Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com
de Ari Aster. 2018. U.S.A. 2h06. Avec Toni Collette, Gabriel Byrne, Alex Wolff, Milly Shapiro, Ann Dowd.
Sortie salles France: 13 Juin 2018. U.S: 8 Juin 2018.
FILMOGRAPHIE: Ari Aster est un réalisateur, acteur et scénariste américain. Hérédité est sa première réalisation.
Précédé d'une réputation élogieuse (notamment auprès du festival de Sundance) et d'un trailer aussi bien percutant que bougrement efficace (dans son habile manière de ne rien dévoiler quant aux tenants et aboutissants de l'intrigue), Hérédité renouvelle brillamment peur et malaise sur grand écran alors qu'il s'agit du premier essai de Ari Aster derrière la caméra. Abordant le genre au 1er degré avec un souci de persuasion infaillible dans l'enchaînement des situations surnaturelles hyper maîtrisées (exit le grand-guignol de comptoir !) et d'une intensité parfois rigoureuse (pour ne pas dire insupportable), Hérédité retrace avec souci d'humanisme "précaire" le parcours de résilience d'une famille dysfonctionnelle en proie à des évènements irrationnels passé le deuil inéquitable de deux de leurs défunts. Prenant son temps à planter son intrigue et à dépeindre ses personnages psychologiquement ébranlés par la perte d'êtres chers, Hérédité est entièrement voué à leur caractérisation fébrile que Tony Colette monopolise avec un désarroi maternel parfois bouleversant. Celle-ci se livrant corps et âme face caméra à travers une palette d'émotions névralgiques que le spectateur endure à l'instar de coups de poignard émotionnels. L'intrigue parcimonieuse dans son refus de dévoiler tout indice étant établi de son point de vue paranoïaque eu égard des témoignages de son époux et de son fils davantage perplexes, suspicieux face à sa posture versatile.
Sur ce point, la première partie riche en intensité dramatique et donc rigoureusement éthérée dans son refus de l'esbroufe se surpasse, notamment afin de défricher une atmosphère à la fois fétide, mortifère, malsaine sous l'impulsion d'un score dissonant (prioritairement un simple bourdonnement permanent) n'ayant rien à envier au climat oppressant de Shining de Kubrick avec qui il entretient quelques points communs (notamment dans la manière d'ausculter les regards hagards des protagonistes les plus vulnérables et dans sa façon de distiller l'interrogation auprès de personnages équivoques). Véritable coup de maître de la part d'Ari Aster (nouveau talent surdoué à surveiller, pour ne pas dire maître à venir de la trempe d'un Carpenter ou d'un Polanski - on songe d'ailleurs à Rosemary's Bay pour le portrait binaire de l'héroïne évoluant autour d'un thème occulte -), ce dernier maîtrise l'outil horrifique grâce en priorité à l'étude avisée de ses personnages confrontés à une énigme nonsensique si bien que le spectateur aussi désorienté, affaibli et accablé qu'eux observe leurs fragilité névrosée avec une empathie mêlée de désagrément. Notamment lorsque le fils de la mère, l'élément le plus fragile car rongé de culpabilité, s'enfonce dans un mutisme dépressif avant de se laisser chavirer vers la terreur de l'inconnu face à une hostilité d'autant plus fourbe. Ari Aster exploitant intelligemment les codes du genre avec comme ressort la ferme conviction des comédiens compromis par leur foi cartésienne et/ou spirituelle. Quant à sa seconde partie drastique, car plus intense, éprouvante et radicale, elle cède à des séquences de pure terreur (les 2 hantises de spiritisme diffusant une tension de malaise à couper au rasoir, l'agression durant le cours lycéen alternant authentique frayeur et malaise viscéral, morceau d'anthologie traumatique inégalé !) sous le pivot d'une descente aux enfers où les coups les plus couards seront tolérés. Et le spectateur de sortir abattu de la projo (du moins c'était personnellement mon cas) avec une amertume aussi blême qu'anxiogène (pour ne pas dire dépressive chez les plus sensibles).
Apocalypse Now.
Malsain et méphitique de par la vigueur de son climat inquiétant ne lâchant pas d'une semelle les états d'âme véreux des protagonistes, et la montée graduelle d'une violence horrifique semée de visions hyper dérangeantes (alors que le gore s'y fait si discret !), Hérédité réinterprète l'horreur la plus vicelarde derrière un drame psychologique d'une rare acuité dramatique. La réussite probante de ce premier métrage émanant avant tout de sa vibrante réflexion sur l'acceptation du deuil inéquitable avant de bifurquer vers une directive contrairement démoniale. Maîtrisant sur le bout des ongles (fourchus) sa bande-son magnétique, sa mise en scène au cordeau et sa direction d'acteurs hors-pair (notamment auprès de l'étrangement patibulaire Milly Shapiro dans un second-rôle concis mais pour autant proéminent), Ari Aster accomplit le prodige de susciter la frousse et la commotion (à l'instar de la Malédiction ou plutôt de l'Exorciste dans l'art et la manière de nous transmettre un malaise trop tangible) à travers le thème sempiternel du Mal le plus accompli. Une référence donc en bonne et due forme d'une épouvante séculaire (dans son sens le plus éminent et mature) que les ados acnéens fans d'Annabelle auront sans doute peine à acclimater.
* Bruno
La chronique de Gilles Rolland : http://www.onrembobine.fr/critiques/critique-heredite/
Florian Veysselier:
Film d'horreur dont tout le monde parle, Hérédité pourrait bien être le renouveau de l'horreur. Premier film pour Ari Aster, phénomène à Sundance, se targuant d'une belle réputation, Hérédité vaut-il le coup? Oui! Il s'agit d'un vrai film d'ambiance qui met terriblement mal à l'aise, et cela dès le début, naviguant perpétuellement entre réalité complexe et cauchemar éthéré, afin de glisser une histoire bourrée de symboliques et de métaphores. C'est glauque au possible et cela est en partie dû au travail incroyable de la mise en scène, très lente, très contemplative, avec de lents mouvements, empruntant aussi bien à James Wan qu'à John Carpenter. Rien n'est laissé au hasard dans ce rêve éveillé, que ce soit l'image, le son, les symboles ou encore la prestation incroyable de Toni Collette. On pourra petu-être même y retrouver quelques références à Lovecraft, à Dante ou encore à Barker. Par contre, le film est très difficile d'accès, car il est très lent, très long et il peut laisser pas mal de monde sur le carreau. Mais bon Dieu que ça fait du bien de voir un film au cinéma qui a autant de parti pris et de couilles, dans tous les domaines.
5,5/6
Jean-marc Micciche:
Après l'énorme bonne surprise de sans bruit, voilà venir Hérédité et de tenir la dragée haute des œuvres qui viennent de nulle part et qui à la sortie de la projection donne le sentiment d'avoir assisté à une étrange expérience. Assurément, le film va divisé tant son partis pris se positionne aux antipodes du cinéma fantastique et à l'instar de The Witch et de Mother, il y a de grande chance pour que le film fasse son effet. Le plus curieux, c'est de constater à quel point le film est très éloigné de sa bande annonce ou alors de sa taglines 'un choc comme l'exorciste'. Pourtant, si je devais chercher une influence souterraine au film, c'est plus rosemary's baby en fait, tant le film noie franchement le poisson durant la première heure du film au point où on s'interroge sur la nature du film. Incroyable tension porté par une réal incroyablement immersive et des visions chocs qui se succèdent comme une inexorable descente aux enfers. Bourrés d'embardés étranges et poétiques, bourrés d'images inconfortables, le film explose dans ses dernières minutes dans toute son implacable horreur. La terre est en danger et un nouveau roi va régner !
Frederic Serbource:
J'ai surkiffé, je suis au bord du 5/5. Alors bien sûr, c'est l'antithèse des Annabelle ou autres Blumhouseries de seconde zone, c'est une proposition d'épouvante adulte et sujette à réflexion, les ados et le grand public vont détester. La mise en scène est juste virtuose, c'est beau, vraiment ! Quand tu crois que Toni Colette vient de livrer la performance de sa vie pendant une scène, il y en a une autre qui vient te prouver qu'elle en gardait sous la pédale. Et, niveau imagerie de l'épouvante, ça a réussi à me faire flipper, bordel (le nombre de fois ou j'ai fait "Whoo put*** !!" tout seul dans la salle -oui, j'avais la salle pour moi ^^ ).
Juste un petit bémol sur les ultimes secondes qui réexpliquent le pourquoi du comment, sûrement par peur de laisser une partie du public sur le carreau.
Sinon un sans-faute !
4,5/5
Ruffeet Nelly:
Je sors de la projection de 'Hérédité" et c'est prodigieux ! Ari Aster est un réalisateur à suivre qui a tout compris aux codes traditionnels du film d'épouvante. Il les réinvente dans ce film en nous emportant dans un drame familial putride et mortifère dont on ne sort pas indemne ! Mention spéciale à Tony Colette qui est incroyable en mère troublée par le deuil de sa mère puis de sa fille alors que dans la deuxième partie du film, on bascule dans tout autre chose. Elle est littéralement 'habitée" par le rôle et signe une très grande performance ! Les topos du film d'horreur sont là (bruits inquiétants, objets qui bougent, séances de spiritisme, personnages doubles etc) mais ils ont été digérés par le travail minutieux du réalisateur. La mise en scène de la première partie du film est très travaillée, le rythme est assez lent dans la première moitié afin de bien établir les caractères de chaque membre de la famille. La petite fille semble tout droit sortie de Freaks de par son allure et son regard qui semble en permanence habité par une autre dimension (d'ailleurs elle ne dort pas dans son lit). La deuxième partie, plus rythmée, enchaîne les retournements de situation et on ne cesse de se poser des questions sur la voisine, le pourquoi du comment du carnet de la petite fille, des hallucinations du fils, hallucinations très prenantes ! On se demande d'où vient cette répétition du scénario d'étranglement ( avec la fille puis le fils), les raisons de l'ensorcellement de la mère lors de la séance de spiritisme etc Questions la plupart du temps sans réponse jusqu'au feu d'artifice final, abrupt, qui nous laisse sur le cul ! c'est à la fois mon bémol et ce qui fait aussi que la fin est réussie: le mutisme final nous laisse dans un état très particulier de mal-être qui aurait peut-être pu être encore + développé. La photographie est sublimement neutre et sombre à la fois, la mise en scène est irréprochable en alternant les scènes avec chacun des membres de la famille jusqu'à petit à petit se resserrer et atteindre l'origine de ces dysfonctionnements familiaux ! Digne de "La malédiction" ou de "Rosemary's baby, ce film restera dans les annales ! <3 p="">3>
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