vendredi 16 novembre 2012

A PERDRE LA RAISON. Prix d'interprétation Féminine, Cannes 2012

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinebel.be

de Joachim Lafosse. 2012. Belgique. 1h51. Avec Emilie Dequenne, Niels Arestrup, Tahar Rahim, Stéphane Bissot, Mounia Raoui, Redouane Behache, Baya Belal.

Sortie salles France: 22 Août 2012

Récompense: Prix d'Interprétation Féminine pour Emilie Dequenne, dans la catégorie: Un Certain Regard.

FILMOGRAPHIE: Joachim Lafosse est un cinéaste, scénariste, dramaturge et metteur en scène de théâtre belge, né le 18 Janvier 1975 à Uccle.
2004: Folie Privée
2006: Ca rend heureux
2006: Nue Propriété
2008: Elève Libre
2012: A perdre la Raison


Inspiré d'une sordide affaire d'infanticide survenue en Février 2007, A perdre la raison décrit la lente descente dans la folie d'une mère de famille, épouse de quatre enfants.
Dans un climat austère, pesant et dépressif, le réalisateur belge Joachim Lafosse nous convie à une dérive psychotique vis à vis d'une femme démunie car trop esseulée pour se raccrocher à un soutien psychologique. Epouse d'un marocain impassible subjugué par son travail, Muriel est contrainte de partager sa vie conjugale parmi la présence du père adoptif de Mounir, le médecin Pinget. Au fil des mois, après quelques accrochages intempestifs vis à vis de leur autonomie et de la postérité des enfants, le couple décide de s'exiler au Maroc avec l'accord de Pinget. Pour tenter de soigner sa dépression et sous la recommandation du paternel de Mounir, Murielle part consulter une psychologue. Mais une sévère discorde d'ordre relationnelle contraint la jeune femme à endiguer ses futures séances de thérapie. En perte de repères, étouffée par la présence envahissante de Pinget et ses quatre enfants et délaissée par un mari inexistant, Murielle perd pied et sombre dans la folie. Jusqu'à commettre l'irréparable...


Photographie clinique, atmosphère anxiogène suffocante et hyper réalisme d'une mise en scène acérée impliquent le spectateur de manière sensitive vers une introspection mentale d'une jeune mère de famille névralgique. Le climat tendu entretenu au sein du couple et la relation en demi-teinte qu'ils doivent consentir avec le Dr Pinget rendent leur labeur péniblement inconfortable. Ce sentiment de claustration est d'autant plus lourd à supporter que les interprètes du film, exceptionnels de véracité, exacerbent cette déchéance conjugale en chute libre. Outre les prestances probantes de Niels Arestrup (impressionnant d'ambiguïté dans sa spontanéité affable !) et du surdoué Tahar Rahim (révélé dans le multi-césarisé Un Prophète), une mention particulière est indubitablement impartie à la performance criante de vérité d'Emilie Dequenne (louablement récompensée à Cannes !). Dans une froideur désespérée, elle retransmet avec une acuité neurotique le rôle chétif d'une mère de famille totalement désemparée par son environnement cafardeux dont personne ne semble éprouver une moindre empathie.


Remarquablement mis en scène avec un souci de réalisme proche du docu vérité et dominé par la prestance de trois comédiens époustouflants de conviction, A perdre la raison est un drame familial d'une noirceur et d'un désespoir péniblement supportable. Le climat dérangeant et le malaise diffus que le réalisateur véhicule avec application rendent le film finalement antipathique et beaucoup trop austère. A conseiller avec beaucoup de réserve et prudence.

16.11.12
Bruno Matéï

La polémique des intéressés (Source Wikipedia): Bien qu'il n'ait pas vu le film, Bouchaïb Moqadem, le père des enfants de Geneviève Lhermittte, l'a critiqué en le décrivant comme "insulte à la mémoire de mes enfants." Il a ajouté, "J'ai le droit à l'oubli. Cet assassinat et ce massacre gratuit sont inexplicables. Comment peut-on alors l'expliquer avec un artiste ?". Le Dr. Schaar qui a inspiré le personnage joué par Niels Arestrup s'est également indigné par rapport au film, "C'est faire du fric sur cinq cadavres d'enfants". Il estime que Joachim Lafosse "a fait preuve d’un manque d’empathie vis-à-vis des enfants morts et se fout complètement des protagonistes vivants."En mai 2010, les deux intéressés s'étaient déjà vivement opposés à la réalisation du projet et avaient par la suite réclamé un droit de regard sur l'œuvre qui leur a été refusé.


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