samedi 5 mars 2011

COMME UNE ETOILE DANS LA NUIT

                                             

de René feret. 2007. France. 1H30. Avec Salomé Stévenin, Nicolas Giraud, Jean-François Stévenin, Marilyne Canto, Guillaume Verdier ...

BIO: René Féret est un cinéaste et acteur français, (26/05/45 à La Bassée, Nord) qui a réalisé 15 longs-métrages (La Communion solennelle, L'Homme qui n'était pas là, La Place d'un autre, Promenades d'été).

L'ARGUMENT: Marc et Anne vivent d'un amour passionnel qui vient à peine de démarrer. Mais le jeune homme va apprendre qu'il est atteint de la maladie de Hodgkin. Leur rêve d'avoir un enfant et de se marier sera inévitablement compromis.

                    

A travers l'histoire poignante d'un homme atteint d'une grave pathologie, René Féret va nous dresser sans pathos ni grandiloquence le portrait d'un couple exemplaire engagé dans l'optimisme pour la liberté d'espérer et d'aimer coûte que coûte. Deux amants amoureux qui vont s'unifier dans leur sentiment pour combattre la maladie et la mort.

Avec une narration aussi éculée se fourvoyant fréquemment dans la mièvrerie et les larmes faciles, Comme une Etoile dans la nuit tire sa distinction, sa force et son éclat dans son refus d'apitoiement sur les personnes au seuil de la mort. Ou tout du moins qu'il sera évitable de se lamenter, se complaindre de manière exacerbée sur la gravité d'une situation aussi dramatique.
Ce qui intéresse en priorité le réalisateur c'est ce combat de la vie contre la mort qui sait ici rester humble et digne de foi pour accéder à une forme de victoire personnelle autant que fusionnelle dans l'épanouissement de l'amour à travers un couple idyllique écorné.
On suit alors la vie quotidienne en demi-teinte, nonchalante et pleine d'espoir de ce jeune couple enrayé par le cancer de la maladie.
C'est leur cheminement que nous allons suivre et perdurer en suivant leur parcours lourdement affecté à travers les va et vient de différents examens pathologiques prescrits pour Marc dans les diverses cliniques spécialisées. Les lourds traitements qu'il doit subir, ses espoirs, ses craintes, ses angoisses, ses interrogations qu'il fera tout autant partager à son amie Anne constamment à ses côtés.
C'est tout autant le point de vue de cette femme amoureuse au courage exemplaire dans sa nouvelle vie pesante que nous allons également côtoyer et analyser.
Sa lucidité devant le fait accompli, sa foi alimentée par l'optimisme, sa force imparable d'aimer jusqu'au bout de la route et offrir avec toute sa vigueur l'immensité de son coeur à l'être aimé.

                    

Tandis que les autres témoins, les réactions exclamées de l'entourage de Marc ou du point de vue de Anne, leurs amies, les attitudes des différents acolytes ou des membres de la famille auront tendance à se mouvoir dans une plainte lamentée, une compassion tragédienne, un excès d'empathie envers l'état physique et la déliquescence du mourant.
Comme les parents de Anne qui refusent à admettre cette tragédie contemplative, n'acceptant pas que leur fille soit sur le fil du rasoir pour son équilibre vital, son avenir dénaturé, son épanouissement à vivre sa liberté lourdement remis en cause du haut de ses 25 ans.
Un père lâche, apathique et défaitiste qui refuse d'accepter que Marc soit potentiellement condamné par la maladie.
Tandis que les amis chers du malade, sa soeur ou ses parents s'apitoieront de manière pathétique sur son sort plutôt que de lui administrer un regain de chaleur, un optimisme rigoureux et une vivacité clairvoyante pour lui permettre de raviver son esprit et son éthique.

LES AMANTS ETERNELS.
Notre couple interprété par la très jolie Samuel Stevenin dans le rôle de Anne et Nicolas Giraud dans celui de Marc sont étonnants de justesse et d'humilité dans leur trajectoire périlleuse, pleine de doute, de craintes, d'espoir mais surtout leur force implacable de vivre jusqu'à la dernière seconde leur passion amoureusement ardente. Combattre le mal par une communion spirituelle promise dans la chair de l'autre.
La lettre bouleversante dans sa morale existentielle que Anne lira à la fin de leur parcours est un florilège de valeurs essentielles contre l'horreur de la mort, une leçon de vie pour y faire face et mieux affronter sa douleur vertueuse ou physique. Un hymne, une victoire de l'amour sur la mort quelqu'en sera notre destin et l'issue invoquée.

                    

LA MELODIE DE L'AMOUR.
Dans une mise en scène épurée sans aucun artifice, pleine de retenue et de candeur, Comme une étoile dans la nuit est un très beau témoignage tout en modestie et pudeur sur un couple alimenté par la confiance et l'uniformisation de deux coeurs confrontés à l'abîme mais confortés dans le culte de l'altruisme. A travers cette expérience douloureuse du combat implacable contre la maladie, le film se veut un vibrant hommage à l'amour dans sa forme la plus expansive, authentifiée dans le reflet de ces âmes éternelles.
Exactement de la même manière que de verser des cendres dans un océan matinal laissant pointé à l'horizon un soleil serein et contemplatif.

A Pina...

                    

vendredi 4 mars 2011

Freeway

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Matthew Bright. 1996. U.S.A. 1h38. Avec Kiefer Sutherland, Reese Witherspoon, Wolfgang Bodison, Dan Hedaya, Amanda Plummer, Brooke Shields, Michael T. Weiss.

BIO: Matthew Bright est un réalisateur et scénariste américain, né le 8 juin 1952 aux États-Unis, responsable de quatres longs-métrages dont l'excellent Ted Bundy directement sorti en vidéo en 2001. Freeway est sa première réalisation. Il y tournera enfin sa suite 3 ans plus tard, restée inédite en salles en France.


Le pitch : Pendant que sa mère prostituée et son beau-père drogué sont arrêtés par la police, Vanessa, jeune fille rebelle, décide de s'enfuir de la région pour aller rejoindre sa grand-mère en dérobant la voiture de son assistante sociale. Sur l'autoroute, son véhicule tombe en panne, mais un aimable pèlerin, psychologue pour enfants, lui prête main forte pour l'amener à son rendez-vous. Vanessa accepte mais se retrouve embarquée dans une descente aux enfers où les rôles vont finalement s'inverser: d'innocente victime, elle accédera au rang de meurtrière vindicative ! 
Méfiez vous des apparences ! Car à l'annonce du pitch convenu, Matthew Bright accouche d'un film monstre aussi bâtard que débridé. Entre violence incisive et délire sardonique mâtiné de grand-guignol, à situer quelque part entre un Tex Avery vitriolé et le conte de Perrault, Le Petit Chaperon Rouge. Le tout assaisonné du tempérament explosif de son actrice néophyte, Reese Witherspoon !  Porté par l'incroyable talent d'une jeune comédienne en roue libre à l'orée d'une riche carrière (Freeway est déjà son 6è rôle !), la pin-up Reese Witherspoon endosse son rôle effronté avec une spontanéité, une incontinence et un naturel imparables ! Un personnage haut en couleur de diva sexy, une adolescente fragile mais débordante d'impertinence de par son caractère irresponsable !


Il faut la voir affronter courageusement son violeur avec une haine disproportionnée ou affronter les provocations gratuites d'une prisonnière impérieuse dans un pénitencier pour femmes ! Un pugilat féminin bougrement extraverti car culminant au déchaînement de violence désaxée ! Ou lorsque la haine de l'iniquité pousse à la révolte criminelle. Ainsi, Matthew Bright nous transfigure l'attachant  portrait d'un chaperon rouge marginalisé d'une société urbaine en déliquescence, là où la justice et les forces de l'ordre sont devenues des parodies de leur corruption. Vanessa déambulant au hasard de ces rencontres autoritaires, telle l'enfant égaré dans une forêt hostile, pour retrouver un semblant de patrimoine familial, l'ultime espoir d'une retrouvaille salvatrice (celle de sa grand-mère !) au sein d'une métropole aliénée. Secondé par Kiefer Sutherland il caractérise à merveille l'emprise du violeur sadique, un tueur d'adolescent odieusement pervers dans son jeu de rôle cynique de questions-réponses éhontées. Rendu défiguré par sa diva hilare, ce renversement de situation ajoute du piment corrosif à cette traque meurtrière jamais avare de revirements impromptus ! Enfin, les apparitions furtives des seconds rôles ne laissent pas non plus indifférents. Que ce soit l'épatante et trop rare Amanda Plummer dans le rôle déchu d'une prostituée au grand coeur, Michael T. Weiss dans celui d'un drogué violeur aussi désopilant que pathétique, ou encore le duo imbu de flics obtus, campés successivement par Wolfgang Bodison et Dan Hedaya. Je termine avec la surprenante apparition de Brooke Shield interprétant la femme de Bob, une potiche de service aguicheuse au QI déficient, car incapable de déceler la moindre ambiguïté sur la double vie de son amant sociopathe.


La Revanche d'une blonde
Pour emprunter le cheminement d'un conte enfantin, Freeway adopte brillamment la démarche insolente de la farce à la fois cynique et sardonique. De remake trash à cartoon hilare, le cinéaste ayant su agencer climat insolent de rires nerveux et bouffées oxygénées d'ultra violence. Toutes les situations farfelues ou dramatiques s'exacerbant au rythme d'un ton goguenard, notamment par l'attitude erratique des personnages impudents. Enfin, la posture survitaminée de Reese Whiterspoon  et l'arrogance déloyale de Kiefer Sutherland doivent beaucoup au caractère débridé de cette traque infernale ultra jubilatoire. 

Bruno 
18.09.10. 3èx

Récompenses: GRAND PRIX DU JURY AU FESTIVAL DU FILM POLICIER A COGNAC 1997
                        PRIX DE LA CRITIQUE
                        PRIX D'INTERPRETATION FEMININE

NOTE: La durée du film varie selon certains pays !
France : 102 minutes ; Australie : 97 minutes ; Etats-Unis : 97 minutes (cut version)


jeudi 3 mars 2011

THE LAST LITTLE HOUSE ON THE LEFT IN THE PRAIRIE

                                     

de Otto Rivers. 2010. Durée: 7'44".

La vidéo ci-dessous !




HOUSE

             

de Nobuhiko Obayashi. 1977. Japon. 1H32. Avec Kimiko Ikegami, Kumiko Ohba, Yôko Minamida

BIO: Nobuhiko Obayashi (Obayashi Nobuhiko, né le 9 janvier 1938) est un réalisateur japonais, scénariste et monteur de films et de publicités pour la télévision qui est bien connu pour son style visuel surréaliste.
Il fut particulièrement reconnu pour ses films sur le passage à l'age adulte. Des films tels que Exchange Students (1982) et Futari (1991) développent ce thème tout en conservant les éléments de fantaisie surréaliste propre à son univers visuel.
House est son premier long-métrage.
 
                         

L'ARGUMENT: Une jeune fille contrariée fuit le cocon familial après que son père veuf se soit remis avec une nouvelle dulcinée.
Elle décide alors de partir en voyage chez sa tante, en compagnie de quelques amies. Arrivées dans la demeure, d'étranges phénomènes ne vont pas tarder à sa manifester.

MAGICAL MISTERY TOUR !!!
Attention film ovni ne ressemblant à rien de connu, au risque de donner une migraine pour les non avertis !
Dire que le film dâte de 1977 et que Sam Raimi a dû s'en inspirer pour son fameux Evil-Dead, il n'y a qu'un pas à franchir !
 
                    

La première demi-heure du film chatoyante et folichonne sera digne d'un épisode de Candy ! Sept jeunes filles partent en autobus dans une campagne retirée pour retrouver la demeure esseulée d'une tante solitaire introvertie, vivant seule avec son chat siamois.
Cette première partie rose bonbon mélange allégrement scènes niaises et enfantines avec en arrière plan visuel des planches animées, des paysages dessinés à la main dans des couleurs festives arc en ciel. Pour un peu on se croirait renouer avec l'univers du Magicien d'Oz au pays du soleil levant !
La suite vire de bord tout en restant dans le même esprit visuel avec un florilège de séquences chocs macabros humoristiques d'une inventivité hallucinée !
Imaginez un peu sa singularité foisonnante dans sa folie visuelle contagieuse ! Une jeune fille part chercher un pichet d'eau dans un puits pour en sortir une tête tranchée joyeusement égayée de son traitement morbide, valdinguer dans les airs, rebondir de bas en haut et s'en aller taquiner notre camarade éberluée ! Une autre protagoniste se fera gentiment dévorée par son piano pendant que le restant de ses doigts coupées continuera à interpréter une mélodie inspirée ! Des matelas et des draps survoltés vont recouvrir une fille subitement étouffée dans un nuage de plumes démultipliées ! Des lampadaires vivants s'empressent de kidnapper deux de nos héroïnes funambules et lunatiques ! Une tête et une bouche géante traversent la pièce devant nos charmantes invitées stupéfaites des tailles pharaoniques ! Une vitre se brise et se laisse dégouliner des lambeaux de sang fluides et clairs comme de l'eau colorée ! Comme la tête d'une demoiselle se fissurant, telle des bouts de verre déliés pour laisser place aux flammes de l'enfer !
 
                           

Dans un mélange atypique de fantastique onirique, féérie, poésie et terreur parodique, nos sept fidèles japonaises déconcertées mais tout aussi amusées de cet incroyable spectacle infatigable vont facilement se laisser entrainer pour être happées par des forces diaboliques qui se permettent le contrôle absolu sur la réalité des faits.
Les effets spéciaux cheaps, amusants, débridés et désuets ajoutent un charme kitch qui concorde parfaitement à l'esprit cartoonesque du film. Les idées toutes plus frappadingues les unes que les autres pleuvent à foison jusqu'à un final raisonné, tout en calme contenu, d'une philosophie cristalline sur le sens de l'amour.
La partition musicale en demi-teinte souvent mélodieuse et doucereuse tandis que de temps à autre pop et jazzy accusent bien cette ambivalence d'un univers indéfinissable, mis en scène dans des moyens techniques divers et variés comme l'effet d'animation cartoonesque, les scènes vétustes en noir et blanc, l'emploi du ralenti saccadé, les arrêts sur image ou les planches dessinées à la main.
 
                    

LA MAISON DES 1000 TOURS.
House est un film fantastique hors du commun qui ne pourra pas plaire à tout le monde du fait de son climat insolent vraiment particulier, psychédélique et insolite, totalement livré à l'abandon d'un imaginaire expansif et déchainé, entre un Tsui Hark sous ecstasies et un Sam Raimi filmant son film la tête à l'envers avec une affection pour le merveilleux et le kitch criard assumé.
  
                    

22.09.10.

LE SPECTRE DU PROFESSEUR HICHCOCK (The Ghoul / Lo Spettro)

                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemapassion.com

de Riccardo Freda. 1963. Italie. 1h38. Avec Barbara Steele, Peter Baldwin , Elio Jotta, Harriet Medin, Carol Bennet, Carlo Kechler, Reginald Price Anderson.

FILMOGRAPHIE: Riccardo Freda (24.02.09 - 20/12/99) est un réalisateur, scénariste et acteur italien à l'origine de 27 longs-métrages réalisés entre 1942 et 1989. Il sera surtout reconnu auprès des amateurs de cinéma fantastique avec Les Vampires, Caltiki, le monstre immortel, Maciste en Enfer ainsi que ses fausses suites l'Effroyable secret du Dr Hichcock, le Spectre du professeur Hichcock.
L'un de ses plus beaux fleurons qui aura marqué toute une génération de cinéphiles restera également Le Chateau des amants maudits (Béatrice Cenci), fresque historique romantique dont Argento s'en serait particulièrement inspiré pour Suspiria (ex: la fille accourant dans les bois sous une pluie battante en scène d'intro).
                
Le Château des amants maudits
Un an après le succès de son chef-d'oeuvre L'Effroyable secret du Dr Hichcock, Riccardo Freda reprend sous son aile son actrice fétiche Barbara Steele pour parfaire un second bijou d'épouvante. Cette fausse séquelle se réapproprie d'une ambiance gothique raffinée qui comblera les amateurs à travers une narration machiavélique mettant en exergue des personnages perfides sans vergogne. Deux amants vont comploter un stratagème criminel pour supprimer le mari moribond et s'approprier sa fortune en guise d'héritage. Mais les sinistres amants ne sont pas au bout de leur peine et de leur surprise lorsqu'ils seront témoins du spectre du professeur hantant les nuits de la demeure maudite. Au sein d'une bâtisse gothique d'une beauté sépulcrale ornée d'éclairages bleutés, Riccardo Freda nous entraîne dans un huis-clos malsain où les nombreux revirements se soumettent à narration charpentée au rythme d'un suspense latent. En dehors de son aspect visuel flamboyant qui ne pourra que pâmer de bonheur les amateurs d'ambiance gothique (candélabres dégoulinants de cire, crane humain, costumes victoriens, caveau vétuste, tableaux picturaux), Le Spectre... s'édifie en passionnant jeu de pouvoir entre des personnages insidieux communément cupides.                

Niveau distribution, la divine Barbara Steele nous magnétise le regard de sa posture de maîtresse complotiste à la fois orgueilleuse et impassible. Vénéneuse en diable, elle magnétise l'écran de ses yeux noirs habités par la soif du Mal. Peter Baldwin lui prête la vedette avec l'autorité d'un séduisant dandy aussi pernicieux et autrement mesquin dans sa manoeuvre criminelle. Dans un jeu en demi-teinte épris d'aigreur et de pulsions vengeresses, Ellio Jotta endosse le Dr Hichcok sous un physique famélique, notamment de par son teint blafard et sa mine anxiogène. Dans une silhouette froide et mortuaire, Harriet Madin campe l'indocile gouvernante sous une sinistre robe noire et un chignon étriqué.   
                  
Le Fantôme vivant
Même s'il n'égale pas son premier coup de maître tourné un an au préalable, le Spectre du professeur Hichcock constitue une formidable contribution au genre gothique autour d'un jeu de massacre sans échappatoire. Nanti d'une fulgurance visuelle traditionnellement raffinée, d'une science du suspense savamment planifié  et surtout d'une galerie pathétique d'antagonistes couards, Le Spectre... épouse un climat malsain d'autant plus audacieux si je me réfère à sa séquence de meurtre particulièrement sanguine. Pour parachever, on finit d'évoquer cette magnifique comptine musicale inscrite dans l'amertume qu'une boite à musique amorce dans une intonation lancinante, étrange et mélancolique. 

24.09.10
Bruno Matéï 

L'ATTAQUE DE LA FEMME A 50 PIEDS (Attack of the 50 Foot Woman)

                          

de Nathan Juran. 1958. U.S.A. 1H08. Avec allisson Hayes, William Hudson, Yvette Vickers, Roy Gordon, Georges Douglas, Ken Terrell, Otto Waldis.

BIO: Nathan Juran est un réalisateur, scénariste et directeur artistique américain, (01.09.1907 / 23.10.2002) totalisant une filmographie de 27 longs-métrages réalisés entre 1947 et 1973.
On lui doit d'excellents westerns de série B mais surtout des classiques et autres chefs-d'oeuvre du fantastique comme La Chose surgie des ténèbres, A des millions de kms de la Terre, le Cerveau de la planète Arous, Jack le tueur de géants et Les Premiers Hommes dans la Lune.
Son chef-d'oeuvre absolu reste Le 7è Voyage de Sinbad, réalisé en 1958.

                                   

L'ARGUMENT: A la suite d'une violente dispute avec son mari, Nancy Archer décide de s'enfuir en voiture dans le désert californien quand une sphère rouge lui illumine les yeux ! Un homme géant en sort pour lui barrer la route ! Paniquée, elle prend la fuite et se réfugie au commissariat du coin raconter son impropable expérience avec cet extra-terrestre éberlué !

                             

LA BLONDE CONTRE-ATTAQUE !
Bienvenu dans un nanar célèbre des années 50 qui vaut plus par la texture de sa magnifique et prometteuse affiche que son contenu maigrelet et vain à cause d'une narration aussi dérisoire que risible.
La trame est à elle seul un sommet d'ineptie et de niaiserie absolue !!! Voyez le topo !
Pendant qu'on annonce à la radio la potentielle apparition d'un mystérieux satellite aperçu par des témoins dans un désert californien, un riche couple accumule les violentes rixes interposées à cause du mari volage qui passe son temps à roucouler dans le bar du coin avec une jeune décervelée affriolante. Tandis que la femme jalouse et impuissante face à cette coutumière infidélité se noie dans l'alcool en attendant des jours meilleurs.
Ces séquences conventionnelles aussi banales que maladroitement mises en scène vont s'étirer durant 40 minutes (le film totalise 1H05 en dvd !) avant que ne surgisse le fameux coup de théâtre tant promis sur l'affiche kitch faramineuse: la taille devenue gigantesque d'une femme vindicative élevée à 50 pieds, bien décidée à faire payer à son mari ses mensonges et son irrévérence envers son infidélité.
Et ne me demandez pas de quelle manière et pourquoi cette femme atteint une taille subitement anormale car nous ne le serons jamais ! Mis à part le fait qu'elle se soit fait enlever quelques heures auparavant par un extra-terrestre géant vêtu comme un lutteur romain chauve en jupette de carnaval ! (là aussi, rire garanti à chacune de ses apparitions !)

                                 

L'idiotie du récit totalement dénuée d'épaisseur psychologique pour un aussi faible enjeu dramatique, les dialogues involontairement drôles, les comédiens caricaturaux mais attachants dans leur véracité à vouloir convaincre, les FX peu nombreux, cheaps et plutôt risibles de manière générale concluent à rendre un nanar amusant qui ne cède pourtant jamais à l'ennui.

Le final bordélique qui fait intervenir la revanche de Nancy rendue physiquement géante vaut son pesant de situations farfelues, de poésie surranée quand elle traverse en petite tenue sexy la ville pour s'en aller retrouver son mari dénigré. De son impressionnante taille et masse musculaire, Nancy, telle un king-kong féminin sans poil (ou si peu !) fracassera de ses mains une toiture et autre fenêtre d'un hôtel, cherchant pertinemment son époux modèle pour l'écraser de ses propres mains !
La conclusion étonnement dramatique que drolatique n'avait pas lieu d'être et si le souhait du réal était de fébrilement nous émouvoir, l'effet est totalement inversé à cause de sa morale neuneu à peine injustifiée.

BIKINI MAD WOMAN.
Réalisé avec un budget dérisoire par des acteurs rigolos, L'attaque de la Femme à 50 pieds  n'est surement pas ce que nous a offert de mieux le maitre de la série B, Nathan Juran, mais il reste malgré tout un bon petit nanar distrayant au charme vintage jamais ennuyeux. D'ailleurs, sa réputation est telle qu'un remake réalisé par Christopher Guest avec Daryl Hannah dans le rôle titre (en faite, il s'agit d'un télé-film déguisé) fut entrepris en 1993.

                   

26.09.10

STOIC

                           

de Uwe Boll. 2009. 1H30. Canada. Avec Furlong Edward, Levinson Sam, Mennekes Steffen, Sipos Shaun, Switch Jamie

BIO: Uwe Boll est un réalisateur, scénariste et producteur allemand, né le 22 juin 1965 qui répercute déjà 31 longs-métrages à son actif.
Surnommé par le presse américaine comme le nouveau Ed Wod ou le Master of error, ses films généralement aseptisés et ses adaptations de jeux vidéo souvent pitoyables de médiocrité se complaisent maladroitement dans la prétention et le racolage quand il ne s'agit pas de simple nanars affriolants et rebattus.
Jusqu'au jour ou débarque un film que personne n'attendait ! STOIC !!!

L'ARGUMENT: Un homme se suicide dans se cellule de prison. Quelques heures plus tard ses trois co-détenus sont interrogés un à un pour connaitre les véritables raisons de cet acte insensé.

                                 

UWE BOLL: LA RESURRECTION !
Dire que l'on n'attendait pas grand chose du nouveau film d'un réalisateur vilipendé par la majorité de la critique et du public est un mince euphémisme tant sa réputation n'est plus à plaindre.
Total revirement de situation, virage à 180 degrés, uppercut dans ta face ! Uwe Boll réalisé une bombe, un film choc, un drame psychologique implacable à la limite de la nausée dont personne ne pourra sortir indemne !

L'introduction nous amène à montrer un homme entrain de se pendre dans sa cellule. La suite nous fera intervenir la présentation de ses 3 compagnons avec qui la victime partageait sa taule. Un à un, les détenus vont se livrer à leur témoignage aux autorités tandis qu'en intermittence, de nombreux flash-back viendront nous épauler sur le véritable déroulement du récit, sur la vie antécédente de nos quatre prisonniers co-existés en communauté le temps d'une interminable journée au bout de l'horreur.

Tourné en 6 jours dans un style proche du documentaire, manipulé par une photo désaturée et d'une caméra mobile filmée souvent à l'épaule, Uwe Boll   nous envoie directement dans une impitoyable descente aux enfers à travers ce huis-clos claustrophobe et sonder les tréfonds de l'âme (in)humaine, de ce qu'elle peut commettre de pire quand elle en est réduite à se retrouver en hiérarchie restreinte dans un endroit isolé de tous pour une durée (in)déterminée.
A cause de la bêtise d'un pari stupide qu'un nouveau détenu a osé concourir, ce même prisonnier va se retrouver embarqué malgré lui dans un incessant jeu d'humiliations davantage éprouvés sur sa personne. Jusqu'à lui saborder des actes insensés de torture et de barbarie dont la victime réduite à un jouet de soumission ne pourra jamais se remettre de tant d'épreuves innommables dans sa moralité introspective décharnée.
Parce que cet homme refusera d'avaler un tube de dentifrice qu'il avait lui même proposer de soumettre au perdant lors d'une partie de poker, ses 3 voisins de cellule vont lamentablement se proposer à lui faire subir ces multiples sévices autant physiques que psychologiques.

                                

La grande qualité de Stoic viendra avant tout de la caractérisation précise de chaque personnage remarquablement interprété et élucidé dans leur tourment de l'horreur, le plaisir pervers de se fourvoyer dans la bassesse humaine et la peur de se confronter face à l'autorité de son adversaire influent et leader.
A cause d'un effet de groupe, d'une influente complicité où la loi du plus fort prédomine, nos trois tortionnaires iront jusqu'au bout de leur désirs meurtriers, au point de non retour et cela même si l'un de leur acolyte épris de remord, d'une parcelle de conscience et de compassion face à tant de sévices infligés tentera désespérément de résonner ses amis.

LES CHAROGNES.
Il faut saluer l'interprétation de nos quatre comédiens tous aussi impliqués et convaincants les uns des autres. Que ce soit la victime démunie campée par Shaun Sipos, un quidam rendu misérable totalement déchu de l'intérêt de sa personne, dénué d'émotion au fur et à mesure de son long calvaire, de son impitoyable sevrage à subir les ultimes bravades et brimades de ses camarades putassiers.
Edward Furlong (le jeune fils de Sarah Connor dans terminator 2) est presque méconnaissable, surprenant en prisonnier antipathique, physiquement un peu enveloppé dans son surpoids inopiné. Peut-être le bourreau le plus pervers, le plus dangereux abjecte salopard à ne pas manifester un chouilla de remord ou d'affectation face à sa victime lapidée.
Steffen Mennekes en grand complice du leader imposé, aux allures de Skin refoulé est l'un des personnages les plus pathétiques dans son viol commis pour la première fois devant ses camarades surpris de cette révélation éhontée. Pathétique aussi dans ses interrogatoires hypocrites, ses véritables remords à concevoir un tel sacrilège inhumain, sa honteuse conscience d'avoir commis les actes les plus extrêmes et impardonnables. Avant d'oser verser quelques larmes contraignantes...
Sam levinson dans le rôle du détenu le moins répressible est parfaitement convaincant, grisonnant dans son personnage lamenté, torturé dans ses estocades de prise de conscience, sa révulsion à avoir assisté, participé à ce lynchage festif commis en communauté.
Envahit par la peur d'être à son tour le prochain bouc émissaire, impuissant d'oser transgresser les barrières de leur propre loi établie, ce prisonnier est sans doute le personnage le plus à plaindre dans sa conscience morale à cause du regain d'amitié qu'il éprouvait face à sa victime et le triste sort qu'il sera obligé de lui réserver malgré son désistement.
   
                               

SENTENCE D'UNE DELIVRANCE.
Inspiré d'une histoire vraie (qui s'en étonnera ?), Uwe boll  surprend énormément avec Stoic dans ce huis-clos nauséeux extrêmement malsain et dérangeant. Sa mise en scène sobre et sans effet de style mise tout sur la psychologie de ses personnages interprétés avec une intense conviction, imposés dans un climat glacial et sa froide brutalité établie jusqu'au vertige du malaise. Son introspection à observer les états-d'âme d'êtres humains réduits à l'état animal dans leur environnement barricadé sans clarté ou nuance de lueur habilitée.
Cette descente aux enfers nous interpelle autant qu'elle démotive dans son effrayant constat humain livré sans anesthésie.  
Stoic choque de manière lamentée et désarme sans jamais céder à la gratuité ou au plaisir rudimentaire de choquer son spectateur aigri d'avoir été le témoin de cette triste requête à la limite de l'improbable.
Bienvenu dans les tréfonds de l'âme inhumaine...

NOTE: En février 2009, Uwe Boll a reçu : le Razzie Award du pire réalisateur de l'année 2008 pour Postal, King Rising (In the Name of the King: A Dungeon Siege Tale) et Tunnel Rats un Razzie Award pour avoir réussi la pire carrière
En juin 2008, Uwe Boll a reçu : le prix du meilleur réalisateur pour Postal au festival du cinéma d'Hoboken (New-Jersey)
En septembre 2010 : Darfur est élu meilleur long-métrage international au Festival du Film Indépendant de New-York

                              

27.09.10

La Chasse Sanglante / Open Season / Los Cazadores

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de Peter Collinson. 1974. 1h45. Etats-Unis / Suisse / Espagne / Angleterre / Argentine. Avec Peter Fonda, Richard Lynch, John Phillip Law, Alberto de Mendoza, Cornelia Sharpe, William Holden, Simon Andreu.

Sortie salles France: 18 Août 1982

BIO Peter Collinson (01.04.36 / 16.12.80) est un réalisateur anglais responsable de 17 longs-métrages mis en scène entre 1967 et 1980 (l'or se barre, la nuit des alligators, 10 petits nègres).

 
"Au bout du fusil, la bête humaine".
Dans la lignée de Délivrance, de La Chasse du comte Zaroff, des Chiens de paille ou de Week-end sauvage, La Chasse sanglante s’inscrit dans ce réalisme cru, viscéral et poisseux typique des Seventies - atmosphère granuleuse, sordide, moite. Sa grande force réside dans une efficacité narrative à la tension rampante, jusqu’à basculer dans un inattendu rape and revenge.

Le pitch : réunis le temps d’un week-end, trois amis de longue date kidnappent un jeune couple pour une distraction bien particulière : la chasse au gibier humain.

La première partie s’étire comme un jeu de brimades : des agresseurs goguenards, des victimes réduites à la soumission, puis une beuverie de trop qui déborde en dérive meurtrière. La perversité sourd sous chaque ricanement, chaque œil trouble, chaque geste trivial. L’angoisse grimpe sur les visages livides, jusqu’à ce que Nancy comprenne l’horrible dessein : cette séquestration n’est qu’un prélude, un caprice sauvage pour s’adonner, en bonne et due forme, à la chasse à l’homme dans une forêt livide.

La seconde partie, autrement suffocante et cruelle, se mue en survival abrupt, d’une violence physique et surtout morale à la limite du soutenable. Nancy, proie hagarde, suppliant de vivre, abandonnée à la terreur nue - image glaçante d’un réalisme moite, sans aucun racolage graphique, qui lacère bien après le générique. Pas étonnant que le film ait été classé X outre-Atlantique et interdit aux moins de 18 ans chez nous.

Le dernier acte, d’un cynisme sec, boucle la boucle du prologue, relançant une seconde chasse - bestiale, vengeresse - où l’auto-justice expéditive se fait catharsis et condamnation.


Côté casting, Peter Fonda, tranquille et venimeux, brille en prédateur sans scrupules, laissant planer une fausse tendresse pour Nancy, maîtresse de Martin. Richard Lynch, au regard de fauve, et John Phillip Law, bonhomme rassurant, forment un duo délicieusement pervers. Mais c’est Alberto De Mendoza qui touche le plus : mari infidèle, spectateur impuissant, broyé entre les humiliations de ses tortionnaires et l’égarement éthylique de sa femme. Cornelia Sharpe, radieuse et pourtant brisée, irradie une vulnérabilité si nue qu’elle dérange, éveille une pitié douloureuse, presque insupportable. Quant à William Holden, son apparition inattendue injecte une dernière gorgée de subversion : justicier froid, impassible, autoritaire, père vengeur.
 

"Une chasse crue pour un film oublié".
Tendu, fangeux, brutal jusqu’à l’inconfort moral, La Chasse sanglante reste un classique du survival horrifique, sans racolage mais regorgeant de sévices et d’humiliations en roue libre. Carré, sec, porté par un casting gouailleur, le film condamne une fois de plus l’instinct de prédation tapie sous le vernis civilisé. Dommage que cette perle, jadis murmurée comme le film qu’on ne verrait jamais à la télévision (remember René Chateau), ait sombré dans l’oubli le plus éhonté. Car La Chasse sanglante n’a rien perdu de sa morsure dramatique, ni de sa sauvagerie si emblématique d’une époque charnière où tout, déjà, vacillait.

*Bruno
Dédicace à Mathias Chaput

04.10.10


GRIZZLY, LE MONSTRE DE LA FORET (Grizzly, l’orso che uccide / Claws / Killer Grizzly)

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site avoir-alire.com

de William Girdler. 1976. U.S.A. 1h37. Avec Christopher George, Andrew Prine, Richard Jaeckel, Joan McCall, Joe Dorsey.

FILMOGRAPHIE: William Girdler est un compositeur, producteur, réalisateur et scénariste américain, né le 22 octobre 1947 à Louisville, dans le Kentucky aux États-Unis, et décédé le 21 janvier 1978 à Manille aux Philippines.
1972: Three on a Meathook. 1974: Quand la ville tremble. 1974: Abby. 1975: l'Antre de l'horreur. 1975: Sheba, Baby. 1976: Grizzly. 1976: Project: Kill. 1977: Day of the Animals. 1978: Le Faiseur d'Epouvante.


Surfant sur le succès des Dents de la mer sorti un an au préalable, Grizzly, le Monstre de la Forêt est un démarquage bisseux du chef-d'oeuvre de Spielberg. Bâti sur le même canevas narratif (meurtres en pagaille commis sur des vacanciers par une créature monstrueuse, cupidité du directeur à laisser l'entrée libre de son parc forestier, traque finale de la bête par des chasseurs pugnaces), le film de William Girdler est une modeste série B tirant profit de son concept horrifico-catastrophiste avec un grain de violence gore (un gamin se fait arracher la jambe devant le témoignage horrifié de sa mère). Avec l'aimable participation de Christopher Georges et de trognes de seconds zone toutes aussi avenantes (Richard Jaeckel en tête !), Grizzly emprunte ses clichés rebattus sans complexe mais avec la foi d'un réalisateur obstiné. Dans le sens où il s'évertue tant bien que mal à rendre attachant un spectacle ludique par l'efficacité de situations alertes auquel un animal enragé va multiplier ses attaques sanglantes. Néanmoins, les protagonistes qui évoluent durant le récit s'avèrent plutôt superficiels et maladroits dans leur démarche héroïque ou couarde. Mais leur partie de cache-cache improvisée au sein de la forêt s'avère assez ludique quand certains des vacanciers se retrouvent incessamment traqués par la bête. Alors que plus tard, les rôles vont s'inverser vis à vis de braconniers déterminés à le prendre en chasse.
Le point d'orgue inévitable compromis à l'habituelle traque du monstre s'avère notamment cocasse quand trois de nos comparses ont fermement décidé de mettre un terme à ces exactions meurtrières. Enfin, la manière expéditive et couillue dont la bête est exterminée par l'un d'eux ne manque pas non plus d'attrait fantaisiste.


Les Dents de la Terre
Pour les amateurs de nanars dérivés des années 70, Grizzly est un petit produit d'exploitation assez distrayant et pittoresque. La mise en scène superficielle, le cabotinage des acteurs, les situations redondantes qui empiètent le récit et l'absence d'intensité renforcent son capital sympathie par la foi du réal de nous avoir bricolé un ersatz du film de monstre. Les apparitions du Grizzly prêtant plus à sourire qu'à provoquer l'effroi escompté. 
A voir également d'un oeil amusé pour son dépaysement écolo, sa violence débridée ainsi que la bonhomie des vétérans de seconde zone !

NOTE: Grâce au succès du film, une suite intitulée Grizzly II : the Predator avait été mise en chantier, avec George Clooney et Charlie Sheen dans les rôles principaux. Faute de financements et de quelques problèmes liés aux effets spéciaux, cette suite n'aura jamais vu le jour.

26.04.13. 3èx
Bruno Matéï



THE EXPENDABLES

                                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site expendables.wikia.com

de Sylvester Stallone. 2010. U.S.A. 1H44. Avec Bruce Willis, Arnold Schwarzenegger, David Zayas, Terry Crews, Sylvester Stallone, Jet Lee, Jason Statham, Micker Rourke...

BIO: Sylvester Enzio Gardenzio Stallone, né le 6 juillet 1946 à New York, est un acteur, réalisateur, scénariste et producteur de cinéma américain.
Tributaire de 8 longs-métrages en tant que metteur en scène, il démarre la réalisation en 1978 avec La Taverne de l'enfer. Il tourne ensuite un an plus tard la suite de Rocky pour renouer avec l'étalon italien dans Rocky 3, l'oeil du tigre en 1982. Oublions le pathétique Staying Alive sorti en 1983 pour retrouver de nouveau l'énième suite des aventures du boxeur de Philadelphie dans un 4è volet entrepris en 1985.
Après une longue abscence derrière la caméra, Stallone renoue avec l'ambition de ses plus grands succès commerciaux pour tenter de donner suite en 2006 et 2008 aux mythes que sont Rocky et Rambo. Deux de ces icones les plus célèbres d'une riche carrière en demi-teinte.
En 2010, il entreprend The Expendables qui se veut un ultime hommage au cinéma d'action ludique qui aura bercé des millions de fans dans les années 80, rassemblant une tête d'affiche hors pair pour le genre viril et codifié.

L'ARGUMENT: Une bande de mercenaires sont envoyés en mission par la CIA pour renverser un dictateur du pays Sud-américain.

POUR UNE POIGNEE DE HEROS
Maintes fois annoncé et fantasmé à grand renfort de teasers et bande annonces prometteuses concoctés pour une horde de fans surexcités de voir à nouveau réunis sur grand écran leurs héros intrépides aux muscles saillants, Sylvester Stallone nous avait promis un hommage sincère et respectueux envers ces séries B d'exploitation de la vieille école. Des plaisirs coupables tournés sans prétention aucune (ou si peu) qui ont notamment envahi avec succès les rayons VHS des années 80.   Pour citer les exemples les plus éloquents, les amateurs virils se repassent toujours en boucle Tango et Cash, Haute Sécurité, Cobra, Le Dernier Samaritain, Rémo, sans arme et dangereux, Oeil pour oeil, Full contact, Bloodsport ou encore Commando. Le résultat est-il à la hauteur de nos espérances ? En partie, on peut dire que oui tant cette nouvelle production remise au goût du jour reprend les ingrédients conventionnels des séries B survitaminées d'antan avec ce juste dosage d'action et d'humour. Mais aussi un mauvais goût assumé pour les scènes gores violentes et cartoonesques (hormis cette fâcheuse manie indolente à se laisser commander par des CGI aseptisés). Néanmoins, son prologue maladroit aurait pu annoncer le pire des vicissitudes à venir. En effet, cette séquence d'introduction mollement mise en scène débute sur un trafalgar peu inspiré dans ses actions tempérées, son caractère spectaculaire tombant ici à plat. La suite s'annonce un peu bancale avec la caractérisation folichonne de certains de nos personnages pour les retrouvailles familiales de l'équipe de choc. Et cela en dépit de clins d'oeil plutôt cocasses, Bruce Willis et Arnold Scwarzeneger se moquant d'eux même avec une décontraction spontanée. Cette narration désordonnée impose donc de prime abord et d'une façon malhabile les enjeux de nos mercenaires prêts à partir au combat et annihiler l'ennemi.

Le scénario balisé (une guerre est déclarée entre les bons et les méchants avec en guise d'appât une jeune rebelle farouche dont Stallone s'éprendra de manière affectueuse) n'est pas plus mauvais que nos productions eighties citées au préalable. Mais la sympathie de nos personnages héroïques casse-cou et les séquences d'action qui vont intervenir au bout de 30 minutes ravivent notre contentement soulagé d'assister à un spectacle généreux et ludique. C'est notamment ce défilé de stars complices qui fait vraiment plaisir à retrouver ici pour un fantasme qui relevait auparavant de l'utopie. Que ce soit Mickey Rourke, Dolph Lundgren, Steve Austin, Bruce Willis, Arnold Schwarzeneger, Jet Lee, Eric Roberts, Jason Stathan, et bien sur l'inoxydable Sylvester Stallone. Il est d'ailleurs dommageable que Steven Seagal et Jean Claude Vandamme n'aient pas répondu présent pour une telle opportunité !
Dans le rôle du leader chevronné, Sylvester Stallone impose avec décontraction son habituelle bonhomie et sa sympathie innée de briscard à la trogne burinée, du haut de ses 64 printemps. Il reste tout de même dans une belle forme physique pour ses talents d'acrobaties, de cogneur pugnace et de coureur fugace. Jason Statham, nouveau jeune prodige du cinéma d'action, prête son alliance avec une fougue délibérée pour servir ce commando atypique parti en guerre contre une armée de soldats et un tyran pernicieux. Sa prestance aussi juvénile que virile est un atout de charme et son maniement habile du couteau fait illusion pour défendre la vie des plus démunis. Jet Lee transcende l'action par l'art martial de ses combats chorégraphiés avec vigueur et sensualité pour les coups assénés contre l'ennemi désarçonné. Quand à Eric Roberts voué au bad guy d'un trafiquant de drogue, il incarne avec mesquinerie un personnage orgueilleux tout à fait détestable dans son snobisme hautain et sa lâcheté méprisante.

The Expendables n'est donc pas le film d'action ultime fantasmé par une armée de fidèles amateurs mais il reste un bon divertissement agréable à suivre en dépit d'une première partie laborieuse. La décontraction de nos illustres stars (vétustes ou contemporaines) du cinéma bourrin, la loufoquerie de certains dialogues et sa naïveté assumée, les séquences d'action jouissives (malgré une scène de poursuite automobile illisible) et son final apocalyptique concourent de nous offrir un spectacle assez honnête à contrario d'un manque d'ambition et d'émotion. 

06.10.10
Bruno Matéï

                    

TOUT CE QUI BRILLE


de Hervé Mimran, Géraldine Nakache. 2010. France. 1H40. Avec Leïla Bekhti, Virginie Ledoyen, Géraldine Nakache, Audrey Lamy, Manu Payet, Linh-Dan Pham.

BIO: Il s'agit de la première réalisation de Hervé Mimran et Géraldine Nakache (01.01.80), tous deux scénaristes du film. Géraldine Nakache est également actrice dans une série TV (Kaamelot) et quelques comédies frenchies (Comme t'y es belle, RTT, Jusqu'à toi, Tu peux garder un secret ?).Elle a aussi supervisé les casting des émissions Groland sur Canal +, puis en tant qu'assistante-réalisatrice sur les fictions des Guignols de l'info. En 2000 elle travaille sur la chaîne Comédie et y passe d'assistante-productrice et productrice exécutive. De 2003 à 2005, elle se met en scène dans Starloose Academy et La Télooose, deux émission parodiant les programmes télévisés.

TOUT CE QUI BRILLE EST EPHEMERE.
Portrait intime d'un duo de jeunes filles utopistes à la recherche du bonheur et d'un désir de luxe pour l'illusion perdue des paillettes et des noctambules imbus de leur condition extravagante. A travers l'itinéraire de ces deux jeunes filles pétillantes de vitalité et d'esprit de camaraderie, nos deux réalisateurs dépeignent une introspection dans leur fidèle amitié et des conflits qui en émanent. Un témoignage lucide débordant de chaleur humaine sur le sens et les valeurs de l'amitié lorsque qu'une situation fructueuse pour l'une fera le malheur de l'autre. Ely et Lila se connaissent depuis leur tendre enfance et partagent leur journée à flâner, imiter leurs idoles caricaturées, savourer les instants anodins de la vie imprévue quand elles ne trouvent pas de petits boulots intermédiaires de vendeuse de pop-corn dans un ciné ou de babysitting forcé. Au fil des rencontres inopinées, elles vont se lier d'amitié avec un duo de lesbiennes chics et bon genres, tributaires de nuits débridées dans les soirées mondaines. Mais l'univers artificiel des bourgeoises vampirisées par l'or et l'argent vont faire tourner la tête à Lila jusqu'à délaisser son amie de longue dâte et entreprendre sa nouvelle destinée, un semblant de vie plus harmonieuse. 

Dans le rôle d'Eli, Géraldine Nakache  apporte la touche de douceur avec son physique traditionnel, rehaussé d'un charme de fraîcheur auquel elle apporte une belle vérité humaine. Une âme en peine au fil de la progression du récit car atténuée par la douleur affective. C'est dans les bras d'un enfant pour son rôle improvisé en Baby-sitter qu'elle tentera de retrouver un regain de douceur et de tendresse entre deux blagues involontaires de son autre amie, une prof de sport extravertie souvent témoin des conflits orageux. Leïla Bekhti interprète la jolie Lila avec tempérament dans son caractère brut, traversé de crises de délires ausis amusés qu'effrontés et sa froide fermeté à ne pas se laisser marcher sur les pieds. Charmante et rayonnante dans son physique enjôleur mais aussi éprouvée, lamenté, déçue par une idylle perfide, davantage en prise de remord pour son amitié écornée. Lila est avant tout une fille fragilisée, profondément blessée par l'absence d'un père fuyant, parti refaire sa vie au Maroc avec une autre dulcinée. Elle se révèle souvent touchante, juste et intense dans ses expressions amères livrées au désenchantement. Dans celle de la bonne copine de service, Audrey Lamy est une prof de gym hilarante par ces allures de garçon manqué. Elle trouve le juste équilibre pour son talent irrésistible à provoquer le rire dans ses réparties verbales et son esprit rancunier à ne plus se laisser gentiment profiter par ses deux acolytes complices.

Avec sa superbe BO entraînante, Hervé Mimran et Géraldine Nakach nous offrent ici une comédie de moeurs pétillante, pleine de fraîcheur et de tempérament, illuminé par le formidable duo de jeunes actrices novices extraverties inscrites dans la spontanéité. Tout ce qui brille traitant avec beaucoup d'humanité autant que d'humour débridé les relations étroites, éphémères, tendancieuses ou fidèles de l'amitié sans facilité ni pathosLe film observe également au passage les rapports familiaux avec cette nouvelle génération plus indépendante et affirmée quant à l'évolution de la fille au sein de notre société contemporaine. Un joli premier long-métrage fougueux, sincère qui sort du lot traditionnel des productions françaises et qui pourrait aussi rappeler sur le même thème le magnifique la Vie rêvée des Anges d'Eric Zonka, avec ici une tonalité plus optimiste et vigoureuse.

07.10.10

mercredi 2 mars 2011

Le Cercle Infernal. Grand Prix à Avoriaz 1978.

   

"Full Circle / The Haunting of Julia" de Richard Loncraine. 1977. Canada/Angleterre.1H38. Avec Mia Farrow, Keir Dullea, Tom Conti, Jill Bennett, Robin Gammell, Cathleen Nesbitt, Anna Wing, Edward Hardwicke, Mary Morris, Pauline Jameson, Arthur Howard...

Sortie salles France: 3 Mai 1978

FILMOGRAPHIE: Richard Loncraine est un réalisateur britannique né le 20 Octobre 1946 à Cheltenham du Gloucestershire, Grande Bretagne. 1975: Flame. 1977: Le Cercle Infernal1982: Drôle de missionnaire. Pierre qui brûle. 1995: Richard III. 2004: La Plus belle victoire. 2006: Firewall. 2009: My One and Only


« S’introduire comme un rêve dans l’esprit d’une femme chétive est un art. En sortir, un chef-d’œuvre. »
Sous couvert d’une demeure hantée, Richard Loncraine aborde en 1978 les thèmes du deuil familial et de la perte de l’innocence à travers un drame psychologique transplanté dans l’épouvante gothique. Possession, folie, réincarnation, autosuggestion : autant de pistes s’entrelacent dans une prude discrétion. Récompensé du Grand Prix à Avoriaz, Le Cercle Infernal laisse libre cours à un au-delà insaisissable, exutoire d’une mère traumatisée, transie d’amour pour sa défunte fille.

Le pitch :
Lors d’un déjeuner, Julia et son époux Magnus assistent à l’étouffement de leur fille, un morceau de pomme coincé dans la gorge. Paniquée, Julia tente une trachéotomie de fortune avant l’arrivée tardive des secours. Deux mois plus tard, après un séjour en hôpital psychiatrique, elle quitte son mari et leur maison pour s’installer seule dans un vaste pavillon londonien. Mais une étrange présence semble hanter les lieux. L’intervention de médiums aguerris ne fera qu’amplifier son trouble, l’enfonçant dans un abîme d’insécurité et de résignation face à une vérité innommable.


Dès l’ouverture, un prologue d’une brutalité tragique nous submerge. Une scène domestique d’un réalisme cruel : une fillette agonise, un fruit pour seule sentence, tandis que sa mère tente l’impossible, un couteau à la main. Le plan suivant, fixe, glaçant : Julia, hagarde, tremblante, un tablier souillé, figée sur le seuil devant des secouristes pétrifiés. Une scène anthologique au montage adroit, distillant une intensité si malaisante qu’elle en devient insupportable. Car quoi de plus indicible que d’observer — sans complaisance — la lente agonie d’un enfant ?

Après ce fardeau tétanisant, Julia se retrouve seule, deux mois plus tard, dans une maison poussiéreuse à l’élégance gothique. Peu à peu, son isolement la submerge, nourrissant un sentiment d’inquiétude mêlé d’attirance pour ce lieu feutré. Lors d’une séance de spiritisme improvisée, conseillée par la belle-sœur de son époux, le malaise se densifie : l’au-delà semble frapper, et Julia plonge. Obsédée par des révélations aussi invraisemblables que galvanisantes, elle entreprend une enquête fiévreuse, espérant lier ce mystère à la mort de sa fille — et peut-être, sauver une âme en peine. Entre visions, avis de recherche et révélations interlopes, son empathie est ravivée par un autre drame infantile, comme un miroir funeste de sa propre expérience.


À moins que tout ne soit que le fruit de son esprit en ruine — la psyché brisée d’une mère coupable cherchant un refuge, une échappatoire spirituelle à son désespoir. Mû par la suggestion et un envoûtement sensoriel, Loncraine cristallise dans Le Cercle Infernal un drame de la solitude, dissimulé sous un suspense aussi dense que brumeux, baigné d’une atmosphère gothico-funèbre difficilement saisissable. La narration, d’une sournoiserie insidieuse, s’épaissit à mesure que progresse la quête spirituelle d’une femme esseulée, hantée par des forces obscures.

Dans le rôle de Julia, Mia Farrow incarne avec une sensibilité bouleversante cette fragilité névrosée qui fait d’elle un être poreux, égaré entre les vivants et les morts. Son regard azur, son corps fluet, son souffle vacillant nourrissent sa vulnérabilité morale. Démunie mais habitée par ses convictions, elle semble soumise à une victime démoniale — jusqu’à dériver vers un échappatoire qu’elle ne contrôle plus.


Elégie maternelle.
Élégie maternelle.
Scandé par la sublime mélodie élégiaque de Colin Towns, Le Cercle Infernal se révèle chef-d’œuvre diaphane, d’une puissance émotionnelle aussi décharnée que délicate, suspendue à un récit irrésolu. Richard Loncraine illustre avec pudeur la dérive d’une mère endeuillée, en quête d’un bras tendu depuis l’au-delà. L’angoisse se fait ouate, lente, diffuse. La séance de spiritisme (glaciale malgré son silence), la tortue ensanglantée dans le parc, les révélations sordides d’un témoin, les aveux d’une mère grabataire : autant d’instants troubles qui, sans crier, dérangent profondément.

Poème hanté, Le Cercle Infernal se referme sur un épilogue capiteux, volontairement filandreux, laissant le spectateur sidéré, suspendu à l’image figée, infiniment mélancolique, de son dernier souffle. Ce final, d’une beauté funèbre sensorielle, agit comme un venin doux et persistant. Diamant noir chétif, comparable à une porcelaine fissurée, Le Cercle Infernal s’érige en drame maternel unique, tendu sur le fil ténu d’une émotion obscure, vacillante, déchue.

Remerciement immodéré à Ciné-Bis-Art.

*Bruno
16.10.10.  
07.05.21. 4èx

Récompense: GRAND PRIX, Avoriaz 78.

VERSAILLES

                    

de Pierre Schoeller. 2008. France. 1H53. Avec Guillaume Depardieu, Max Baissette de Malglaive, Aure Atika, Judith Chemla, Brigitte Sy, Patrick Descamps.

BIO: Pierre Schoeller est un Réalisateur français, compositeur, scénariste, dialoguiste, adaptateur né en 1961.
Versailles est son second film, réalisé 4 ans après Zéro Défaut et en attendant son prochain projet: l'Exercice de l'état.

L'ARGUMENT: Un SDF et un enfant abandonné vont se lier d'amitié et vivre ensemble une aventure humaine écorchée vive.

                    

Sur le thème délicat de l'exclusion engendrant une marginalité davantage consolidée dans sa conviction déchue, Versailles décrit avec une belle justesse et de réalisme le destin croisé de trois êtres humains démissionnés d'une société individualiste toujours plus ingrate et irrévérencieuse.

Une jeune mère, Nina et son fils Enzo, sans domicile fixe, vivent au jour le jour tant bien que mal dans un état d'esprit où l'insalubrité, l'ennui et le désespoir de survivre coûte que coûte pèseront un peu plus chaque matin négligeable.
Sur leur chemin impromptu ils vont rencontrer Damien, un SDF vivant loin de la civilisation dans une cabane au fond des bois de Versailles.
Un matin, après avoir fait l'amour à cet inconnu, elle part brusquement sans avertir quiconque et abandonne son fils pour le laisser aux bras de Damien.
Les deux vagabonds livrés à eux même vont apprendre à se connaitre et vivre ensemble sans savoir ce que réservera le lendemain dérisoire.

                   

Pierre Schoeller raconte sans pathos ni misérabilisme un douloureux portrait d'un duo brisé par la vie qui ne leur aura jamais fait de cadeau.
Le début nocturne où l'on observe un gosse de 5 ans accompagné de sa mère, trouvant refuge dans un endroit neutre pour sommeiller sur des planches de carton disposées sur un bitume goudronné annonce bien la tonalité morose et aigrie auquel nous allons assister.
La première partie nous oriente dans une leçon de vie que nous n'avons pas coutume de connaitre et vivre malgré les documentaires à la TV que l'on a pu parfois assister, consacrés à ces jeunes désoeuvrés qui ont tout ignoré du jour au lendemain.
C'est l'existence humaine de Damien et d'un petit enfant de 5 ans, Enzo, que nous allons suivre dans un environnement forestier dénué de toute présence humaine en dehors des quelques fidèles amis qui viendront parfois leur rendre visite.
Nos deux SDF uniformisés vont poursuivre d'inlassables nuits mornes monocordes sans étoiles ni espoir, éclairées par un discret feu de camp avant de pouvoir s'endormir communément dans une cabane pour mieux se protéger de l'indifférence et le manque de reconnaissance.
Au fur et à mesure de sa nouvelle vie de bohème avec un "paternel" recomposé pour ce rôle improvisé, Enzo, enfant encouragé par son existence innée d'une blême incertitude et d'une précarité instable va peu à peu s'accommoder, se familiariser, se compléter avec Damien.
La deuxième partie un peu plus harmonieuse et aseptisée renoue avec un mode de vie plus orthodoxe, revigorant avec cette décision parentale pour l'amour infantile et son éthique pédagogique. Un espoir permis et salvateur pour la nouvelle vie du petit Enzo avant que sa mère maternelle ne vienne brusquement refaire surface.

                     

Guillaume Depardieu dans le rôle de Damien est impérial de vérité humaine dans sa composition viscérale d'un personnage miné par sa vie misérable et moribonde. Un marginal endurci dans sa solitude et sa haine vindicative d'une société condescendante qui ira jusqu'à dénigrer, avilir les plus démunis en déversant par exemple du javel dans un vide ordures rempli d'aliments consommables qui n'étaient pas périmés.
Un rôle poignant, une expression animale habitée par la pertinence d'authentifier ce SDF laminé par l'intolérance ainsi que le pouvoir imbus d'un système consulaire endoctriné dans la récurrence de ses lois répressives. Un physique de baroudeur taillé à la serpe par l'oxygène anxiogène de son climat blafard. Une âme dépitée, brimée par la rigidité de longues années vaines mise en cause de sa démission d'insertion dénuée d'espoir.
Mais l'arrivée inopinée d'Enzo lui amènera un regain d'intérêt, une indulgence, une bienfaisance à tenter de reconstruire la vie d'un enfant qui n'avait rien demandé dans un dernier acte optimiste mais néanmoins acerbe et contrarié.
Sachez le, cet immense acteur qu'est Guillaume Depardieu est divin, bouleversant d'amertume accablée et d'acuité humaine affligée.
Il faut tout autant saluer l'incroyable interprétation de Max Baissette de Malglaive, totalement photogénique dans celui de l'enfant inculte, du haut de ces 5 ans offrant une surprenante prestance instinctive, un regard innocent de bambin désincarné, débordant de sensibilité désoeuvrée, d'ignorance dans ses yeux noirs détachés de fougue et d'ardeur. Il se révèle perpétuellement  émouvant, attachant, particulièrement poignant dans sa trajectoire inflexible avant de pouvoir renouer avec un semblant de vie accoutumé.

                         

LES INSOUMIS DE LA PERDITION.
Sur une note musicale hésitante d'un clavier de piano, dans une photographie naturaliste éclairée de décors ternes et aseptisés, Versailles est un drame social existentiel d'une force inévitable dans ses relations introverties et taciturnes, sans niaiserie imposée ni excès de mièvrerie totalement expurgée.
Un témoignage pragmatiste dur et émouvant sur la destinée de deux êtres qui se sont mutuellement sauvés la mise le temps d'un moment opportun avant de réaffecter leur pesante rancoeur avec les liens parentaux.
Il narre tout autant l'histoire précaire d'un homme esseulé définitivement rompu avec la société qui aura préféré sauvegarder l'avenir potentiel d'un enfant vagabond plutôt qu'émanciper sa rédemption individualiste.
Une oeuvre insoumise humble, profondément modeste et prude dans son talent à authentifier les sentiments sans effet de style, qu'il sera difficile d'oublier sitôt la projection clos.

A Guillaume...

DEDICACE à SELENA qui porte Guillaume au plus profond de son coeur.

19.10.10