de George A. Romero. 1992. U.S.A. 2h02. Avec Timothy Hutton, Amy Madigan, Michael Rooker, Julie Harris, Robert Joy.
Sortie salles France: 18 Août 1993
FILMOGRAPHIE: George Andrew Romero est un réalisateur, scénariste, acteur, auteur américain, né le 4 Février 1940 à New-York. 1968: La Nuit des Morts-vivants. 1971: There's Always Vanilla. 1972: Season of the Witch. 1973: The Crazies. 1977: Martin. 1978: Zombie. 1981: Knightriders. 1982: Creepshow. 1985: Le Jour des Morts-vivants. 1988: Incidents de parcours. 1990: Deux Yeux Maléfiques. 1992: La Part des Ténèbres. 2000: Bruiser. 2005: Land of the Dead. 2008: Diary of the Dead. 2009: Survival of the Dead. 2011: Deep Red.
Œuvre mésestimée, aujourd’hui sombrée dans l’oubli, La Part des Ténèbres demeure l’un des films les moins appréciés du maître Romero. Certes, l’un de ses projets les moins personnels, mais il serait injuste d’occulter l’originalité de son scénario (adapté de Stephen King) et la conviction de ses interprètes.
Synopsis: À la suite d’un chantage d’un admirateur, l’écrivain Thad Beaumont décide de se débarrasser de son pseudonyme en révélant sa véritable identité aux médias. Dès lors, une série de meurtres sanglants frappe son entourage. Rapidement, la police le soupçonne : ses empreintes sont relevées sur chaque scène de crime.
22.04.13
01.09.25. Vost. 4èx
En habile conteur, George A. Romero emprunte ici la voie du thriller fantastique, tissant un suspense haletant savamment planifié. Le film se concentre sur une succession de crimes dans une petite bourgade et sur l’investigation solitaire de l’écrivain. En abordant le thème du double et de la « part des ténèbres » tapie en chacun de nous, Romero orchestre un récit diabolique porté par Timothy Hutton. Dans un double rôle en demi-teinte, l’acteur incarne avec intensité deux figures antinomiques, confrontées à l’éthique du bien et du mal. À l’instar d’un Jekyll et Hyde, Thad Beaumont et George Stark incarnent une gémellité schizophrène, leurs enjeux traversés par la soif de survivre, d’exister et de perdurer. Romero y insuffle une réflexion identitaire sur l’influence corrosive du mal et sur l'impossibilité de se débarrasser de son ombre. Or, la conclusion du récit affiche ici une victoire du Mal sur le Bien dans la mesure où Thad retrouve sa fonction de respectable écrivain conformiste alors que sa part mauvaise autrefois enfouie en lui lui offrait la possibilité de créer de manière plus autonome, inspirée et ambitieuse.
Cette confrontation dense entre un personnage de fiction et son propre créateur - un écrivain prisonnier du genre qui a forgé sa réputation - suscite à la fois trouble et fascination, notamment à travers l’aura délétère de George Stark. Figure renfrognée du Mal, matérialisée par la tumeur cérébrale de Beaumont, Stark s’obstine à cultiver sa nouvelle existence. Pour accentuer l’étrangeté du récit, Romero cisèle l’esthétique d’une séquence cauchemardesque (le rêve prophétique de Thad), et convoque l’onirisme d’une métaphore divine par l’entremise d’oiseaux chargés d’emporter l’âme des damnés. La dernière séquence, spectaculaire et singulière, déploie ainsi une imagerie poético-morbide où s’abat l’offensive d’une nuée de passereaux carnivores.
Avec modestie mais savoir-faire, Romero s’impose ici en conteur d’exception, transfigurant une intrigue originale par une mise en scène efficace, une interprétation solide et une maîtrise du suspense. Un thriller inquiétant, singulier, fascinant, injustement méprisé, qui apporte une passionnante réflexion sur notre identité fracturée. Car l'homme est à la fois créateur et destructeur, civilisé et sauvage, écrivain raffiné ET conteur de sang. Ce que Thad se refuse ici à tolérer et encore moins assumer...
— le cinéphile du cœur noir
22.04.13
01.09.25. Vost. 4èx
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