samedi 3 septembre 2011

HYPNOSE (Stir of Echoes). Grand Prix au Festival de Gérardmer en 2000.

                         
de David Koepp. 1999. U.S.A. 1h40. Avec Kevin Bacon, Kathryn Erbe, Ileana Douglas, Liza Weil, Kevin Dunn, Conor O'Farrell, Jennifer Morrison, Zachary Davod Cope, Lusia Strus.

GRAND PRIX AU FESTIVAL DU FILM FANTASTIQUE DE GERARDMER EN 2000

Sortie en salles en France le 3 Mai 2000. U.S: 10 Septembre 1999.

FILMOGRAPHIE: David Koepp est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 9 Juin 1963 Pewaukee (Wisconsin, Etats-Unis). 1994: Suspicious (court-métrage). 1996: Réactions en Chaine. 1999: Hypnose. 2003: Suspense (télé-film). 2004: Fenêtre Secrète. 2008: Ghost Town. 2012: Premium Rush.

                                       

Sorti à la même période que le 6è Sens, ghost story à l'ancienne concoctée par M. Night Shyamalan, Hypnose fut malencontreusement occulté à tort, faute de son sujet similaire (un enfant communiquant avec les morts épaulé d'un adulte rationnel tentant de découvrir une vérité éclipsée) et du prodigieux succès planétaire porté sur les épaules du novice Haley Joel Osment mais aussi de Bruce Willis. Inspiré d'une nouvelle du célèbre écrivain Richard Matheson, il serait temps aujourd'hui de reconsidérer l'oeuvre digne de David Koepp, couronnée à juste titre du Grand Prix du Festival de Gérardmer en 2000. Tom Witzky mène une existence paisible à Chicago en compagnie de sa femme et son enfant. Au cours d'une soirée festive, il s'essaie sans conviction à tenter une séance d'hypnose improvisée par une amie railleuse. Depuis cette expérience, il est sujet à d'intenses visions hallucinatoires particulièrement imbitables et dérangeantes. Peu à peu, Tom va découvrir la vérité sur une affaire de disparition d'adolescente par l'entremise de ses visions fantomatiques. Hypnose est le genre de film que l'on redécouvre quelques années plus tard dans un état d'esprit distinct après l'avoir malencontreusement comparé au Sixième Sens. En l'occurence, nous sommes indéniablement frappés par la maîtrise de la mise en scène entamant d'entrée de jeu son canevas horrifique de par une séance d'hypnose hermétique. Une épreuve psychologique sensorielle portée au témoin incrédule, Tom Witzky, subissant un florilège d'images insolites consciencieusement structurées à travers une mise en forme baroque et inquiétante.

                                             

Cette séquence percutante et concise frappe par son aura insolite, son caractère palpable et surtout elle rend l'expérience d'autant plus persuasive qu'elle est remarquablement exacerbée par l'interprétation habitée de Kevin Bacon. Un rôle à la mesure de son talent endossant avec une belle vigueur un père de famille sans histoires, équilibré et amoureux de sa dulcinée mais bientôt intrigué par le comportement de son bambin communiquant discrètement avec un personnage invisible et surtout de son expérience d'hypnose altérant sa propre réalité avec l'intrusion cinglante d'images d'avertissement. Le travail fourni sur la bande-son occupe également une place considérable afin de provoquer un sentiment d'anxiété chez le spectateur intrigué, mais c'est surtout le suspense remarquablement ciselé autour d'une histoire d'enlèvement d'adolescente qui rend Hypnose continuellement passionnant. La subtilité suggestive allouée au scénario remarquablement construit permet au spectateur de s'impliquer de manière attentive dans cette ghost story offusquant une famille au bord de la déliquescence. L'étude psychologique des personnages en prise avec leur conflit conjugal crédibilise naturellement leur rapport orageux auprès de situations jamais bêtifiantes ou conventionnelles. Une relation aussi communément compassionnelle même si la lente progression dans le folie du père de famille rendu inflexible et intransigeant ne fera qu'amplifier se sentiment de marasme incontrôlé.

                                            

Quand à sa conclusion à tiroirs, Hypnose se permet après son point d'orgue frénétique une dernière note émouvante dans sa poésie cathartique, suivie l'instant d'après d'un inquiétant moment ombrageux octroyé à l'enfant installé à l'arrière d'un véhicule mené par ses parents en route vers une contrée indéterminée. Un garçonnet victimisé par l'emprise des morts et donc irrité par l'écho machinal de murmures spirituels invoqués de façon insolente. Outre l'interprétation solide de Kevin Bacon, parfait de sobriété à travers son personnage assidu de paternel obsédé à l'idée de découvrir l'ultime vérité, on est aussi fasciné par la trogne inquiétante de l'innocence du bambin qu'incarne David Cope, surprenant de naturel diaphane de par ses expressions raisonnées pour un si jeune âge. Quand bien même les charmantes Kathryn Erbe et Ileana Douglas composent avec aplomb des femmes affirmées et délibérées.

                                     

Superbement conté, interprété sans fioriture et méthodiquement construit autour d'un implacable suspense, Hypnose se décline en film fantastique humble pour y honorer la maturité du spectateur. L'intelligence de sa réalisation menée avec dextérité car réfutant l'artillerie d'effets grand-guignolesques propose à contrario des séquences tantôt angoissantes (les séances d'hypnose, les flashs carmins imposés par le psyché troublé de Tom, la baby-sitter déconcertée de la conversation entendue à travers le moniteur de surveillance par l'enfant à Samantha) ou terrifiantes (l'avertissement funèbre du voisin de palier en guise de prémonition, le simulacre du rapt de Jake, le coup de folie suicidaire de l'adolescent, la découverte du cadavre décharné dans la cave, le viol subi par Samantha). Des séquences adroites  mises en exergue sur la véracité d'un quotidien fustigé. On pense d'ailleurs parfois au magnifique l'Enfant du Diable auquel il renvoie d'étranges similitudes de par sa narration appuyée sur l'empathie d'une mort innocente et d'un homme avide de cette abominable découverte. Un clin d'oeil implicite est également attribué au fabuleux Dead Zone de David Cronenberg sans toutefois tenter de le plagier vulgairement. Hormis un épilogue quelque peu prévisible mais haletant et fertile en péripéties perfides, Hypnose demeure l'un des métrages les plus convaincants des années 90 auprès du thème de la hantise.

03.09.11.
Bruno Matéï          

                                         

6 commentaires:

  1. Vrai ! Il faut redonner sa chance à ce très beau film fantastique distribué au mauvais moment et superbement interprété. J'ajouterais juste que le très talentueux David Koepp a travaillé plusieurs fois avec De Palma et Spielberg. Ceci pour éclairer certains choix ou réminiscences de son film. Perso, je le préfère au "Sixième Sens" qui illustre un sujet similaire.

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  2. Ah oui, un excellent film avec un Kevin Bacon au top !

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  3. Je me suis moi même surpris d'éprouver encore plus de plaisir à la 3è vision qu'aux précédentes !
    (je voulais le préciser Adam en guise d'introduction pour sa contribution avec De Palma et Spielberg. Puis j'ai laissé tomber)

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  4. Oui, je m'en doute car tu es très précis et complet quand tu parles d'un film. Il faut que je revois le film car je ne me souviens plus à quels moments j'ai pensé "Tiens, là ça rappelle De Palma ou Spielberg" à propos d'un élément ou une séquence. C'était aussi le cas dans son premier film pas mal du tout "The Trigger Effect" (Réactions en Chaîne) avec Elisabeth Shue et Kyle MacLachlan.

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  5. Un Kevin Bacon au top comme l'a dit Leatherface,
    Je retiens une réalisation soignée et un très bon montage sonore.

    Ileana Douglas que j'aime beaucoup est parfaite comme à son habitude .
    J'avais pensé qu'après sa fabuleuse prestation dans Les nerfs à vif de Scorsese on l'aurait vu plus souvent et pourquoi pas dans un premier rôle.
    PFFFF

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  6. @ Lirandel
    Bien d'accord. Vraiment dommage de ne pas la voir plus souvent, en tout cas dans des films de premier plan; c'est une très grande comédienne.

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