mercredi 14 septembre 2016

Les Yeux sans Visage

                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de George Franju. 1960. France. 1h28. Avec Pierre Brasseur, Alida Valli, Juliette Mayniel, Édith Scob, François Guérin, Alexandre Rignault, Béatrice Altariba, Charles Blavette, Claude Brasseur.

Sortie salles France: 11 janvier 1960.

FILMOGRAPHIEGeorges Franju est un réalisateur français, né le 12 avril 1912 à Fougères (Ille-et-Vilaine) et mort le 5 novembre 1987 (à 75 ans) à Paris. 1958 : La Tête contre les murs
1960 : Les Yeux sans visage. 1961 : Pleins feux sur l'assassin. 1962 : Thérèse Desqueyroux. 1963 : Judex. 1965 : Thomas l'imposteur. 1970 : La Faute de l'abbé Mouret. 1974 : Nuits rouges.


"L’apparence est le vêtement de la personnalité."
Grand classique de l’horreur à la française, Les Yeux sans Visage adapte le roman de Jean Redon publié en 1959. Aussi notoire que La Belle et la Bête, le film tisse les thèmes de la beauté, de la laideur et de l’amour avec une singularité troublante : une poésie maladive en émane, alternant séquences surréalistes où le morbide se mêle à une mélancolie étrange. L’héroïne, défigurée par un accident, promène sa silhouette fragile tel un spectre errant, naufragée dans sa propre désillusion. Coupable de cette difformité, son père, chirurgien éminent, enlève de jeunes filles pour greffer à sa fille une beauté juvénile volée.

  
"La beauté de l’apparence n’est qu’un charme de l’instant ; le corps ne reflète pas toujours l’âme."
Conte d’épouvante d’un humanisme aussi douloureux que désespéré, Les Yeux sans Visage invoque sacrifice, jeunesse éternelle et dissection clinique, transcendé par l’onirisme de sa photographie noir et blanc. Le contraste frappe : la pénombre crépusculaire s’oppose à la froideur aseptisée du manoir, laboratoire d’expériences et de vivisections. La mise en scène, minutieuse, échafaude une intrigue tordue, malsaine, où Georges Franju impose son style documentaire sous une chape d’onirisme épuré, parfois enchanteur. À la densité narrative — corruption d’âmes aveuglées par l’égoïsme — répond le jeu sobre des comédiens, drapé dans une élocution théâtrale chère au cinéma français. Mais si Les Yeux sans Visage fascine, jusqu’à l’opacité, dans sa quête formelle et sa réflexion sur l’identité morale et charnelle (Christiane, étrangère à son âme sous ce nouveau visage), c’est surtout grâce à l’aura incandescente d’Édith Scob. Voilée d’un masque laiteux presque tout du long, elle n’a pour armes que la fièvre de son regard et la grâce de son corps longiligne, distillant une empathie amère pour cette victime complice, rongée de remords et de solitude.


"Les Voleurs de corps."
Récit horrifique déviant, collision de beauté et de monstruosité, Les Yeux sans Visage érige son style d’auteur dans l’écrin d’un conte cruel, déshumanisé. En dépit d’un rythme languissant qu’il faut apprivoiser, cette tragédie familiale, écartelée entre remords, amour et orgueil, ensorcelle les sens d’un magnétisme éthéré qu’un second regard révélera encore, à la faveur de ses ombres et de ses secrets.

*Bruno 
13.06.25. 4èx

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