelle. Cette ambiance trouble de malaise existentiel, de perversité sexuelle et de désir morbide est renforcé du jeu sobre des comédiennes insufflant de la spontanéité dans leur fonction torturée.


Captivant et dérangeant au fil d'une intrigue criminelle censée provoquer la rédemption, The Quiet surprend par son parti-pris de souligner les rapports fragiles de deux ados perturbées par leur éveil sexuel plutôt que d'afficher un thriller convenu. Une étonnante découverte donc dont l'ambiance hermétique et parfois envoûtante nous laisse un goût amer dans la bouche. 

vendredi 10 juin 2016

SHOTGUN STORIES

                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site ecranlarge.com  

de Jeff Nichols. 2007. U.S.A. 1h31. Michael Shannon, Douglas Ligon, Barlow Jacobs, Natalie Canerday, Glenda Pannel, Lynnsee Provense, Michael Abbott Jr.

Sortie salles France: 2 Janvier 2008

FILMOGRAPHIE: Jeff Nichols est un réalisateur et scénariste américain né le 7 Décembre 1978 à Little Rock, Arkansas (Etats-Unis).
2007: Shotgun Stories. 2011: Take Shelter. 2012: Mud. 2016: Midnight Special. 2016: Loving.


Considéré aujourd'hui comme un nouveau maître du cinéma américain, Jeff Nichols avait déjà  amorcé son talent personnel à travers Shotgun Stories réalisé en 2007. A mi-chemin entre le cinéma de James Foley (pour les thèmes et le lyrisme hérités de Comme un chien enragé) et celui de Terence Mallick pour sa manière sensitive de filmer une nature sereine, Shotgun Stories empreinte le schéma du film de vengeance avec une rare intelligence. De par son parti-pris à réfuter une violence démonstrative au profit de l'identité psychologique d'une famille désoeuvrée au sein d'une Amérique profonde. 


Abandonnés par leur père dès leur plus jeune âge et délaissés par la mère, trois frères tentent de survivre en s'épaulant mutuellement. A la suite du décès du patriarche, une rivalité entre eux et les demi-frères éclate lors des funérailles. Communément trop fiers de céder aux intimidations, leur discorde morale va entraîner un règlement de compte meurtrier. Drame psychologique d'une intensité dramatique inscrite dans la pudeur et le non-dit, Shotgun Stories aborde l'exclusion d'une délinquance juvénile depuis l'abandon parental. Réflexion sur l'engrenage de la violence sous la bannière d'une rancune intraitable, cette dérive criminelle dresse le constat social d'une jeunesse laissée pour compte où le chômage, l'incommunicabilité et l'absence d'amour vont extérioriser chez eux un sentiment de révolte destructrice. Fort d'une distribution criante de vérité humaine, les trois acteurs composant la fratrie portent le film sur leurs épaules avec une humilité poignante. Leur présence naturelle étant renforcée par un jeu de regards oscillant l'amertume et la tendresse timorée. En frère aîné hanté par la colère et l'injustice, Michael Shannon (Bug, Take Shalter, Midnight Special) livre à nouveau une prestance compacte pour se glisser dans la peau d'un leader protecteur avec un charisme placide. Au sein d'une nature paisible auquel ils évoluent depuis leur enfance, Jeff Nichols met en contraste leur solitude existentielle avec un onirisme nonchalant (mélodie élégiaque en sus durant tout leur cheminement !). 


"Le chemin qui mène à la sagesse est long, tortueux et semé d'obstacles".
Affichant un climat réaliste de poésie existentielle sous l'impulsion d'acteurs en posture sentencieuse , Shotgun Stories renouvelle le drame familial avec pudeur et sobriété afin de scruter les âmes torturées d'une fratrie noyée de solitude et de mal-être depuis l'abandon parental. 

jeudi 9 juin 2016

EVENT HORIZON: LE VAISSEAU DE L'AU-DELA. Prix du public, Bruxelles 98.

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Paul W. S. Anderson. 1997. 1h36. Avec Laurence Fishburne, Sam Neill, Kathleen Quinlan, Joely Richardson, Richard T. Jones, Jack Noseworthy, Jason Isaacs.

Sortie salles France: 6 Mai 1998. U.S: 15 Août 1997

FILMOGRAPHIE: Paul William Scott Anderson, né le 4 mars 1965 à Newcastle upon Tyne est un producteur, réalisateur et scénariste britannique. 1994 : Shopping. 1995 : Mortal Kombat. 1997 : Event Horizon, le vaisseau de l'au-delà. 1998 : Soldier. 2000 : The Sight. 2002 : Resident Evil. 2004 : Alien vs Predator. 2008: Death Race. 2010 : Resident Evil: Afterlife. 2011 : Les Trois Mousquetaires 3D. 2012 : Resident Evil : Retribution 3D. 2014 : Pompéi. 2016 : Resident Evil : Chapitre final.


Echec public et critique lors de sa discrète sortie en salles, Event Horizon constitue une oeuvre maudite si on se réfère à l'indiscutable savoir-faire de Paul Anderson particulièrement impliqué à façonner un grand huit cauchemardesque. Tant par l'efficacité de sa mise en scène cultivant une angoisse en apesanteur que de son esthétisme léché sublimant l'architecture baroque des corridors du vaisseau. A mi chemin entre Hellraiser pour la représentation d'un Enfer SM et la Maison du Diable pour son aura diabolique sous-jacente, Event Horizon parvient à nous captiver dans son enchaînement de situations hostiles où la mort insidieuse ne laissera aucun répit aux victimes.


Durant 1h30, une poignée d'astronautes va tenter de percer le mystère de l'Event Horizon depuis que les passagers de l'ancienne expédition n'avaient plus donné signe de vie. Au fil de leur découverte macabre, une présence diabolique plane sur leurs épaules si bien que un à un, ils vont sombrer dans une paranoïa collective depuis leurs hallucinations plus vraies que nature. Ce sentiment d'insécurité permanent et cette manière vénéneuse de provoquer nos protagonistes en faisant appel aux réminiscences familiales, Paul Anderson le met en exergue parmi le pouvoir de suggestion. La présence invisible mais palpable redoublant de cynisme à bizuter ces derniers avant de posséder leurs âmes. Qui plus est, en jouant sur la dimension parallèle du trou noir, une vision de l'enfer nous est suggérée sous l'impulsion d'une machine rotative et d'hallucinations hystériques de victimes écorchées vives ! Au-delà du réalisme formel imparti à sa scénographie spatiale et de son climat anxiogène, Event Horizon tire parti d'une distribution solide pour renforcer la crédibilité des enjeux humains. Particulièrement Laurence Fishburne et Sam Neill se disputant l'autorité avec sang froid et une pugnacité en chute libre. Et si sa dernière partie homérique cède un peu à la facilité de l'esbroufe (FX renversants à l'appui à base d'explosions dantesques et d'atrocités corporelles !), Paul Anderson nous avive encore l'attention par le principe d'un survival aussi nerveux qu'escarpé.


Pur divertissement de série B classieuse comme le caractérise l'excentricité des décors futuristes, Event Horizon nous propose un spectacle de haute tenue dans son format de science-fiction horrifique ne lésinant pas sur un gore vicié. A redécouvrir avec un vif intérêt si bien qu'il s'agit (de loin) du meilleur film du très inégal Paul Anderson

Récompense: Prix du Public au Festival du Film Fantastique de Bruxelles, 1998