jeudi 28 décembre 2017

La Fille qui en savait trop / La ragazza che sapeva troppo.

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site dvdclassik.com

de Mario Bava. 1963. Italie. 1h28. Avec Letícia Román, John Saxon, Valentina Cortese, Titti Tomaino, Luigi Bonos, Milo Quesada.

Sortie salles France: 29 Janvier 1964. Italie: 10 Février 1963

FILMOGRAPHIEMario Bava est un réalisateur, directeur de la photographie et scénariste italien, né le 31 juillet 1914 à Sanremo, et décédé d'un infarctus du myocarde le 27 avril 1980 à Rome (Italie). Il est considéré comme le maître du cinéma fantastique italien et le créateur du genre dit giallo. 1946 : L'orecchio, 1947 : Santa notte, 1947 : Legenda sinfonica, 1947 : Anfiteatro Flavio, 1949 : Variazioni sinfoniche, 1954 : Ulysse (non crédité),1956 : Les Vampires (non crédité),1959 : Caltiki, le monstre immortel (non crédité),1959 : La Bataille de Marathon (non crédité),1960 : Le Masque du démon,1961 : Le Dernier des Vikings (non crédité),1961 : Les Mille et Une Nuits,1961 : Hercule contre les vampires,1961 : La Ruée des Vikings, 1963 : La Fille qui en savait trop,1963 : Les Trois Visages de la peur, 1963 : Le Corps et le Fouet, 1964 : Six femmes pour l'assassin, 1964 : La strada per Fort Alamo, 1965 : La Planète des vampires, 1966 : Les Dollars du Nebraska (non cédité), 1966 : Duel au couteau,1966 : Opération peur 1966 : L'Espion qui venait du surgelé, 1968 : Danger : Diabolik ! , 1970 : L'Île de l'épouvante ,1970 : Une hache pour la lune de miel ,1970 : Roy Colt e Winchester Jack, 1971 : La Baie sanglante, 1972 : Baron vampire  , 1972 : Quante volte... quella notte, 1973 : La Maison de l'exorcisme, 1974 : Les Chiens enragés,1977 : Les Démons de la nuit (Schock),1979 : La Venere di Ille (TV).

 
Œuvre séminale inaugurant le Giallo avec une étonnante maîtrise et une inventivité mordante, La Fille qui en savait trop conjugue avec brio l’horreur et le thriller sous l’œil baroque de Mario Bava, qui filme statues et ornementations à travers des cadrages alambiqués, comme un architecte du trouble. Écho féminin au célèbre titre hitchcockien, cette perle rare — aussi paradoxale soit-elle — reste cruellement méconnue, ignorée à l’époque, jamais reconnue à sa juste valeur. À cela s’ajoute le désintérêt croissant pour le roman de gare estampillé “Giallo”, qui n’attirait plus les lecteurs au seuil des années 60.

Si Bava, selon la rumeur, fut d’humeur irascible face à un projet qu’il jugeait trop teinté de comédie romantique policière, il y imprima pourtant sa marque. Du moins dans la version italienne, bien plus audacieuse que le remontage édulcoré et pittoresque destiné au marché américain. En soignant une atmosphère d’étrangeté, Bava cisèle un suspense affûté, comme un fil de rasoir entre rêve et réalité. 

Pitch: Arrivée à Rome pour visiter sa tante, la jeune Américaine Nora voit cette dernière succomber à un arrêt cardiaque. Errant dans la ville, hagarde, Nora devient le témoin d’un meurtre à l’arme blanche... avant de s’évanouir. À son réveil : aucun corps, aucun article dans les journaux. Hallucination ? Cauchemar ? Où s’arrête l’imagination, où commence le réel ?

 
Thriller horrifique passionnant, son intrigue charpentée distille maigres indices et faux-semblants autour de figures équivoques, de rebondissements suspendus. Entièrement centré sur Nora -fragile, attirée par l’inconnu, troublée par la perversité latente - le film scrute son esprit poreux à la paranoïa, à la psychose. Bava esquisse ce portrait mental avec une précision clinique : elle ira jusqu’à tendre un piège domestique avec du talc et du fil de nylon pour piéger un intrus invisible. Car La Fille qui en savait trop joue de l’ambiguïté : rêve ou perception extra-lucide ? Hallucination ou précognition ? L’enquête flotte entre rationalité bancale et menace invisible.

Et lorsque la vérité éclot - le portrait du coupable se révèle d’une puissance dérangeante. Glaçant dans sa présence fuyante, il suinte la folie d’une pulsion homicide nourrie de .... Bava, fasciné, scrute ce visage avec un fétichisme fiévreux. 

 
"La lucidité est une blessure".
Soutenu par une distribution solide - avec un John Saxon juvénile en contrepoint avenant -, un suspense coupé au cordeau et une imagerie charnelle au raffinement macabre, La Fille qui en savait trop amorce l’ADN du Giallo avec une modernité stupéfiante. Letícia Román, littéralement magnétique dans la peau d’une investigatrice en émoi, incarne la perméabilité du regard féminin à l’irruption du chaos. Une œuvre à redécouvrir de toute urgence, à marquer d’une pierre blanche - même si, un an plus tard, Bava transcendera l’essai en chef-d’œuvre absolu avec Six Femmes pour l’Assassin.

— le cinéphile du cœur noir

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