de Mario Bava. 1972. 1h35. Italie/Allemagne/Espagne. Avec Elke Sommer, Telly Savalas, Sylva Koscina, Alida Valli, Alessio Orano, Espartaco Santoni, Eduardo Fajardo, Gabriele Tinti.
FILMOGRAPHIE: Mario Bava est un réalisateur, directeur de la photographie et scénariste italien, né le 31 juillet 1914 à Sanremo, et décédé d'un infarctus du myocarde le 27 avril 1980 à Rome (Italie). Il est considéré comme le maître du cinéma fantastique italien et le créateur du genre dit giallo. 1946 : L'orecchio, 1947 : Santa notte, 1947 : Legenda sinfonica, 1947 : Anfiteatro Flavio, 1949 : Variazioni sinfoniche, 1954 : Ulysse (non crédité),1956 : Les Vampires (non crédité),1959 : Caltiki, le monstre immortel (non crédité),1959 : La Bataille de Marathon (non crédité),1960 : Le Masque du démon,1961 : Le Dernier des Vikings (non crédité),1961 : Les Mille et Une Nuits,1961 : Hercule contre les vampires,1961 : La Ruée des Vikings, 1963 : La Fille qui en savait trop,1963 : Les Trois Visages de la peur, 1963 : Le Corps et le Fouet, 1964 : Six femmes pour l'assassin, 1964 : La strada per Fort Alamo, 1965 : La Planète des vampires, 1966 : Les Dollars du Nebraska (non cédité), 1966 : Duel au couteau,1966 : Opération peur 1966 : L'Espion qui venait du surgelé, 1968 : Danger : Diabolik ! , 1970 : L'Île de l'épouvante ,1970 : Une hache pour la lune de miel ,1970 : Roy Colt e Winchester Jack, 1971 : La Baie sanglante, 1972 : Baron vampire , 1972 : Quante volte... quella notte, 1972: Lisa et le Diable. 1973 : La Maison de l'exorcisme, 1974 : Les Chiens enragés,1977 : Les Démons de la nuit (Schock),1979 : La Venere di Ille (TV).
Après le succès de Baron Blood, le producteur Alfredo Leone propose à Mario Bava de réaliser un nouveau projet en lui laissant carte blanche sur le contenu scénaristique et sa facture visuelle. Le réalisateur s'empare alors d'un ancien script de son défunt père afin de lui rendre personnellement hommage. Mais un problème survient lors de sa première projection au marché de Cannes sachant que Lisa et le diable n'enchante guère les distributeurs trouvant l'oeuvre beaucoup trop confuse, complexe et personnelle. Alfredo Leone décide alors avec l'accord de Mario Bava de remonter le film en y incluant des séquences horrifiques d'exorcisme de manière à surfer sur le succès de l'Exorciste de Friedkin. Le maître italien étant un fervent catholique, il s'offusque à oser insérer ces séquences additionnelles de possession sataniste. Sorti en 75 sous le titre, La Maison de l'exorcisme, le succès commercial est cette fois-ci au rendez-vous. Un filon mercantile pour le producteur quand bien même Bava ne sera pas crédité à la réalisation (ce qui portera atteinte à leur fidélité amicale pour toujours). Cette copie grossièrement remaniée et dénuée de sens fait donc office de pâle figure comparée à Lisa... que je considère comme le plus beau film du maestro. Car ce diamant noir maudit est d'autant plus injustement dénigré qu'il resta honteusement mis à l'écart durant de longues années et inédit en salles dans nos contrées.
Le Pitch: Lisa profite de ses vacances dans la ville de Tolède située en Espagne. Durant sa promenade, elle reste frappée par la gravure d'une peinture représentant le diable. Quelques instants après, elle trouve refuge chez un antiquaire ressemblant au personnage de la fresque et tenant entre ses bras un mannequin que Lisa semble familièrement reconnaître. Elle continue sa route vers le chemin de la place principale et rencontre soudainement un individu physiquement semblable au mannequin. Prise de panique, elle le pousse sur la chaussée alors que l'homme semble mortellement blessé. La nuit tombée, la jeune femme égarée demande à un couple circulant en voiture avec chauffeur de la reconduire, mais ils tombent malencontreusement en panne et se retrouvent en face d'une vieille demeure gothique auquel le précédant antiquaire semble être le maître d'hôte de la maison.
Oeuvre hermétique au pouvoir de fascination incommensurable, Lisa et le Diable est une fuite en avant vers les songes morbides. La frontière entre la chimère et la réalité se juxtaposant ici afin d'égarer autant nos protagonistes, pris dans la tourmente, que le spectateur impliqué dans un engrenage où l'illusion semble totalement à la merci de notre réalité. Là où la force suggestive d'une narration impénétrable nous pousse à tenter de saisir les moindres indices disposés à chaque composante du récit. Ainsi, dans des décors gothiques richement détaillés, rehaussés d'un esthétisme baroque, Mario Bava nous invite à un cauchemar romantique indéchiffrable dans son cheminement aléatoire fourmillant de détails aussi troublants qu'obscurs. Il faut dire que l'histoire profondément romantique, exacerbée par une sublime partition élégiaque d’Aranjuez, nous enivre les sens dans son amertume nostalgique confrontée à une mouvance nécrophile et au delà du charme insolite de Lisa (Elke Sommer est habitée par l'étrangeté de son comportement indécis !). Le spectateur décontenancé semble, tout comme l'héroïne principale, perdu au beau milieu de la nuit, dans le refuge d'une vaste bâtisse au secret familial inscrit dans l'adultère, où des fantômes névrosés semblent errer pour préoccuper les vivants en tentant de renouer avec un amour ancestral !
Narrer avec force et détail l'histoire fantasmagorique de Lisa et le Diable est quasi inconcevable mais on peut toutefois suggérer qu'il s'agit en résumé d'une famille hantée par le spectre d'Eléna, jeune femme infidèle à la beauté ténébreuse éprise d'amour pour deux amants alors que Lisa semble être sa propre réincarnation. Durant tout le récit, celle-ci est harcelée par le spectre du mari de la défunte atteinte de cécité alors que son fils marié auparavant à Eléna se laissera emporter par le charme trouble de la nouvelle Eléna ! Dès lors, les morts et les vivants ne cessent de s'entrecroiser alors que le diable incarné par un serviteur mesquin d'apparence chauve (surprenant Telly Savallas !) semble se divertir à brimer et manipuler à sa guise ses invités pour les fondre l'instant d'après en mannequin de cire ! Le final tout aussi cauchemardesque et désarticulé illustrant Lisa prise au piège à bord d'un avion serait alors le dernier trajet pour l'enfer d'une femme condamnée d'avoir corrompu l'amour. La diable, maître de cérémonie, serait alors l'instigateur de cette machination pour mieux déprécier celle par qui le scandale est arrivé. A moins que le récit torturé n'était qu'un rêve fantasque d'une jeune dame refoulée, impressionnée par la fresque médiévale d'une présence démoniaque perpétrant sur sa psyché un cauchemar insensé explosant les frontières entre rêve et réalité !
Fantôme d'amour.
Incarné par des comédiens transis d'émoi, Lisa et le diable s'édifie en somptueux poème funèbre d'un romantisme inassouvi. Un rêve illusoire jonché de mannequins et de statues enracinés dans leur époque vétuste alors qu'une jeune femme hantée par ses offenses semble revenir sur les lieux d'une tragédie sentimentale soumise par l'influence du diable. Traversé d'images oniriques à la beauté macabre charnelle, ce chef-d'oeuvre immuable constitue une éloge à la fantasmagorie la plus obsédante. Sitôt le générique écoulé, difficile alors de retrouver une parcelle de lucidité dans le retour à notre banale quotidienneté. Une idée insatiable me traverse alors promptement l'esprit ! Revoir Lisa et le diable et ne plus jamais en sortir !
*Bruno
23.08.23.
05.04.11
30.12.23. Vistfr. 4èx
Bon ben bravo je vais devoir le revoir ce soir!!! Très belle critique et je ne peux qu'être d'accord encore une fois décidément.J'aime bien quand tu dis que c'est une œuvre hermétique,j'ai toujours beaucoup de mal à expliquer à d'autre l'intérêt du film,c'est tellement particulier!Et puis Telly Savallas complétement en décalage et hallucinant ;) Bon,allez,je le programme pour ce soir pour la 54646468 de fois!
RépondreSupprimerTout à fait pour Telly, moi je le trouve PARFAIT contrairement à certaines critiques qui le trouvent ridicule !
RépondreSupprimerJe viens de l'acheter aujourd'hui chez NOZ à 0.95 Euros.
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