lundi 29 décembre 2014

KISS OF THE DAMNED

                                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Xan Cassavetes. 2012. U.S.A. 1h37. Avec Joséphine de La Baume, Milo Ventimiglia, Roxane Mesquida, Anna Mouglalis, Michael Rapaport, Riley Keough.

Inédit en salles en France. U.S: 3 Mai 2013

FILMOGRAPHIE: Xan Cassavetes (Alexandra Cassavetes) est une réalisatrice, scénariste et actrice américaine, née le 21 Septembre 1965 à Los Angeles, Californie.
2000: Dust. 2004: Z Channel: A Magnificent Obsession (Doc). 2012: Kiss of the Damned. 



Inédit en salles dans nos contrées, en dehors de sa projection hors compétition à Gérardmer, Kiss of the Damned définie l'exercice de style indépendant pour cette première oeuvre particulièrement stylisée. Que ce soit au niveau de sa photographie saturée de couleurs criardes, des décors d'architecture au sein d'une demeure baroque ou des paysages naturels à l'onirisme crépusculaire, la mise en scène s'efforce à soigner ses prises de vue alambiquées parmi le score éclectique d'une BO entraînante. En illustrant la thématique du vampire moderne infiltré dans le cadre de notre quotidienneté, Xan Cassavetes ne souhaite aucunement renouveler le genre avec son intrigue linéaire éludée de surprise, mais plutôt d'expérimenter une ambiance poético-baroque autour du cheminement idyllique d'un couple de vampires, Djuna et Paolo.


Résidant dans un vaste pavillon bucolique, ils sont toutefois perturbés par l'intrusion inopinée de la soeur de Djuna, une jeune marginale plutôt jalouse et sans vergogne dans ses virées urbaines meurtrières. Car depuis son arrivée précipitée, de nombreux incidents vont ébranler la tranquillité des deux amants. Outre le caractère superficiel de sa narration, Kiss of the Damned tire parti d'une certaine originalité à illustrer le comportement diplomatique de vampires bon chic bon genre réfutant le sacrifice humain. Car se nourrissant exclusivement du sang des animaux, leur nouvelle déontologie est de préserver cette doctrine réglementée depuis un siècle par leur matriarche. Sauf qu'un élément perturbateur n'a jamais daigné respecter cette consigne pour son libre arbitre ! Convaincant dans la peinture intimiste de ces personnages, Kiss of the Damned se focalise surtout à nous dépeindre l'ascension extatique du jeune couple, Djuna / Paolo, et d'insister sur le caractère fantasmatique de leur relation. Traversé d'éclairs de violence gore que n'aurait pas renié Argento, sa poésie sensuelle en est parfois contrebalancée avec la fureur rebelle d'une vampire férue de sang humain.


Correctement interprété par des comédiens méconnus, si on écarte certains illustres seconds rôles, et soigneusement mis en scène dans son stylisme aussi baroque que charnel (érotisme torride à l'appui !), Kiss of the Damned relève du fantasme parmi l'étreinte immortelle du couple avenant. En dépit de la futilité de son intrigue, il en émane une sympathique curiosité au capital séducteur fascinant et auquel l'intégrité de sa réalisatrice ne peut être remise en doute.

Bruno Matéï

    samedi 27 décembre 2014

    QUAND VIENT LA NUIT (The Drop)

                                                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

    de Michaël R. Roskam. 2014. U.S.A. 1h47. Avec Tom Hardy, Noomy Rapace, Matthias Schoenaerts, James Gandolfini, John Ortiz, Elizabeth Rodriguez, James Frecheville.

    Sortie salles France: 12 Novembre 2014. U.S: 12 Septembre 2014

    FILMOGRAPHIE:  Michaël R. Roskam est un réalisateur et scénariste belge, né le 9 Octobre 1972 à Saint-Trond.
    2011: Bullhead. 2014: Quand vient la nuit.


    Après avoir été révélé par Bullhead, le cinéaste belge Michaël R. Roskam confirme le brio de son talent avec son second long, Quand vient la Nuit. Un polar à suspense redoutablement efficace dans sa dramaturgie en dent de scie où l'on présage hardiment un dénouement aussi cru qu'imprévisible. C'est également un superbe numéro d'acteurs aux personnalités bien trempées dans leur fonction marginale en déclin quand bien même l'un des protagonistes va pouvoir nous dévoiler son véritable penchant au moment le plus alarmiste. Pour l'anecdote, il s'agit du dernier rôle de James Gandolfini, l'inoubliable interprète du parrain dans la série TV, les Sopranos. A Brooklyn, Bob Saginowski s'est associé avec son cousin Marv pour entretenir un bar où les paris clandestins servent de dépôt au blanchiment d'argent de la pègre urbaine. Après avoir trouvé un chiot au fond d'une poubelle, Bob décide de l'adopter jusqu'au jour où son propriétaire vient lui réclamer. Alors qu'un braquage vient d'avoir lieu dans leur bar, nos tenanciers sont rapidement intimidés par un clan mafieux leur ordonnant de rembourser la dette. C'est le début d'un chantage collectif où les coups les plus mesquins vont enchaîner la mort.  


    Dans la lignée des oeuvres crépusculaires de James Gray, Quand vient la Nuit s'efforce de narrer studieusement un récit criminel à la violence contenue de prime abord afin de privilégier le dessein psychologique de protagonistes pris dans la tourmente et de nous immerger dans leur sombre univers où chantage, jalousie et trahison vont finalement laisser exploser les règlements de compte. La maîtrise de la mise en scène est également d'avoir su gérer un suspense graduel où la tension préalablement sous-jacente va pouvoir s'accroître de manière toujours plus exponentielle. Inévitablement, nous nous prenons de sympathie pour ses deux escrocs familiaux ainsi que la romance impartie entre Bob et Nadia, juste avant que l'intrusion de braqueurs et d'un antagoniste arrogant ne vienne ébranler leur routine. En loup solitaire plutôt discret, timoré et laconique, Tom Hardy insuffle l'empathie dans sa fonction secondaire de barman tour à tour molesté par la police, la pègre et une crapule à la réputation psychotique. Matthias Schoenaerts se délectant à endosser celui du maître chanteur avec esprit de provocation et rancune intraitable. Inscrite dans la fragilité mais également ferme d'autorité, Noomi Rapace endosse la petite amie de Bob dans un esprit de paranoïa où l'amertume laisse planer le passé torturé d'une femme battue. Enfin, James Gandolfini profite de sa robuste carrure pour incarner un patron aussi mesquin qu'insidieux dans ses combines burnées.


    Rigoureusement tendu car pourvu d'un suspense à couper au rasoir, Quand vient la Nuit exploite le genre du polar avec la dramaturgie d'un script détonnant et à l'émotion contenue dans les rapports de force impartis à ces marginaux en perdition. Pour parachever, on reste ébranlé par la tournure poisseuse du dénouement nous laissant un goût amer de souffre dans la bouche pour l'instinct meurtrier imparti à un personnage clef. Ou quand les fantômes du passé reviennent corrompre l'âme d'un proscrit...

    Bruno Matéï


    vendredi 26 décembre 2014

    INVASION LOS ANGELES (They Live)

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site mauvais-genres.com

    de John Carpenter. 1988. U.S.A. 1h33. Roddy Piper, Keith David, Meg Foster, George Buck Flower, Peter Jason, Raymond St. Jacques

    Sortie salles France: 19 Avril 1989. U.S: 4 Novembre 1988

    FILMOGRAPHIE: John Howard Carpenter est un réalisateur, acteur, scénariste, monteur, compositeur et producteur de film américain né le 16 janvier 1948 à Carthage (État de New York, États-Unis). 1974 : Dark Star, 1976 : Assaut, 1978 : Halloween, la nuit des masques 1980 : Fog, 1981 : New York 1997, 1982 : The Thing, 1983 : Christine, 1984 : Starman, 1986 : Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin, 1987 : Prince des ténèbres 1988 : Invasion Los Angeles, 1992 : Les Aventures d'un homme invisible, 1995 : L'Antre de la folie, 1995 : Le Village des damnés, 1996 : Los Angeles 2013 1998 : Vampires, 2001 : Ghosts of Mars 2010 : The Ward.


    Un an après Prince des Ténèbres, John Carpenter s'approprie une fois de plus d'un budget modeste pour mettre en scène Invasion Los Angeles après la déconvenue commerciale des Aventures de Jack Burton. Pamphlet satirique contre le capitalisme commandité en son temps par la présidence de Regan, John Carpenter redouble d'ironie caustique à railler toute forme de politique répressive implantée dans nos états sous l'entremise d'une paire de lunettes. Car cet instrument de consommation est ici détourné au profit d'une technologie inédite afin de nous divulguer le vrai visage de la propagande fasciste que nos sociétés modernes nous ont inculqué. En traitant des thèmes de l'exclusion et du chômage auquel le prolétariat est prioritairement préjudiciable, John Carpenter se porte en pourfendeur pour dénoncer l'inégalité des classes sociales et l'intolérance d'un système dictatorial où les forces de l'ordre n'hésitent pas à faire parler les armes dans une fonction d'épuration. 


    Affublé de son sac à dos, John Nada parcourt Los Angeles afin de trouver un emploi de maçonnerie. Sur place, il découvre qu'une milice anarchiste est sur le point de divulguer au monde le vrai visage d'extraterrestres implantés sur notre territoire. Grâce à la confection d'une paire de lunettes noires capables de déceler la réalité d'un leurre, il découvre l'envers du décor subliminal que les extra-terrestres ont réussi à falsifier à travers nos médias, la publicité et les magazines pour mieux nous contrôler. Epaulé d'un comparse de chantier, ils partent à l'assaut de ces envahisseurs insidieusement infiltrés dans les postes d'emploi les plus lucratifs. Série B d'action purement ludique et jouissive dans la complicité musclée impartie à deux résistants partis en guerre contre l'asservissement, Invasion Los Angeles s'impose en farce sociale pour caricaturer à outrance nos notables politiques, financiers et pubards camouflés ici sous une panoplie d'extra-terrestre. Avec une bonne dose de violence aussi corrosive que débridée, John Carpenter s'en donne à coeur joie dans le politiquement incorrect pour canarder à tout va la classe bourgeoise engluée dans le confort de sa cupidité. Sans jamais se prendre au sérieux, il prend autant plaisir à parodier l'attitude désinvolte de notre (anti) héros redresseur de tort exterminant avec ferveur tous ces envahisseurs codifiés en costard. Enchaînant quiproquos et déconvenues impromptus, telle cette baston interminable échangée entre nos deux acolytes en pleine discorde, puis les offensives explosives entre rivaux armés jusqu'aux dents, John Carpenter surfe sur l'efficacité de ses situations alarmistes avec une bonne humeur infaillible ! 


    Jouissif en diable, car aussi drôle que violemment cartoonesque, et mené par un duo de prolétaires en pleine sédition, Invasion Los Angeles n'a rien perdu de son mordant politique dans sa satire imposée au consumérisme, au contrôle des médias et à l'esclavagisme de masse auquel nous dépendons dans nos sociétés modernes. 

    Bruno Matéï
    4èx


    jeudi 25 décembre 2014

    LADYHAWKE, LA FEMME DE LA NUIT (Ladyhawke)

                                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

    de Richard Donner. 1985. U.S.A. 2h01. Avec Rutger Hauer, Matthew Broderick, Michelle Pfeiffer, Leo McKern, John Wood, Ken Hutchison, Alfred Molina.

    Sortie salle France: 27 Mars 1985. U.S: 12 Avril 1985

    FILMOGRAPHIE: Richard Donner (Richard Donald Schwartzberg) est un réalisateur et producteur américain, né le 24 Avril 1930 à New-York.
    1961: X-15. 1968: Sel, poivre et dynamite. 1970: l'Ange et le Démon. 1976: La Malédiction. 1978: Superman. 1980: Superman 2 (non crédité - Richard Lester). 1980: Rendez vous chez Max's. 1982: Le Jouet. 1985: Ladyhawke, la femme de la nuit. 1985: Les Goonies. 1987: l'Arme Fatale. 1988: Fantômes en Fête. 1989: l'Arme Fatale 2. 1991: Radio Flyer. 1992: l'Arme Fatale 3. 1994: Maverick. 1995: Assassins. 1996: Complots. 1998: l'Arme Fatale 4. 2002: Prisonnier du temps. 2006: 16 Blocs. 2006: Superman 2 (dvd / blu-ray).


    Titre notoire de l'Heroic-Fantasy issu des années 80, Ladyhawke ne rencontra pas le succès escompté lors de sa sortie public, la faute incombant peut-être à sa modestie visuelle faisant fi d'effets spéciaux démonstratifs. Car outre l'aspect foncièrement fantastique de son intrigue mythologique, Richard Donner compte sur la noblesse des sentiments pour nous conter une superbe histoire d'amour dévalorisée par l'imprécation d'un religieux sans vergogne. Si l'on pouvait contester à l'époque l'audace de son score musical alternant orchestration classique et rock progressif de manière décalée pour le contexte médiéval, son extravagance s'avère aujourd'hui plus en harmonie avec la vigueur du récit déployant action, humour et fantastique autour d'une romance impossible. Poème médiéval illustrant avec sobriété l'amour improbable de deux amants frappés par un sortilège, Ladyhawke transfigure de manière fort originale leur relation singulière puisque contraints de se prémunir dans une condition animale. 


    Transformé en loup au soir du crépuscule, Etienne de Navarre peut enfin retrouver son apparence humaine dès l'aube matinale. De son côté, sa bien-aimée Isabeau est condamnée à se métamorphoser en faucon durant le jour pour ensuite retrouver son enveloppe corporelle dès la nuit tombée. Incessamment ensemble mais séparés par leur condition animale, ils sont incapables de se voir et de se toucher dans la peau d'êtres humains. En désespoir de cause, Etienne de Navarre envisage alors de mettre un terme à leur fardeau. C'est avec l'aide d'un jeune voleur et d'un moine solitaire qu'il va tenter de briser la malédiction puis se venger du principal responsable, un évêque rendu fou d'amour et de jalousie pour la belle Isabeau ! Baignant dans une atmosphère onirique où la splendeur des décors naturels contraste avec la sensualité d'une Michelle Peiffer touchée par la candeur d'un physique de porcelaine, Ladyhawke transcende la romance déchue autour de moult péripéties et rebondissements, et avant le dénouement d'une éventuelle rédemption. Epaulé des présences attachantes du jeune Matthew Broderick incarnant avec verve un jeune voleur aussi véloce qu'espiègle, et de Leo McKern, dans celui du moine acariâtre au grand coeur, le film insuffle une cocasserie attendrissante dans leur contribution héroïque, quand bien même l'inventivité des combats est renforcée par la main secourable d'Etienne de Navarre. Indubitablement, c'est au duo de charme formé par Rutger Hauer et Michelle Pfeiffer que l'on doit la force émotionnelle du récit insufflant une poésie diaphane dans le rapport contradictoire alloué à la cause de la nature (voir la sublime séquence où les amants tentent de s'effleurer la main au rayon d'un crépuscule !), quand bien même l'espèce animale sert de métaphore pour nous rappeler l'essence du mot liberté.


    Se clôturant par un point d'orgue aussi féerique qu'homérique, à l'instar de ces duels interminables qu'Etienne de Navarre doit déjouer contre l'ennemi en guise de baroud d'honneur, Ladyhawke distille une émotion épurée dans la romance du duo maudit tout en alternant l'action des péripéties parmi la cocasserie de comparses incorrigibles venus prêter main forte avec une spontanéité attendrissante. Un spectacle familial esthétiquement immaculé, notamment par son onirisme naturel.

    Bruno Matéï
    4èx 

    mardi 23 décembre 2014

    CONAN LE BARBARE (Conan the Barbarian)

                                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site Moviecovers.com

    de John Milius. 1982. U.S.A. 2h11. Avec Arnold Schwarzenegger, James Earl Jones, Sandahl Bergman, Gerry Lopez, Mako, Max Von Sydow, Ben Davidson.

    Sortie salles France: 7 Avril 1982. U.S: 14 Mai 1982

    FILMOGRAPHIE: John Milius est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 11 Avril 1944 à Saint-Louis, dans le Missouri, Etats-Unis.
    1973: Dillinger. 1975: Le Lion et le Vent. 1978: Big Wednesday. 1982: Conan le Barbare. 1984: L'Aube Rouge. 1989: L'Adieu au Roi. 1991: Le Vol de l'Intruder. 1994: Motorcycle Gang (télé-film). 1997: Rough Riders (télé-film).


    "Entre l'époque où les océans ont englouti l'Atlantide et l'avènement des fils d'Arius, il y eut une période de l'histoire fort peu connue dans laquelle vécut Conan, destiné à poser la couronne d'Aquilonia, ornée de pierres précieuses, sur un front troublé. C'est moi, son chroniqueur, qui seul peut raconter son épopée. Laissez-moi vous narrer ces jours de grandes aventures..."

    Chef-d'oeuvre d'Heroic Fantasy sorti à l'aube des années 80, Conan le Barbare fut inexplicablement boudé par une partie de la critique de l'époque fustigeant un spectacle barbare desservi par la confusion de son scénario (?) et le jeu inexpressif de l'acteur autrichien Arnold Schwarzenegger. C'est d'autant plus injustifiable que l'acteur néophyte se prête à merveille dans la peau du guerrier laconique pourvu d'une musculature saillante. Un héros primitif réduit à l'animal sauvage dans sa condition d'esclave, son personnage évoluant ensuite dans la posture impassible d'une motivation vindicative. Quand on revoit aujourd'hui ce gros morceau de cinéma, on est d'autant plus frappé par l'ampleur de sa mise en scène consciencieuse où rien n'a été laissé au hasard, que ce soit au niveau des paysages naturels ou des décors internes (l'immense palais de la secte des serpents), des effets spéciaux artisanaux, de sa photo sépia, de la figuration déployée ou de son score fulgurant, tout est orchestré par un cinéaste habité par la transposition cinématographique. Ou plus précisément un metteur en scène motivé par l'art de conter l'épisode d'une légende cimmérienne !


    Depuis la mort de ses parents, dont celle de sa mère décapitée sous ses propres yeux, Conan, réduit à l'esclavage dès son enfance, va échauder une implacable vengeance pour les meurtriers de ce massacre. Devenu un gladiateur invincible après de longues années d'affrontements, il est libéré par son mentor. Avec l'aide d'un voleur et d'une guerrière farouche, ils vont tenter d'infiltrer le refuge sectaire de Thulsa Doom afin de soutirer la fille d'un roi retenue prisonnière, puis tenter de tuer ce souverain meurtrier ! Aventure mythologique, drame et fantastique s'entrechoquent avec souffle épique, lyrique et romanesque afin de nous plonger dans un univers d'heroic fantasy aussi fluide que brutal. Sur ce dernier point, nous restons sidérés par l'extrême violence impartie aux affrontements belliqueux, puisque perpétrés avec une barbarie primitive ! Les lourds coups d'épées et de massue, les fléchettes et pieux acérées entaillant la chair des victimes dans des gerbes de sang ! Outre l'aspect spectaculaire de ses bravoures préméditées, Conan le Barbare est autant gagné par l'aspect tragico-romanesque de son aventure inscrite dans la cohésion d'une vengeance de longue haleine. Qui peut d'ailleurs oublier le châtiment cruel invoqué à la mère de Conan perpétré sous ses yeux d'enfant (une mise à mort d'une intensité névralgique dans sa chorégraphie élégiaque !), puis celle de sa compagne guerrière lâchement exécutée par un roi fanatique ayant la capacité de se transformer en serpent (il pactise avec le Mal parmi sa secte de fidèles !). Cet habile dosage de Fantasy, de sorcellerie et magie noire réussit à se cristalliser sous nos yeux par l'habileté d'une construction narrative sans fioriture, à l'instar de sa réalisation extrêmement appliquée. John Milius faisant preuve d'un souci de véracité dans sa retranscription mythologique sublimant les grands espaces naturels et l'humanité solidaire de nos héros motivés par l'esprit de bravoure et la foi spirituelle. Il s'en extrait une intensité émotionnelle parfois élégiaque dans leurs souffrances morales compromises par le deuil ou la renaissance, quand bien même la dimension héroïque de notre héros laisse en exergue l'icone du surhomme ("ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort") gagné par l'estime de soi et l'assouvissement de la victoire.


    Le trône de fer
    Eloge à la puissance de l'acier, au courage de vaincre et à l'instinct de vengeance, Conan le Barbare réussit avec stylisme à transcender un spectacle barbare, baroque et lyrique dans une dimension romanesque bouleversante. Un chef-d'oeuvre immuable d'une beauté à couper le souffle et d'une fureur guerrière aussi primitive que la virilité de son héros inscrite dans une légende hyborienne ! 

    Dédicace à Franck Gossard
    Bruno Matéï
    4èx

    lundi 22 décembre 2014

    COLD PREY (Fritt Vilt)

                                                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site mazika2day.com

    de Roar Uthaug. 2006. Norvège. 1h37. Avec Ingrid Bolso Berdal, Rolf Kristian Larsen, Tomas Alf Larsen, Endre Midtstigen, Viktoria Winge.

    Sortie salles France: 5 Janvier 2010 (uniquement en Dvd et Blu-ray). Norvège: 13 Octobre 2006.

    FILMOGRAPHIE: Roar Uthaug est un réalisateur, scénariste et producteur norvégien, né le 25 Août 1973 à Lorenskog dans le comté d'Akershus en Norvège.
    1994: En aften i det gronne. 1996: DX13036. 1998: A fistful of kebab. 2002: Regjeringen Martin. 2006: Cold Prey. 2009: Le secret de la Montagne Bleue. 2012: Flukt (Dagmar).


    Modeste série B venue de Norvège, directement sortie en support numérique chez nous, Cold Prey se réapproprie des codes du psycho-killer dans une narration éculée mais dont la foi des personnages débrouillards relance l'intrigue avec réelle efficacité. Confinant l'action dans le cadre hivernal de montagnes enneigées, puis celui, beaucoup plus restreint, d'un hôtel abandonné, Cold Prey dépeint l'expédition ludique d'un groupe de vacanciers partis skier dans les montagnes de Jotunheinem. Alors que l'un d'eux vient de se blesser grièvement la jambe en dévalant une pente en snowboard, ils réussissent par chance à faire escale dans une station abandonnée. Mais sur place, une menace tapie dans l'ombre les attend, sachant qu'ils vont avoir affaire aux exactions d'un dangereux psychopathe. 


    Ce pitch orthodoxe mainte fois traité depuis les modèles Black Christmas et Halloween, ne compte donc que sur l'efficacité des péripéties et rebondissements haletants pour captiver le spectateur immergé autour d'une nature réfrigérante. Mais à contre-courant d'un Vendredi 13 routinier, le film fait preuve d'intelligence pour exploiter les ficelles du "ouh fais moi peur !" dans un concours de circonstances malchanceuses plutôt convaincantes. Exploitant habilement les recoins inquiétants d'un hôtel désaffecté (l'ombre de Shining semble d'ailleurs planer au détour d'une vue d'ensemble !), le film distille d'abord une atmosphère ombrageuse assez séduisante pour attiser l'expectative, quand bien même la spontanéité rafraîchissante des protagonistes nous permet de nous attacher facilement à leurs caractères et de nous identifier à leurs vicissitudes. C'est d'ailleurs une des principales qualités du film d'avoir su "humaniser" ses personnages vigilants, couards ou valeureux par le jeu naturel de comédiens avenants. Les estocades meurtrières s'avérant notamment assez percutantes dans leur effet de brutalité et de stupeur, voires parfois même surprenantes dans les rebondissements aléatoires lorsque nos protagonistes sont appréhendés par surprise ou lorsqu'ils tentent de se défendre avec fraternité. Sur ce dernier point, je pense particulièrement aux deux derniers survivants rivalisant de stratégies de défense afin de ne pas se laisser alpaguer par les coups de pioche du tueur. En prime, une certaine empathie déjà suggérée au préambule est allouée à la cause du meurtrier lorsque l'épilogue nous dévoile ouvertement son visage et qu'un flash-back va lever le voile sur les véritables responsables de sa déficience mentale. Sans esbroufe sanglante et un savoir-faire dans la mise en scène, Roar Uthaug préfère donc se focaliser sur l'atmosphère anxiogène de son décor d'insécurité auquel nos protagonistes tentent de s'y extraire en tirant parti de leur ressource.   


    Avec modestie et aucune prétention, Cold Prey souhaite rendre hommage au psycho-killer parmi l'efficacité de situations horrifiques assez tendues et parmi la caractérisation humaine de survivants plein d'audaces et de bravoures pour se défaire de leur déveine. Il en résulte un sympathique survival un plus finaud que la traditionnelle du genre et assez bien géré dans sa réalisation circonspecte.

    Bruno Matéï
    2èx

    vendredi 19 décembre 2014

    MORSE (Låt den rätte komma in / Let The Right One in). Grand Prix, Gérardmer, 2009.

                                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

    de Tomas Alfredson. 2008. Suède. 1h55. Avec Kare Hedebrant, Lina Leandersson, Per Ragnar, Henrik Dahl, Karin Bergquist, Peter Carlberg.

    Sortie salles France: 4 Février 2009. Suède: 24 Octobre 2008

    FILMOGRAPHIE: Tomas Alfredson est un réalisateur suédois, né le 1er Avril 1965 à Lidingo en Suède. 1994: Bert: The Last Virgin (Bert: Den siste oskulden). 2003: Office Hours (Kontorstid)
    2004: Four Shades of Brown (Fyra nyanser av brunt). 2008: Morse (Låt den rätte komma in). 2011: La Taupe (Tinker, Tailor, Soldier, Spy).


    Réalisateur suédois inconnu chez nous, Tomas Alfredson s'est fait connaître en 2008 avec Morse, un film fantastique indépendant ovationné à travers le monde par une pléthore de récompenses. Empruntant au mythe du vampire, la trame nous illustre avec pudeur et sensibilité contenues l'amitié naissante d'une fillette vampire de 12 ans avec son voisin d'immeuble, un adolescent timoré du nom d'Oskar. Au fil de leur relation intime, ils vont apprendre à se connaître et s'échanger des confidences en dépit des exactions meurtrières qu'Eli doit commettre afin de survivre. Sur le papier, si ce pitch superficiel semble concourir la carte des bons sentiments dans la mouvance d'un Twilight suédois, Tomas Alfredson a suffisamment d'ambition et de personnalité pour transcender à l'écran un poème macabro-féerique touché par la grâce de ses têtes blondes. 


    Ecartant les conventions éculés, ces vampires suédois sont ici marqués par la solitude dans leur comportement criminel et monstrueux, préférant parfois même céder au sacrifice du dernier ressort plutôt que de transmettre la contagion auprès d'un innocent. Outre le soin formel d'une réalisation maîtrisée laissant libre court à l'esthétisme immaculé d'une banlieue enneigée, et auscultant au plus près la pureté des sentiments de nos héros, Morse fait appel à l'émotion prude pour nous interpeller face à leur posture amoureuse difficilement concrétisable. Car prisonnière dans le corps d'une adolescente de 12 ans et affermie par sa maturité, Eli ne peut entamer une relation durable avec le premier venu, spécialement ce jeune Oskar fragilisé par la persécution et la vengeance. En alternant l'horreur d'agressions perpétrées au coeur d'une urbanisation enneigée et l'intimisme de leur frêle relation, Tomas Alfredson déploie un saisissant contraste dans la ténuité sentimentale et la violence viscérale. A travers leurs rapports amicaux davantage bienveillants, c'est une initiation à la révolte et à la mort qu'Oskar doit emprunter en tant qu'auditeur puis témoin afin de s'affirmer aux yeux des autres. En particulier celui de braver les quotidiennes brimades imposées à un trio de camarades délinquants inscrits dans la lâcheté. La démission parentale est également soulignée dans la condition esseulée d'Oskar vivant reclus avec une mère effacée, alors qu'Eli, co-habite avec un paternel corrompu par sa connivence meurtrière. L'identification pour ce jeune couple livré à l'abandon n'en n'est alors que plus empathique dans leur situation démunie d'amants en quête rédemptive. 


    Récit initiatique auquel un garçon timoré affronte la cruauté de l'adolescence du point de vue d'une délinquance juvénile et de celle d'une vampire infortunée, Morse insuffle avec originalité et poésie une justesse d'émotion dans le cheminement d'une romance trouble destinée à l'isolement. Leçon de tolérance pour le droit à la différence, on est d'autant plus bouleversé par le score mélancolique de Johan Soderqvist accompagnant cette odyssée prude avec une acuité vertigineuse. Un chef-d'oeuvre d'une pudeur à fleur de peau contrastant avec le stylisme des situations morbides. 

    Bruno Matéï

    Récompenses:
    Meilleur film et meilleur photographie au 31e Festival international du film de Göteborg.
    Meilleur film au Festival du film de TriBeCa 2008.
    Méliès d'argent au 8e Festival International du film Fantastique de Neuchâtel.
    Meilleur film, meilleur réalisateur et meilleure photographie au festival Fantasia 2008
    Meilleur film, meilleur réalisateur et meilleure photographie aux European Independent Film Critics Awards
    Prix de la critique et meilleur réalisateur au 12e festival international du film fantastique de Puchon
    Prix de la critique au festival NatFilm 2008
    Prix de la critique au Festival international du film de Toronto 2008
    Méliès d'or du meilleur film fantastique européen de 2008
    Grand prix du festival Fantastic'Arts de Gérardmer en 2009
    Prix de la critique au festival Fantastic'Arts de Gérardmer en 2009
    Silver Scream Award au Festival du film fantastique d'Amsterdam en 2009
    Meilleur film étranger à la British Independent Film Awards 2009