Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr
"Hounds of Love" de Ben Young. 2016. Australie. 1h48. Avec Ashleigh Cummings, Emma Booth, Stephen Curry, Susie Porter, Damian de Montemas, Harrison Gilbertson.
Sortie salles France: 12 Juillet 2017. U.S: 11 Mars 2017. Australie: 1er Juin 2017
FILMOGRAPHIE: Ben Young est un réalisateur, acteur et scénariste australien.
2016: Love Hunters.
Quel Trip d'avoir assisté à un thriller horrifique si maîtrisé, aussi diablement intense qu'implacable, surtout venant d'un cinéaste néophyte puisqu'il s'agit de son premier long-métrage ! Sur le papier, Love Hunters avait de quoi laisser dubitatif par son impression de déjà vu déjà 1000 fois traités à l'écran avec plus ou moins de bonheur. Une jeune fille tombant dans les mailles du filet d'un couple de serial-killers experts dans l'art de kidnapper les fugueuses indociles pour les séquestrer dans leur cocon conjugal. Seulement ici, l'australien Ben Young impose sa patte personnelle à travers une réalisation aussi inspirée que stylisée (notamment cette bande-son monocorde, tel un battement de coeur irrégulier, parvenant à nous hypnotiser par son intensité auditive), quand bien même sa distribution au physique "ordinaire" parvient remarquablement à apporter un cachet d'authenticité. Aussi bien les rôles principaux (le couple et leur victime) que les seconds-rôles (la famille de la disparue et la police locale). Outre sa facture visuelle particulièrement soignée et non exempt d'expérimentation (ses longs plans filmés au ralenti pour imprimer la banalité d'un quotidien étrangement serein), Love Hunters bénéficie en prime de rebondissements particulièrement inventifs (la tentative d'évasion dans la salle de bain puis un peu plus tard celle du viol, les rapports tendus avec un voisin, l'intimidation d'un dealer) afin de surprendre le spectateur trop habitué aux codes éculés du genre.
Sur ce point, Love Hunters ne ressemble d'ailleurs à rien de connu à peu de choses près si bien que le réalisateur s'attache à nous brosser scrupuleusement, et au travers d'un climat aussi bien austère que feutré, le portrait d'un couple de tueurs dans leur stricte intimité. Entre étreinte amoureuse, jalousie rivale et goût pervers pour une sexualité morbide. Car au centre de leur relation passionnelle, leur nouvelle victime va malgré elle devenir un élément perturbateur si bien que l'époux assez sournois et manipulateur auprès de sa muse semble lui éprouver un soupçon de sentiments. C'est au fil de cette dissension conjugale que Love Hunter gagne en tension et dramaturgie sous l'impulsion d'un suspense émoulu que nous endurons sans pouvoir deviner l'évolution de cette guerre des sexes. Un spectateur attentif car totalement impliqué dans l'action, partagé entre contrariété, appréhension, empathie puis terreur pour la destinée de la victime dont on ne saurait présager un heureux dénouement. Quant à cette terreur psychologique que nous éprouvons pour sa condition de vie miséreuse, entre sévices sexuels et détérioration corporelle, Ben Young privilégie toujours le hors-champs (en dehors d'une seule séquence sanglante particulièrement crue lors de son point d'orgue) afin de ne pas sombrer dans la complaisance que nombre de cinéastes ont tendance à abuser pour choquer le plus facilement. Le jeu expressif et viscéral de la victime en déliquescence morale (Meilleure Actrice pour Ashleigh Cummings au Fedeora Award !) instaurant en prime un sentiment de désespoir qui ira crescendo jusqu'à sa dernière partie tendue comme un arc, et à nouveau imprévisible quant à l'intervention de nouveaux personnages et l'éventuelle issue dramatique. A ce titre, sa conclusion plutôt bouleversante insuffle une émotion candide au rythme d'une illustre chanson pop toute aussi gracile.
Mother and child.
Constamment tendu et désespéré, psychologiquement fouillé (et inopiné) quant aux rapports de force que s'improvise le trio conjugal (notamment la caractérisation fébrile de l'épouse en requête impossible de maternité !), Love Hunters créé la surprise avec une maîtrise, une intelligence et un réalisme cauchemardesque peu commun si bien que l'horreur des situations perpétuellement suggérée ne nous empêche pas de plonger avec effroi dans une descente aux enfers exiguë. Ajoutez à cela la singularité d'une ambiance lourde oppressante parfois désamorcée de tubes pop mélancoliques où perce une émotion fragile et vous obtenez une perle du psycho-killer (indépendant) à découvrir d'urgence ! En attendant le nouveau projet de ce réalisateur fort prometteur car pétri d'ambition, de foi et d'intégrité dans son amour pour le genre !
Dédicace à Cid Orlandu
Bruno Matéï
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