mardi 29 janvier 2013

LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE (The Thing from another world)

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site notrecinema.com

de Christian Nyby et Howard Hawks. 1951. U.S.A. 1h27. Avec Margaret Sheridan, Kenneth Tobey, Robert Cornthwaite, Douglas Spencer, James R. Young, Robert Nichols.

Sortie salles France: 14 Décembre 1951. U.S: 6 Avril 1951 / 29 Avril 1951

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Christian Nyby est un monteur et réalisateur américain, né le 1er Septembre 1913 à Los Angeles (Californie), décédé le 17 Septembre 1993 à Temecula.
1951: La Chose d'un autre Monde. 1957: Hell on Devil's Island. 1962: Elfego Baca: Six gun Law. 1965: Furie sur le Nouveau-Mexique. 1965: Operation C.I.A. 1967: First to fight.
Howard Hawks est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 30 Mai 1896 à Goshen dans l'Indiana, décédé le 26 Décembre 1977 à Palm Springs en Californie.
1930: La Patrouille de l'aube. 1932: Scarface. 1933: Après nous le déluge. 1936: Brumes. 1936: Les Chemins de la Gloire. 1938: l'Impossible Monsieur Bébé. 1939: Seuls les anges ont des ailes. 1941: Sergent York. 1944: Le Port de l'Angoisse. 1946: Le Grand Sommeil. 1948: La Rivière Rouge. 1951: La Chose d'un autre Monde. 1952: La Captive aux Yeux clairs. 1952: Chéri, je me sens rajeunir. 1953: Les Hommes préfèrent les Blondes. 1955: La Terre des Pharaons. 1959: Rio Bravo. 1962: Hatari. 1966: El Dorado. 1970: Rio Lobo.


Bien avant The Thing de Carpenter, deux réalisateurs s'étaient appropriés du roman de John W. Campbell, Who Goes There ?, afin d'innover dans l'anticipation alarmiste. Car même si Howard Hawks est crédité au poste de producteur, il aurait été en partie responsable de la réalisation prodiguée à Christian Nyby.

Dans une région polaire de l'arctique, des chercheurs vont établir la stupéfiante découverte d'un vaisseau spatiale échoué sur la banquise. Après l'avoir fait explosé, les hommes ramènent à leur base militaire le corps congelé d'un extra-terrestre. Rapidement, la créature en éveil s'échappe et sème la terreur parmi le groupe. 


Ce qui frappe d'emblée en revoyant ce classique de la science-fiction mâtinée d'épouvante, c'est la modernité de sa mise en scène rigoureuse, filmée à la manière d'un reportage pris sur le vif. D'ailleurs, d'illustres réalisateurs comme Ridley Scott et John Carpenter appliqueront plus tard la même recette pour façonner avec véracité leur terreur diffuse d'une menace extra-terrestre (Alien et bien entendu le démarquage The Thing).
Avec un sens habile du suspense sous-jacent, la Chose d'un autre monde est une formidable machine anxiogène privilégiant l'effet de suggestion avec une belle efficacité. L'originalité de son récit confiné au sein d'un décor hivernal réfrigérant et l'aspect hybride de sa créature végétale (en gros, une carotte vivante se régénérant grâce au sang humain), confronte le spectateur à une menace inédite irrémédiablement fascinante. En prime, la dextérité à laquelle les réalisateurs retardent ses furtives apparitions afin de véhiculer l'angoisse, déploie par intermittence des séquences d'agressions particulièrement cinglantes ! Pour preuve, l'altercation avec la chose prise dans les mailles d'un grand incendie se révèle bougrement impressionnante lorsque le feu a décidé de se propager aux alentours de la pièce cloisonnée, pour intenter notamment à la vie de nos équipiers.
La sobriété d'interprétation allouée à chacun des comédiens renforce largement son aspect documenté auquel l'esprit de cohésion va leur permettre avec courage de se mesurer à la menace singulière. Et pour renforcer le caractère épineux de l'enjeu de survie, un scientifique renfrogné a décidé de bafouer sa discipline hiérarchique pour préserver la survie d'une race inconnue !


Irrésistiblement fascinant et inquiétant, La Chose d'un autre monde n'a en l'occurrence rien perdu de sa rigueur technique d'une réalisation novatrice privilégiant un suspense méthodique. Un modèle du genre étonnamment pragmatique et stimulant ! 

29.01.13. 3èx
Bruno Matéï 


lundi 28 janvier 2013

THE COLLECTION

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site geektyrant.com

de Marcus Dunstan. 2012. U.S.A. 1h22. Avec Josh Stewart, Lee Tergesen, Christopher McDonald, Emma Fitzpatrick, Courtney Lauren Cumming.

Inédit en salles en France. Sortie salles U.S: 30 Novembre 2012

FILMOGRAPHIE: Marcus Dunstan est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 9 Septembre 1975 à Macomb dans l'Illinois.
2009: The Collector
2011: The Collection

Une déclinaison inutile de son modèle. A force de tout miser sur l'efficacité de l'action à grosse dose de surenchère et d'esbroufe, on finit par en être lasser. La faute en incombe un peu aussi au scénario éculé multipliant (comme dans le précédent) les invraisemblances. Quand au final vindicatif, il sombre dans le ridicule, comme la  plupart des vicissitudes allouées aux protagonistes. 

Distrayant au second degré pour les indulgents alors que la nouvelle génération sevrée à Saw applaudira une fois de plus !

P.S: le film ne dure qu'1H10 (non générique compris) !



vendredi 25 janvier 2013

THE MAN FROM EARTH (Jerome Bixby's The Man from Earth). Prix du Meilleur Film à Rhode Island, 2007

                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site aeriesguard.com

de Richard Schenkman. 2007. U.S.A. 1h27. Avec David Lee Smith, John Billingsley, Ellen Crawford, William Katt, Annika Peterson, Richard Riehle, Alexis Thorpe.

Sortie dvd et blu-ray en France: 5 Juillet 2011. Sortie salles U.S: 13 Novembre 2007

Récompenses: Premier Prix du Meilleur Film, Grand Prix du Meilleur Scénario au Festival de Rhode Island en Août 2007.

FILMOGRAPHIE: Richard Schenkman est un réalisateur, scénariste et acteur américain, né le 6 Mars 1958 à New-York.
2000: A Diva's Christmas Carol (télé-film)
2006: Muckraker ! (télé-film)
2007: The Man from Earth
2007: And then came Love


Inédit en salles en France mais distribué en dvd et blu-ray, The Man From Earth est le genre de perle rare honteusement occultée mais favorisée par un bouche à oreille particulièrement expansif. Notamment grâce à son téléchargement illégal pratiqué à travers le monde mais approuvé par le réalisateur lui même.
Récit de science-fiction spéculatif sur les origines de l'univers et de la religion, The Man From Earth est un passionnant cours d'histoire et de philosophie inculqué par l'entremise d'un divin (affabulateur ?).

Sur le point de quitter ses amis, un professeur leur confesse qu'il était un homme de Croc- Magnon ayant survécu depuis des millénaires. Au cours des discussions enflammées, ses camarades dubitatifs et intrigués commencent à douter de son état mental. L'un des leurs fait donc appel à un psychologue pour tenter de définir s'il est saint d'esprit, mythomane ou tout simplement dérangé. En prime, au moment où l'un des thèmes abordés se focalise sur le thème religieux, l'homme prétend être Jésus en personne !


Avec des moyens dérisoires essentiellement établis autour d'un huis-clos intime, le réalisateur nous convie à un aparté symbolisé par un oracle venu de nulle part, délibéré à avouer son éthique auprès de ses fidèles amis ! Au fil de ses discussions passionnelles sur l'intérêt de l'existence (en gros, prodiguer tout simplement le Bien !) et de la foi, le film remet en cause nos valeurs spirituelles sur l'idéologie d'un quelconque Dieu, pointe du doigt le fanatisme religieux et théorise sur la fatalité de la réincarnation. Autour de cet entretien passionnant chargé de mystère insondable, le réalisateur met en évidence le rapport philosophique du bouddhisme auquel l'enseignement du christianisme se serait largement inspiré pour exalter l'humanité. Nos grands philosophes, prosélytes et poètes nous auraient alors inventé des paraboles et des mythes extravagants pour mieux nous orienter vers une sagesse mystique.
A travers cette idée improbable qu'un homme de 35 ans aurait survécu depuis plus de 14 000 ans, le réalisateur aborde notamment une réflexion sur le pouvoir de persuasion et d'imagination. Sur notre inévitable curiosité à tenter de déceler la véracité de propos fantaisistes mais aussi d'y croire fermement si le narrateur en question était réellement céleste. Etrange mais irrésistiblement captivant, le discours théorique de John nous énonce finalement que l'homme est destiné à apprendre, aimer son prochain et respecter les lois de la nature. Notamment que le paradis tant idéalisé s'est érigé sur notre terre (la bonté est ici là où elle doit être !), et que nous ne formons peut-être qu'une seule et unique personne, à moins d'être voué à renaître indéfiniment !


La vie de Jésus
Science-fiction cérébrale bourrée de réflexions passionnantes sur les thèmes de l'existence et la religion, la fatalité de la vieillesse et la peur de la mort, The Man From Earth est une allégorie agnostique sur une forme d'incarnation surnaturelle. Avec des moyens minimaliste érigés sur une unité de lieu, Richard Schenkman réalise une oeuvre universelle, originale, studieuse et sensible, culminant son épilogue vers un coup de théâtre particulièrement poignant. Là où l'amour implore de laisser deux amants en étreinte...

Dédicace à O du Moulin
26.01.13
Bruno Matéï

LE LAC DES MORTS-VIVANTS (Zombie Lake)

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site cult-labs.com

de Julian de Laserna (Jésus Franco) et Jean Rollin. 1981. France/Espagne. 1h29. Avec Howard Vernon, Pierre-Marie Escourrou, Anouchka Lesoeur, Antonio Mayans, Nadine Pascal, Youri Radionow, Burt Altman, Gilda Arancio, Marcia Sharif, Yvonne Dany, Jean-René Bleu.

Sortie salles France: 13 Mai 1981

FILMOGRAPHIE: Jean Rollin (Jean Michel Rollin Roth Le Gentil) est un réalisateur, producteur, scénariste et écrivain français, né le 3 novembre 1938 à Neuilly-sur-Seine (Seine), décédé le 15 Décembre 2010. 1958: Les Amours Jaunes. 1961: Ciel de cuivre. 1963: l'Itinéraire marin. 1964: Vivre en Espagne. 1965: Les Pays loin. 1968: Le Viol du Vampire. 1969: La Vampire Nue. 1970: Le Frisson des Vampires. 1971: Requiem pour un vampire. 1973: La Rose de fer. 1973: Jeunes filles impudiques. 1973: Christina chez les morts-vivants (une séquence, non crédité). 1974: Les Démoniaques. 1974: Tout le monde il en a deux. 1975: Lèvres de sang. 1975: Phantasmes. 1976: La Romancière Lubrique. 1976: La comtesse Ixe. 1977: Saute moi dessus. 1977: Hard Penetration. 1977: Vibrations sexuelles. 1977: Positions danoises. 1978: Remplissez moi les trois trous. 1978: Petites pensionnaires impudiques. 1978: Lèvres entrouvertes pour sexes chauds. 1978: Hyperpénétrations. 1978: Les Raisins de la mort. 1978: Discosex. 1979: Fascination. 1979: Gamines en chaleur. 1979: Bouches lascives et pornos. 1979: Pénétrations Vicieuses. 1980: Le Nuit des Traqués. 1981: Fugues mineures. 1981: Le Lac des Morts-vivants (sous le pseudonyme de J. A. Lazer). 1982: Rêves de sexes. 1982: La Morte-vivante. 1983: Sodomanie. 1983: Folies anales. 1984: Les Trottoirs de Bangkok. 1985: Ne prends pas les poulets pour des pigeons. 1985: Emmanuelle 6. 1990: La Griffe d'Horus (TV). 1990: A la poursuite de Barbara. 1991: Perdues dans New-York. 1993: Killing Car. 1994: Le Parfum de Mathilde. 1997: Les 2 Orphelines Vampires. 2002: La Fiancée de Dracula. 2007: La Nuit des Horloges. 2010: Le Masque de la Méduse.


Tourné en partie par Jean Rollin (Jesus Franco aurait pris la poudre d'escampette au bout de 2 jours de tournage !), Le Lac des Morts-vivants est considéré à juste titre comme l'un des nanars les plus affligeants de l'Hexagone (et de la planète entière s'exclameront les goguenards !). Nanti d'un budget de miséricorde, d'acteurs amateuristes (même Howard Vernon semble totalement évasif !) et d'une réalisation godiche, cette production Eurociné transcende sa nullité par un humour involontaire multipliant les bourdes techniques. Maquillage verdâtre des zombies tantôt criard, tantôt désaturé dès qu'ils s'extirpent de l'eau, piscine camouflée en étang de nénuphars et surtout un jeu d'interprétation constitué en grande partie de bovins du 3è âge quand il ne s'agit pas de jolies potiches dénudées filmées sous toutes les coutures !


Le scénario risible est à lui tout seul une farce saugrenue alliant romantisme infantile, horreur académique et parodie troupière ! Dans un petit village des années 50, des zombies nazis autrefois assassinés et noyés par des résistants français s'extirpent d'un lac pour revenir se venger. La cause de leur damnation provient des messes noires invoquées dans les eaux de l'étang sous le règne de l'inquisition médiévale. Débarquée au village, une journaliste enquête auprès du maire pour connaître les origines de la tragédie que la populace prénomme "le lac des maudits". Enfin, pour insuffler une certaine forme de poésie romanesque à l'intrigue, un flash-back nous remémore qu'un des soldats allemands avait eu une relation idyllique avec une femme française, décédée quelques temps après l'accouchement de leur fille. Revenu aujourd'hui d'entre les morts, l'officier décide de rendre visite à sa fille avec une bonhomie virginale !!!


Jamais ennuyeux car tellement andouille dans les chassés croisés imparties entre zombies délavés et victimes ahuries, le Lac des Morts-vivants est notamment privilégié d'une quantité astronomique de dialogues aussi bien grandiloquents qu'hilarants ! A titre d'exemple, je vous laisse lire l'une des répliques les plus mémorables !
Le maire: Seul le grand feu sacré de l'apocalypse pourrait les réduire en cendres et leur donner la paix éternelle !
Katia: Le grand feu sacré de l'apocalypse, le feu auquel je pense n'a rien de sacré vous voyez ! Au contraire, il est moins mystique mais tout aussi efficace que l'apocalypse ! Pas grand chose ne lui résiste, n'hésitez pas utilisez le !
Le maire: Mais, mais, à quoi pensez vous ?
Katia: Au napalm !
Le maire: Merci, merci Katia ! Vous allez sauvez le village de la destruction et moi du désespoir !


On a retrouvé la 7è compagnie !
Panthéon du Z franchouillard où le grand-guignol troupier se dispute à l'érotisme polisson (le club des baskets est entièrement à poil pour aller faire trempette dans la piscine !), le Lac des Morts-vivants est un nanar suprême que tout aficionados se doit d'expérimenter ! Filmé avec une maladresse et un sérieux stoïques, joué par des métayers plus vrais que nature et des nymphettes décomplexées, cette pantalonnade s'alloue même d'un charme formel dans ses paysages bucoliques et dans sa poésie niaise attendrissante. Ajoutez enfin pour agrémenter la fantaisie grand-guignol un score dissonant résolument envoûtant et vous obtenez un épigone d'outre-tombe des Bidasses en Folie !
A noter l'apparition clin d'oeil du regretté Jean Rollin en victime baba !

25.01.13. 3èx
Bruno Matéï


jeudi 24 janvier 2013

SOCIETY

                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site horrordaily.com

de Brian Yuzna. 1989. U.S.A. 1h35. Avec Bill Warlock, Devin Devasquez, Evan Richards, Ben Meyerson, Connie Danese, Ben Slack.

FILMOGRAPHIE: Brian Yuzna est un producteur, réalisateur et scénariste américain, né en 1949 aux Philippines.
1989: Society. 1990: La Fiancée du Ré-animator. 1990: Silent Night, Deadly Night 4. 1993: Le Retour des morts-vivants 3. 1996: Le Dentiste. 1998: Progeny, l'enfant du futur. 1998: Le Dentiste 2. 2000: Faust. 2003: Beyond Ré-animator. 2004: Rottweiler. 2005: La Malédiction des Profondeurs. 2010: Amphibious 3D.


En 1989, un réalisateur néophyte élabore une série B détonante sortie de nulle part, dépeignant avec une originalité sans égale une caricature au vitriol de la bourgeoisie ricaine de Beverlly Hills. Sous influence d'un épisode de la 4è Dimension ou des délires organiques d'un Cronenberg, Society est une farce caustique à l'humour noir cinglant culminant sa dépravation sexuelle dans une partouze finale paroxystique ! Perturbé par des cauchemars récurrents, un jeune lycéen issu d'une noble famille consulte un psychologue pour tenter de remédier à ses terreurs nocturnes. Alors qu'il accumule les conquêtes féminines, Billy suspecte l'étrange comportement indécent de sa soeur et ses parents. Pour alimenter ces soupçons, un de ses camarades de classe, David, lui fait écouter une étrange cassette audio auquel ses parents semblent s'adonner à des plaisirs incestueux. Le lendemain, le témoin meurt dans un accident de voiture. Série B d'apparence conventionnelle, desservie par une facture télévisuelle à la mise en scène débutante, Society s'élabore finalement en immense farce macabre dans sa métaphore sur le cannibalisme de la haute bourgeoisie. Empreint de dérision et d'érotisme coquin, la première partie nous décrit une jeunesse huppée de la Californie s'adonnant aux traditionnels conflits machistes pour de futiles flirts avec des potiches sexy. Peu à peu, l'atmosphère paisible mais factice de cette petite bourgeoisie va rapidement changer de ton avec l'attitude parano du jeune Billy.



Plongé dans une psychose toujours plus contraignante, le lycéen va peu à peu remarquer l'attitude inconvenante de certains proches de son entourage mais aussi celle de sa propre famille. Certains citadins semblent en effet avoir un penchant fétichiste pour toute déviance sexuelle, alors que la mère bedonnante d'une de ses amies éprouve un penchant obsessionnel pour les mèches de cheveux ! Si Brian Yuzna se révèle en l'occurrence un réalisateur novice peut adroit dans le maniement de sa caméra, il réussit à instaurer un climat d'inquiétude et d'étrangeté d'une manière palpable ! Le comportement versatile ou interlope de certains des antagonistes, la découverte macabre de témoins assassinés et leur résurrection imposée nous assaillent de doutes et de questionnements laissés en suspens. Avec une certaine habileté, le réalisateur réussit donc à nous façonner un long-métrage atypique, gros bordel incongru au cours duquel son point d'orgue orgasmique va arborer une audace visuelle hallucinée ! Ce bouquet final cartoonesque, où des corps dénudés se combinent à d'autres pour pratiquer des échanges sexuels et cannibales, est transcendé par les FX de Screaming Mad George ! Et on peut dire que l'équipe s'en est donné à coeur joie pour nous confectionner des séquences (gluantes) de transformation corporelle encore jamais vues au cinéma ! (les corps se décomposent en masse gélatineuse ou se synthétisent d'une manière destructurée !)


La grande bouffe
Drôlement sardonique, inquiétant et dérangeant, Society s'érige en satire sociale pour illustrer le cynisme de la haute bourgeoisie s'adonnant uniquement aux plaisirs de la chair ! Déployant dans sa dernière partie des effets-spéciaux d'une inventivité ahurissante, cette petite perle incongrue n'a toujours rien perdu de sa verve insolente et de son mystère insoluble. 

*Bruno 
24.01.13
17.09.22

mercredi 23 janvier 2013

Répulsions. Ours d'Argent à Berlin, 1965

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemotions.com

de Roman Polanski. 1965. Angleterre. 1h45. Avec Catherine Deneuve, Yvonne Furneaux, John Fraser, Ian Hendry, Helen Fraser, Patrick Wymark.

Sortie salles France: 7 Janvier 1966. Angleterre: Juin 1965

FILMOGRAPHIE: Roman Polanski (né le 18 août 1933 à Paris) est un comédien, metteur en scène de théâtre et d'opéra puis un producteur, scénariste et réalisateur de cinéma franco-polonais.
1962 : Le Couteau dans l'eau , 1965 : Répulsion, 1966 : Cul-de-sac, 1967 : Le Bal des vampires, 1968 : Rosemary’s baby, 1971 : Macbeth, 1972 : Quoi ?, 1974 : Chinatown, 1976 : Le Locataire ,1979 : Tess, 1986 : Pirates, 1988 : Frantic, 1992 : Lunes de fiel ,1994 : La Jeune Fille et la Mort , 1999 : La Neuvième Porte ,2002 : Le Pianiste,2005 : Oliver Twist, 2010 : The Ghost Writer 2011 : Le Dieu du carnage.


Conçu par la production comme un film d'horreur lambda, le néophyte Roman Polanski va transformer son oeuvre de commande en drame psychologique auteurisant. Chargé d'une atmosphère anxiogène, lourde et suffocante, Répulsion relate au compte goutte l'introspection déclinante d'un cas de schizophrénie. En l'occurrence, il s'agit d'une jeune manucure introvertie et taciturne, co-habitant avec sa soeur aînée dans un appartement lugubre. Plongée dans le désarroi de la solitude, Hélène est angoissée à l'idée d'être courtisée par la gente masculine. Alors que sa frangine vit une relation extra-conjugale avec un mari infidèle, la jeune femme est importunée par ses gémissements sexuels durant ses nuits de sommeil. Quand le couple décide de partir en villégiature, Hélène est effrayée à l'idée de rester cloîtrée dans l'appartement. Peu à peu, enclin à diverses hallucinations effrayantes, elle perd pied avec la réalité et sombre dans une folie meurtrière irréversible. De pas sa mise en scène à la fois inventive et ambitieuse, Roman Polanski transcende le portrait fébrile d'une jeune schizophrène avec un souci de réalisme aussi éprouvant que dérangeant. Et ce en y effectuant un travail judicieux sur le son (le tic-tac pondéré du réveil, le bourdonnement des mouches, le viol imaginaire d'Hélène éludé d'une moindre vibration ! ) le réalisateur nous transmet une angoisse diffuse toujours oppressante. 


En prime, l'atmosphère feutrée régie au sein de l'appartement est rehaussée d'une odeur putrescente de lapin avarié, tandis que des cadavres humains fraîchement assassinés vont venir amplifier l'odeur faisandée. Immergé à l'intérieur de l'esprit d'une malade mentale esseulée dans ce logement insalubre, le spectateur témoigne de ses moindres mouvements, ses pensées dérangées, ses visions horrifiées, si bien qu'il redoute ses pulsions incontrôlées ! Sans forcer le trait sur l'hémoglobine, les séquences d'estocades meurtrières impressionnent par leur violence implacable. En cinéaste avisé, Roman Polanski maîtrise ses cadres inquiétants en insufflant une indéniable tension au suspense escompté. A ce titre, le crime du bailleur infligé à coups de rasoir est retardé du comportement erratique d'Hélène pour se révéler ensuite d'une crudité difficilement supportable lorsque la peur se relaxe d'une sauvagerie précipitée. Dans un rôle inattendu, Catherine Deneuve accomplit une performance glaçante pour s'immiscer dans la peau d'une meurtrière avec son regard neutre dénué de raisonnement. Enfoui dans un mutisme aliénant laissant s'extérioriser des hallucinations cauchemardesques (les mains s'extirpant des murs d'un couloir pour l'appréhender, ses viols récurrents avec un vagabond !), le spectateur est plongé dans sa psyché torturé avec une vérité humaine confinant au malaise. Peut-être le rôle de sa vie.


Drame de la solitude illustrant sans concession la pathologie d'une jeune victime refoulée, abandonnée depuis l'enfance par la famille et discréditée d'une société machiste, Répulsion autopsie son portrait avec une véracité éprouvante. Outre la prestation transie d'émoi de Catherine Deneuve, ce chef-d'oeuvre inquiétant est notamment affermi d'une mise en scène innovante, car utilisant avec efficacité le cadre de son espace clos et l'effet de suggestion, non exempte d'éclairs de violence cinglants ! A ne pas mettre entre toutes les mains tant son réalisme demeure aussi malaisant que perturbant.

*Bruno
05.01.23. 4èx
23.01.13. 

RécompenseOurs d'Argent à Berlin, 1965


mardi 22 janvier 2013

YAKUZA (The Yakuza)

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinebel.be

de Sydney Pollack. 1974. U.S.A. 1h52. Avec Robert Mitchum, Brian Keith, Herb Edelman, Richard Jordan, Keiko Kishi, Eiji Okada.

Durée: 123 minutes (Japon), 112 minutes (États-Unis), 107 minutes (Royaume-Uni)

Sortie salles U.S: 19 Mars 1975. Japon: 28 Décembre 1974

FILMOGRAPHIE: Sydney Pollack est un réalisateur, acteur et producteur américain, né le 1er Juillet 1934 à Lafayette, dans l'Indiana (Etats-Unis), mort d'un cancer à Los Angeles le 26 Mai 2008.
1965: The Slender Thread. 1966: Propriété Interdite. 1968: Les Chasseurs de Scalps. 1968: The Swimmer. 1969: Un Château en Enfer. 1969: On Achève bien les chevaux. 1972: Jeremiah Johnson. 1973: Nos plus belles années. 1974: Yakuza. 1975: Les 3 Jours du Condor. 1977: Bobby Deerfield. 1979: Le Cavalier Electrique. 1981: Absence de Malice. 1982: Tootsie. 1985: Out of Africa. 1990: Havana. 1993: La Firme. 1995: Sabrina. 1999: l'Ombre d'un Soupçon. 2005: l'Interprète. 2005: Esquisses de Frank Gehry


Rarement diffusé à la TV et souvent oublié des amateurs de polar, Yakuza fait parti se ses perles rares dont les défaveurs du temps n'ont eu aucune emprise. Les spectateurs qui avaient eu la chance de le découvrir sur petit écran ne manqueront pas de se remémorer avec nostalgie sa fameuse diffusion intervenue un certain mardi soir sur Antenne 2, estampillée du fameux "carré blanc" (faute d'une violence assez démonstrative). Avec la trempe d'un réalisateur aussi confirmé que Sydney Pollack, Yakuza est un superbe polar, dense et nerveux, tirant son originalité sur la culture nippone imposée aux fameux Yakuza. Une organisation du crime aux codes d'honneur et de fraternité bien spécifiques, notamment voués à un sens du sacrifice peu commun (pour éviter la peine de mort, le coupable doit se trancher l'index en guise de repentance). Un entrepreneur corrompu demande à l'un de ses amis, Harry Kilmer, ancien détective, de récupérer sa fille kidnappée au Japon par les membres d'un Yakuza. Harry en profite pour revoir une ancienne amie avec qui il eut une idylle amoureuse, et par la même occasion lui invoque l'aide de son frère. Avec l'entremise de ses équipiers, la tentative d'extraire la fille des membres des Yakuza se transforme en règlements de compte sanglants. 



Réalisé avec rigueur, épuré de décors insolites et rehaussé d'un solide scénario aux rebondissements surprenants, Yakuza est une fascinante incursion au sein de l'univers trouble des fameux Yakuzas. Dominé par l'interprétation notable du vétéran Robert mitchum, louablement secondé par la prestance magnétique du japonais Ken Takakura, cette vendetta familiale redouble d'intensité dramatique dans ces enjeux considérables où vaillance et sens du sacrifice vont être mis à rude épreuve. Autour de cette confrérie mafieuse, le réalisateur nous brode donc une histoire d'amour et d'amitié entachée de contrariété, vis à vis d'un trio d'amants compromis à leur éthique de probité. Unis dans le passé par un lien de solidarité pour la survie d'une jeune femme rescapée de la guerre, Harry Kilmer et son acolyte Ken Tanaka vont être amenés à s'échanger une dîme pour combattre toute une organisation criminelle. Sans cesse défiés au sens du courage et de la bravoure pour un code d'honneur aux règles archaïques, nos combattants vont devoir employer des risques considérables pour prémunir famille et acolytes avant leur dernier baroud d'honneur. A ce titre, les combats de sabre inévitablement imposés à Ken pour défier une armée de Yakuza, avant de pouvoir s'opposer au leader, déploient de furieux accès de violence homériques remarquablement chorégraphiées !


Formidablement tempéré par un savant dosage de suspense, d'émotion et d'action intense, Yakuza est surtout privilégié par sa densité narrative à la dramaturgie fraternelle. Sa fascinante incursion dans l'univers trouble des Yakuzas ne manque pas de nous interpeller avec leur hiérarchie drastique établie dans une discipline marginale. Un classique d'une éclatante modernité !

Dédicace à Franck Gossard
Remerciement au Ciné-club de l'antre !
22.01.13
Bruno Dussart