4 ans après les Valseuses, Bertrand Blier enrôle à nouveau le mythique tandem Depardieu / Dewaere pour une comédie acide reprenant le concept du triangle amoureux sous un angle moins vulgaire, effronté et choquant en dépit d'une ultime demi-heure abordant l'inceste et l'hébéphilie avec une sensibilité et une délicatesse éclipsant de justesse l'intolérable.
D'ailleurs, petite précision, il faut savoir que le film fut produit avec la Belgique et tourné dans cette région (pour les séquences finales) grâce à une législation moins drastique quant aux thèmes évoqués plus haut et pour une question de durées de tournage. L'acteur Riton Liebman étant un enfant au moment du tournage.
Et si le pitch (deux jeunes lurons tentent de satisfaire les besoins sentimentaux et sexuelles de leur partenaire) s'apparente à une séquelle des Valseuses, "Préparez vos mouchoirs" demeure moins provocateur, licencieux et autrement personnel à travers sa tonalité sémillante conjuguant à nouveau l'absurde et le réalisme naturaliste avec l'art consommé habituel de Blier.
Une farce de marivaudage aussi décalée que réjouissante car truffé d'humour (corrosif) quant aux situations lunaires et de verve impayable pour les dialogues prônant les valeurs de l'amitié, de l'amour et de la fidélité. Mais pas que, puisque nous questionnant sur la maternité, ce besoin maternel inné chez la femme dépeint ici sous l'impulsion du mal-être existentiel, d'une quête identitaire entre homme et femme notamment que tout sépare. Si bien que pour reprendre une illustre citation de Freud: “ Je n'ai toujours pas trouvé de réponse à la grande question : Que veulent-elles au juste ?
Eclatant l'écran comme de coutume auprès de leurs excentricités (ici) gentiment dévergondées; il faut louer la tendre complicité que manifeste Gérard Depardieu / Patrick Dewaere accompagné ici d'une Carole Laure néophyte à la fois languissante, vaporeuse, attendrissante en bovarienne étouffée (d'où ses crises d'angoisse et d'évanouissement aléatoires) finissant par découvrir l'amour auprès d'une innocence responsable si j'ose dire avec une pointe de provoc.
Une comédie sociale de ma région (le Nord) ancré dans les Seventies et dégageant un charme insolite auprès de sa poésie à la fois prude, sensible, osée que les protagonistes amorcent malgré eux sous la mainmise d'un tonton Blier farceur instillant pour le coup une tendresse inattendue auprès des non-dits et des réflexions/interrogations personnelles de ses marginaux aussi autonomes qu'hétérodoxes dans leur fureur de vivre teintée de désillusion, de désespoir.
Une merveille du cinéma Français donc évidemment infaisable aujourd'hui à revoir d'urgence pour les amateurs OFNI burné (tout en finesse !) qui laissent des traces dans le ❤️ et l'encéphale.
*Bruno
Distinctions:
Oscar du meilleur film étranger à la 51e cérémonie des Oscars
César de la meilleure musique originale pour Georges Delerue à la 4e cérémonie des César