de James Wan. 2007. U.S.A. 1h31. Avec Ryan Kwanten, Amber Valleta, Donnie Wahlberg, Michael Fairman, Joan Heney, Bob Gunton, Laura Regan.
Sortie salles France: 21 Novembre 2007. U.S: 16 Mars 2007
FILMOGRAPHIE: James Wan est un producteur, réalisateur et scénariste australien né le 27 Février 1977 à Kuching (Malaisie), avant de déménager à Perth (Australie).
2004: Saw, 2007: Dead Silence, Death Sentence, 2010: Insidious. 2013: The Conjuring. 2013: Insidious 2.
Au 6è siècle avant J.-C., on croyait que les esprits des morts parlaient du ventre des vivants.
Synopsis: Un couple reçoit un colis anonyme contenant une poupée ventriloque. Peu après, la femme est retrouvée morte, la langue arrachée. Jamie Nash, son époux, entame alors sa propre enquête, laquelle le ramène dans sa ville natale, là où plane encore l’ombre de Mary Shaw, spectre vengeur qui terrorise les vivants.
Le premier éloge à faire au nouveau prodige de l’horreur, c’est l’éclat esthétique de sa scénographie gothique, d’un raffinement classieux. Porté par une photo désaturée tranchant avec un rouge rutilant, Dead Silence éblouit : James Wan cisèle ses cadres avec une ambition picturale rare. Qu’il s’agisse d’un amphithéâtre flambant neuf ou tombé en ruines, d’un cimetière diaphane, d’une bâtisse aux lignes mortuaires ou d’un village fantôme, tout suinte la beauté glaciale d’un cauchemar ancien.
Cette atmosphère séculaire d’une épouvante gothico-onirique captive d’autant plus que le pitch recycle habilement de vieilles ficelles — peur du noir, angoisse du mutisme — pour mieux les réinventer sous les traits d’une mégère flétrie flanquée d’une poupée sardonique.
À l’image d’un prologue terrifiant, James Wan orchestre un montage fin, distillant l’appréhension d’un danger diffus et sculptant le silence avec une précision sonore acérée. En jouant sur la peur enfantine de la poupée figée, il déclare son amour aux automates hagards, ici possédés par l’esprit vengeur de Mary Shaw. Dans un élan d’originalité, il revisite la figure du spectre maudit sous les traits d’une sexagénaire hargneuse, décidée à faire taire à jamais les enfants insolents en leur tranchant la langue.
Si Dead Silence parvient efficacement à ressusciter une épouvante archaïque, on peut peut-être se désolidariser de son épilogue, totalement dérisoire. Un rebondissement faisant écho à l’effet de stupeur déjà invoqué dans Saw, pour à nouveau décoiffer le spectateur. Or, cet épilogue poursuit sa ligne de conduite narrative à manipuler à sa guise l'ultime victime telle un pantin désarticulé.
"Le cri dans la gorge, le silence en héritage".
*Bruno
Il y a dans ce film quelque chose d’inhumainement froid. Un vide creusé dans la bouche des morts. Un hurlement qu’on n’a pas entendu, mais dont l’écho racle encore les murs de nos nerfs.
James Wan, jeune architecte de cauchemars, délaisse ici les chaînes et les pièges de Saw pour bâtir un mausolée gothique, un théâtre du silence où les morts parlent par l’intermédiaire du bois poli et des yeux de verre. Dead Silence n’est pas un film qui crie. C’est un murmure humide. Une comptine que chuchotent les cercueils fermés.
Au cœur du récit, Mary Shaw, spectre aux lèvres figées, fait de ses poupées les prolongements d’un traumatisme irrésolu. Elle ne tue pas. Elle recompose, découpe les corps pour mieux en faire des accessoires de théâtre. Elle sculpte les âmes avec la précision d’un artisan maudit. Ses marionnettes sont des cercueils miniatures, des orphelins sans fils visibles.
Et Jamie, lui, traverse ce récit comme un mort-vivant égaré. Son visage de veuf prématuré se décompose à mesure que les secrets remontent, que le passé familial remonte par la trachée, comme une bile noire. La vérité, au fond, c’est que tout le monde est déjà mort. Les vivants ne sont que des pantins avec un peu d’illusion dans les yeux.
Le théâtre abandonné, l’éclairage au néon malade, les chambres vides, tout semble exsangue. La mise en scène respire par spasmes. Chaque plan est une crypte. Chaque coupe, un cercueil qui claque.
Et puis vient la fin. Le dernier retournement. Celui qui serre la gorge et laisse une brûlure dans les amygdales. Le père mort depuis longtemps, manipulé comme un pantin humain… Mary Shaw qui vit encore, parasite silencieux logé dans une nouvelle hôte. Alors Jamie crie. Et c’est ce cri — enfin — qui le condamne.
Dans ce monde-là, ce n’est pas la mort qui tue, c’est le son.
Dead Silence, derrière sa trame de série B assumée, évoque la transmission du mal comme un virus généalogique, un poison logé dans la langue. C’est un film hanté, pas seulement par des fantômes, mais par les mots qu’on n’a pas su taire, les cris qu’on a laissés sortir. Un conte cruel pour adultes endormis.
Ne criez pas.
Elle écoute.
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