jeudi 16 juin 2011

COMBAT SHOCK (AMERICAN NIGHTMARE)


de Buddy Giovinazzo. 1986. U.S.A. 1h39. Avec Rick Giovinazzo, Veronica Stork, Mitch Maglio, Asaph Livni, Nick Nasta, Michael Tierno, Arthur Saunders, Lori Labar.

Sortie salles US le 14 Mai 1986.

FILMOGRAPHIE: Buddy Giovinazzo est un réalisateur, scénariste et producteur indépendant américain né le 5 mai 1957 à New-York.
1986: Combat Shock (scénariste, réalisateur, éditeur, producteur, acteur)
1987: Jonathan of the Night (scénariste, réalisateur, producteur)
1989: Mr Robbie: Maniac 2 (Court. réalisateur, producteur)
1996: No way home (réalisateur, scénariste, acteur)
1999: The Unscarred (réalisateur, producteur)
2009: Life is Hot un Cracktown (scénariste, réalisateur)
2011: The Theatre Bizarre (Segment: I love you. Co-réalisateur)
1989: She's Back (scénariste).
1998: Fallen Arches (acteur)

                           

Hommage subjectif d'un puriste amateur.
En 1986, un jeune néophyte du nom de Buddy Giovinazzo réalise pour un budget de misère ($40,000) un cauchemar urbain rarement documenté de manière aussi poisseuse et sordide, en dépit du côté maladroit d'une mise en scène hésitante. 25 ans plus tard, ce film maladif et moribond, témoignage désespéré de l'impossible réinsertion d'un vétéran du Vietnam, garde intact son pouvoir de fascination/répulsion dans une ambiance funeste singulière.
Une question reste cependant en suspens ! Qu'est-il arrivé à la firme Troma d'avoir édité un film aussi extrême et nauséeux ?

Franckie est un ancien soldat ayant combattu durant la guerre du Vietnam. Resté hospitalisé durant 3 ans suite à de graves séquelles psychologiques, il peut enfin retourner dans son pays natal pour retrouver sa femme et son jeune fils difforme âgé d'à peine 1 an. Au chômage, sans ressources d'allocations financières, ils vivent tous trois lamentablement dans un appartement insalubre suintant la puanteur et la nourriture avariée. En désespoir de cause et sous l'influence de sa femme irascible, il décide d'arpenter inlassablement les rues dépravées pour trouver un quelconque boulot partiel.

                           

Avec son prélude belliqueux où l'action est supposée se dérouler en pleine jungle du vietnam, on pouvait craindre le pire dans ces décors de pacotille où quelques soldats américains jouent les baroudeurs farouches contre l'antagoniste hostile. Le réalisateur alternant stock-shots de documents d'archive de guerre et séquences simulées de combats sanglants contre l'ennemi redouté, jalonnés de corps déchiquetés et tête tranchées sur une végétation polluée.
Ce premier quart d'heure peine donc à convaincre faute d'un amateurisme un peu trop forcé mais non dénué d'une certaine ambiance cauchemardesque. C'est au retour au pays US que le métrage va pouvoir se transcender et entamer un voyage au bout de l'enfer pour ne plus lâcher l'amertume dépressive du spectateur jusqu'au générique de fin exutoire.
La narration balisée de Combat Shock n'a rien d'innovante et ne souhaite aucunement structurer une intrigue solide ou substantielle. Tout ce qui fait l'intérêt inhérent à ce cauchemar américain vient de la manière radicale dont notre héros est illustré dans un environnement ultra glauque extrêmement réaliste.
C'est dans son ambiance hallucinée d'une cité urbaine à l'agonie que le métrage s'empreint d'une ampleur visuellement viscérale et palpable, accentuée par une bande musicale planante (bien qu'en décalage de ton à de brefs moments futiles). Misère humaine, toxicomanes azimutés, sdf, prostituées de mineurs, macros, mafieux et quidams désoeuvrés tentent de survivent dans un quartier pourrissant où la grisaille atmosphérique, la déchéance humaine et la violence crapuleuse sont leur lot quotidien d'une existence terne sans but.

                           

Entre le huis-clos irrespirable d'un appartement étroit décrépi et les extérieurs néfastes d'une ville en déliquescence, Buddy Giovinazzo livre l'un des plus impitoyables constats social sur la misère humaine condamnée à survivre et destinée à s'entretuer en guise de précarité alarmiste.
Il illustre avec une détresse implacable le portrait d'une famille désunie. Franckie, père de famille revenu d'entre les morts après l'enfer du Vietnam, marié à une mégère bedonnante incapable de lui éprouver la moindre affection. Pour amplifier ce sentiment de marasme dépressif et de désolation éprouvée, leur lignée est un nouveau né difforme et monstrueux gesticulant langoureusement des râles d'agonie pour cause de famine. Faute de ne plus pouvoir nourrir sa famille famélique et sur le point d'être expulsé de leur foyer, il décide d'errer dans les quartiers malfamés, en quête d'un éventuel emploi subsidiaire dans l'agence matrimoniale familière. Sans aubaine de s'être accaparer d'un poste professionnel, il rencontre sur son chemin un trio de malfrats auquel il leur devait une grosse somme d'argent. Autant dire que la nouvelle journée de Franckie n'est qu'une accumulation de mauvaises rencontres. Même les retrouvailles impromptues avec l'un de ces anciens acolytes, devenu en l'occurrence toxicomane, ne le mènera qu'à une pathétique altercation contre un drogué psychotique.
Lentement, le destin de cet ancien vétéran seul contre tous, revenu au pays pour subir une seconde guerre de survie, va peu à peu sombrer dans la folie suicidaire en guise de rédemption. Et en matière de final nihiliste lapidaire, on peut dire que Combat Shock ira jusqu'au bout de sa labeur pour avoir dépeint le portrait abrupt d'un individu fébrile, déprécié par une société inhumaine sans vergogne, acculé à s'auto-détruire.

                           

UN CAUCHEMAR AMERICAIN.
Sous ses influences assumées de Taxi Driver et Eraserhead, Combat Shock est l'un des plus opaques cauchemars urbains que le cinéma indépendant nous ait été donné de voir. Malgré la maigreur du budget, sa mise en scène chétive et une interprétation folichonne (hormis le jeu honnête du héros  plutôt charismatique et concluant), ce portrait sans concession de la solitude humaine laisse une horrible empreinte dans notre psyché, jamais dupe d'un fait divers tristement quotidien.

Dédicace à l'Antre du Bis.
16.06.11
Bruno Matéï.

 

2 commentaires:

  1. Bravo pour ta critique et merci pour ta dédicace cher Bruno. Continues comme ça !

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  2. Avec plaisir Sevenko, on est tous dans la même passion ! Merci beaucoup ! ^^

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