"Quand on aime, on aime toujours trop". "Quand on aime on voit les belles choses".
mercredi 31 mai 2017
A LA RECHERCHE DU PLAISIR
lundi 29 mai 2017
Poor Pretty Eddie
de Richard Robinson. 1975. U.S.A. 1h32. Avec Leslie Uggams, Shelley Winters, Michael Christian, Slim Pickens, Dub Taylor, Ted Cassidy.
Sortie salles U.S: Juin 1975
FILMOGRAPHIE: Richard Robinson est un réalisateur, producteur, acteur américain. 1974: La grande partouze (as Rick Jr.). 1973 Fantaisies sexuelles d'un couple libre. 1972 Bloody Trail. 1972 To Hell You Preach. 1971 Adultery for Fun & Profit. David Worth est un réalisateur et producteur américain. 1994: Chain of Command. 1993 Lady Dragon 2. 1992 Lady Dragon. 1989 Kickboxer. 1986 Soldier's Revenge. 1983 Frat House. 1983 Doing It! 1983 Le chevalier du monde perdu. 1982 Body Magic. 1979 Hard Knocks. 1979 Pink Champagne. 1978 How Sweet It Is! 1975 Poor Pretty Eddie. 1998: I Might Even Love You. 1997 True Vengeance (Video). 1996 American Tigers 2014: Hazard Jack. 2014 House at the End of the Drive. 2006 Honor. 2004 Air Strike (Video). 2002 Shark Attack III (Video). 2001 Time Lapse (Video). 2000 Shark Attack 2 (Video). 2000 The Prophet's Game.
Etrange curiosité que ce Poor Pretty Eddie restée inédite en salles dans nos contrées. A mi-chemin entre The last house on Dead and street (pour le grain de pellicule rubigineux, le charisme patibulaire de quelques comédiens méconnus et pour son ambiance expérimentale malsaine) et Week-end sauvage (notamment cette relation ambiguë entre le violeur et sa victime), l'intrigue relate la séquestration d'une chanteuse afro-américaine chez les rednecks d'un pub reculé. Attiré par sa jeune beauté, Eddie Collins ne tarde pas à la violer sauvagement avant de tomber amoureux. C'est le début d'un long cauchemar qu'Elizabeth va traverser entre humiliations raciales et sévices sexuels, quand bien même la tenancière Bertha s'opposera à leur liaison, faute de sa jalousie sentimentale.
Echec commercial à sa discrète sortie aux States, Poor Pretty Eddie fait office de pépite atypique sous couvert de cinéma d'exploitation estampillé "seventie". De par son ambiance baroque multipliant les séquences-chocs en "slow motion" afin de décupler le caractère brutal de sa violence et son parti-pris expérimental de nous désarçonner avec d'autres moments dérangeants (tel le parallèle établi entre une scène de viol et un coït canin) sur un air de Country.
Franchement étrange, interlope et glauque au sein d'une scénographie domestique abritant des ploucs gouailleurs, Poor Pretty Eddie demeure une agréable curiosité si bien qu'il parvient sensiblement à nous immerger dans un bad trip sous le pilier du rape and revenge culminant au carnage anthologique ! Une conclusion illustrée en "slow motion" afin d'immortaliser la décadence criminelle !
Eric Binford.
jeudi 25 mai 2017
WILLARD
de Glen Morgan. 2001. U.S.A. 1h40. Avec Crispin Glover, Laura Harring, Jackie Burroughs, R. Lee Ermey, William S. Taylor, Kim McKamy.
Sortie salles France: 17 Septembre 2003. U.S: 15 Mars 2003
FILMOGRAPHIE: Glen Morgan est un scénariste, producteur et réalisateur américain né à Syracuse (New York) en 1962. 2003 : Willard. 2006 : Black Christmas. 2016 : X-Files (saison 10 épisode 4).
Remake d'une sympathique mais obsolète série B réalisée en 1971 par Daniel Mann, Willard demeure une fructueuse déclinaison sous la houlette de Glen Morgan. Si bien que ce dernier parfaitement inspiré par le roman de Stephane Gilbert (Ratman's Notebooks) transcende de loin son modèle grâce à la maîtrise de sa réalisation aussi bien inventive que stylisée (photo sépia à l'appui afin renforcer la scénographie gothique de la demeure vétuste), à l'efficacité des séquences-chocs d'une intensité dramatique (à l'instar de cette séquence anthologique d'une cruauté mélancolique quant au guet-apens meurtrier improvisé auprès d'un chat désorienté !) et au jeu halluciné de Crispin Glover en employé névrosé d'une haine refoulée. Les petits yeux éraillés dans son costard de croque-mort, ce dernier insuffle une présence iconique dans sa posture sépulcrale où se contredisent les sentiments d'impuissance, de désarroi et de rébellion en ascension. En patron véreux dénué d'une once de charité, R. Lee Ermey lui partage la vedette avec l'aplomb qu'on lui connait dans une exécrable posture d'orgueil méprisant.
En dépit de la sympathique assistance de Laura Harring en secrétaire prévenante, je préfère vanter la silhouette aussi bien longiligne que nécrosée de Jackie Burroughs (inoubliable mégère dans Simetière !) endossant la maman possessive de Willard avec un charisme famélique proprement terrifiant. Outre l'attrait ludique d'un schéma narratif semblable à son modèle (à peu de choses près), Willard s'avère autrement plus convaincant lorsque le réalisateur s'efforce sans peine à nous faire croire au domptage amical de l'anti-héros avec sa meute de rats. Décuplés en masse, ces derniers s'avérant franchement impressionnants lorsqu'ils accourent dans une hiérarchie militaire pour déchiqueter portes, fenêtres et pneus de voiture avant de passer à l'acte criminel sous l'allégeance de leur mentor. Autour de la relation amiteuse entamée entre Willard et son chouchou, Socrate, le redoutable Ben tente de lui voler sa place avec une jalousie pernicieuse. Glen Morgan recourant notamment à des séquences haletantes beaucoup plus spectaculaires et horrifiques que son modèle (ce qui lui manquait cruellement !), et ce sans céder à une quelconque gratuité. Les séquences horrifiques s'enchaînant au rythme de la progression criminelle de Willard et avant que les rats ne lui tiennent tête sous l'impériosité de Ben.
Sardonique et cruel (son épilogue référentiel à Psycho, les châtiments invoqués au chat, à Socrate et à l'entrepreneur !) et surtout plus crédible, horrifique et intense que son modèle, Willard constitue l'idéal prototype du remake salutaire.
Eric Binford
3èx
de Daniel Mann. 1971. U.S.A. 1H35. Avec Bruce Davison, Elsa Lanchester, Ernest Borgnine, Sondra Locke, Michael Dante
FILMOGRAPHIE: Daniel Mann est un réalisateur américain né le 8 août 1912 à Brooklyn, New York (États-Unis) et décédé le 21 novembre 1991 à Los Angeles des suites d'une insuffisance cardiaque. 1952 : Reviens petite Sheba , 1954 : About Mrs. Leslie, 1955 : La Rose tatouée, 1955 : Une femme en enfer, 1956 : La Petite maison de thé, 1958 : Vague de chaleur, 1959 : The Last Angry Man, 1960 : The Mountain Road, 1960 : La Vénus au vison, 1961 : Le troisième homme était une femme, 1962 : Five Finger Exercise, 1962 : L'Inconnu du gang des jeux, 1963 : Who's Been Sleeping in My Bed?, 1966 : Our Man Flint, 1966 : Judith, 1968 : For Love of Ivy, 1969 : A Dream of Kings, 1971 : Willard, 1972 : La Poursuite sauvage, 1973 : Interval, 1973 : Maurie, 1974 : Lost in the Stars, 1975 : Le Voyage de la peur, 1978 : Matilda
A l'origine du projet, il y a un roman, Ratman's Notebooks de Stephen Gilbert, paru en 1968 aux Etats Unis. Trois ans plus tard, le réalisateur Daniel Mann le transpose à l'écran en prenant pour vedette le débutant Bruce Davison (une sobre prestation perfectible mais néanmoins convaincante !) ainsi que d'éminents seconds-rôles parmi lesquels Elsa Lanchester (La Fiancée de Frankenstein), Sondra Locke et Ernest Borgnine. A sa sortie en salles, le film récolte un joli succès si bien qu'une suite beaucoup moins sombre (car plus familiale) intitulée Ben sera rapidement mise en chantier sous la houlette du cinéaste Phil Karlson. Timoré et introverti, Willard est un jeune employé d'une entreprise ayant des rapports houleux avec son patron tyrannique. Après le travail, il s'isole en compagnie de sa mère alitée dans leur grande bâtisse gothique quand bien même quelques acolytes de celle-ci viennent parfois leur rendre visite. Un jour, Willard se distrait de l'intrusion d'un rongeur dans son jardin. Le début d'une étrange et tragique histoire d'amitié va se nouer entre eux. Pour ceux ayant vécu leur adolescence à l'époque charnière des années 80 n'ont jamais pu oublier sa première diffusion TV du lundi soir dans le cadre de l'émission l'Avenir du futur. Alors que le lendemain, durant la cour de récré, on s'empressait de relater avec fascination passionnelle le fameux film d'épouvante diffusé à une heure de grande écoute !
46 ans plus tard, que reste-t'il de ce petit classique des années 70 après qu'un excellent remake fut mis en chantier en 2003 par Glenn Morgan ? On ne peut pas dire que la réalisation académique et le montage elliptique soient au beau fixe, et ce même si un charme désuet s'y fait ressentir à travers cette attachante histoire d'amitié entre un homme et deux rats que Daniel Mann nous content avec une sensible attention. En prime, sa partition musicale archaïque, en quasi décalage avec l'époque dans lequel il fut conçu prêterait même à confusion si bien qu'on croirait que le film pourrait dater des années 50 ! Outre ses couacs et son aspect vétuste émanant d'une réalisation beaucoup trop canonique, Willard parvient encore à nous séduire et nous toucher grâce à son récit à la fois débridé et dramatique évoquant les rapports troubles entre Willard et son escorte de rats. Quand bien même Daniel Mann fustige au passage l'exploitation ouvrière auprès de la dictature d'un patron vénal (formidable Ernest Borgnine dans ses outrances gouailleuses !), ce dernier étant prioritairement responsable de la déliquescence morale de son employé prochainement voué à une rancoeur vindicative. Willard s'impose alors en conte horrifique à travers ce portrait fragile d'un célibataire endurci constamment raillé et discrédité par son entourage amical (si on excepte sa vaine liaison avec une secrétaire), professionnel, voir même familial (sa mère possessive le considère comme un raté en dehors de son bon caractère), si bien que sa nouvelle relation entamée avec les rats va enfin lui permettre de se forger une autorité et s'affirmer auprès des autres lors d'un règlement de compte meurtrier. Un acte de rancoeur finalement aussi couard qu'ingrat, tant auprès de la victime assassinée que des rongeurs exploités à des fins criminelles puis finalement sacrifiés au profit de la nouvelle indépendance de leur mentor.
La nuit du Rat
En dépit de ces scories susmentionnés, Willard reste un divertissement aussi bien attachant que bonnard dans son lot de séquences intimistes et incidents progressivement horrifiques, certes désuets, mais néanmoins crédibles quant aux rapports de domination/soumission (et vice versa) imputés entre Willard et Ben. Réflexion sur leurs rapports de force où possessivité, jalousie et désir de surpasser son allié empruntent le cheminement de la sédition, Willard ne manque pas de provoquer l'empathie à travers le portrait sensible d'un marginal livré au désespoir de la solitude.
Note: Il s'agit d'un des premiers rôles de Bruce Davison au cinéma. Dans le remake, il incarne le père de Willard.
Eric Binford16.05.17
27.01.11. 92
mardi 23 mai 2017
Grave. Grand Prix, Gerardmer 2017
"Raw" de Julia Ducournau. 2016. France. 1h38. Avec Garance Marillier, Ella Rumpf, Rabah Naït Oufella, Joana Preiss, Laurent Lucas, Marion Vernoux
Sortie salles France: 15 Mars 2017 (Interdit aux - de 16 ans). U.S: 10 Mars 2017 (Int - de 17 ans).
FILMOGRAPHIE: Julia Ducournau est une réalisatrice et scénariste française née le 18 novembre 1983 à Paris. 2011 : Mange (téléfilm co-réalisé avec Virgile Bramly). 2016 : Grave
Nouvel électro-choc à la réputation sulfureuse (évanouissements de spectateurs à Toronto et à Los Angeles, distribution de sacs à vomi dans certaines salles, interdiction aux - de 18 ans en Irlande, en Norvège et en Grande-Bretagne), Grave est un objet de scandale que notre pays hexagonal s'est une fois de plus imposer dans un parti-pris gore. Partagé entre une répulsion viscérale me provoquant à moult reprises une nausée (sous-jacente) et une irrésistible fascination pour les portraits morbides impartis aux deux adolescentes, Grave aborde les thèmes du bizutage, de l'éveil sexuel, du végétarisme et du cannibalisme avec une originalité incongrue. Esthétiquement soigné et stylisé et nanti d'une ambiance malsaine à l'acuité envoûtante, l'intrigue suit le parcours de Justine au sein d'une école vétérinaire de Belgique. Issue d'une famille végétarienne, elle est contrainte lors d'un bizutage d'avaler un morceau de viande. De prime abord révulsée par son exploit et éprise de nausée, elle finit pour autant par prendre goût à la chair au point d'en devenir addict comme tout bon consommateur carné.
Descente aux enfers vertigineuse de deux adolescentes en proie à des pulsions cannibales incontrôlées, Grave s'avère diablement inventif et viscéralement émotif quant à son cheminement narratif truffé de revirements fortuits. Si bien qu'étonnement et stupeur se jumellent régulièrement afin de provoquer nos sentiments les plus vulnérables, la réalisatrice attisant autant notre curiosité que notre perplexité avec une diabolique alchimie. Outre la subtile pudeur qu'elle emploie pour brosser le portrait singulier d'une jeune ado chrysalide, car partagée entre l'éveil sexuel, le besoin de s'affirmer et le goût pour la chair, Grave aborde l'insatiabilité de ces sentiments matures sans jamais se complaire dans une complaisance putassière. Une gageure quand on se remémore son florilège de séquences extrêmes toutes plus provocantes les unes que les autres mais pour autant palliées d'une poésie macabre teintée de sensualité. De par sa mise en scène auteurisante et expérimentale abordant en filigrane la dictature du bizutage, Julia Ducournau y transfigure une satire sur le végétarisme sous l'impulsion du plaisir corporel. Celui du goût immodéré pour le sexe et la viande si bien que le corps virginal en mutation atteint ici des sommets d'orgasme lors de ses pulsions les plus outrancières. La sexualité (hétéro ou homo) et le cannibalisme ne cessant de télescoper afin de provoquer notamment chez le spectateur une confusion des sens gustatifs et olfactifs, jusqu'au malaise viscéral.
Parents
Beau, étonnamment épuré et parfois touchant, gore et sarcastique sous le pilier d'une narration iconoclaste habilement réinventée, Grave constitue une brillante réussite d'horreur à la française d'autant plus immersive et ensorcelante sous l'impulsion de jeunes comédiennes épatantes de spontanéité dans leur posture marginale. La réalisatrice rivalisant sans cesse d'audaces visuelles et d'inventivité afin de porter en dérision notre instinct primitif et carnivore, et ce jusqu'à sa toute dernière image glaçante d'ironie mordante.
Pour public averti avec avertissement du "haut le coeur" !
Eric Binford
Récompenses: Festival de Cannes 2016 : Prix Fipresci de la critique internationale pour les sections parallèles, après sa présentation en compétition à la 55e Semaine de la Critique
Festival européen du film fantastique de Strasbourg 2016 :
Octopus d’or du meilleur long-métrage fantastique international
Prix du public du meilleur film fantastique international
Festival du film de Londres 2016 : Sutherland Trophy du meilleur premier film
Festival international du film de Flandre-Gand 2016 : Explore Award
Paris International Fantastic Film Festival#2016 2016 :
Œil d'or du meilleur film de la compétition internationale
Prix Ciné+ Frisson du meilleur film
Festival international du film fantastique de Gérardmer 2017 :
Grand prix du jury
Prix de la critique
lundi 22 mai 2017
DREAM DEMON
de Harley Cokeliss. 1988. Angleterre. 1h28. Avec Jemma Redgrave, Kathleen Wilhoite, Timothy Spall, Jimmy Nail, Mark Greenstreet, Susan Fleetwood, Annabelle Lanyon
Sortie salles Angleterre: Août 88
FILMOGRAPHIE: Harley Cokeliss est un réalisateur, producteur, scénariste et acteur anglais né en 1945 à San Diego. Paris Connections (2010). An Angel for May (2002) : director (TV). Pilgrim (2000). The Ruby Ring (1997). Dream Demon (1988). Malone (1987). Black Moon Rising (1986).
Warlords of the 21st Century (1982). That Summer! (1979). The Glitterball (1977). The Battle of Billy's Pond (1976). Crash! (1971)
Surfant sur le succès des Griffes de la nuit, Dream Demon est une petite production anglaise exploitant le thème du rêve avec une certaine originalité. L'héroïne fraîchement débarquée dans son nouvel appartement étant en l'occurrence persécutée par de récurrents cauchemars au point de ne plus distinguer la réalité et d'entraîner dans ses délires sa nouvelle amie (l'ancienne propriétaire de l'immeuble occultant un sombre passé) ainsi que deux journalistes. Quand bien même ses propres rêves parviennent notamment à s'extirper de son psyché pour venir s'insérer dans sa réalité quotidienne et intenter à la survie de son entourage. Sur le point de se marier, elle tente d'excuser son sommeil perturbé par la peur de s'engager. Si la redondance des scènes de cauchemars aurait gagnée à être un peu moins appuyée, Harley Cokeliss parvient néanmoins à distiller l'inquiétude par le biais de situations tantôt grotesques, tantôt incongrues que nos héroïnes ne cessent mutuellement de déjouer. Le film se résumant à une longue course-poursuite chimérique au sein d'un huis-clos domestique de tous les dangers. A travers ses séquences horrifiques parfois débridées (les deux journalistes faisant office d'olibrius multiplie les provocations impudentes), on peut aussi vanter la qualité de ses effets gores sardoniques plutôt impressionnants et le jeu attachant des comédiennes s'épaulant mutuellement afin de démystifier une sombre intrigue de drame familial. L'héroïne servant finalement de vecteur cathartique pour elle même (son avenir potentiellement conjugal) et pour son amie amnésique depuis une enfance martyr !
En dépit de son cheminement narratif sans surprises et du manque de cohérence des situations surnaturelles (à force de confondre cauchemar et réalité on s'y perd largement !), Dream Demons demeure une sympathique série B au climat d'inquiétude assez perméable, à l'instar de l'esthétisme crépusculaire de sa photo azur instaurant un onirisme cauchemardesque.
Bruno Matéï
2èx
vendredi 19 mai 2017
Surveillance
de Jennifer Lynch. 2008. U.S.A. 1h38. Avec Julia Ormond, Bill Pullman, Pell James, Ryan Simpkins,
French Stewart.
Sortie salles France: 30 Juillet 2008
FILMOGRAPHIE: Jennifer Chambers Lynch est une réalisatrice et scénariste américaine, née le 7 avril 1968 à Philadelphie en Pennsylvanie aux États-Unis. 1993 : Boxing Helena (également scénariste). 2008 : Surveillance (également coscénariste). 2010 : Hisss (également scénariste). 2012 : Chained (également coscénariste). 2014 : A Fall From Grace. 2014 : XX.
Seconde réalisation de Jennifer Lynch (fille du célèbre David Lynch) après avoir désertée les écrans durant plus de 15 ans, Surveillance est un ovni incongru délicieusement sournois par son intrigue sinueuse conjuguant habilement road movie et huis-clos. Cette dernière alternant judicieusement évènements du présent et flashbacks explicatifs afin de nous éclairer sur le cheminement sordide d'une succession de déconvenues grotesques. Dans un commissariat reculé, 2 agents du FBI interrogent quelques témoins ayant plausiblement un rapport étroit avec divers assassinats potentiellement perpétrés par un ou des serial-killers. Au fil de leurs interrogatoires, chacun d'eux feint la vérité, de par leur responsabilité et complicité véreuse, quand bien même les agents tentent de démêler le vrai du faux.
Jeu de massacre en roue libre auquel deux flics ripoux, un couple junkie et une famille sans histoire vont malencontreusement se croiser lors d'une prise d'otages de fortune, Surveillance déstructure les codes du thriller sous le pilier d'une intrigue reptilienne résolument poisseuse. Sans dévoiler ses tenants et aboutissants, la brillante réussite de Surveillance émane de son ossature narrative constamment imprévisible si bien que l'on se surprend des moult épisodes dramatiques enfantés par un concours de circonstances aléatoires. Alors qu'autour de ses personnages sévèrement mis à mal avec l'infortune, une fillette témoin de ses actes immoraux s'avéra plus apte et lucide à démasquer le ou les éventuels coupables. Jennifer Lynch prenant notamment malin plaisir à avilir l'innocence sous ce témoignage infantile taiseux et d'inverser les rôles pour mieux nous piéger (et déranger) quant à sa résolution criminelle faisant office de cadeau empoisonné. D'une intensité de prime abord sous-jacente tout en distillant scrupuleusement un climat malsain aussi bien étouffant que méphitique, Surveillance nous confine au cauchemar escarpé au sein d'une réalité quotidienne bafouée par une romance viciée.
Pour Public averti.
Bruno Dussart
jeudi 18 mai 2017
REVES SANGLANTS
"The Sender/Deadly Dreams" de Roger Christian. 1982. Angleterre. 1h22. Avec Kathryn Harrold, Željko Ivanek, Shirley Knight, Paul Freeman, Sean Hewitt.
Sortie salles U.S: 22 Octobre 1982.
FILMOGRAPHIE: Roger Christian est un réalisateur et scénariste britannique, né en 1944 à Londres. 1982 : Rêves sanglants. 1985 : Starship. 1994 : Nostradamus. 1995 : The Final Cut. 1996 : Underworld. 1997 : Masterminds. 1999 : Star Wars, épisode I : La Menace fantôme de George Lucas (réalisateur 2e équipe). 2000 : Battlefield Earth - Terre champ de bataille. 2004 : American Daylight. 2004 : Bandido. 2013 : La Malédiction de la pyramide (TV). 2013 : Intuition maternelle (Dangerous Intuition) (TV) . 2013 : Invasion sur la Lune.
Un jeune bambin est témoin de l'assassinat de ses parents par un individu masqué d'une peau de loup. Des années plus tard, il souffre de récurrents cauchemars nocturnes par le biais de ce psychopathe vindicatif désireux de le faire sombrer dans la folie. Rêves et réalité s'entrechoquant dans l'esprit d'Alex au point de lui faire douter de son état mental. Sa petite amie et son frère aîné tentent vainement de le rassurer avant le fameux coup de théâtre d'une terrible machination.
Inédite en salles en France, Rêves Sanglants est une médiocre curiosité si proche de l'alibi narratif des Griffes de la Nuit (semer la confusion entre rêve et réalité) qu'on jurerait qu'elle eut été réalisée après le modèle de Craven ! Rêves Sanglants ayant été réalisé 2 ans au préalable par un cinéaste néophyte ! Parasité d'une intrigue minimaliste tentant d'apporter un regain d'originalité autour d'un nébuleux suspense empreint d'adultère, Rêves Sanglants sombre dans la redondance à conjuguer sans vigueur séquences de rêves et indices inquiétants d'une réalité quotidienne que notre héros confond. Et ce avant que son dénouement sans queue ni tête ne bifurque dans l'incohérence et le ridicule à daigner nous surprendre. Reste quelques scènes-chocs étonnamment soignées et réussies et l'effet de curiosité d'une production anglaise s'efforçant avec négligence de semer doute et confusion dans notre esprit peu inspiré par l'éventuelle cause surnaturelle des évènements.
Bruno Matéï
2èx
mercredi 17 mai 2017
BEN
de Phil Karlson. 1972. U.S.A. 1h34. Avec Lee Montgomery, Joseph Campanella, Arthur O'Connell,
Rosemary Murphy.
Sortie salles France: 4 Octobre 1972
FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Phil Karlson est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 2 juillet 1908 à Chicago, Illinois (États-Unis), et mort le 12 décembre 1985 à Los Angeles (Californie). 1944 : A Wave, a WAC and a Marine. 1945 : There Goes Kelly. 1945 : G.I. Honeymoon. 1948 : Les Reines du music-hall. 1949 : Le Chat sauvage. 1949 : Down Memory Lane. 1950 : The Iroquois Trail. 1951 : Les Maudits du château-fort. 1952 : Le Quatrième homme. 1953 : L'Affaire de la 99ème rue. 1954 : They Rode West. 1955 : Coincée. 1955 : Les Îles de l'enfer. 1955 : On ne joue pas avec le crime. 1955 : The Phenix City Story. 1957 : Les Frères Rico. 1958 : Le Salaire de la violence. 1959 : Les Incorruptibles défient Al Capone (Téléfilm). 1960 : Saipan. 1960 : Key Witness. 1961 : Le Dernier passage. 1961 : Les Blouses blanches. 1962 : Un direct au cœur. 1963 : Massacre pour un fauve. 1966 : Matt Helm, agent très spécial. 1967 : La Poursuite des tuniques bleues. 1968 : Alexander the Great (TV). 1968 : Matt Helm règle son comte. 1970 : L'Assaut des jeunes loups. 1972 : Ben. 1973 : Justice sauvage. 1975 : La Trahison se paie cash.
Profitant du filon commercial de Willard réalisé un an au préalable, Ben est une séquelle aussi vaine que poussive. Faute d'une mise en scène académique, d'un jeu d'acteurs transparents et d'une intrigue stérile oscillant maladroitement relation amiteuse entre un bambin et son rat domestique et attaques animales racoleuses si bien qu'elle sombrent parfois/souvent dans le ridicule (le prologue dans la cave évacué de toute tension dans sa tentative de susciter le frisson, l'invasion dans le gymnase digne d'une prod Z et le final vainement homérique sous les égouts). On se console timidement auprès de son générique final lorsque Michael Jackson prête sa voix de chanteur à travers la superbe mélodie Ben (présente dans son second album) et l'on se remémore avec nostalgie sa fantasmatique jaquette éditée chez Proserpine durant la sacro-sainte époque Vhs. Dénué de moindre émotion et de tension dramatique dans son intrigue de pacotille et l'entreprise de techniciens peu motivés, Ben demeure un divertissement beaucoup trop naïf et obsolète (que j'aurai pour autant aimer défendre dans mon souvenir d'enfance émue !), à réserver aux mômes entre 11 et 13 ans.
Bruno Matéï
2èx
de Daniel Mann. 1971. U.S.A. 1H35. Avec Bruce Davison, Elsa Lanchester, Ernest Borgnine, Sondra Locke, Michael Dante
FILMOGRAPHIE: Daniel Mann est un réalisateur américain né le 8 août 1912 à Brooklyn, New York (États-Unis) et décédé le 21 novembre 1991 à Los Angeles des suites d'une insuffisance cardiaque. 1952 : Reviens petite Sheba , 1954 : About Mrs. Leslie, 1955 : La Rose tatouée, 1955 : Une femme en enfer, 1956 : La Petite maison de thé, 1958 : Vague de chaleur, 1959 : The Last Angry Man, 1960 : The Mountain Road, 1960 : La Vénus au vison, 1961 : Le troisième homme était une femme, 1962 : Five Finger Exercise, 1962 : L'Inconnu du gang des jeux, 1963 : Who's Been Sleeping in My Bed?, 1966 : Our Man Flint, 1966 : Judith, 1968 : For Love of Ivy, 1969 : A Dream of Kings, 1971 : Willard, 1972 : La Poursuite sauvage, 1973 : Interval, 1973 : Maurie, 1974 : Lost in the Stars, 1975 : Le Voyage de la peur, 1978 : Matilda
A l'origine du projet, il y a un roman, Ratman's Notebooks de Stephen Gilbert, paru en 1968 aux Etats Unis. Trois ans plus tard, le réalisateur Daniel Mann le transpose à l'écran en prenant pour vedette le débutant Bruce Davison (une sobre prestation perfectible mais néanmoins convaincante !) ainsi que d'éminents seconds-rôles parmi lesquels Elsa Lanchester (La Fiancée de Frankenstein), Sondra Locke et Ernest Borgnine. A sa sortie en salles, le film récolte un joli succès si bien qu'une suite beaucoup moins sombre (car plus familiale) intitulée Ben sera rapidement mise en chantier sous la houlette du cinéaste Phil Karlson. Timoré et introverti, Willard est un jeune employé d'une entreprise ayant des rapports houleux avec son patron tyrannique. Après le travail, il s'isole en compagnie de sa mère alitée dans leur grande bâtisse gothique quand bien même quelques acolytes de celle-ci viennent parfois leur rendre visite. Un jour, Willard se distrait de l'intrusion d'un rongeur dans son jardin. Le début d'une étrange et tragique histoire d'amitié va se nouer entre eux. Pour ceux ayant vécu leur adolescence à l'époque charnière des années 80 n'ont jamais pu oublier sa première diffusion TV du lundi soir dans le cadre de l'émission l'Avenir du futur. Alors que le lendemain, durant la cour de récré, on s'empressait de relater avec fascination passionnelle le fameux film d'épouvante diffusé à une heure de grande écoute !
46 ans plus tard, que reste-t'il de ce petit classique des années 70 après qu'un excellent remake fut mis en chantier en 2003 par Glenn Morgan ? On ne peut pas dire que la réalisation académique et le montage elliptique soient au beau fixe, et ce même si un charme désuet s'y fait ressentir à travers cette attachante histoire d'amitié entre un homme et deux rats que Daniel Mann nous content avec une sensible attention. En prime, sa partition musicale archaïque, en quasi décalage avec l'époque dans lequel il fut conçu prêterait même à confusion si bien qu'on croirait que le film pourrait dater des années 50 ! Outre ses couacs et son aspect vétuste émanant d'une réalisation beaucoup trop canonique, Willard parvient encore à nous séduire et nous toucher grâce à son récit à la fois débridé et dramatique évoquant les rapports troubles entre Willard et son escorte de rats. Quand bien même Daniel Mann fustige au passage l'exploitation ouvrière auprès de la dictature d'un patron vénal (formidable Ernest Borgnine dans ses outrances gouailleuses !), ce dernier étant prioritairement responsable de la déliquescence morale de son employé prochainement voué à une rancoeur vindicative. Willard s'impose alors en conte horrifique à travers ce portrait fragile d'un célibataire endurci constamment raillé et discrédité par son entourage amical (si on excepte sa vaine liaison avec une secrétaire), professionnel, voir même familial (sa mère possessive le considère comme un raté en dehors de son bon caractère), si bien que sa nouvelle relation entamée avec les rats va enfin lui permettre de se forger une autorité et s'affirmer auprès des autres lors d'un règlement de compte meurtrier. Un acte de rancoeur finalement aussi couard qu'ingrat, tant auprès de la victime assassinée que des rongeurs exploités à des fins criminelles puis finalement sacrifiés au profit de la nouvelle indépendance de leur mentor.
La nuit du Rat
En dépit de ces scories susmentionnés, Willard reste un divertissement aussi bien attachant que bonnard dans son lot de séquences intimistes et incidents progressivement horrifiques, certes désuets, mais néanmoins crédibles quant aux rapports de domination/soumission (et vice versa) imputés entre Willard et Ben. Réflexion sur leurs rapports de force où possessivité, jalousie et désir de surpasser son allié empruntent le cheminement de la sédition, Willard ne manque pas de provoquer l'empathie à travers le portrait sensible d'un marginal livré au désespoir de la solitude.
Note: Il s'agit d'un des premiers rôles de Bruce Davison au cinéma. Dans le remake, il incarne le père de Willard.
Eric Binford
16.05.17
27.01.11. 92
mardi 16 mai 2017
Willard
de Daniel Mann. 1971. U.S.A. 1H35. Avec Bruce Davison, Elsa Lanchester, Ernest Borgnine, Sondra Locke, Michael Dante
FILMOGRAPHIE: Daniel Mann est un réalisateur américain né le 8 août 1912 à Brooklyn, New York (États-Unis) et décédé le 21 novembre 1991 à Los Angeles des suites d'une insuffisance cardiaque. 1952 : Reviens petite Sheba , 1954 : About Mrs. Leslie, 1955 : La Rose tatouée, 1955 : Une femme en enfer, 1956 : La Petite maison de thé, 1958 : Vague de chaleur, 1959 : The Last Angry Man, 1960 : The Mountain Road, 1960 : La Vénus au vison, 1961 : Le troisième homme était une femme, 1962 : Five Finger Exercise, 1962 : L'Inconnu du gang des jeux, 1963 : Who's Been Sleeping in My Bed?, 1966 : Our Man Flint, 1966 : Judith, 1968 : For Love of Ivy, 1969 : A Dream of Kings, 1971 : Willard, 1972 : La Poursuite sauvage, 1973 : Interval, 1973 : Maurie, 1974 : Lost in the Stars, 1975 : Le Voyage de la peur, 1978 : Matilda
A l'origine du projet, il y a un roman, Ratman's Notebooks de Stephen Gilbert, paru en 1968 aux Etats Unis. Trois ans plus tard, le réalisateur Daniel Mann le transpose à l'écran en prenant pour vedette le débutant Bruce Davison tout en sobriété ainsi que d'éminents seconds-rôles parmi lesquels Elsa Lanchester (La Fiancée de Frankenstein), Sondra Locke et Ernest Borgnine. A sa sortie en salles, le film récolte un joli succès si bien qu'une suite beaucoup moins sombre (car plus familiale) intitulée Ben est rapidement mise en chantier sous la houlette du cinéaste Phil Karlson.
Quelques décennies plus tard, que reste-t'il de ce petit classique des années 70 après qu'un excellent remake fut mis en chantier en 2003 par Glenn Morgan ? Willard parvient encore à nous séduire et nous toucher grâce à la sobre efficacité du récit à la fois fascinant, débridé, oppressant puis dramatique évoquant les rapports troubles entre Willard et son escorte de rats. Quand bien même Daniel Mann fustige au passage l'exploitation ouvrière auprès de la dictature d'un patron vénal (formidable Ernest Borgnine dans ses outrances gouailleuses). Ce dernier étant prioritairement responsable de la déliquescence morale de son employé prochainement voué à une rancoeur vindicative.
La nuit du Rat
Attachant, fort et impeccablement construit dans sa construction d'un suspense latent au service d'un profil psychologique sombrant dans la psychopathie, Willard reste un excellent divertissement adulte à travers son lot de séquences intimistes et incidents progressivement horrifiques plutôt crédibles quant aux rapports de domination/soumission (et vice versa) imputés entre Willard et Ben. Réflexion sur leurs rapports de force où possessivité, jalousie et désir de surpasser son allié empruntent le cheminement séditieux, Willard ne manque pas de provoquer l'empathie à travers le portrait sensible de ce marginal livré au désespoir de sa solitude.
Note: Il s'agit d'un des premiers rôles de Bruce Davison au cinéma. Dans le remake, il incarne le père de Willard.
Eric Binford
16.05.17
27.01.11. 92
lundi 15 mai 2017
LOGAN
de James Mangold. 2017. U.S.A. 2h17. Avec Hugh Jackman, Patrick Stewart, Dafne Keen, Boyd Holbrook, Stephen Merchant, Elizabeth Rodriguez, Richard E. Grant.
Sortie salles France: 1er mars 2017. U.S: 3 Mars 2017
FILMOGRAPHIE: James Mangold, de son vrai nom James Allen Mangold, est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur américain né le 16 décembre 1963 à New York, dans l'État de New York, aux (États-Unis). 1995: Heavy. 1997: Cop Land. 1999: Une vie volée. 2001: Kate et Léopold. 2003: Identity. 2005: Walk the Line. 2007: 3 h 10 pour Yuma. 2010: Night and Day. 2013: Wolverine: Le Combat de l'immortel. 2017: Logan.
"On se met hors de la vie quand on a tué... Il n'y a pas de retour possible... Légitime ou non, un meurtre vous marque."
Troisième volet imputé au personnage de Wolverine d'après Marvel Comics, Logan ressuscite le film de super-héros (en berne depuis une dizaine d'années si on excepte un ou deux sursauts) avec une grâce à la fois mélancolique et vertigineuse. Bouleversant drame familial si j'ose dire autour d'un survival mené avec une maîtrise sans fard, Logan constitue un concentré d'actions et d'émotions pures comme rarement le genre ait pu nous en offrir. Car à partir d'une intrigue linéaire relatant l'escapade d'un quatuor de super-héros contre l'armée, James Mangold en extrait un monstrueux divertissement inopinément sombre et sauvage. Sans concession, la vélocité des rixes entre bons et méchants s'avérant d'une barbarie viscérale lors des coups de griffes violemment assénés contre l'ennemi, quand bien même on se surprend de l'acuité dramatique des moments les plus cruels comme le soulignera une circonstance faussement rassurante. Sans céder à l'outrance ou le racolage comme il en pullulent chez les films de supers-héros mainstream, Logan demeure le p'tit canard subversif si bien que les séquences d'action chorégraphiées s'enchaînent (à en avoir parfois le tournis !) et se renouvellent au profit d'un récit substantiel faisant honneur à ses personnages tourmentés.
Modèle d'efficacité par sa structure soigneusement charpentée alternant bravoures homériques et émotion intimiste en la présence de Logan et de sa fille mais aussi de seconds-rôles malmenés (Xavier et Caliban), Logan distille un climat élégiaque (score au clavecin à l'appui !) au sein d'une campagne solaire contrastant avec la désillusion d'un Logan à bout de souffle dans sa retraite anticipée (il est proche du suicide). A travers ses dures expressions où se disputent l'irascibilité alcoolique, le désespoir latent mais aussi la rage de vaincre lors de furieux accès de révolte, Hugh Jackman nous délivre sans doute son plus grand rôle dans ce personnage sclérosé volontiers individualiste au point de délaisser le sort de sa partenaire incessamment traquée par des soldats sans vergogne. On peut d'ailleurs souligner le parti-pris réaliste du réalisateur à nous illustrer lors d'un bref passage explicatif la condition esclave de ces enfants martyrs souvent sacrifiés sous l'autel d'une hiérarchie militaire mégalo. Souvent mutique mais d'un charisme plutôt mature par son regard aussi bien revêche que torve, la petite Dafne Keen partage la vedette de son ascendant avec aplomb, soupçons d'arrogance et une émotion toujours plus fragilisée au fil de sa relation tendue avec son père. A eux deux, ils forment un duo improbable d'une belle dimension humaniste dans leur initiation fraternelle et familiale si bien que le réalisateur en extirpe au final un déchirant requiem avant de nous conclure une leçon de sagesse et de tolérance contre le venin de la haine meurtrière.
Transcendé par la densité humaniste de ces personnages en proie au doute, à la crainte de la vieillesse mais aussi à l'espoir de refonder un semblant de famille, Logan frappe en plein coeur dans son maelstrom d'émotions à la fois brutes et éthérées, notamment lorsque son sujet cible l'exploitation des enfants pour une cause belliciste. Au coeur des affrontements barbares émane une oeuvre initiatique épurée, pleine de bruit, de fureur et d'élégie, où perce une émotion lyrique. Un divertissement adulte avec une âme et un coeur, tel est l'emblème des grands classiques.
Bruno Matéï
samedi 13 mai 2017
Alien Covenant
de Ridley Scott. 2017. U.S.A/Angleterre. 2h02. Avec Michael Fassbender, Katherine Waterston, Billy Crudup, Danny McBride, Demián Bichir, Carmen Ejogo, Jussie Smollett, Amy Seimetz, Callie Hernandez.
Sortie salles France: 10 Mai 2017. U.S: 19 Mai 2017
FILMOGRAPHIE: Ridley Scott est un réalisateur et producteur britannique né le 30 Novembre 1937 à South Shields. 1977: Duellistes. 1979: Alien. 1982: Blade Runner. 1985: Legend. 1987: Traquée. 1989: Black Rain. 1991: Thelma et Louise. 1992: 1492: Christophe Colomb. 1995: Lame de fond. 1997: A Armes Egales. 2000: Gladiator. 2001: Hannibal. 2002: La Chute du faucon noir. 2003: Les Associés. 2005: Kingdom of heaven. 2006: Une Grande Année. 2007: American Gangster. 2008: Mensonges d'Etat. 2010: Robin des Bois. 2012: Prometheus.
"Il se prend pour Dieu mais Dieu a horreur de la concurrence"
Fraîchement sorti de la salle obscure, le flegme apaisé (malgré le bashing de masse sur Facebook !) et le sourire d’ado docile (repus de mes émotions fortes), je m’empresse de livrer à chaud mes impressions — et, par la même occasion, de déclarer ma flamme au père fondateur de la franchise, Monsieur Ridley Scott, trop souvent discrédité ces dernières années. Après avoir révolutionné le space opera avec son œuvre séminale Alien, le voilà de retour avec une préquelle située dix ans après les événements de Prometheus. Sans dévoiler les arcanes d’une intrigue brassant peur de l’inconnu, danger létal et création, Scott signe, avec Alien: Covenant, un spectacle flamboyant renouant avec l’essence du cinéma d’horreur : cristalliser, avec intégrité et brio technique, tension, angoisse, mystère et terreur dans un univers stellaire et terrestre, sombre et envoûtant, habité par une créature toujours aussi furieusement expressive.
Ce goût du sentiment d’insécurité, Scott le ressuscite dès la première partie, terriblement affolante : l’inoculation de micro-organismes qu’involontairement deux membres de l’équipage vont enfanter déclenche des séquences chocs d’une violence inouïe, soufflant une terreur viscérale sous l’impulsion d’un montage frénétique, où chaque éclat visuel avive l’intensité dramatique. En dépit d’un canevas narratif de prime abord éculé (quinze passagers détournent leur route vers une planète hostile pour s’y faire massacrer un à un, tandis qu’un androïde aux intentions troubles les retient dans son antre), Alien: Covenant nous entraîne vers un voyage au bout des ténèbres, imprégné d’une « épouvante licencieuse » que n’auraient pas reniée les artisans du ciné bis. Scott ose une violence crue, exposant des trognes méconnues dignes de Mutants ou Inseminoïd - mais ici, le jeu sobre et l’empathie pour ces visages égarés font toute la différence. Loin de la chair à canon transparente d’un Vendredi 13, leurs morts nous touchent.
Semé de clins d’œil au premier Alien (costumes « classiques » de nos héros futuristes, huis clos final dans le vaisseau) et de trouvailles macabres (l’extraction de l’alien chez deux victimes, la singularité de leur contamination), Alien: Covenant séduit habilement une nouvelle génération tout en alternant morceaux de bravoure spectaculaires et surgissements de terreur haletante sous l’effigie de xénomorphes toujours aussi rageurs et perfides. On salue, à ce titre, l’audace de son épilogue nihiliste.
Dans l'espace, personne ne vous entend hurler !
Spectaculaire, grandiose et épique sans céder à l’esbroufe, angoissant et parfois terrifiant, plongé dans un univers crépusculaire aussi suffocant qu’immersif, Alien: Covenant réinvente le divertissement horrifique à travers des codes connus mais savamment revitalisés, baignant dans une facture bis délicieusement assumée - les moyens pharaoniques en prime. S’ajoute à cela l’attachante caractérisation de personnages à la fois fragiles et combatifs, fuyant l’hostilité de créatures exterminatrices. Il en résulte un spectacle hybride de samedi soir, où « jouissance », « émotion » et « poésie » dictent la cadence - et où la magnifique scène d’apprivoisement d’un alien par son maître irradie une intensité mélancolique.
-- Bruno
La critique de Gilles Rolland: http://www.onrembobine.fr/critiques/critique-alien-covenant/
La critique du Point: http://www.lepoint.fr/pop-culture/cinema/alien-covenant-quand-ridley-scott-se-prend-pour-dieu-09-05-2017-2125903_2923.php
Le point de vue antinomique de Jean Marc Micciche:
Bon la question qui fâche...oui Alien covenant....J'ai du mal à comprendre l'indulgence qu'il y a autour du film...Et malgré mes réticences de bases très marqués, j'avais envie d'y croire, en Scott, dans sa mythologie....bref j'étais partie pour voir du Alien, pas un Vendredi de l'espace, parce que je suis désolé, c'est juste çà (malheureusement), une boucherie froide, sans aucune (pour la majorité) une once de mise en place de suspense. La première heure fait encore illusion, car moi en tant que fan de sf pur, je suis content de voir un vaisseau dans l'espace, et si le film se résume à une version clean du premier Alien, au moins la chose titille encore ma vibre alien...La scène d'ouverture fait un lien poussif sur la création (sic) mais bon c'est jolie et bien cadré, bien joué...la scène de l'incident spatial est une bonne entrée matière...puis le signal, plus l'arrivée sur la planète mystérieuse, etc...bon même si visuellement ça a de la gueule et la direction artistique est soigné, on reste loin quand de l'étrangeté, du suspense, de l'exploration de la planète...bref du sous alien, mais ça reste dans les clichés du genre, ça me gêne pas...et puis du coup le film s'accélère avec pour ma part les deux meilleures scènes du film, toute la scène d'horreur dans la navette ou Scott se lâche dans un jeu de course poursuite en montage parallèle vraiment grisant suivie dans la scène 'raptor' dans les hautes herbes...certes les perso agissent comme des teubés mais il y a une vrai tension..bref une bonne demi heure avant l'arrivée de David et de tout le tra lala sur la création....et là mon cerveau décroche littéralement....le film devient d'une lourdeur pachydermique, bavard, surlignant tout dix fois histoire de bien souligner le message.. et c'est là que le film vire clairement aux slaher à deux balles. Scott déteste ses personnages et pour un jeu de massacre triste pas si loin de série z genre Inseminoid ou Créatures...les bisseux trouveront sans doute leurs comptes dans ce wft, les autres pleureront....au passage, on apprend le sort des ingénieurs (renversant), on découvre l'origine de l'alien et de l'oeuf (misère)...les perso, tous plus con les uns que les autres font n'importe quoi et on les emploi à les faire tuer comme des merdes (qu'on est loin des perso secondaires des trois premiers alien)....je passe sur les invraisemblances, les ellipses pourries, car on a droit à deux scènes qui vaut leurs pesant de cacahouètes (le sauvetage et le scène dans le vaisseau). Il est temps que le film se termine....voilà la création de l'alien est douloureuse que celle de dark wador. Si vous aimez les slasher couillon, ça peut le faire.....
de Ridley Scott. 2011. U.S.A. 2h02. Avec Noomi Rapace, Michael Fassbender, Charlize Theron, Idris Elba, Guy Pearce, Logan Marshall-Green, Sean Harris, Rafe Spall, Emun Elliott, Benedict Wong.
Sortie salles France: 30 Mai 2012. U.S: 8 Juin 2012
FILMOGRAPHIE (Info Wikipedia): Ridley Scott est un réalisateur et producteur britannique né le 30 Novembre 1937 à South Shields.
1977: Duellistes. 1979: Alien. 1982: Blade Runner. 1985: Legend. 1987: Traquée. 1989: Black Rain. 1991: Thelma et Louise. 1992: 1492: Christophe Colomb. 1995: Lame de fond. 1997: A Armes Egales. 2000: Gladiator. 2001: Hannibal. 2002: La Chute du faucon noir. 2003: Les Associés. 2005: Kingdom of heaven. 2006: Une Grande Année. 2007: American Gangster. 2008: Mensonges d'Etat. 2010: Robin des Bois. 2012: Prometheus
Une équipe de scientifiques se dirigent vers une planète hostile après avoir exploré une grotte illustrant une carte sur l'origine de la vie. A bord de cette expédition, Elizabeth et son ami Charlie sont persuadés de rencontrer nos créateurs de l'humanité sur la planète LV-223. 33 ans après Alien, Ridley Scott ainsi que ses scénaristes Damon Lindelof et John Spaihts ont enfin entrepris de concrétiser le rêve de millions de fans. Concevoir une préquelle à son modèle et donc relancer la franchise pour exploiter d'autres horizons spéculatives et rameuter une nouvelle génération. Spectacle de science-fiction d'une sobriété intègre, Prometheus est avant tout une réussite esthétique dans sa photogénie rugueuse d'un univers hostile, un règne interlope imprégné de mystère avant l'affront d'un cataclysme terrien. A la manière de son aîné Alien, le réalisateur nous refait le coup de l'excursion ombrageuse auprès d'une nouvelle compagnie d'explorateurs envisageant de démystifier l'origine de la vie par le biais d'une carte symbolique. Sur place, en visitant les lieux d'une cavité rocheuse à l'atmosphère irrespirable, ils vont se confronter à une multitude d'énigmes, telles ces apparitions furtives d'humanoïdes virtuels ou encore le corps momifié d'un extra-terrestre. Tandis qu'au fil de leur archéologie, des sculptures et monuments historiques inscrites sur les remparts d'un sous-sol présagent une technologie avancée.
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Avec une ambition formelle, Ridley Scott se réapproprie des codes de la mythologie dans une sorte de mise en abyme pour réinterpréter un univers opaque irrésistiblement inquiétant. Dans Prometheus, l'immersion de son milieu inhospitalier est totalement fluide ! En artiste virtuose aux idées technologiques innovantes, renouant avec de vastes décors organiques d'une planète caverneuse, Scott s'impose une fois de plus en créateur d'images. Cette persuasion de nous entraîner en interne d'une galaxie jalonnée d'éléments troubles ou nébuleux, en connivence avec l'origine de la vie. Avec une science du suspense sous-jacent, Prometheus insuffle une atmosphère singulière d'abandon et d'isolement auprès d'une équipe de chercheurs incapables de supplanter l'antagoniste. Les enjeux humains impartis aux personnages, leur choix conflictuel de survie pour sauvegarder la terre et leur foi spirituelle vont être mis à lourde épreuve pour tenter de se devancer. Pour rationaliser leurs vicissitudes, la dimension humaine de nos protagonistes est allouée à une poignée de comédiens dépouillés car éludés d'une éventuelle bravoure guerrière (mention spéciale à Naomi Rapace en héroïne opiniâtre de sa conviction mystique et à Michael Fassbinder, androïde étrangement équivoque, sournois et affable). Des scientifiques au caractère bien distinct, chargés de crainte, de doutes et d'espoir mais piégés par une évolution délétère auprès d'un individu perfide. Quand bien même au fil de leur cheminement en déclin, leur quête initiatique est allouée d'une théorie métaphysique sur la notion de Bien et de Mal (un Dieu créateur souhaiterait-il invoquer notre perte ?). Notamment sur le fondement de notre foi à la spiritualité pour nous convaincre d'exister et évoluer.
Je ne sais rien mais c'est ce que je choisi de croire
Si nombre de questions restent en suspens (pour quelle motivation les ingénieurs souhaitent éradiquer la Terre et quel est le rôle véritable des armes biologiques ?), Prometheus est suffisamment dense, tangible, convaincant, parfois même terrifiant pour relancer une nouvelle franchise prometteuse. Spectaculaire, esthétiquement fascinant et impressionnant (l'avortement fait figure de nouvelle anthologie horrifique alors que la cruauté de certaines mises à mort renforcent son aspect cauchemardesque), Prometheus déploie en outre un nouvel antagoniste ésotérique. Un humanoïde finalement accouplé avec une forme organique bien connue des amateurs et donc en l'occurrence dévoilée sous son incubation originelle ! S'il n'est pas le chef-d'oeuvre annoncé, la nouvelle démesure de Ridley Scott est un grand film d'anticipation sur l'horreur d'une menace inconnue, l'infini inaccessible et notre soif d'en déchiffrer le sens.
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