FILMOGRAPHIE: Gabriel Abrantes est un réalisateur américano-portugais vivant à Lisbonne, né en 1984 en Caroline du Nord. 2014 : Pan Pleure Pas, long métrage qui rassemble trois de ses précédents courts (Taprobana, Liberdade et Ennui ennui). 2018 : Diamantino, coréalisé avec Daniel Schmidt. 2024 : Amelia's Children.
Quelle belle surprise que ce petit métrage portugais tourné en anglais (le réal étant de nationalité américano-portugais) repartit qui plus est avec le Prix du Jury lors du festival de Gérardmer. 3è long du méconnu Gabriel Abrantes, Amélia's Children s'y entend pour nous amener à le suivre sur les pentes d'une intrigante filiation lorsque Ed et sa compagne Riley recherchent les parents de celui-ci après avoir été kidnappé lorsqu'il fut bébé. Ce qui les amènent à côtoyer sa véritable mère et son frère jumeaux vivants reclus dans un manoir à proximité d'un bois. Efficacement mené auprès de son suspense lattent ne relâchant jamais l'attention, notamment grâce à l'attachement imparti au couple sans fard (tant auprès de leur physique standard que de leur jeu dépouillé particulièrement naturel, surtout auprès de Brigette Lundy-Paine portant littéralement le récit sur ses épaules), Amélia's Children empreinte intelligemment la thématique incestueuse sous couvert d'une satire cinglante sur le jeunisme. Or, fort d'un climat d'étrangeté d'autant plus stylisé au sein de cette charmante demeure où les jeux de couleurs y esquissent l'ameublement, l'inquiétude ressentie demeure d'autant plus palpable en la présence d'une maman tuméfiée d'une chirurgie plastique.
Celle-ci parvenant à susciter gêne et malaise, notamment auprès de sa posture faussement affable, quand bien même le fils instille lui aussi une équivoque amabilité auprès de ses hôtes désorientés. Pour autant simpliste auprès de son schéma connu, Amélia's Children réinvente la notion de suspense et d'horreur suggestive hérités des fleurons des années 70 et 80. Tant et si bien que l'on se surprend à être irrésistiblement attiré, captivé par cette étrange retrouvaille familiale sous l'impulsion de protagonistes subtilement équivoques, sournois, inévitablement perfides. Le réalisateur n'usant que rarement de facilités et de clichés (à l'exception d'un seul assez grossier lors d'une poursuite finale entre 2 personnages) puisque privilégiant le non-dit, la suggestion, l'inquiétude, l'interrogation, la perplexité avec une efficacité payante. Et ce avant d'y parfaire un final autrement tendu, haletant et quelque peu sanglant sans toutefois s'embarrasser de surenchère ou d'effets grand-guignolesques injustifiés. D'autant plus que plus l'intrigue progresse, plus son climat malsain s'y impose en embrayant l'angoisse tangible, notamment parmi l'appui de certaines visions intolérables dénuées de violence graphique.
Attachante farce morbide pleine de modestie et de sincérité pour le genre horrifique puisque traitée entre noblesse et intelligence, Amélia's Children demeure un excellent divertissement à la fois sardonique, ombrageux et dérangeant en renouant avec les contes fétides que l'on se narrait au coin du feu. Et ce dans une facture toute à la fois moderne et baroque auprès de son esthétisme inspiré.
Dédicace à Loïc Bugnon.
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