mercredi 23 octobre 2019

On achève bien les Chevaux

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"They Shoot Horses, Don't They?" de Sydney Pollack. 1969. U.S.A. 1h59. Avec Jane Fonda, Michael Sarrazin, Susannah York, Gig Young, Red Buttons, Bonnie Bedelia, Michael Conrad, Bruce Dern, Al Lewis.

Sortie salles France: 2 Septembre 1970

FILMOGRAPHIE: Sydney Pollack est un réalisateur, acteur et producteur américain, né le 1er Juillet 1934 à Lafayette, dans l'Indiana (Etats-Unis), mort d'un cancer à Los Angeles le 26 Mai 2008. 1965: The Slender Thread. 1966: Propriété Interdite. 1968: Les Chasseurs de Scalps. 1968: The Swimmer. 1969: Un Château en Enfer. 1969: On Achève bien les chevaux. 1972: Jeremiah Johnson. 1973: Nos plus belles années. 1974: Yakuza. 1975: Les 3 Jours du Condor. 1977: Bobby Deerfield. 1979: Le Cavalier Electrique. 1981: Absence de Malice. 1982: Tootsie. 1985: Out of Africa. 1990: Havana. 1993: La Firme. 1995: Sabrina. 1999: l'Ombre d'un Soupçon. 2005: l'Interprète. 2005: Esquisses de Frank Gehry.


Avant-propos:
"La brutalité est en chaque être humain. Plus un sport est violent, plus il paraît attirant. Notre histoire suit simplement la logique de cette tendance. Plus les gens sont à l'aise, plus leur besoin de violence augmente. D'ici la fin de ce siècle, la société aura donné aux gens le plus de confort possible, mais elle leur aura également ôté toute liberté personnelle. A l'instar de Rome, lorsqu'elle était au sommet de sa gloire tant au niveau politique, économique qu'artistique. C'était à cette période que, dans l'arène, le samedi après-midi, la violence éclatait."
Norman Jewison


Uppercut moral dont on ne sort pas indemne, tant et si bien que la dépression nous gagne au moment du générique de fin tout en étant soulagé qu'un tel fardeau y soit enfin clôt, On achève bien les chevaux est le genre de métrage qu'on ne peut "aimer" avec le coeur et la passion eu égard de son tableau infiniment cruel sur la condition humaine. Car prenant pour thème la société du spectacle le plus trivial et indigne à travers un marathon de danse que des participants tentent de parfaire afin de remporter 1500 dollars durant la grande dépression des années 30, On achève bien les Chevaux nous laisse en état de choc de par son accumulation de séquences éprouvantes à perdre haleine. Sydney Pollack nous martyrisant l'ouïe et la vue à nous mettre en exergue durant 2h l'épreuve de force et la résilience surhumaine de ces danseurs martyrisés par une fatigue aussi bien morale que corporelle. Si bien que certains d'eux finissent par sombrer dans l'aliénation, la démence ou l'hallucination, alors que d'autres se laisseront chavirer par le trépas (tant en guise de rédemption ou d'âge avancé). Antipathique, anxiogène, dérangeant, malsain et surtout extrêmement suffocant à nous confiner dans ce huis-clos insalubre afin d'y reluquer tant les participants que le public voyeuriste féru de misère humaine (afin de mieux supporter la leur !), cette aberration filmique s'avère notamment visionnaire quant à l'émergence de la TV réalité créée à l'orée des années 2000 si je me réfère uniquement au paysage français.


Sydney Pollack décrivant avec une lucidité impitoyable la cupidité des danseurs et du présentateur sans vergogne infiniment complice à exploiter cette misère humaine, telle du bétail, afin de contenter une populace fureteuse de grand-guignol. Quant aux interprètes communément habités par leurs sentiments de désespoir, de dégoût, de pitié et d'épuisement, ils nous transmettent leur affliction comme si nous étions à l'intérieur de leur corps strié au rythme d'une mélodie ironiquement avenante ou enjôleuse. Fort de son intensité dramatique davantage en roue libre, ce concours de danse comparable aux jeux du cirque romain s'avère donc un chemin de croix pour ces désoeuvrés tentant de survivre de la manière la plus basse et soumise. Tant et si bien que sa conclusion encore plus noire et radicale nous laisse sur le bitume de par son pessimisme irrévocable intenté à ceux en qui nous étions les plus proches en dépit de leur posture individualiste, bourrue et schizo. Outre son casting criant de vérité humaine (et de cynisme quant aux inspirateurs de cette immense farce lucrative), on peut surtout saluer le jeu ambivalent de Jane Fonda transie d'acrimonie à travers sa prise de conscience davantage préjudiciable d'avoir osé participer à un spectacle aussi décadent qu'humiliant où tout n'est que simulacre.


Baignant dans un insolent climat de déréliction à travers une vile épreuve d'endurance létale, On achève bien les Chevaux se décline en puissant réquisitoire contre l'aliénation de l'homme capable de se prostituer pour un enjeu cupide afin de subvenir à sa survie. A déconseiller toutefois aux âmes sensibles et aux dépressifs, car la douche glaciale, horrifiante de nihilisme à travers sa déchéance cérébrale et corporelle, n'aura pas fini de vous hanter sitôt le générique clôt. 

*Bruno

Récompenses:
New York Film Critics Circle Awards 1969 : meilleure actrice pour Jane Fonda
Oscars 1970 : meilleur acteur dans un second rôle pour Gig Young
Golden Globes 1970 : meilleur acteur dans un second rôle pour Gig Young
Kansas City Film Critics Circle Awards 1970 : meilleur acteur dans un second rôle pour Gig Young, meilleure actrice pour Jane Fonda
National Board of Review Awards 1970 : meilleur film, prix Top Ten Films
Festival du film de Taormine 1970 : Charybde d'or pour Sydney Pollack
British Academy Film Awards 1971 : meilleure actrice dans un second rôle pour Susannah York
Grand prix de l'Union de la critique de cinéma 1971

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire