mercredi 31 octobre 2012

DE ROUILLE ET D'OS. Prix du Meilleur Film au Festival du film de Londres, 2012.

Photo empruntée sur Google, appartenant au site docslumpy.info

de Jacques Audiard. 2012. France/Belgique. 1h55. Avec Marion Cotillard, Matthias Schoenaerts, Bouli Lanners, Corinne Masiero, Armand Verdure, Céline Sallette, Yannick Choirat.

Sortie salles France: 17 Mai 2012

Récompenses: Prix du Meilleur Film au Festival du film de Londres, 2012
Swann d'or du meilleur film au Festival du film de Cabourg, 2012

FILMOGRAPHIE: Jacques Audiard est un réalisateur, scénariste et monteur français, né le 30 Avril 1952 à Paris.
1994: Regarde les Hommes tomber. 1996: Un héros très discret. 2001: Sur mes lèvres. 2005: De battre mon coeur s'est arrêté. 2009: Un Prophète. 2012: De Rouille et d'Os.


Trois ans après son ébouriffant drame carcéral, Un Prophète (9 Récompenses allouées à la cérémonie des Césars dont celui du Meilleur Film et Meilleur Réalisateur !), l'artiste prodige Jacques Audiard nous revient avec un mélodrame en état de grâce. Coproduit par la Belgique et magistralement incarné par deux comédiens à la caractérisation écornée, cette ode à l'espoir et l'optimisme est transcendée par la virtuosité d'une mise en scène épurée. Suite à une violente rixe à la sortie d'une boite, Stéphanie se fait rapatrier chez son compagnon par le videur Ali, un père de famille en situation précaire parti emménager chez sa soeur avec son fils de 5 ans. Dresseuse d'orques dans un parc aquatique, Séphanie succombe à un terrible accident sur son lieu de travail l'amputant des deux jambes. Au fil des semaines, une relation fraternelle et sentimentale se nouent entre les deux amants. Pour ramasser un peu d'argent, Ali participe à des combats de rue clandestins alors qu'en intermittence, il tente maladroitement d'éduquer le petit Sam.


Eloge à la rage de vaincre et au courage de braver les aléas du destin, De Rouille et d'Os est une oeuvre clairsemée, un morceau de cinéma d'une élégance sobre car d'une acuité émotionnelle bouleversante. Sans céder au pathos lacrymal habituellement consigné dans le genre mélodramatique, Jacques Audiard nous illustre avec ambition formelle la tranche de vie de deux écorchés de la vie. Stéphanie est jeune fille aguicheuse en quête de reconnaissance tandis qu'Ali est un marginal défavorisé au tempérament irascible mais débordant d'un humanisme candide. Ces deux personnages au caractère autonome vont se rencontrer par le fruit du hasard et élaborer une relation cordiale à la suite d'un brutal accident. Traversé de moments de poésie empreint de lyrisme (Stéphanie contemplative devant la vitre d'un orque, lui adressant son attachement par le langage des signes) et d'effets de ralenti transcendant la brutalité des combats au corps à corps, De Rouille et d'os est une odyssée des sentiments en perdition. L'introspection intime de deux amants épris d'aspiration pour leur postérité et engagés dans une volonté de transcender leurs failles par un désir commun. Ses instants quotidiens de deux infortunés hésitant à dévoiler leur intuition vont toutefois se rapprocher et s'épauler par la cause d'un évènement inopportun aux conséquences préjudiciables. Habitée par l'attirance et le béguin, Marion Cotillard (je t'aime !) n'a peut-être jamais été aussi sobrement gracile dans sa candeur avisée pour extérioriser le tempérament chétif d'une handicapée éprise d'éthique et d'amour rédempteur. Révélé dans l'uppercut bovin Bullhead, Matthias Schoenaerts dégage une intensité tangible dans la retenue d'un écorché de la vie. Un individu au caractère vigoureux un peu trop instantané car incapable d'exprimer avec bienséance la tendresse imparti à son fils. Mais sa tolérance et sa compassion pour Stéphanie, l'échec d'une rupture familiale ainsi que la mésaventure d'un contretemps vont peu à peu le ramener à la raison d'un équilibre social plus épanoui. 


La rage d'aimer 
Transcendé par une mise en scène fastueuse et deux interprètes incandescents de fragilité humaine, De Rouille et d'Os est un moment précieux de cinéma séraphique. Une leçon de vie pour les infortunés et les insurgés de l'intolérance, une lutte perpétuelle pour la consécration. Un conte suave distillant des instants d'émotion sensitive dans son souci de vérité, confinant parfois au vertige (voir son point d'orgue traumatique) mais rattrapée par une repentance salvatrice.

31.10.12
Bruno Matéï

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