mardi 23 avril 2019

Le Narcisse Noir

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"Black Narcissus" de Michael Powell et Emeric Pressburger. 1947. Angleterre. 1h40. Avec Deborah Kerr, David Farrar, Kathleen Byron, Jean Simmons, Sabu, Judith Furse, Flora Robson.

Sortie salles France: 20 Juillet 1949. Angleterre: 24 Avril 1947

FILMOGRAPHIE: Michael Powell est un réalisateur britannique, né le 30 septembre 1905 à Bekesbourne, décédé le 19 Février 1990 à Avening, Gloucestershire. 1937: A l'angle du monde. 1939: L'Espion noir. 1939: Le Lion a des ailes. 1940: Le Voleur de Bagdad. 1940: Espionne à bord. 1941: 49è parallèle. 1942: Un de nos avions n'est pas rentré. 1943: The Volunteer. 1943: Colonel Blimp. 1944: A Canterbury Tale. 1945: Je sais où je vais. 1946: Une Question de vie ou de mort. 1947: Le Narcisse Noir. 1948: Les Chaussons Rouges. 1948: The Small Back Room. 1950: La Renarde. 1950: The Elusive Pimpernel. 1951: Les Contes d'Hoffman. 1955: Oh! Rosalinda ! 1956: La Bataille du Rio de la Plata. 1956: Intelligence Service. 1959: Lune de Miel. 1960: Le Voyeur. 1961: The Queen's Guards. 1964: Le Château de Barbe-Bleue. 1966: They're a Weird Mob. 1969: Age of Consent.


"Nul ne pèche par un acte qu'il ne peut éviter." 
Réputé pour sa beauté plastique exceptionnelle alors qu'il fut réalisé en 1947; Le Narcisse Noir est un objet filmique difficilement apprivoisable au 1er regard. Car de mon point de vue strictement subjectif et l'ayant découvert sur le tard, il s'agit d'une oeuvre insaisissable de par la subtilité de son atmosphère éthérée tantôt vénéneuse, tantôt envoûtée, et d'un cheminement narratif à la fois imprévisible, sporadique, tentaculaire. Le pitch: une poignée de soeurs anglicanes sont recrutées par un général indien à diriger un couvent, un dispensaire et une école dans son palais situé à hauteur d'une falaise hymalayenne. Peu à peu, et depuis la présence de Mr Dean et d'un jeune général, Soeur Rose et Soeur Clotilde sont troublées par ses autorités masculines. Entièrement voué à la psychologie névrosée de ses nonnes dépaysées par un panorama disproportionné, Le Narcisse Noir traite du refoulement sexuel avec une trouble ambiguïté.


Tant auprès de l'inimitié de Soeur Rose et de Clothilde hantées par le désir sexuel, que du personnage frigide de Mr Dean difficilement domptable à travers son machisme rigide (le final s'avérant d'autant plus cruel faute de son empathie éprouvée pour l'une d'elles). Emaillé de séquences baroques à la limite du surréalisme (notamment auprès du regard littéralement ensorcelant de soeur Rose gagnée par la folie punitive), Le Narcisse Noir jongle avec le drame psychologique parmi la trouble intensité du non-dit et des regards tacites. Sa beauté flamboyante omniprésente renforçant le caractère hermétique de ces pertes identitaires en proie à l'émancipation que Rose et Clothilde se contredisent parmi la complexité du passé secret. Sans anticiper l'action sobrement mise en place sous l'impulsion d'un environnement naturel à la lisière de la féerie, Michael Powell et Emeric Pressburger parviennent donc à fasciner à travers les thèmes universels de l'amour et de la sexualité que des nonnes s'interdisent en lieu et place de foi religieuse. Ainsi, en traitant de l'inégalité des sexes, Le Narcisse Noir oppose le pouvoir hermétique de son immense cadre naturel (symbole de liberté absolue) avec l'autorité des hommes en quête de discipline, de rédemption (l'alcoolisme de Mr Dean), d'appui féminin et d'éventuelle liaison amoureuse.


Une réflexion sur la morale chrétienne et la complexité des rapports contradictoires entre les 2 sexes. 
Difficile d'accès au premier abord selon mon propre jugement de valeur, Le Narcisse Noir me parait riche d'intensité et de beauté diaphane à travers ses caractérisations cérébrales compromises par le refoulement, la névrose, le désir et la discipline chrétienne. Un objet inclassable en somme aussi bien candide que sulfureux à revoir plusieurs fois pour en saisir toute son essence capiteuse. Car étrange, déroutant, ineffable et subtilement oppressant, il laisse en mémoire de saisissantes images baroques à travers les thèmes de la jalousie, de la pulsion sensuelle et de la folie amoureuse que l'obscurantisme finit par engendrer chez les êtres les plus précaires.  

*Bruno

Récompenses: Oscars 1948
Oscar de la meilleure photographie pour Jack Cardiff
Oscar de la meilleure direction artistique pour Alfred Junge
Golden Globes 1948
Golden Globe de la meilleure photographie pour Jack Cardiff

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