mardi 13 septembre 2016

Emilie, l'Enfant des Ténèbres / Il medaglione insanguinato


de Massimo Dallamano. 1975. Italie/Royaume-Uni. 1h30. Avec Richard Johnson, Joanna Cassidy, Ida Galli, Nicoletta Elmi, Edmund Purdom.

Sortie en salles en France le 21 mars 1979.  Sortie U.S.A: Mars 1976.

FILMOGRAPHIEMassimo Dallamano est un directeur de la photographie et un réalisateur italien né le 17 avril 1917, décédé le 4 Novembre 1976. 1968: Le tueur frappe trois fois. 1972: Mais qu'avez vous faits à Solange ? 1973: Piège pour un tueur. 1974: La Lame Infernale. 1975: Emilie, l'enfant des Ténèbres.
                                         

"..... Le Diable est à l'origine des premiers malheurs de l'humanité...... Il est l'ennemi secret qui a semé erreurs et calamités dans l'histoire de l'homme."
Sa sainteté. Le Pape Paul VI.
 
"La Chambre aux tableaux". 
Illustre auteur des classiques du Giallo Mais qu’avez-vous fait à Solange ? et La Lame Infernale, Massimo Dallamano signe en 1975 son dernier testament — il meurt quelques mois après la fin du tournage — Emilie, l’enfant des ténèbres. Surfant sur la vague de L’Exorciste, sorti deux ans plus tôt, le film explore à son tour les chemins du satanisme à travers la possession d’une fillette traumatisée par la mort de sa mère, brûlée vive sous ses yeux.

Le pitch : Michael vient de perdre sa femme dans un tragique incendie. Sa fille, Emilie, est brisée par cette perte maternelle. Pour faire le deuil, il part en Italie réaliser un reportage sur les fresques représentant le Diable. Là, irrésistiblement attiré par un tableau étrange — qu’une petite fille semble fuir, effrayée par l’apparition spectrale d’une dame en blanc —, il achète un médaillon dans une boutique d’antiquités. Il l’offre à Emilie. Dès lors, son comportement change. Elle devient irascible, imprévisible.

Avec ce dernier long-métrage, Dallamano délaisse le Giallo pour s’aventurer dans un cinéma d’épouvante plus psychique, plus atmosphérique, dans le sillage de L’Exorciste. Il tisse ici une nouvelle variation sur la possession, doublée d’un drame de réincarnation et d’un trouble complexe d’Œdipe. Tout est dédié à l’étrangeté : nature crépusculaire baignée de lumière spectrale, villas provinciales saturées de silence... Emilie, l’enfant des ténèbres opte pour la suggestion, installe un suspense diffus, une langueur envoûtante.

Sans surenchère sanglante, même si quelques brèves secousses viennent ébranler l’âme — visions paniquées de villageois hostiles, lévitations d’objets, terreur pure figée sur le visage d’une enfant — Dallamano privilégie la retenue, bâtit une ambiance opaque, nourrie d’une fresque gothique d’une beauté hermétique. Nos protagonistes se réunissent dans une vieille bâtisse, scrutent les détails d’un tableau macabre peint deux siècles plus tôt par un artiste inconnu. Rapidement, on soupçonne qu’Emilie serait la réincarnation d’une fillette jadis damnée. Le scénario se répète aujourd’hui, guidé par le médaillon maudit et la peinture d’un démon cornu.

La présence d’une comtesse sexagénaire férue d’ésotérisme ajoute un mystère insondable, alors que le père d’Emilie écoute ses conseils avec scepticisme, pendant que sa nouvelle compagne, elle, préfère s’abandonner à ses bras. Richard Johnson (l’inoubliable docteur de L’Enfer des zombies) et Joanna Cassidy forment un couple d’amants un brin équivoques, au comportement glacial face à une certaine disparition.

Quant à Nicoletta Elmi (La Baie sanglante, Chair pour Frankenstein, Les Frissons de l’angoisse), elle livre une prestation écorchée, viscérale, d’une enfant névrosée hantée par les réminiscences : flash-backs moyenâgeux, visions morbides de sa mère immolée. Son regard perdu dans le vide, la beauté étrange de ses taches de rousseur, la douceur de sa chevelure... elle dégage un charme vénéneux, hypnotique, indicible.

Au-delà des plages de calme consacrées aux investigations, la réussite du film tient à sa simplicité : il narre une tragédie familiale où se mêlent inceste, sacrifice et œdipianisme. C’est ce que révèle sa dernière partie, élégiaque, bouleversante, lorsqu’on découvre le destin d’Emilie.                                


"Le Visage Blanc d’Émilie".
Passé inaperçu à sa sortie, encore ignoré aujourd’hui (malgré quelques cinéphiles fidèles), ce dernier film de Dallamano scande un gothisme d’ambiance avec un esthétisme digne des plus beaux travaux de Bava. Il ne faut pas bouder la simplicité de son scénario — tout en mystère diffus et suspense latent — pour mieux se laisser bercer par ces images baroques d’une limpidité poétique : Emilie, le teint blême, toute de blanc vêtue, pianotant dans une chambre envahie de tableaux…

Porté par la mélodie lancinante et inoubliable de Stelvio Cipriani, Emilie, l’enfant des ténèbres honore la série B d’épouvante avec intelligence et humilité. Son point d’orgue poignant accouche finalement d’une méditation troublante sur l’amour interdit et le pouvoir du Mal, transmis à travers une postérité damnée.

*Bruno
12.01.23. 4èx
13.09.16. 
25.05.11. (422)

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