de Masayuki Ochiai. 2004. Japon. 1H35. Avec Michiko Hada, Mari Hoshino, Tae Kimura, Yoko Maki, Kaho Minami, Moro Morooka.
Sortie en France le 26 Aout 2008, Japon: 2 Octobre 2004.
FILMOGRAPHIE: Masayuki Ochiai est un réalisateur japonais.
1997: Parasite Eve,1999: Hypnosis, 2004: Infection, 2008: Shutter.
Après l'excellent Hypnosis et avant le remake décrié de Shutter, Masayuki Ochiai a su diverger de la mode des fantômes revanchards au longs cheveux type Ring ou des six volets de Ju-on en pleine effervescence en ce début des années 2000. Il livre avec Infection un film à petit budget original, soigné et inquiétant, renforcé par son atmosphère étouffante d'un huis-clos hospitalier auquel un virus inconnu semble contaminer chaque membre du personnel.
Dans un hôpital au bord de la faillite financière, un malade est ramené devant les portes d'entrées contre les défaveurs des médecins complètement débordés et déjà envenimés par un patient critique brûlé au troisième degré. Lentement, le personnel médical semble épris de folie contagieuse alors que leur souche sanguine se met à virer de couleur dans une tonalité verdâtre en liquéfiant leur chair humaine.
Sorti tardivement chez nous quatre ans après sa sortie nippone, Infection pourrait nous faire penser à un énième film de zombie cocaïné ou d'infecté surexcité façon 28 jours plus tard avec son titre accrocheur d'une potentielle contamination pernicieuse. Effectivement, il s'agira bien d'une propagation virale attribuée vers un groupe de médecins réfugiés dans un centre hospitalier précaire en pleine ébullition mais sans toutefois la réhabilitation festive de meurtriers enragés. La manière sobre et originale dont le réalisateur tisse son sujet évite donc la redite aux airs classiques de déjà vu et concentre son potentiel et son savoir-faire sur une ambiance glauque subtilement amenée dans un suspense lattent et inquiétant.
Le décor restreint d'un établissement chirurgical est tout à fait propice pour jouer avec les angoisses anxiogènes du spectateur avec cet endroit voué à guérir les patients d'une maladie ou d'un accident plus ou moins grave. Y faire pénétrer à l'intérieur de cette clinique un malade atteint d'un virus extrêmement dangereux et contagieux attise l'inquiétude et la peur viscérale surtout quand le réalisateur finaud prend un malin plaisir à distiller tranquillement une ambiance insolite où nos personnages délurés vont peu à peu perdre pied dans l'improbabilité des faits exposés.
De plus, Masayuki Ochiai nous met face à une étonnante galerie de personnages équivoques et paradoxales ! Quelques médecins expertisés en chute libre, deux malades décharnés et moribonds dont l'un succombera rapidement à cause de ses brûlures, une patiente âgée atteinte de troubles mentaux s'amusant perpétuellement à narguer nos protagonistes et des infirmières novices peu adroites et inconfiantes dans leur frêle contribution à soigner et surveiller les souffrants.
Inévitablement et langoureusement, tout ce beau monde va facilement se laisser entamer par une folie sous-jacente enrayée de manière inconsciente par la cause d'une maladie infectieuse inédite.
En effet, nos protagonistes vont peu à peu se comporter de manière irrationnelle pour avoir des attitudes masochistes comme le fait de se piquer machinalement à plusieurs reprises les veines d'un bras avec une seringue multi utilisée ou se laisser baigner les mains dans une bassine d'eau ébouillantée. Alors que chaque individu contaminé se verra transpirer d'un sang verdâtre et se liquéfier jusqu'à ce que leur corps ressemble à un amas de bouillie visqueuse et flasque.
A travers cette trame horrifique éparpillée de scènes chocs inopinées mais jamais outrancières dans ses effusions de gore absent (chaque mort à caractère sanguinolent est éludé du sang traditionnellement rouge pour le remplacer par une couleur verte), Masayuki Ochiai traite en premier lieu du système faillible des services médicaux hospitaliers en situation précaire, davantage en manque de main d'oeuvre, peu favorisés par l'assistance d'infirmières néophytes inexpérimentées alors qu'une grossière erreur médicale va devoir leur être imposée. De cet incident majeur entraînant inévitablement des poursuites judiciaires, les témoins responsables vont devoir faire face à leur moralité, à savoir s'il faudra falsifier les causes du décès du malade mort par leur faute accidentelle ou assumer leur responsabilité et faire face à la justice de manière équitable et répréhensible.
Malgré un final confus et trouble qui multiplie les coups de théâtre pour mieux nous interloquer (le virus s'insinuant en fin de compte dans les rêves pour mieux altérer la conscience), Infection est un excellent moment horrifique qui traite sa mise en scène avec intelligence par un refus du racolage sanglant. En dehors d'une bonne interprétation d'ensemble, il doit surtout à son ambiance insolite prenant soin de distiller un environnement glauque d'un lieu hospitalier baroque entaché d'une aura presque malsaine, et renforcée par ses éclairages flashys de teintes fluorescentes.
08.04.11.
Bruno Matéï.
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