mercredi 21 septembre 2016

STARRY EYES

                                                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Kevin Kolsch et Dennis Widmyer. 2014. U.S.A. 1h38. Avec Alex Essoe, Amanda Fuller, Noah Segan, Fabianne Therese, Shane Coffey, Natalie Castillo.

Inédit en salles en France. Sortie U.S: 14 Novembre 2014.

FILMOGRAPHIE: Kevin Kolsch et Dennis Widmyer sont des réalisateurs, producteurs et scénaristes américains.
2016: Holidays (segment "Valentine's Day"). 2014: Starry Eyes. 2009: Absence. 2003: Postcards from the Future: The Chuck Palahniuk Documentary (Documentaire).


Inédit en salles en France et sous support numérique, Starry Eyes porte la signature de deux réalisateurs néophytes si bien qu'il s'agit de leur second long-métrage si j'occulte leur documentaire (Postcards from the Future: The Chuck Palahniuk Documentary). Jeune serveuse de fast-food en intermittence, Sarah rêve d'accéder à la consécration en postulant pour un rôle majeur de film d'horreur. Mais sa rencontre avec un éminent producteur va l'influencer à arpenter un voyage au bout de l'enfer. Alors que The Neon Demon de Nicolas Winding Refn fut accueilli en grande pompe à la montée des marches de Cannes et qu'une majorité du public et de la critique l'encensèrent, Starry Eyes sort dans l'indifférence générale comme en témoigne notamment sa discrète sortie en salles ricaines. Car prenant pour thèmes similaires l'élitisme et le culte de la célébrité qu'une jeune comédienne en herbe tente d'accéder avec constance désespérée, Starry Eyes épouse la carte d'une horreur psychologique hérité du cinéma de Lynch et de Polanski.


Tant par sa mise en scène expérimentale s'efforçant de distiller un malaise lestement palpable chez le portrait d'une héroïne en mal d'amour et de reconnaissance que de ses décors opaques provocant un sentiment d'insécurité éthéré lorsque Sarah auditionne face au témoignage présomptueux de deux jury. Par le biais de son cheminement psychologique endurant et contradictoire à céder ou à refuser le chantage d'un producteur lubrique, Starry Eyes constitue une charge virulente contre l'industrie prolifique du 7è art quand bien même nos deux auteurs n'hésitent pas à y dénoncer leurs méthodes immorales à repousser les limites de la bienséance lorsqu'une jeune actrice est forcée de se mettre à nu devant une caméra voyeuriste. Jusqu'où peut-on exploiter son éventuel talent au risque de provoquer chez le sujet une dégénérescence morale en perte identitaire ? Métaphorique quant au vampirisme de ces producteurs dénués d'humanité, Starry Eyes emprunte le genre fantastique pour mieux nous ébranler et semer la confusion chez l'esprit névrosé d'une actrice en perte de repères. Le spectateur étant témoin de ces agissements et réflexions personnelles avec une attention si scrupuleuse que l'on s'identifie viscéralement à sa déchéance immorale ! Ce qui nous converge à un dernier acte littéralement cauchemardesque si bien que le réalisme d'un gore crapuleux nous imposera des exactions à la limite du soutenable ! On peut d'ailleurs reprocher la facilité à laquelle les réalisateurs font preuve pour clôturer leur intrigue hermétique alors que l'impact émotionnel de ses séquences horrifiques escarpées nous dérangent par le refus du hors-champ !


"Le comédien est une personne atteinte de schizophrénie (in)contrôlée."
Bad trip expérimental jusqu'au-boutiste dans sa vision terrifiante d'une industrie hollywoodienne pactisant avec le mythe de Faust, Starry Eyes met à mal les sens du spectateur partagé entre l'effroi et l'empathie d'une victime soumise par le Mal. Pour parachever, on peut saluer le talent et la beauté virginale d'Alex Essoe se livrant (et se transformant) corps et âme face caméra avec une acuité viscérale. 

Dédicace à George Abitbol
B-M

mardi 20 septembre 2016

SAVAGE WEEK-END

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site mondoconfidential.wordpress.com

de David Paulsen  et John Mason Kirby (non crédité). 1976/79. 1h28. U.S.A. Avec Christopher Allport, Jim Doerr, David Gale, Devin Goldenberg, Marilyn Hamlin, Caitlin O'Heaney, Jeff Pomerantz, William Sanderson.

Inédit en salles en France.

FILMOGRAPHIE: David Paulsen est un réalisateur, producteur et scénariste américain.
1976/79: Savage Week-end. 1980: Schizoïd.


                                                              Chronique express

Une curiosité Bis inédite en salles en France mais tout juste exhumée de l'oubli grâce à notre éditeur chéri Artus Films ! En dépit de l'évidente maladresse de sa mise en scène, du jeu superficiel des comédiens méconnus, des dialogues risibles et des incohérences narratives (notamment les motivations vaseuses du tueur), Savage Week-end parvient à distiller un climat malsain sous l'impulsion de séquences lubriques parfois audacieuses (la traite de la vache !) que des protagonistes interlopes ne cessent de s'échanger afin de tuer l'ennui. Qui plus est, en exploitant soigneusement le cadre bucolique d'une nature idyllique émane un petit pouvoir d'envoûtement, notamment grâce au parti-pris documenté d'une réalisation bricolée bien ancrée dans son époque symptomatique des Seventies.
Une sympathique mauvaise série B donc, psycho-killer avant-coureur, à privilégier aux inconditionnels de curiosité marginale, à condition aussi de s'y préparer avec beaucoup d'indulgence.

B.M

lundi 19 septembre 2016

LA DERNIERE ORGIE DU 3E REICH / DES FILLES POUR LE BOURREAU / BOURREAUX SS

                                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site ladylink.org 

"L'ultima orgia del III Reich" de Cesare Canevari. 1977. Italie. 1h32. Avec Marc Loud, Daniela Levy, Maristella Greco, Antinesca Nemour, Fulvio Ricciardi, Caterina Barbero.

Sortie salles France: 7 Décembre 1977. Italie: 31 Janvier 1977

FILMOGRAPHIE: Cesare Canevari est un réalisateur et scénariste italien né en 1927 à Milan, décédé le 25 Octobre 2012. 1983: Delitto carnale. 1977 Des filles pour le bourreau. 1976 Parties déchaînées. 1974 Il romanzo di un giovane povero.  1970 ¡Mátalo! 1969 Moi, Emmanuelle. 1968 Una iena in cassaforte. 1965 Un tango dalla Russia.  1964 Per un dollaro a Tucson si muore.


Sorti deux ans après Ilsa, la Louve des SSLa Dernière orgie du 3è Reich exploite avec une intelligence inhabituelle le filon de la Nazisploitation initiée par les Damnés, Portier de Nuit et Salon Kitty. Dans le sens où Cesare Canevari évacue l'aspect grand-guignolesque des séquences traditionnelles de tortures SS pour privilégier la dimension humaine équivoque échangée entre une jeune déportée et un commandant tyrannique. Ce qui ne veut pas dire que cette production scabreuse ne s'épargne pas de distiller un climat obscène aussi fétide que déviant lors de certaines séquences d'humiliations, d'exécutions et de cannibalisme à la limite de la nausée. Pourtant, si certains effets-chocs se laissent un peu gagner par une certaine complaisance (insert de gros plans gores ou X), le cinéaste évite l'esbroufe de sa violence graphique par le biais d'un montage concis et d'effets de mise en scène où le hors-champs prédomine. Lisa est envoyée dans un "camp d'amour" afin de satisfaire les appétits lubriques d'une clientèle nazie. Le Commandant Conrad von Starker est particulièrement sensible au comportement impassible de cette dernière si bien qu'il s'efforce de lui infliger diverses tortures afin de la faire craquer. Peu à peu s'installe entre eux une étrange relation amoureuse sur fond de masochisme.


Série B d'exploitation sombrée dans l'oubli depuis sa sortie salles et VHS, La Dernière orgie du 3è Reich surprend agréablement par son réalisme blafard et l'aura perméable du climat obscène qui en émane sous l'impulsion du duo d'amants maudits. On peut d'ailleurs saluer le jeu cabotin des comédiens beaucoup plus convaincants que de coutume si bien que l'on finit par s'attacher aux rapports ambivalents du couple d'anti-héros qu'endossent assez sobrement Adriano Micantoni et Daniela Poggi. L'intérêt premier du métrage résidant dans leurs rapports de force qu'ils se disputent vulgairement avant que des liens amoureux ne viennent les compromettre. Par la posture ambiguë de Lisa hantée par la culpabilité (celle d'avoir été potentiellement responsable de la mort de ses parents), La Dernière orgie du 3è Reich distille un climat trouble de mélancolie et de perversion depuis son passé éhonté et ses rapports masochistes entamés avec Conrad. Corrompue par le vice et le mal depuis les sévices et humiliations quotidiennement perpétrés par son bourreau, Lisa sombre peu à peu dans une déchéance sexuelle masochiste afin de préserver sa vie. Son attitude condescendante face à la pitié d'une de ses amies en instance de survie accentuant la frigidité de son éthique en perdition.


Bien que les séquences d'humiliations et de torture se succèdent sans trop de répit avec une audace parfois burnée (la séquence vomitive du repas et le châtiment qui s'ensuit auprès d'une juive, les délires scatos d'une des déportés, les orgies sexuelles sadiennes), Cesare Canevari parvient à s'extraire de la routine grâce à l'aura incongrue de son climat licencieux et l'autorité des comédiens aux caractères bien trempés (notamment Alma, antagoniste faire-valoir qu'endosse brillamment Maristella Greco !). Sous couvert d'énième réquisitoire contre la barbarie Nazie y émane donc une troublante histoire d'amour à l'odeur de souffre si indécrottable qu'il est difficile de s'en extraire ! (comme le souligne d'ailleurs le magnifique thème de sa chanson italienne !). 

La Chronique d'Holocauste Nazi: http://brunomatei.blogspot.fr/2013/06/holocauste-nazi-la-bestia-in-calore.html

B.M. 2èx

31

                                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Rob Zombie. 2016. U.S.A. 1h42. Avec Sheri Moon Zombie, Lawrence Hilton-Jacobs, Meg Foster, Jeff Daniel Phillips, Malcolm McDowell, Torsten Voges, Daniel Roebuck, Elizabeth Daily, Judy Geeson, David Ury.

Sortie DTV: Janvier 2017. U.S: 21 Octobre 2016

FILMOGRAPHIE: Rob Zombie est un chanteur, musicien et réalisateur américain, né le 12 Janvier 1965 à Haverhill, dans le Massachusetts.
2003: House of 1000 Corpses. 2005: The Devil's Rejects. 2007: Werewolf Women of the S.S. (trailer). 2007: Halloween. 2009: Halloween 2. 2012: The Lords of Salem. 2016: 31.


                     Un recyclage (involontairement) parodique de "la maison des 1000 morts".
                 Ma 1ère déception chez le maître référentiel de bobines insalubres des Seventies.

Un esthétisme onirico-horrifique toujours aussi stylisé, une vulgarité lubrique assumée, un score électro entraînant emprunté à Carpenter (clin d'oeil furtif aux Goblin en sus !), des trognes burinées comme on n'en voit plus au ciné, des meurtres incisifs magistralement filmés, mais une intrigue linéaire poussive finissant malheureusement par provoquer la lassitude. Faute des situations de survie où s'enchaînent sans passion ni acuité attaques et contre-attaque par des protagonistes secondaires finalement peu investis dans leur fonction victimisée. Et donc l'intrusion finale du nouveau super tueur sombre dans l'auto-parodie à force de gestuelle outrancière et de rictus racoleur.
Vraiment dommage d'être passé à côté du divertissement sardonique si bien que son ambiance étrange de fête foraine cartoonesque aurait pu être beaucoup mieux expressive.

B.M

                                                         
                                                             Le mot de Jean-Marc:

Séance découverte avec le très attendu '31' du très discuté Rob Zombie. Il est indéniable qu'en l'espace d'une douzaine d'année, le cinéma de Zombie fait preuve d'une évidente singularité dans le cinéma d'horreur. Extrême dans ses partis pris, que ce soit dans ses personnages bien décalqués, sa mise en scène au bord de l'explosion, ses sujets nihilistes. Logique qu'un tel cinéaste ne fasse pas l'unanimité surtout à l'aube de son auteurisant Lords of salem. A l'annonce de 31 et de son sujet, ses fans pensaient sans doute tenir un projet hors norme, un truc bien crade, un ovni comme pouvait l'être certains films 'autres' des années 70 et 80 (L'enfer des armes, Maniac, Calligula, Cannibal Holocaust et d'autres encore). Les fans de The Devil's reject s'en délectaient d'avance, une sorte de running man dégénéré. S'il y a bien une chose qu'on ne peut pas retirer à 31 c'est qu'il ressemble effectivement bien à son auteur, par son casting, par ses partis pris visuels et de montages, par son ambiance, par sa vision freak du monde. Mais si 31 est effectivement un film d'auteur, c'est surtout la vision mégalomane d'un artiste qui a totalement perdus le sens de la réalité et de ce que doit être un film : des perso écrits, une exposition claires, une intrigue qui évoluent. Tout ça est explosé par un Zombie en totale roue libre n'arrivant plus à faire la différence entre une scène d'horreur et une scène grotesque. Irritant, mou, inintéressant, le film vire au film racoleur et vulgaire.

Jean-Marc Micciche



vendredi 16 septembre 2016

LE PONT DE CASSANDRA

                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site moviepostershop.com

"The Cassandra Crossing" de George Pan Cosmatos. 1977. Italie/Angleterre/France/allemagne. 2h04. Avec Sophia Loren, Richard Harris, Burt Lancaster, Martin Sheen, Ava Gardner, O.J. Simpson, Ingrid Thulin.

Sortie salles France: 15 Juin 1977. U.S: 9 Février 1977

FILMOGRAPHIE: George Pan Cosmatos était un réalisateur et scénariste grec né le 4 janvier 1941 à Florence (Toscane, Italie), mort le 19 Avril 2005 à Victoria (Colombie-Britannique, Canada) d'un cancer du poumon.1973 : SS Représailles. 1971 : The Beloved. 1977: Le Pont de Cassandra. 1979: Bons Baisers d'Athènes. 1983: Terreur à Domicile. 1985: Rambo 2, la Mission. 1986: Cobra. 1989: Leviathan. 1993: Tombstone. 1997: Haute Trahison.


Sorti en pleine mouvance du genre catastrophe, le Pont de Cassandra porte la signature de George Pan Cosmatos, habile artisan de série B si je me réfère aux célèbres Rambo 2, Cobra et à moindre échelle, Haute Trahison. Mais bien avant ces classiques bourrins, le réalisateur d'origine grec nous avait déjà offert deux de ses meilleurs métrages, Terreur à Domicile et ce Pont de Cassandra. Fort d'une distribution prestigieuse réunissant selon la tradition du genre d'illustres stars tels que Sophia Loren, Richard Harris, Burt Lancaster, Martin Sheen, Ava Gardner et O.J. Simpson, le Pont de Cassandra ne s'embarrasse pas trop de clichés éculés si bien que chaque comédien donne chair à leur personnage avec une humble sobriété. Et si les amourettes futiles échangées entre deux couples n'évitent pas le stéréotype, les acteurs engagés parviennent tout de même à nous impliquer dans leur discorde et/ou réconciliation conjugales avec une certaine densité caractérielle. Par le principe du survival mené sur rythme haletant sous le pilier d'un suspense tendu, George Pan Cosmatos parvient à dépoussiérer le genre grâce à son concept inédit de décor ferroviaire et à son sujet alarmiste (le danger bactériologique) aux cimes du genre horrifique. A la suite d'un cambriolage dans un laboratoire médical, l'un des malfrats contaminés par un produit toxique parvient à s'évader pour se confiner à l'intérieur d'un train. Rapidement, il est localisé grâce aux services secrets de l'armée. Ces derniers ordonnant aux 1000 passagers de rester cloîtrés en interne du wagon pour être prochainement placés en quarantaine vers un village polonais. Mais sur leur chemin ferroviaire, ils doivent emprunter le pont de Cassandra, un viaduc fermé depuis 1948. Une course contre la montre s'engage alors entre les passagers et les services d'ordre afin d'empêcher le train de traverser le pont. 


Ce pitch original semé de rebondissements (Spoil ! l'intrusion des militaires en combinaison afin de faire régner l'ordre, le trafiquant de drogue semant la zizanie jusqu'à détruire l'émetteur radio fin du Spoil) et revirements épiques (Spoil ! sa dernière demi-heure multipliant les confrontations musclées d'échanges de tir entre passagers rebelles et assaillants militaires ! fin du Spoil) gagne en vigueur au fil d'un cheminement dramatique présageant un éventuel crash ferroviaire ! Mais bien avant l'appréhension d'arpenter ce fameux pont que Cosmatos filme à la manière d'un spectre d'acier chargé de silence, nos passagers embrigadés de force dans leur compartiment ont fort affaire avec l'hostilité de militaires affublés de combinaisons blanches. Baignant dans un climat de claustration irrespirable, le Pont de Cassandra parvient à nous immerger dans une épreuve de force morale que les passagers du train doivent transcender afin de rester en vie. Qui plus est, parmi l'apparition progressive de victimes contaminées par la peste pneumonique, une angoisse viscérale s'empare de notre psyché depuis que ces dernières affaiblies par le virus sombrent dans une déchéance physique fébrile. Pour accentuer l'intensité des enjeux humains et y dénoncer les méthodes expéditives d'une armée sans vergogne, l'intrusion d'un colonel opiniâtre (remarquablement campé par l'inflexible Burt Lancaster !) provoque l'ambiguïté quant à connaître sa véritable déontologie à préserver ou à sacrifier 1000 vies innocentes ! Ce dernier surveillant sur son écran radar l'itinéraire du train tout en correspondant par émetteur radio ses consignes drastiques auprès d'un médecin charitable. La peur viscérale de la maladie progressive et l'intuition de redouter une destination mortelle doublant donc la mise d'une terreur psychologique à double visage !


Dernier train pour Cassandra
Empruntant la démarche du genre catastrophe sous un aspect novateur de survival horrifique fustigeant les expérimentations bactériologiques, Le Pont de Cassandra captive sans relâche le spectateur embarqué dans une descente aux enfers ferroviaire aussi anxiogène qu'oppressante. Le spectacle brillamment rodé et interprété culminant vers un point d'orgue cauchemardesque parmi le réalisme d'FX artisanaux en maquettes aux antipodes d'une production Toho

B.M. 4èx
16.09.2016
02.03.11. (179 vues)

mercredi 14 septembre 2016

LES YEUX SANS VISAGE

                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de George Franju. 1960. France. 1h28. Avec Pierre Brasseur, Alida Valli, Juliette Mayniel, Édith Scob, François Guérin, Alexandre Rignault, Béatrice Altariba, Charles Blavette, Claude Brasseur.

Sortie salles France: 11 janvier 1960.

FILMOGRAPHIEGeorges Franju est un réalisateur français, né le 12 avril 1912 à Fougères (Ille-et-Vilaine) et mort le 5 novembre 1987 (à 75 ans) à Paris. 1958 : La Tête contre les murs
1960 : Les Yeux sans visage. 1961 : Pleins feux sur l'assassin. 1962 : Thérèse Desqueyroux. 1963 : Judex. 1965 : Thomas l'imposteur. 1970 : La Faute de l'abbé Mouret. 1974 : Nuits rouges.


"L'apparence est le vêtement de la personnalité." 
Grand classique horrifique du cinéma Français, Les Yeux sans Visage est l'adaptation d'un roman de Jean Redon publié en 1959. Aussi notoire que La Belle et la Bête, les Yeux sans visage emprunte les thématiques de la beauté, de la laideur et de l'amour de manière singulière si bien que sa poésie qui en émane alterne des séquences surréalistes où le morbide se dispute à une étrange mélancolie. L'héroïne, défigurée à la suite d'un accident, promenant sa fragile dégaine à l'instar d'une fantomette errante, car plongée dans une désillusion en perdition. Responsable de sa difformité corporelle, son père, éminent chirurgien, s'empresse de kidnapper des jeunes filles pour des greffes de visage afin de rendre la beauté juvénile de sa fille. 


“La beauté de l’apparence est seulement un charme de l’instant ; l’apparence du corps n’est pas toujours le reflet de l’âme.”
Conte d'épouvante d'un humanisme aussi douloureux que désespéré parmi les thèmes du sacrifice, de la jeunesse (éternelle) et de la dissection, Les Yeux sans visage est transcendé par l'esthétisme onirique de sa photo noir et blanc. Tant par le contraste saisissant alloué à sa nature crépusculaire qu'aux intérieurs cliniques de la bâtisse, lieu d'expérimentations en tous genres comme le souligne la vivisection imposée sur les chiens. Par le biais d'une mise en scène méticuleuse prenant soin de charpenter une intrigue aussi tordue que malsaine, Georges Franju se surpasse à imposer son style documenté sous le pilier d'un onirisme épuré parfois enchanteur (Spoil ! à l'instar de son final rédempteur, Christiane s'évaporant dans la nuit en compagnie de colombes fin du Spoil). Outre sa densité narrative allouée à la corruption de personnages aveuglés par l'égoïsme de leur intérêt personnel, le jeu sobre des comédiens insuffle une dimension réaliste particulière, notamment sous une élocution théâtrale chère au cinéma Français. Mais si Les Yeux sans Visage s'avère aussi fascinant qu'impénétrable dans ses recherches formelles et dans sa réflexion sur l'identité tant morale que corporelle (Christiane ne reconnaissant plus son âme depuis la greffe de son nouveau visage !), il le doit beaucoup à la présence incandescente d'Édith Scob ! Affublé d'un masque exsangue durant la quasi totalité du métrage, l'actrice compte sur l'acuité de son regard élégiaque et la sensualité de son corps longiligne pour susciter une amère empathie depuis sa condition torturée de victime complice chagrinée de remord. 


Les Voleurs de corps. 
Récit horrifique déviant où se télescopent beauté de l'apparence et monstruosité de l'acte immoral, les Yeux sans Visage impose un style auteurisant au sein d'une ambiance débridée de conte d'épouvante aussi cruel que déshumanisé. En dépit d'un rythme languissant qu'il faut savoir adopter, cette tragédie familiale se disputant les sentiments contradictoires de remord, d'amour et d'orgueil magnétise nos sens de manière si éthérée qu'un second visionnage en serait même profitable pour en saisir toutes ses nuances. 

E-B. 3èx

mardi 13 septembre 2016

Emilie, l'Enfant des Ténèbres / Il medaglione insanguinato


de Massimo Dallamano. 1975. Italie/Royaume-Uni. 1h30. Avec Richard Johnson, Joanna Cassidy, Ida Galli, Nicoletta Elmi, Edmund Purdom.

Sortie en salles en France le 21 mars 1979.  Sortie U.S.A: Mars 1976.

FILMOGRAPHIEMassimo Dallamano est un directeur de la photographie et un réalisateur italien né le 17 avril 1917, décédé le 4 Novembre 1976. 1968: Le tueur frappe trois fois. 1972: Mais qu'avez vous faits à Solange ? 1973: Piège pour un tueur. 1974: La Lame Infernale. 1975: Emilie, l'enfant des Ténèbres.
                                         

"..... Le Diable est à l'origine des premiers malheurs de l'humanité...... Il est l'ennemi secret qui a semé erreurs et calamités dans l'histoire de l'homme."
Sa sainteté. Le Pape Paul VI.

Illustre auteur des classiques du Giallo, Mais qu'avez vous faits à Solange et La Lame Infernale, Massimo Dallamano réalise en 1975 son dernier testament (il mourut quelques mois après la fin du tournage), Emilie, l'enfant des ténèbres. Surfant sur la vague de l'Exorciste sorti 2 ans au préalable, le film emprunte le thème sataniste parmi la possession d'une jeune fillette traumatisée par la mort de sa mère, brûlée vive sous ses yeux. Le pitchMichael vient de perdre sa femme dans un tragique incendie alors que sa fille Emilie est durement éprouvée par cette perte maternelle. Pour faire le deuil, il décide de rejoindre l'Italie afin de réaliser un reportage sur les fresques incarnant le Diable. Irrémédiablement, il est attiré par un tableau étrange auquel une petite fille semble effrayée par l'apparence spectrale d'une dame vêtue de blanc. Quelques instants plus tard, Michael achète dans une antiquité un médaillon qu'il offre à Emilie. Depuis, elle semble changer de comportement pour devenir de plus en plus irascible. Avec cet ultime long-métrage, Massimo Dallamano délaisse le Giallo pour s'aventurer dans le genre horrifique en vogue depuis le succès phare de l'Exorciste si bien qu'il s'inspire ici d'un nouveau cas de possession sur fond de réincarnation et de complexe d'Oedipe. Dédié à son atmosphère d'étrangeté, tant par le climat onirique d'une nature crépusculaire magnifiquement éclairée que des villas provinciales chargées de silence, Emilie, l'enfant des Ténèbres joue la carte de la suggestion pour nous narrer une intrigue à suspense doucereusement envoûtante.


Ainsi, sans surenchère d'effusions sanglantes, et même si certaines courtes séquences chocs suscitent un effroi palpable (visions horrifiées de villageois hostiles, objets domestiques en lévitation par une force surnaturelle, expression infantile horrifiée en plan serré !), Massimo Dallamano préconise la sobriété en privilégiant scrupuleusement une ambiance opaque, avec comme principale source, une fresque gothique d'une beauté funèbre hermétique. Nos protagonistes se rassemblant fréquemment au sein d'une ancienne bâtisse afin d'y observer et d'y comprendre les détails d'un tableau macabre dessiné 200 ans auparavant par un peintre inconnu. On imagine alors rapidement qu'Emilie pourrait être la réincarnation de la défunte fille, le scénario se répétant à nouveau aujourd'hui sous l'impulsion de la fresque (représentant en toile de fond un démon cornu !) et du médaillon maudit. La présence supplémentaire d'une comtesse sexagénaire très portée sur l'irrationnel ajoute de surcroît ce sentiment lattent de mystère insondable lorsque le père d'Emilie s'efforce d'écouter ses conseils avec perplexité, quand bien même sa nouvelle maîtresse préfère se réconforter dans ses bras. Richard Johnson (l'inoubliable médecin de l'île maudite de l'Enfer des Zombies) et Joanna Cassidy forment ce duo d'amants en herbe un brin équivoques si je me réfère à leur posture frigide pour une certaine disparition. Quand à la prestation écorchée de Nicoletta Elmi (la Baie Sanglante, Chair pour Frankenstein, les Frissons de l'angoisse), l'actrice infantile tire son épingle du jeu par sa spontanéité viscérale à se fondre dans le corps d'une fillette névrosée hantée de réminiscences traumatiques (les flash-back moyenâgeux ainsi que les visions morbides de sa mère immolée). Son regard inscrit dans le vide, la beauté insolite de ses tâches de rousseur et la douceur de sa chevelure renforçant un charme vénéneux particulièrement hypnotique, indicible, inquiétant. Outre les plages d'accalmie imparties aux investigations de nos protagonistes, la réussite du métrage émane notamment de sa simplicité à nous narrer une tragédie familiale où se télescopent l'inceste, le sacrifice et le complexe d'Oedipe. Spoil ! Du moins c'est ce que nous déclare sa passionnante dernière partie élégiaque lorsque l'on connaît l'issue du destin infortuné d'Emilie confinée dans une morale désespérément rédemptrice. Fin du Spoil.
                                 

Les Amants d'Outre-Tombe
Bien que passée inaperçue à sa sortie et encore ignorée de nos jours (en dépit d'une poignée de cinéphiles), la dernière oeuvre de Massimo Dallamano scande le film d'ambiance gothique avec un esthétisme aussi stylisé que les éminents travaux de Bava. Ne boudons pas la simplicité de son scénario privilégiant suspense lattent et mystère diffus pour se laisser avant tout bercer par ces images baroques d'une poésie limpide (Emilie, le teint blême, entièrement vêtue de blanc, pianotant dans une chambre jalonnée de tableaux). Soutenu de l'inoubliable mélodie lancinante de Stelvio CiprianiEmilie, l'enfant des Ténèbres honore la série B d'épouvante avec intelligence et humilité, à l'instar de son point d'orgue poignant engendrant au final une réflexion sur l'amour le plus interdit et le pouvoir du Mal par le biais d'une postérité maudite.

*Bruno

12.01.23. 4èx
13.09.16. 
25.05.11. (422)

vendredi 9 septembre 2016

LA SECTE

                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site dvdclassik.com

"La Setta" de Michel Soavi. 1991. Italie. 1h56. Avec  Kelly Curtis, Herbert Lom, Mariangela Giordano, Michel Adatte, Tomas Arana, Donald O'Brien.

Inédit en salles en France. Sortie Italie: 1er Mars 1991

FILMOGRAPHIE: Michele Soavi est un réalisateur italien né le 3 Juillet 1957 à Milan, (Italie).
1985: The Valley (vidéo). 1985: Le Monde de l'horreur (Documentaire). 1987: Bloody Bird. 1989: Le Sanctuaire. 1991: La Secte. 1994: Dellamorte Dellamore. 2006: Arrivederci amore, ciao. 2008: Il sangue dei vinti.


Deux après le Sanctuaire, l'étoile montante Michele Soavi continue de progresser avec la La Secte si bien qu'il s'avère même supérieur à son 1er coup d'essai que les fans avaient chaleureusement acclamé: le slasher (/giallo) onirique Bloody Bird. Inédit en salles en France et à nouveau co-produit par son pair Dario Argento, la Secte s'inspire du schéma narratif de Rosemary's Baby avec une inventivité en roue libre. Véritable cauchemar éveillé d'un onirisme macabre vénéneux, Michele Soavi renouvelle les codes de l'horreur sataniste par le biais d'un scénario incongru bourré de revirements cauchemardesques et de situations insolentes. Miriam, jeune femme célibataire, se retrouve prise au piège d'une diabolique conjuration après avoir hébergé au sein de son foyer un vieillard accidentellement blessé. Les éléments inquiétants s'enchaînant sans faiblir depuis que ce dernier inocula un insecte dans la narine de l'inconnue avant de trépasser de cause inexpliquée !


Soignant sa mise en scène sous le pivot d'une caméra véloce oscillant travellings et angles tarabiscotés, le cinéaste fignole d'autant plus la forme en confondant le cadre d'une nature champêtre avec une scénographie féerique. Emaillé d'une foule d'éléments d'apparence anodine et d'objets intrigants (agenda, ustensiles incantatoires, seringue, drap, chiffon, journal, cercueil, eau) au sein d'un champ d'action richement détaillé (tant au chalet domestique qu'auprès des extérieurs bucoliques ou urbains !), l'intrusion hostile d'insectes et de mammifères (à l'instar de la symbolique récurrente du "lapin" ou du "marabout" !) renforce le malaise du déambulement de l'héroïne en perte de repères. Prenant son temps à narrer son histoire par le biais d'incidents en chaîne parfois intentés sur ses proches connaissances, Soavi parvient à impliquer le spectateur dans une descente aux enfers vertigineuse vouée à l'initiation maléfique. A l'instar du refuge imposé dans la cave domestique auquel un puits abyssal semble être l'aboutissant d'une stratégie sataniste ! Si La Secte façonne de prime abord une intrigue un peu décousue, elle se révèle petit à petit plus limpide, voire payante lors des révélations de son dernier acte. Parmi son climat réaliste tangible (superbement éclairé !) où l'aura ombrageuse ne lâche jamais prise, le cinéaste introduit également en intermittence des séquences chocs typiquement latines car provoquant chez nous une répulsion morbide viscérale avec l'appui d'FX artisanaux convaincants. A l'instar du rituel sataniste convoqué sur une jeune femme lors d'une nuit sépulcrale de pleine lune !


Ambitieux, méticuleux et avisé, Michele Soavi rend ses lettres de noblesses au cinéma d'horreur transalpin avec un esprit premier degré et une modernité inespérés ! Version latine de Rosemary's Baby, La Secte ne cesse d'interpeller et de nous surprendre auprès de la quotidienneté malléable d'une élue partagée entre sa foi morale de rejeter les fondements du Bien ou du Mal. 

P.S: A éviter comme la peste l'horripilante version française issue du Dvd franchouillard contrefait auprès de quelques discounts !

E-B

jeudi 8 septembre 2016

OSLO, 31 AOUT. Grand prix du jury long-métrage européen.

                                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site Cinemapassion.com

"Oslo, 31. august" de Joachim Trier. 2011. Norvège. 1h35. Avec Anders Danielsen Lie, Hans Olav Brenner, Ingrid Olava, Petter With, Malin Crépin, Tone Beate Mostraum

Sortie salles France: 29 Février 2012. Norvège: 31 Août 2011

FILMOGRAPHIEJoachim Trier est un réalisateur et scénariste norvégien, né à Copenhague en 1974. 2006: Reprise. 2011: Oslo, 31 août. 2015: Back Home.


Drame psychologique relatant avec réalisme documenté la réinsertion sociale d'un jeune toxico de retour dans sa ville natale, Oslo, 31 Août doit beaucoup de sa vigueur émotive à la maîtrise de sa mise en scène rigoureusement personnelle et au talent criant de vérité du jeune Anbders Danielsen Lie. Ce dernier se livrant corps et âme face caméra avec un humanisme à bout de souffle. Accablé par le poids de sa solitude, l'aigreur, le désespoir, la susceptibilité, Anders tente timidement de se raccrocher à la réconciliation de son ex amie avant de contacter en dernier ressort ces anciennes fréquentations.


Introverti, timoré, placide, Anders déambule tel un fantôme errant au sein d'une cité urbaine où citadins expansifs et couples amoureux semblent en harmonie existentielle. Du moins en apparence si bien que chacun de nous dépendons d'un jardin secret de notre propre personnalité. Sans verser dans une sinistrose complaisante (le film baignant dans un climat austère perpétuellement anxiogène), Joachim Trier s'efforce d'illustrer avec souci de vérité l'introspection cafardeuse de ce jeune repenti à deux doigts de chavirer vers le néant. C'est d'ailleurs ce que nous dévoile ouvertement son prologue pessimiste avant qu'Anders ne se ravise de se noyer dans un lac. Durant son cheminement itinérant, nous poursuivons ses errances urbaines avec l'appui d'anciens collègues et d'une nouvelle partenaire finalement peu attentifs à son désarroi affectif et à sa désillusion d'un avenir sans lendemain. Au-delà de traiter de la difficulté de s'extraire de la drogue dure, le réalisateur s'attarde surtout à relever les conséquences tragiques du poids (écrasant) de la solitude lorsqu'un jeune toxico en voie de convalescence tente vainement de se raccrocher au fil de l'espoir. Celui de l'amour d'une ex auquel il songeait renouer quand bien même cette dernière hésite à lui tendre la main, faute d'un passé trop lourd à porter. Avec une attention toute particulière, Joachim Trier filme les témoignage amicaux partagés entre vivacité et allégresse tout en scrutant ostensiblement le regard meurtri d'Anders, victime malgré lui de son isolement inconsolable, entre non-dits et causettes futiles.


D'un pessimisme plombant, Joachim trier dresse le portrait infortuné d'un jeune toxico trop fragile à pouvoir survivre dans une société en perpétuel mouvement où chacun des témoins ne songe finalement qu'à son propre intérêt. Constat monocorde sur l'hypocrisie de l'amitié et la cruauté de l'amour, Oslo, 31 Août jette un pavé dans la marre sur l'individualisme de nos civilisations contemporaines. 

Dédicace à Franck Gossard.

Récompenses
24e festival Premiers Plans d'Angers : Grand prix du jury long-métrage européen et prix Jean-Carmet d'interprétation masculine pour Anders Danielsen Lie.
Cheval de bronze au Festival international du film de Stockholm de 2011

mardi 6 septembre 2016

WARGAMES

                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemateaser.com

de John Badham. 1983. U.S.A. 1h55. Avec Matthew Broderick, Ally Sheedy, Dabney Coleman, Barry Corbin, John Wood.

Sortie salles France: 14 Décembre 1983. U.S: 3 Juin 1983

FILMOGRAPHIE: John Badham est un réalisateur et producteur britannique, né le 25 Août 1939 à Luton. 1976: Bingo. 1977: La Fièvre du samedi soir. 1979: Dracula. 1981: C'est ma vie après tout. 1983: Tonnerre de feu. 1983: Wargames. 1985: Le Prix de l'exploit. 1986: Short Circuit. 1987: Etroite Surveillance. 1990: Comme un oiseau sur la branche. 1991: La Manière Forte. 1992: Nom de code: Nina. 1993: Indiscrétion Assurée. 1994: Drop Zone. 1995: Meurtre en suspens. 1997: Incognito. 1998: Road Movie.


Gros succès en salles (79 567 667 dollars de recette contre un budget de 12 000 000), Wargames est l'oeuvre de John Badham, maître du divertissement à qui l'on doit le somptueux Dracula (beaucoup plus classieux à mon sens que la flamboyante relecture de Coppola), le bouleversant C'est ma vie après tout (drame sur l'euthanasie), le tonitruant Tonnerre de Feu (actionner militant contre les nouvelles technologie de l'armée aérienne et de l'espionnage industriel) et le classique musical La Fièvre du samedi soir (témoignage naïf de la vogue du Disco à la fin des Seventies). Tourné en 1983, Wargames est mon sens sa dernière grande réussite même si la suite de sa filmographie enchaîne une poignée d'autres excellents métrages aussi carrés dans l'art du savoir-faire ludique. Par le biais d'un concept aussi singulier qu'improbable (un ordinateur optimal capable de provoquer la 3è guerre mondiale en moins de 52 heures !), John Badham parvient aisément à crédibiliser pareille utopie dans l'art de conter, dans la complicité fougueuse des comédiens et dans le savoir-faire technique d'une réalisation scrupuleuse s'efforçant de documenter le corps informatique ! Haletant et passionnant dans son lot de rebondissements et poursuites que notre héros juvénile doit déjouer afin de prémunir l'humanité, l'intrigue se focalise sur sa condition de victime héroïque.


David étant un génie informaticien ayant parvenu avec l'aide de son ordinateur à infiltrer un système informatique au sein du réseau de défense militaire. Croyant échanger une partie de jeu video avec NORAD (un ordinateur conçu pour la surveillance de l'espace aérien et prédire les pertes humaines en cas de guerre nucléaire, nouveau substitut de l'homme trop faillible à impulser le bouton rouge ! ), David Lightman déclenche sans le savoir une guerre thermonucléaire globale contre l'URSS. Dès lors, persuadés qu'ils ont affaire à un espion pro-russe sur leur sol américain, des agents se lancent à ses trousses. Avec l'aide de son amie Jennifer, David va notamment tenter d'entrer en contact avec le créateur de l'ordinateur, le professeur Falken afin d'obstruer les prédictions mortuaires de NORAD. D'une efficacité à toutes épreuves, Wargames s'avère si remarquablement coordonné dans sa gestion du suspense exponentiel qu'on a beau connaître l'issue de son enjeu catastrophiste, le caractère haletant puis affolant de la situation (rendue ingérable !) insuffle une vigueur jubilatoire ! Car sous l'autorité faillible du témoignage militaire et du duo juvénile en quête de soutien, nous restons fascinés car accrochés à notre siège à observer leurs ultimes recours de contrecarrer le projet belliciste d'une machine échappant au contrôle de son créateur ! Diatribe contre le péril nucléaire à renfort d'humour caustique, le réalisateur en profite sous couvert de divertissement de nous alerter des dangers du progrès informatique si l'homme décidait un jour de nous substituer d'une responsabilité cruciale ! (l'ordinateur impassible n'accordant aucune clémence ni empathie pour l'éventuel sort de millions de pertes humaines en cas de conflit atomique).


D'une incroyable frénésie pour l'intensité des enjeux humains à grande échelle et d'une folle originalité pour son concept catastrophiste en chute libre, Wargames captive et passionne avec un brio technique jubilatoire. Pour clore avec une pincée de nostalgie, on peut également prôner les prestations attachantes de Matthew Broderick en informaticien facétieux et d'Ally Sheedy lui partageant tendrement la vedette en petite amie avenante. Un p'tit chef-d'oeuvre d'humour au vitriol (Spoil !!! si bien qu'il s'agit au final d'une immense farce sarcastique ! fin du Spoil) doublé d'un modèle de suspense à redécouvrir d'urgence ! 

E-B

lundi 5 septembre 2016

LES AILES DE L'ENFER

                                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

"Con Air" de Simon West. 1997. U.S.A. 1h55. Avec Nicolas Cage, John Malkovich, John Cusack, Steve Buscemi, Ving Rhames, Colm Meaney, Nick Chinlund.

Sortie salles France: 6 Juin 1997. U.S: 20 Août 1997

FILMOGRAPHIE: Simon West est un réalisateur, producteur et scénariste britannique né en 1961 à Letchworth (Royaume-Uni). 1997 : Les Ailes de l'enfer. 1999 : Le Déshonneur d'Elisabeth Campbell. 2001 : Lara Croft : Tomb Raider. 2006 : Terreur sur la ligne. 2011 : Le Flingueur. 2012 : Expendables 2 : Unité spéciale. 2012 : 12 heures. 2015 : Joker. 2016 : Stratton. 2017: Salty.


Blockbuster des années 90 ayant remporté un succès considérable, Les Ailes de l'Enfer fait parti de ses réussites du genre ayant sur exploiter avec beaucoup d'efficacité une action homérique sous l'effigie d'un pitch assez délirant. Cameron Poe vient de purger une peine de 8 ans de prison pour homicide alors qu'il venait de secourir sa femme lors d'une rixe. Avant de retrouver sa liberté, il doit embarqué à bord d'un avion pénitenciaire avec à son bord une communauté de criminels extrêmement dangereux. Ayant pris le contrôle de l'appareil lors d'une stratégie préalablement planifiée par leur leader Cyrus, ces derniers décident de prendre en otage l'appareil afin de rejoindre Las Vegas. Epaulé d'un Marshall resté au sol, Cameron va tenter d'empêcher leur plan d'action. Un script linéaire sans surprise que Simon West parvient pourtant à transcender grâce au soin de sa mise en scène nerveuse (vélocité du montage à l'appui !) et de la complicité attractive des comédiens s'en donnant à coeur joie dans leur archétype criminel. Mention spéciale au charismatique John Malkovich endossant avec une spontanéité placide un leader aussi finaud que sans pitié.


Si Nicolas Cage joue les redresseurs de tort avec une prétention modeste (si bien que l'on s'amuse parfois de ses acrobaties outrées sous l'autorité de son regard inflexible), il parvient à rendre attachant son personnage héroïque multipliant risques et subterfuges contre l'autorité de ses alliées, tout en insufflant au final bouffée de tendresse dans sa fonction paternelle en requête d'amour. Si sa bluette sentimentale impartie avec sa compagne n'épargne pas les clichés et la mièvrerie, on se prend tout de même d'empathie pour leurs retrouvailles escomptées lorsque sa fille le repousse timidement avant de se réconforter dans ses bras. Grâce à son contexte débridé de huis-clos aérien et à un schéma narratif plutôt bien ficelé, les Ailes de l'Enfer réussit pleinement son contrat de divertissement jouissif. Tant par le souffle spectaculaire des scènes d'action (au service narratif !) que de l'exploitation des décors (comme ceux décharnés d'un cimetière d'avion que les criminels empruntent pour une escale en plein désert). Cette nouvelle situation de trêve permettra ensuite de renouveler l'action des enjeux sous l'impulsion de Cameron et du Marschall secrètement en concertation afin de déjouer l'évasion des criminels. Les fédéraux en retrait participant également au conflit sur terre et dans les airs ! Et pour parachever de la manière la plus cinglante, Simon West surenchérit l'action vertigineuse lors d'un point d'orgue catastrophiste sans doute inspiré du procédé généreux de Speed de Jan De Bont (offrir une dernière gerbe de pyrotechnie alors que l'on pensait l'action achevée !).


Hormis ses instants d'intimité naïve (les rapports cucul la praline du couple) et une violence racoleuse souvent gratuite (héritiaire d'"Hollywood Night"), les Ailes de l'Enfer affiche une énergie galvanisante dans son concentré d'actions explosives et d'humour noir exprimé par des taulards cabotins hauts en couleur ! (les seconds-rôles s'en donnant à coeur joie dans leur vanité cynique). Un excellent spectacle donc, aussi fun que décomplexé, si bien que les 1h55 s'écoulent comme une lettre à la poste ! 

E-B

jeudi 1 septembre 2016

Six Feet Under

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site www.sixfeetunder-france.com

Créé par Alan Ball. 2001/2005. U.S.A. Avec  Peter Krause, Michael C. Hall, Frances Conroy, Lauren Ambrose, Rachel Griffiths, Jeremy Sisto, Freddy Rodríguez, Justina Machado, Mathew St. Patrick,
Richard Jenkins, Lili Taylor, Brenna et Bronwyn Tosh, James Cromwell, Tina Holmes.

Diffusion TV:  3 juin 200121 août 2005


Avant-propos: "Lorsque j'ai regardé (avec beaucoup de craintes, de tension et d'appréhension) le dernier épisode, je me suis vu au final vieillir et Mourir. En l'occurrence, il ne me reste plus qu'à Vivre".

"Le chemin qui mène à la sagesse et au bonheur est long, tortueux et semé d'obstacles"
5 semaines ! C'est le temps qu'il m'aura fallu pour dévorer les 5 saisons de Six Feet Under réunissant 63 épisodes ! Une série inoxydable d'une vigueur dramatique vertigineuse (particulièrement l'ultime saison ! ) sachant que les thèmes universels brillamment autopsiés sont traités sans pathos ni fioriture. A savoir la Vie, l'Amour, la Mort que la famille Fisher côtoie quotidiennement avec un humanisme aussi pugnace que fragile et torturé. Comment s'extirper d'une série dramatique aussi réaliste dans la ferveur des sentiments après avoir vécu aussi intimement les vicissitudes de Nathaniel (père), Ruth, David, Keith, Claire, George, Rico, Vanessa, Lisa, Olivier, Maggie, Billy, Brenda et Nathaniel (Junior - mon personnage fétiche - !) ! ? Ces derniers s'efforçant communément de cristalliser leur destin avec une ambition partagés entre désespoir et fureur de s'affirmer ! Car outre sa leçon de vie et l'hymne à l'amour conjugal que les créateurs nous inculquent sans mièvrerie, la série baigne subtilement dans un anticonformisme caustique sous l'impulsion des témoins familiaux et amicaux (drogue, homosexualité, bisexualité, saphisme, échangisme, inceste, schizophrénie, pédophilie, sadomasochisme, adultère sont traités sans concession ni voyeurisme).


"La vie est simple mais nous insistons à la rendre compliquée". 
Car aussi imparfaite soit-elle, la Famille Fisher incarne avec une sensibilité digne la complexité de notre nature humaine incessamment ballottée entre l'optimisme (nos désirs, nos sentiments amoureux) et le pessimisme (l'angoisse de l'abandon et notre crainte de la mort). La peur de clore ses jours sous le poids de la solitude, sans amour, ni soutien, ni amant. La peur de rater sa vie (sentimentale et professionnelle), la peur de ne plus aimer, la peur de mourir brièvement sans avoir pu concrétiser nos espoirs et nos rêves ! Les créateurs de la série nous plongeant également dans les pensées intimes les plus anxiogènes et malsaines des personnages depuis leur remise en question et leur crainte de l'échec. Par le biais des rapports conjugaux en perpétuel discorde, Six Feet Under tend à souligner qu'au sein de notre société contemporaine nous nous sommes égarés dans l'instabilité, l'égoïsme et la névrose (aussi intelligents et érudits que nous puissions l'être), la lâcheté, le mensonge, le simulacre, car trop individualistes (et donc pas assez à l'écoute de l'autre) quant à notre quête idéale d'amour absolu. Comme il est difficile d'aimer avec sincérité infaillible et d'être autant aimé en retour, comme il est difficile de fonder une famille lorsque l'on enchaîne les erreurs et les échecs et que le manque de confiance en soi tend à nous fragiliser toujours un peu plus au fil de notre cheminement identitaire. La peur, toujours cette peur viscérale, sensorielle ! De vivre, d'aimer, de mourir, de s'affirmer, de s'accomplir, de risquer les défis ! La fougue, l'exaltation amoureuse, ce besoin de tendresse immodérée, la famille Fisher s'y plonge trop vite au fil de rencontres passionnelles où chacun des nouveaux compagnons extériorise ce même sentiment d'indécision, d'égoïsme, de jalousie et de peur de l'échec. Portrait craché de l'être humain tributaire de sa complexité et ses contradictions, de ses défauts et de ses qualités !


"Parfois il suffit d'une série pour atteindre la perfection".
Quant à la mort omniprésente que soulèvent les prologues de chaque épisode (afin de mieux nous interroger sur son absurdité et le sens d'une hérédité aussi fatale !), Six Feet Under l'aborde avec autant de gravité et de poésie que d'humour noir si bien que la peur de trépasser et de perdre l'être cher parviennent constamment à nous rappeler à la raison d'une valeur essentielle ! Celle de chérir l'instant présent au lieu de s'apitoyer sur son sort existentiel. Le fait de côtoyer la mort à chaque épisode nous amène à nous réconcilier avec cette injustice puisque nous ne tenons qu'à un fil et qu'il est donc urgent d'aimer ceux qui nous sont proches et encore en vie. Outre son exutoire mortifère et sa réflexion fructueuse sur la spiritualité et l'athéisme, Six Feet Under constitue également un hymne à la fidélité amicale à travers l'esprit de famille que nous caractérisent fébrilement les Fisher. Car devenant au fil progressif des épisodes des personnages intimes de notre quotidienneté en constante évolution comme s'ils s'agissaient de nouveaux membres de notre famille. Sur ce point, là encore la série frappe TRES fort (et s'avère même sa plus grande réussite !) sachant que TOUS les comédiens criants de spontanéité et de véhémence nous émeuvent et nous bouleversent avec une acuité viscérale parfois inconsolable. Les Fisher devenant de véritables amis, de nouveaux parents qu'on ne demande qu'à daigner protéger au-delà de notre lucarne TV ! Ce qui m'amène à vous souffler un petit mot sur le dernier épisode de la saison 5. Le moment émotionnel le plus ardu (et rédempteur !) que je n'ai jamais subi de mémoire de cinéphile ! Une conclusion déchirante, "dévastatrice" (pour reprendre un terme que j'ai osé "piller" dans une critique), d'une poésie limpide proche de l'enchantement (alors qu'elle ne cesse de cumuler la résultante de destins morbides !). Un cadeau d'adieux pour une famille infortunée unie par les liens du bonheur et du malheur alors qu'elle puise son attachement dans sa facture la plus ordinaire ! On en sort évidemment ébranlé à jamais, aussi bouleversé que grandi (notre perception de la vie et de la mort ayant évolué au fil des saisons !) car il est si bon de vivre et d'aimer notre entourage le plus proche, de s'enthousiasmer pour son prochain avant de s'exiler inévitablement six pieds sous terre ! Car malgré sa cruauté et son injustice, la vie reste belle et si fragile. Répétez-le vous chaque matin car tout a une fin si bien que nous ne savons pas quand l'horloge s'arrêtera...

A Pascal...
Dédicace à Isabelle Rocton et à mon entourage.

J'ai tant reçu de la vie, de joie, de tendresse, de plaisir, d'amitié, de bonheur, de savoir, que ma seule angoisse est de n'avoir pas su donner assez avant de m'endormir...
Jean Marais


Récompenses
Emmy Award 2002 : Meilleur réalisateur de série dramatique pour Alan Ball
Emmy Award 2002 : Meilleur casting pour une série dramatique
Emmy Award 2002 : Meilleurs maquillages pour l’épisode Intimité (A Private Life)
Emmy Award 2002 : Meilleur thème musical pour Thomas Newman
Emmy Award 2002 : Meilleur générique
Emmy Award 2002 : Meilleure participation d’actrice pour Patricia Clarkson
Golden Globe 2002 : Meilleure actrice dans un second rôle pour Rachel Griffiths
Golden Globe 2002 : Meilleure Série Dramatique
Emmy Award 2003 : Meilleur casting pour une série dramatique
Golden Globe 2004 : Meilleure actrice dans une série dramatique pour Frances Conroy