lundi 20 janvier 2014

THE TRUTH ABOUT EMMANUEL

                                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmzvf.com

de Francesca Gregorini. U.S.A. 2013. 1h36. Avec Kaya Scodelario, Jessica Biel, Alfred Molina, Frances O'Connor, Aneurin Barnard, Jimmi Simpson.

Sortie salles France: Prochainement. U.S: 10 Janvier 2014

FILMOGRAPHIE:  Francesca Gregorini est une réalisatrice, productrice et scénariste américaine, née le 7 Août 1968 à Rome. 
2009: Tanner Hall. 2013: The Truth about Emanuel


Drame psychologique alloué à l'affliction maternelle, The Truth about Emanuel joue la carte de l'intimité avec une pudeur trouble. Sa mise en scène autonome préférant se focaliser sur l'ambiance feutrée d'états d'âme en quête de rédemption. Emmanuel, jeune fille introvertie, ne parvient pas à accepter la mort de sa maman au moment de son accouchement. Un jour, elle fait la rencontre de Linda, une voisine solitaire vivant recluse parmi son nourrisson. Sauf qu'en l'occurrence, le bébé est un jouet de substitution afin de pallier la disparition brutale du vrai rejeton. Pour ne pas la perturber, Emmanuel accepte le jeu d'exercer des séances de baby sitting à son domicile. Au fil du temps et de leur confiance, les deux jeunes femmes finissent par entamer une liaison amicale, jusqu'au jour où la vérité est dévoilée au grand jour !


En cinéaste indépendante privilégiée par le Festival de Sundance, Francesca Gregorini élabore une oeuvre fragile toute en psychologie pour ausculter l'alliance amicale de deux femmes égarées dans les eaux troubles de leur névrose. Reposant sur les frêles épaules de Jessica Biel et surtout Kaya Scodelario, The truth about Emmanuel trouve la sobre mesure pour nous émouvoir avec une discrétion presque timorée et parmi l'entremise de plages de poésie en relation avec la nature (l'eau et les étoiles ont une signification spirituelle dans les songes oniriques d'Emmanuel !). En jouant sur l'exubérance finaude d'une jeune fille difficilement apprivoisable, Kaya Scodelario étoffe un joli portrait féminin où ses sentiment de désarroi et de culpabilité ne nous sont pas affichés en spectacle. Sa sensualité naturelle littéralement magnétique permettant en outre d'extérioriser un climat d'étrangeté lattent qui va planer durant tout son cheminement. En second plan, Jessica Biel insuffle la même tempérance de composition mais en insistant sur le trouble affectif (plus préjudiciable) d'une femme ruinée par la perte de son bambin.   


Avec l'alibi d'un étrange script privilégiant l'émotion sobre et avec la cohésion de deux actrices issues de nouvelle génération (j'insiste à dire que Kaya Scodelario doit beaucoup de sa présence insolite pour prédominer inquiétude et empathie), The Truth about Emanuel détourne les conventions du drame par une réalisation sans fioriture, jusqu'au final mystique assez bouleversant. 

Dédicace à Pascal Frezzato
Bruno Matéï

jeudi 16 janvier 2014

ALABAMA MONROE (The Broken Circle Breakdown)


                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de Felix van Groeningen. 2012. Belgique. 1h52. Avec Veerle Baetens, Johan Heldenbergh, Nell Cattrysse, Geert Van Rampelberg, Nils De Caster, Robby Cleiren, Bert Huysentruyt, Jan Armoise, Blanka Heirman.

Récompenses: César du Meilleur Film Etranger, 2014
Label Europa Cinemas du Meilleur Film européen, Prix du Public Panorama, 2013
Prix du Meilleur Scénario au Festival du film de Tribeca, 2013.
Prix du Public au Festival CPH PIX à Copenhague.
Prix Ensor du Meilleur Film, Meilleur Réalisateur, Meilleur Montage, Meilleurs Costumes, Meilleure musique, Meilleure Photographie, Meilleure Actrice, Veerle Baetens, Meilleure Direction Artistique, Prix de l'Industrie pour Van Lauwereys au Festival du film d'Ostende.
Meilleure Actrice, Veerle Baetens au European Films Awards à Berlin.
Nomination aux Oscars pour le film en langue étrangère, 2014

Sortie salles France: 28 Août 2013. Belgique: 9 Octobre 2012

FILMOGRAPHIE: Felix van Groeningen est un réalisateur belge flamand, né à Gand en 1977.
2000: 50CC. 2004: Steve + Sky. 2007: Dagen zonder lief (des jours sans amour). 2009: La Merditude des Choses. 2012: The Broken Circle Breakdown


Electrochoc d'une intensité émotionnelle traumatisante, à tel point que des larmes s'épanchent sur mon clavier au moment même où j'essaie d'extérioriser mes impressions, Alabama Monroe est un drame sur le deuil infantile du point de vue parental. Le réalisateur se focalisant sur la reconstruction du couple après que leur fille eut été emportée par un cancer.


En alternant les évènements du passé et ceux du présent, le réalisateur établit un contraste entre les joies de l'épanouissement et l'infortune funeste vis à vis d'une relation conjugale. Lui, est un chanteur féru de country music, athée et caractériel. Elle, est une tatoueuse de métier, croyante et spontanée. A eux deux, ils forment un couple harmonieux auquel le mariage finira par les unir pour le meilleur et pour le pire. Au rythme de la country chantonnée dans les vieux cabarets à guichet fermé, Felix van Groeningen nous entraîne dans un tourbillon musical auquel l'icone des tatouages et la nature spirituelle vont venir cristalliser une réflexion inhérente sur la foi. Avec une émotion viscérale au plus près de l'affliction des parents, le réalisateur observe leur divergence d'opinion fondée sur le fondement catholique et le nihilisme du néant. Quand bien même Didier et Elise accumuleront les disputes dérisoires pour se reprocher mutuellement la mort de Maybelle. A travers leur destin, où l'alchimie du bonheur et l'épreuve du malheur ne cessent de se télescoper, le réalisateur scande notamment l'hymne existentiel au sein d'une nature candide, en y opposant l'idéologie optimiste (la foi en la réincarnation) et le défaitisme de la désillusion (la résolution du néant). Cette rancune furibonde engendrée par Didier (notamment sa remise en cause du fondamentalisme ricain réfrénant le progrès médical) va confiner le couple dans une discorde psychologique destructrice, quand bien même Elise était prête à pardonner la fatalité du deuil. L'affrontement moral, la violence de leurs sentiments vont atteindre un point de non-retour, avant qu'une perspective d'aspiration ne vienne bousculer les repères de Didier !


Vivre et mourir
Sans aucun sentimentalisme outré et avec l'aide d'un habile montage, Felix van Groeningen délivre sans anesthésie un portrait sensitif sur ce couple en berne, incapable de surmonter l'obstacle du deuil, faute de leur chagrin et d'une philosophie antinomique. Mais avec le pouvoir exaltant de la country et la destinée mystique d'un volatile, Alabama Monroe en extrait finalement une élégie incandescente inscrite dans la croyance. Avec son thème délicat traité avec autant de dignité et refus de voyeurisme, Alabama Monroe est un crève-coeur d'une intensité difficilement gérable (jusqu'au malaise !), que les comédiens, transis d'expression viscérale, vont immortaliser dans leur écorchure meurtrie.  
Pour public averti

La critique de La Merditude des Choses (la): http://brunomatei.blogspot.fr/…/la-merditude-des-choses-de-…

Dédicace à Jenny Winter
Bruno Matéï


mercredi 15 janvier 2014

A.C.A.B.: All Cops Are Bastards. Prix sang neuf, Beaune 2012.


                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site movpins.com

de Stefano Sollima. 2012. Italie. 1h30. Avec Pierfrancesco Favino, Filippo Nigro, Marco Giallini, Andrea Sartoretti, Domenico Diele, Roberta Spagnuolo.

Sortie salles France: 18 Juillet 2012. Italie: 27 Janvier 2012

Récompense: Prix sang neuf au Festival International du film policier de Beaune, 2012

FILMOGRAPHIE: Stefano Sollima est un réalisateur italien, né le 4 Mai 1966 à Rome.
2012: A.C.A.B.


Pour rappel, A.C.A.B. (All Cops are Bastards / "Tous les flics sont des batards") est un sigle d'intimidation exploité par les skinheads anglais durant les années 70. Avec souci de réalisme au coeur des affrontements, le film relate la quotidienneté d'un trio de CRS contraints d'exercer leur métier dans un climat de haine omniprésent. A la suite de l'agression sanglante d'un de leur comparse et de la mort d'un policier, ils décident de retrouver les responsables afin d'appliquer la loi du talion.


Témoignage choc d'une Italie en pleine dérive fasciste, Stefano Sollima dresse un constat alarmant d'une société de crise où chômage, racisme et insécurité font bon ménage. A travers la dérive réactionnaire d'une section policière, le réalisateur met en exergue la contagion de la violence quand des CRS sont couramment provoqués par des fouteurs de troubles à la sortie des stades. Contraints de canaliser leur peur et leur colère face à une situation houleuse qui pourrait à tous moments dégénérer, ils doivent éviter l'usage de la matraque pour riposter aux agressions. Défavorisés par leur manque d'effectif, déconsidérés par leur supérieur et réputés comme des "bâtards" par la jeunesse marginale, nos trois comparses doivent également gérer une vie conjugale déstructurée. Cette insécurité régie à l'intérieur des villes découle notamment du traitement de faveur infligé à l'affluence des roms et des sans-papiers. Quand bien même les habitants italiens les plus défavorisés se retrouvent le plus souvent occultés par leur gouvernement afin de récupérer un logement décent. Avec l'entremise de skinhead toujours mieux organisés pour perpétrer leur dictature, Stefano Sollima dresse un état des lieux d'une montée de la xénophobie, que ce soit du camp des délinquants que celui même des forces de l'ordre. Car nos ripoux déboussolés, sévèrement bafoués par le sentiment d'injustice, vont finalement se résoudre à répercuter la même violence gratuite dans leurs pulsions vindicatives. L'intensité du film réside donc dans la pression psychologique de cette milice policière, délibérée à exploiter leur symbole d'autorité pour se venger des humiliations et agressions quotidiennes pratiquées en interne de leur profession.


Baignant dans un climat d'insécurité inquiétant où la tension s'avère toujours aussi progressive (à l'instar de sa BO rock endiablée !), A.C.A.B rend hommage au métier ardu des CRS pour leur flegme imparti au maintien de l'ordre en cas d'évènements populaires. Plus inquiétante est la dérive réactionnaire infligée ici à l'insigne policier et le constat d'échec de la violence urbaine que nos politicards ont finalement engendré par leur laxisme et leur incompétence. Un cri d'alarme édifiant !

Dédicace à Stéphane Passoni
Bruno Matéï

mardi 14 janvier 2014

The Spectacular Now

                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site notrecinema.com

de James Ponsoldt. 2013. U.S.A. 1h35. Avec Miles Teller, Shailene Woodley, Brie Larson, Jennifer Jason Leigh, Mary Elizabeth Winstead, Kyle Chandler.

Sorties salles France: 8 Janvier 2013. U.S: 18 Janvier 2013

FILMOGRAPHIE: James Ponsoldt est un réalisateur et scénariste américain, né en 1978
2006: Off the black. 2012: Smashed. 2013: The Spectacular Now 


Je m'appelle Suther Kelly et j'ai 18 ans. Par rapport aux autres enfants, je n'ai pas eu beaucoup d'épreuves à surmonter. Pas vraiment. Des problèmes me sont arrivés, c'est sûr. Mais les problèmes, ça arrive tout le temps, non ? Mais le vrai challenge dans ma vie, la vraie épreuve... C'est moi. Ca a toujours été moi. Aussi loin que je m'en souvienne, je n'ai jamais eu peur. Peur de l'échec... De laisser tomber les gens... De les blesser... D'être blessé. Je pensais que si je baissais ma garde et que je me concentrais sur d'autres choses... Si je ne pouvais même pas la sentir, alors aucun mal ne m'arriverait. J'ai foiré. Non seulement, je me suis fermé à la douleur, mais je me suis fermé à tout le reste. Le bon et le mauvais. Jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien. C'est bien de vivre dans l'instant présent, mais la meilleure chose à propos du présent, c'est qu'il y aura un autre demain. Et je vais faire en sorte qu'il ait de l'importance. Bien à vous. Sutter Kelly. 

The Spectacular now, ce moment précis de l'instant présent où tout peut arriver ! L'alternance du blanc et du noir, la névrose du doute et de l'espoir ! L'instant suprême où notre raison d'exister peut être reconsidérée à tous moments ! Mélo sentimental où le concept de l'amour est élevé à son niveau le plus candide, The Spectacular now s'achemine en parallèle vers le cri d'alarme d'une démission parentale. En l'occurrence, celui d'un père déchu incapable d'apporter un regain d'attention envers sa progéniture et celui de sa famille. Un quadra paumé préférant sillonner les bars malfamés en compagnie d'une aguicheuse d'un soir plutôt que de se soucier de l'avenir de son rejeton. Ainsi, à travers l'idylle naissante de deux adolescents, le réalisateur radiographie l'introspection douloureuse d'un jeune étudiant, Sutter Kelly lourdement éprouvé par l'absence de ce père alcoolique. Ce manque d'amour et d'attention se répercutent inévitablement sur son équilibre moral et celui de ses études scolaires, jusqu'à ce que l'alcool devienne un palliatif pour apaiser sa conscience. Mais au hasard d'une rencontre amoureuse, son destin va bouleverser la donne jusqu'à ce que l'instant présent, si vanté dans ses principes, soit reconsidéré pour aborder une éventuelle postérité.


Au détour d'un bouche à oreille élogieux ou d'une récompense suprême (Prix Spécial du Jury à Sundance), certains films indépendants vous abordent sans prévenir et vous entraînent dans un vortex d'émotions où la magie du cinéma renoue avec l'angélisme le plus épuré. Car emporté par la grâce des deux jeunes interprètes (ils dégagent un jeu naturel aussi prude que spontané à l'instar de leur physionomie ordinaire sans fard !), The Spectacular Nox réinvente la thématique de l'amour avec une simplicité digne. Exit donc la convention du pathos et les clichés impartis au teen movie trivial, James Ponsoldt n'ayant point besoin de sortir les violons pour faire pleurer dans les chaumières ! Ainsi, en jouant sur la complicité pleine de fraîcheur de ces deux comédiens, le réalisateur aborde des instants de grâce d'un réalisme ténu. Au plus près de leur relation inscrite dans la tendresse et la confiance, The Spectacular Now émule leur fragilité avec une dimension psychologique bouleversante. Notamment du point de vue de Sutter, lourdement accablé par le dépit depuis ses retrouvailles avec son père. Cette manière épurée d'y filmer son désarroi et son chagrin nous terrassant d'émotions, à l'instar des échanges sentimentaux que les amants se livrent avec compassion. L'incroyable pureté qui se dégage des moments d'intimité (leur première relation sexuelle) nous ébranlent le coeur, notamment parce qu'elle nous rappelle notre premier émoi amoureux. On peut en dire autant du réconfort maternel que Sutter éprouve avec une douloureuse considération (sa confiance est enfin retrouvée par la parole noble de sa mère !) et du bonheur communautaire qu'il éprouve en regardant danser ses camarades de classe au sein du bal promotionnel. Ce florilège d'émotions, le réalisateur les véhiculent avec son intégrité humaine en comptant sur la prestance incandescente des jeunes acteurs en ascension de par leur douleur moral qu'ils traversent entre la contradiction de l'espoir, de la rancoeur et de l'amertume.


De manière simple mais authentique, The Spectacular Now réinvente la notion romanesque parmi l'expérience trouble de l'adolescence ici malmenée de démission parentale découlant d'une crainte de souffrir. Il en découle un cheminement initiatique confronté à l'apprentissage de la maturité, où la remise en question demeure une catharsis afin de s'épargner le poids de la culpabilité et du remord. Un moment de cinéma sensitif en somme confinant au vertige mais débordant d'espoir et d'optimisme au final même s'il faut prévoir les mouchoirs pour une bonne cause. 

Récompenses: Prix Spécial du Jury des meilleurs acteurs, Miles Teller, Shailene Woodley au festival de Sundance, 2013
Grand Prix du Jury "Future Wave Feature".
Meilleur Film passé inaperçu (ex-aequo avec The Kings of Summer).
Meilleure Actrice de second rôle pour Shailene Woodley

*Bruno 
16.06.22
14.01.14

lundi 13 janvier 2014

LA BATAILLE DE LA PLANETE DES SINGES (Battle for the Planet of the Apes)

                                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Jack Lee Thompson. 1973. U.S.A. 1h30. Avec Roddy McDowall, Claude Akins, Natalie Trundy, Severn Darden, Lew Ayres, John Huston, Paul Williams, Austin Stoker.

Sortie salles France: 2 Août 1973. U.S: 15 Juin 1973

FILMOGRAPHIE: Jack Lee Thomson, de son vrai nom John Lee Thompson, est un réalisateur, scénariste et producteur britannique né le 1er août 1914 à Bristol (Royaume-Uni), décédé le 30 août 2002 à Sooke (Canada).
Avec 47 longs-métrages, le cinéaste a abordé tous les genres avec plus ou moins de bonheur dont certains font office de chef-d'oeuvre. On peut citer à titre d'exemples Les Canons de Navarone, Les Nerfs à vif, la Conquête de la planète des singes, la Bataille de la Planète des singes, le Bison Blanc, l'Empire du Grec, Monsieur St-Yves, Passeur d'hommes et Happy Birthday (son unique incursion dans le slasher). Enfin, il est notamment responsable de la saga des justiciers avec l'aimable complicité de son acteur fétiche Charles Bronson (Le Justicier de Minuit, l'Enfer de la Violence, la Loi de Murphy, le Justicier braque les dealers, le Messager de la mort et Kinjite, sujets tabous).


"Au commencement, Dieu créa la bête et l'homme pour que tous deux vivent en amis et se partagent un monde en paix. Mais, avec le temps, l'homme trahit la confiance de Dieu. Bravant la volonté divine, il livra des guerres sanglantes non seulement contre sa propre espèce, mais aussi contre les singes, qu'il réduisit en esclavage. Jusqu'au jour où ces derniers furent doués du langage !"

Dernier chapitre d'une saga inégale mais oh combien fascinante, la Bataille de la planète des singes s'achève de manière anecdotique pour illustrer le dernier conflit guerrier qui opposa civils et primates. Au sein de sa communauté, César tente d'établir un havre de paix parmi une poignée de survivants humains et en dépit de l'opposition drastique du gorille Aldo. Quand bien même une milice de mutants rescapés de l'holocauste nucléaire décide de leur déclarer la guerre.


Efficacement mené, la Bataille de la Planète des singes joue essentiellement la carte du divertissement modeste à travers son alliage d'affrontements guerriers et de rivalités humaines où la violence des armes riposte à la réflexion pacifiste. Jack Lee Thompson comptant sur l'hostilité de deux antagonistes forts en gueule pour accroître l'intérêt d'une intrigue dont on connaît déjà l'issue depuis le 1er volet. C'est donc avec l'entremise opiniâtre de Aldo le gorille et du gouverneur Kolp qu'il compte insuffler une certaine densité aux enjeux belliqueux. En dépit d'un manque évident d'ambition dans son caractère épique, le film attise la sympathie grâce en partie au caractère attachant des personnages, à la spéculation invoquée à la guerre (comment des conflits de divergence fondés sur la méfiance et la peur de l'autre peuvent céder à la rébellion et employer les armes !) et à une scénographie post-apo assez bien retranscrite malgré le peu de moyens alloués.
Mais c'est principalement du point de vue autoritaire de César (toujours aussi remarquablement campé par Rody Mc Dowall) que la bataille si escomptée réussit à éveiller l'intérêt, notamment lorsqu'il finit par céder à ses pulsions de rancune pour châtier le responsable du meurtre de son fils. Par son acte réactionnaire, on peut y évoquer une réflexion sur la vengeance (un meurtre doit-il être vengé par un autre meurtre ?), quand bien même le portrait imparti à Aldo laisse en exergue une méditation sur l'intolérance par son idéologie totalitaire.


Si la Bataille de la planète des singes s'avère l'un des plus faibles opus, il n'en demeure pas moins agréablement troussé dans sa réalisation compétente et suffisamment efficace pour ne jamais ennuyer. En prime, le caractère spectaculaire des affrontements guerriers (notamment la stratégie ironique employée par César pour emporter la mise !) nous divertit avec la traditionnelle complicité du simien, miroir de notre espèce humaine ! Puisque dans leur orgueil et leur ignorance, ils sont condamnés à réitérer nos mêmes erreurs jusqu'à éradication de la Terre !  

Les autres opus de la saga: 
http://brunomatei.blogspot.fr/2013/12/la-planete-des-singes-planet-of-apes.html
http://brunomatei.blogspot.fr/2013/12/le-secret-de-la-planete-des-singes.html
http://brunomatei.blogspot.fr/2013/12/les-evades-de-la-planete-des-singes.html
http://brunomatei.blogspot.fr/2014/01/la-conquete-de-la-planete-des-singes.html

13.01.14. 3èx
Bruno Matéï 

vendredi 10 janvier 2014

LE HOBBIT: LA DESOLATION DE SMAUG (The Hobbit: The Desolation of Smaug)

                                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site notrecinema.com

de Peter Jackson. 2013. Nouvelle Zélande/U.S.A. 2h41. Avec Martin Freeman, Ian McKellen, Richard Armitage, Ken Stott, Graham McTavish, Aidan Turner, Dean O'Gorman, James Nesbitt, William Kircher, Stephen Hunter, John Callen, Peter Hambleton, Mark Hadlow, Jed Brophy, Adam Brown, Orlando Bloom, Evangeline Lilly.

Sortie salles France: 11 Décembre 2013. U.S: 13 Décembre 2013. Nouvelle Zélande: 12 Décembre 2013

FILMOGRAPHIE: Sir Peter Robert Jackson est un réalisateur, producteur et scénarise néo-zélandais, né le 31 Octobre 1961 à Pukerua Bay, North Island (Nouvelle-Zélande).
1987: Bad Taste. 1989: Les Feebles. 1992: Braindead. 1994: Créatures Célestes. 1995: Forgotten Silver. 1996: Fantômes contre fantômes. 2001: Le Seigneur des Anneaux. 2002: Les Deux Tours. 2003: Le Retour du Roi. 2005: King-Kong. 2009: Lovely Bones. 2012: Le Hobbit: un voyage inattendu. 2013: Le Hobbit: la Désolation de Smaug. 2014: Le Hobbit: Histoire d'un aller et retour.


Après une première friandise faisant office de récréation infantile, La Désolation de Smaug joue la carte de la sobriété avec une narration beaucoup moins échevelée et des personnages au caractère plus affirmé, voir aussi équivoques. Je pense à la relation ambiguë qu'entretient Thoron avec Bilbon, quand bien même ce dernier semble épris du pouvoir de l'anneau et de l'arkenston (une pierre précieuse planquée sous le trésor de Smaug). L'enjeu majeur s'avère également beaucoup plus drastique pour accéder au fameux sommet d'Erebor parmi l'hostilité du dragon. Thorin, Bilbo et leurs comparses vont tenter de parvenir à la montagne solitaire pour récupérer leur trésor et le partager avec la population de Lacville. Mais l'inévitable monstre ailé, Smaug, veille sur son trône ! Avant cela, nos héros vont devoir se confronter à l'hostilité des elfes depuis leur intrusion dans la forêt noire. Néanmoins, ils vont devoir communément s'allier afin de combattre l'armée des orques commandée par Azog. Pendant ce temps, Gandalf se prépare à sillonner le repère du nécromancier.


Ce bref résumé émaillé d'ellipses représente la topographie que Peter Jackson s'est entaché à respecter. Exit le côté ultra jouissif des morceaux de bravoure invoqués dans le premier volet ainsi que l'esprit infantile qui planait durant toute la croisade des nains, La Désolation de Smaug s'avérant ici beaucoup plus posé, car beaucoup moins fertile en rebondissements trépidants. Le réalisateur privilégie donc la dimension noble ou cupide de ces personnages avec un sens psychologique plus mature. Une large place est notamment accordée à leurs relations conflictuelles, à l'instar des rapports houleux entrepris entre les elfes et les nains, mais aussi ceux des villageois de Lacville, plutôt méfiants envers l'intrusion de l'étranger depuis leur déroute avec Smaug. Il fait notamment intervenir de nouveaux protagonistes comme l'elfe Tauriel, éprise de romance avec Legolia et Tauris, ou encore Bard, un batelier avenant venu aider la troupe des nains. Inévitablement, ce second volet ne manque pas de coordonner quelques séquences de bravoures vertigineuses (l'attaque des arachnides dans la forêt et la poursuite en tonneau sur la rivière s'avèrent étourdissants de fluidité technique dans le sens véloce des affrontements) avant l'ampleur de son final homérique culminant dans les sombres galeries du dragon (l'immensité de la scénographie laisse pantois et les attaques du monstre redoublent de mesquinerie !). Avec un sens du spectacle lyrique déployant un environnement crédible au sein d'une nature fantasmagorique, Peter Jackson recrée un univers d'héroic fantasy sans jamais calquer sur ses antécédents modèles. Ce qui prouve une fois de plus sa capacité à transcender un esthétisme formel dans la variété des décors insolites (le village de Lacville situé sur l'eau, le repère tentaculaire du dragon, le palais des elfes et enfin les sombres ruines du nécromancier). Enfin, avec l'iconographie du fameux dragon de feu, le cinéaste iconise un monstre ailé terriblement impressionnant dans son charisme écaillé, d'autant plus pourvu d'un langage guttural pour intimider ses adversaires. 


Moins généreux en terme d'action mais beaucoup plus substantiel dans l'étude caractérielle, La Désolation de Smaug renoue une fois encore avec le spectacle épique en accordant plus d'importance à la présentation des personnages et leur parcours personnel. On sera par contre terriblement frustré du dénouement inachevé, puisque contraint d'attendre le 3è volet pour escompter une confrontation belliqueuse des plus tragiques. En cinéaste avisé, toujours aussi délibéré à transfigurer l'archétype de l'Heroic-fantasy, Peter Jackson ne perd rien de son éloquence pour imposer sa nouvelle trilogie. Une saga plus modeste car moins guerrière et intense, mais toute aussi captivante dans ses enjeux établis, ses personnages mythologiques et son sens du merveilleux.  

Le Hobbit: http://brunomatei.blogspot.fr/2012/12/photo-empruntee-sur-google-appartenant.html
Bruno Matéï


jeudi 9 janvier 2014

CANNIBAL MAN (La semana del asesino)

                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site mondoexploito.com

de Eloy De La Iglesia. 1972. Espagne. 1h30. Avec Vicente Parra, Emma Cohen, Eusebio Ponsela, Charly Bravo, Fernando Sanchez Polack, Goyo Lebrero.

Sortie salle Espagne: 22 Avril 1974

FILMOGRAPHIE: Eloy Germán de la Iglesia (Zarautz, Guipuscoa, 1er janvier 1944 - 23 mars 2006) est un réalisateur espagnol. 1966: Fantasia... 3. 1969: Algo amargo en la boca. 1970: Cuadrilatero. 1971: El techo de cristal. 1972: Cannibal Man. 1973: Nadie oyo gritar. 1973: Una gota de sangre para morir amando. 1975: Juego de amor prohibido. 1976: La otra alcoba. 1977: Los placeres ocultos. 1977: La Criatura. 1979: El diputado. 1979: El sacerdote. 1980: Miedo a salir de noche. 1981: La mujer del ministro. 1981: Navajeros. 1982: Colegas. 1983: El Pico. 1984: El Pico 2. 1985: Otra vuelta de tuerca. 1985: La Estanquera de Vallecas. 1987: La Estanquera de Vallecas. 2001: Caligula. 2003: l'Amant bulgare.


Film majeur au sein de la filmographie de Eloy De La Iglesia et pour le répertoire du cinéma d'horreur ibérique, Cannibal Man (titre stupide car infondé !) retrace la dérive meurtrière d'un assassin après avoir porté assistance à l'agression de sa fiancée. Replié sur lui même et plongé dans le remord, il n'ose avouer son crime accidentel à la police, faute de préjugés sur sa condition sociale. Bien avant Maniac, Henry ou l'étonnant Pyromaniac de Joseph Ellison, un réalisateur s'intéressait déjà à traiter d'un cas de serial-killer dans sa plus stricte intimité, au coeur d'une claustration poisseuse. La scénographie confinée autour d'un bidonville distillant ici un climat dépressif tangible qui ira se répercuter sur la dégénérescence morale de notre individu. Dans sa condition de prolétaire, notre tueur est en l'occurrence un ouvrier besogneux exerçant son activité au sein d'un abattoir.


Déjà épris de névroses pathologiques bien avant ses meurtres (son malaise viscéral face à des photos de charme), il semble déjà souffrir d'un refoulement identitaire (une potentielle attirance homosexuelle ?). Sa rancoeur d'avoir accompli un meurtre et son incapacité à accepter la réalité de son acte vont le plonger dans une contrainte ingérable et le pousser à répercuter la violence en éliminant tous les témoins gênants. Durant 1h30, le réalisateur nous projette dans sa quotidienneté avec souci de réalisme sordide (les meurtres graphiques sont parfois impressionnants quand bien même l'atmosphère irrespirable dégage une odeur de rance émanant des cadavres de la chambre !) épaulé d'une dimension psychologique scrupuleuse (son sens de la vie n'accorde plus aucun bénéfice). A travers ses diverses relations familières (la soeur de son frangin) ou amicales (la tenancière, la passante et le voisin homosexuel), le réalisateur dresse également l'état des lieux d'une population repliée sur elle même car livrée à l'abandon, l'ennui et la solitude. Par leur situation précaire où l'insalubrité urbaine et le chômage sont indissociables de leur environnement, nos protagonistes sont confinés dans le désarroi affectif, le refoulement sexuel, voir notamment la dépression. Et si la rédemption du tueur verra finalement le jour, c'est grâce à la compassion d'un individu à tendance suicidaire où la peur de mourir n'aura plus lieu d'être.


Dérangeant et malsain, désenchanté et dépressif, Cannibal Man est d'autant plus déstabilisant qu'il est accentué d'une mise en scène expérimentale usant de métaphores et d'un contrepoint musical tantôt dissonant, tantôt mélancolique. Si la pauvreté des dialogues et le jeu perfectible des comédiens peut au départ prêter à préjudice, il finit par renforcer une ambiance interlope des plus troublantes. Enfin, on peut louer l'interprétation de Vicente Parra en tueur déprimé, qui, en dépit de son visage inexpressif, sait tout de même retransmettre désarroi et affliction dans son inextricable solitude. Un psycho-killer crépusculaire où le sentiment de désespoir est notamment engendré par la misère sociale, l'exclusion et le chômage. 

La critique de Pyromaniac (adulé par Tarantino !)  http://brunomatei.blogspot.fr/2013/05/pyromaniac-dont-go-in-house.html
La critique de Henryhttp://brunomatei.blogspot.fr/2013/10/henry-portrait-dun-serial-killer-henry.html
La critique de Maniachttp://brunomatei.blogspot.fr/2011/02/maniac.html

09.01.14. 2èx
Bruno Matéï