Pitch : En 1930, un jeune romancier, auteur d’un récit fantastique que personne ne souhaite publier, est expulsé de son domicile faute de pouvoir payer son loyer. Livré à lui-même, sans le sou, il parvient néanmoins à se réfugier dans les souterrains d’une banque désaffectée grâce à l’aide d’une ancienne connaissance. C’est alors qu’il devient le témoin d’une étrange confrérie s’abandonnant, sans vergogne, à des orgies culinaires et lubriques...
Ovationné par la Licorne d’Or et le Prix du Meilleur Scénario au Festival du Film Fantastique de Paris au Rex, récompensé du Grand Prix à Trieste, La Nuit de la Métamorphose est un OVNI rare et précieux, parvenant sans esbroufe ni fioriture à rendre crédible un argument fantastique inusité : celui d’une ligue de rats parvenant à adopter une apparence humaine, dans un contexte de crise sociale, pour mieux nous asservir après nous avoir poussés au chômage et à la famine. Derrière l’alibi de cette menace animale d’un genre nouveau, se profile une allégorie féroce sur la cupidité bureaucratique et les régimes fascisants, à l’aube du nazisme d’Hitler (l’action se situe en 1930).
Au-delà d’un suspense latent, franchement accrocheur, la densité de l’intrigue tient à sa capacité à nous faire croire à cette suprématie animale grâce à des trucages sobres, mais d’une efficacité redoutable. Le tout éclairé par une somptueuse photo sépia et inscrit dans une reconstitution historique hyper réaliste, aussi modeste soit-elle, au sein d’une scénographie urbaine insalubre, clairsemée, comme rongée par le vide.
Tout au long du récit, on suit l’enquête obsessionnelle de cet écrivain frondeur, témoin d’une découverte macabre lors d’un banquet tenu secret. Il s’allie bientôt à un chimiste éminent, parvenu à élaborer un sérum capable d’éradiquer ces rats mutants, visant en particulier leur "sauveur", figure messianique vouée à exterminer notre espèce. Une lutte sans merci s’engage alors entre notre duo d’érudits et ces rats humains, d’autant plus insidieux qu’ils savent se fondre à la perfection dans la foule.
L’intrigue, constamment sombre et inquiétante, distille une ambiance mortifère, marquée par un sentiment d’insécurité sous-jacent - notamment dans la précarité du romancier et l’étreinte fragile qu’il partage avec la fille du professeur. Outre son virage haletant et de plus en plus horrifique dans la dernière demi-heure (avec cette condition mutante des détenus humains, "traités" dans une geôle infestée de rats carnassiers !), La Nuit de la Métamorphose n’hésite pas à s’enfoncer dans la cruauté et l’amertume. Sa conclusion, en demi-teinte, s’offre comme un vertige moral : l’écrivain, rongé par le doute, la psychose et le remords, nous laisse face à une ultime image suspendue, incertaine, que chacun pourra interpréter selon son propre prisme - optimiste ou terriblement pessimiste.
Quant aux maquillages, aussi concis que réussis, ils impressionnent par l’apparence fétide de ces rats humains : défroque ténébreuse, petits yeux viciés, traits légèrement velus, commissures baveuses encadrées par deux incisives de belette. Un bestiaire malsain, troublant, presque pitoyable.
25.10.18 4èx
05.08.10 (208 vues)
. Grand Prix du festival du film fantastique de Trieste
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