de John Milius. 1982. U.S.A. 2h11. Avec Arnold Schwarzenegger, James Earl Jones, Sandahl Bergman, Gerry Lopez, Mako, Max Von Sydow, Ben Davidson.
Sortie salles France: 7 Avril 1982. U.S: 14 Mai 1982
FILMOGRAPHIE: John Milius est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 11 Avril 1944 à Saint-Louis, dans le Missouri, Etats-Unis.
1973: Dillinger. 1975: Le Lion et le Vent. 1978: Big Wednesday. 1982: Conan le Barbare. 1984: L'Aube Rouge. 1989: L'Adieu au Roi. 1991: Le Vol de l'Intruder. 1994: Motorcycle Gang (télé-film). 1997: Rough Riders (télé-film).
"Entre l'époque où les océans ont englouti l'Atlantide et l'avènement des fils d'Arius, il y eut une période de l'histoire fort peu connue dans laquelle vécut Conan, destiné à poser la couronne d'Aquilonia, ornée de pierres précieuses, sur un front troublé. C'est moi, son chroniqueur, qui seul peut raconter son épopée. Laissez-moi vous narrer ces jours de grandes aventures..."
Chef-d’œuvre d’heroic fantasy surgissant à l’aube des années 80, Conan le Barbare fut inexplicablement boudé par une partie de la critique, fustigeant un spectacle jugé primaire, desservi par la supposée confusion de son scénario et le jeu inexpressif de l’acteur autrichien Arnold Schwarzenegger. Injustifiable aveuglement, tant le néophyte incarne à merveille ce guerrier laconique, taillé dans l'acier brut, silhouette herculéenne sculptée dans la douleur. Réduit à l’état bestial dans sa condition d’esclave, Conan s’élève dans une mutité tragique, mû par une seule force : la vengeance.
À le revoir aujourd’hui, on est saisi par l’ampleur majestueuse de cette mise en scène habitée, rigoureuse dans ses moindres détails : paysages telluriques, décors titanesques (comme l’immense palais de la secte des serpents), effets spéciaux artisanaux, photographie sépia, figuration monumentale, et surtout, ce score fulgurant de Basil Poledouris, cœur battant de l’épopée. John Milius orchestre le tout avec la ferveur d’un forgeron de légendes, transposant à l’écran le souffle antique d’une mythologie oubliée.
Mythologie, drame, fantastique : les registres s’entrelacent dans un ballet brutal et lyrique. La violence, primitive, y est sidérante : coups de masse, lames acérées, pieux entaillant la chair dans des gerbes de sang rouge sombre. Mais Conan le Barbare ne se résume pas à ses affrontements belliqueux ; il épouse aussi la forme d’une tragédie. La vengeance se teinte de douleur. Qui peut oublier l’exécution de sa mère, dans une scène d’une intensité névralgique à la chorégraphie presque sacrée ? Ou la mort de sa compagne d’armes, frappée lâchement par ce roi fanatique allié aux forces obscures ?
Magie noire, sorcellerie, fatalité... Tous ces éléments s’enracinent dans une narration limpide, sans fioriture, tendue vers l’os. Milius filme avec une rigueur quasi spirituelle, sublimant les grands espaces, magnifiant la camaraderie guerrière et la résilience. Il en résulte une intensité émotionnelle d’une pureté étrange, presque élégiaque : deuils, renaissances, douleurs muettes. Et au cœur de cette odyssée, le surgissement du Surhomme, figure nietzschéenne portée par la devise : "ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort."
"Le trône de fer"
Éloge à la puissance de l’acier, au courage de vaincre et à l’instinct de vengeance, Conan le Barbare transcende avec panache un spectacle barbare, baroque et grandiose dans une dimension tragique bouleversante. Un chef-d’œuvre immuable, d’une beauté brutale, porté par une fureur ancestrale aussi primitive que la virilité sacrée de son héros, enracinée dans la légende hyborienne.
Dédicace à Franck Gossard