lundi 15 avril 2024

Vent de Folie / The Wind

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Nico Mastorakis. 1986. U.S.A/Grèce. 1h32. Avec Meg Foster, Wings Hauser, Robert Morley, David McCallum. 

Sortie salles France: ?. U.S: 25 Novembre 1987. Angleterre: 17 Novembre 1986.

FILMOGRAPHIE: Nico Mastorakis est un réalisateur, scénariste et producteur grec né le 28 Avril 1941 à Athènes. 1976: Ta paidia tou Diavolou. 1976: To koritsi vomva. 1990: In the Cold of the Night. 1990 Hired to Kill. 1989 Ninja Academy. 1988 Glitch! 1988 Nightmare at Noon. 1987: Meurtre dans l'objectif. 1986 The Wind (Video). 1986 Heros Boys. 1985 Sky High. 1984 To kynigi tou ekatommyriou (Video). 1984 The Time Traveller. 1984 Onde de choc. 1992: The Naked Truth. 2002: .com for Murder.

                                        

Une petite perle maudite de l'horreur éthérée.
Arlésienne horrifique que cette production américano-grecque réalisée par Nico Mastorakis (le sympathique Onde de choc diffusé en son temps sur TV6), Vent de Folie se fit connaître auprès des amateurs en Vhs locative et sur la chaine Canal + vers la fin des années 80. Il se tailla d'ailleurs une réputation plutôt optimiste (notamment auprès de la revue Mad Movies) alors qu'aujourd'hui tout le monde, ou presque, l'a malencontreusement oublié (suffit de surfer sur le net pour s'en apercevoir en dépit d'une critique explicative inéquitable issue d'une plateforme spécifique). Or, il faut savoir que Vent de Folie demeure une excellente série B comme on en fait plus de par son ambiance opaque plutôt tempétueuse. Nico Mastorakis soignant à merveille son cadre insulaire nocturne (on peut d'ailleurs largement se remémorer Anthropophagous durant la projo) auprès de magnifiques éclairages dégageant un onirisme à la fois étrange, inquiétant, fascinant, charnel, sensuel presque si j'ose dire. Mais outre l'efficacité de son script dénué de temps mort quant au jeu du chat et de la souris que se dispute le tueur et la victime, Vent de Folie possède un atout de taille pour renouveler le psycho-killer. A savoir l'élément naturel du vent que le réalisateur exploite avec autant de soin formel qu'auditif eu égard de cette menace omniprésente jouant un grand rôle pour le sort précaire des personnages en plein tourment (physiquement et psychologique). 


On peut également souligner le parti-pris anti conventionnel du cinéaste d'allouer le rôle d'une femme forte à l'étrange actrice Meg Foster (avec ses yeux azur supra clairs) difficilement épeurée face à la menace permanente du tueur ne cessant de l'épier, la harceler, la molester et la courser 1h30 durant. Une présence parfois même assez trouble auprès de sa personnalité quelque peu indiscernable épaulée d'un sang froid et d'une lucidité étonnants. Quant à Wings Hauser, il demeure comme de coutume parfaitement à sa place dans celui du psychopathe sournois prenant malin plaisir à poursuivre sa victime en lui laissant parfois volontairement quelques instants de répit lors de leurs nombreuses confrontations physiques instaurées dans ce dédale insulaire. Le réalisateur exploitant pleinement les ruelles rocailleuses de son huis-clos mutique (tout le village est quasi vide de présence humaine) en utilisant avec inventivité une caméra mobile quelque peu alambiquée. Et si hélas les 10 dernières minutes sombrent un peu dans la facilité des clichés et de l'invraisemblance à 2 reprises (le tueur grièvement blessé qui réapparait à nouveau pour reprendre sa course, la victime ne s'acharnant jamais sur lui), sa conclusion astucieuse pardonne ses menus couacs en accordant une importance encore plus capitale à l'élément naturel du vent. Outre le soin imparti aux bruitages on peut peut-être également relever qu'Hans Zimmer épaulé de Stanley Myers fut recruté pour composer ses sonorités horrifiques assez envoûtantes et idoines afin de rehausser l'étrangeté des lieux exigus aussi atmosphériques qu'immersifs. 


A (re)voir absolument donc.

*Bruno
2èx. vost

Merci à Thierry Savastano

mardi 9 avril 2024

Man on Fire

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Tony Scott. 1994. U.S.A/Angleterre/Suisse/Mexique. 2h26. Avec Denzel Washington, Dakota Fanning, Radha Mitchell, Christopher Walken, Marc Anthony, Giancarlo Giannini, Mickey Rourke. 

Sortie salles France: 13 Octobre 2004.

FILMOGRAPHIE: Tony Scott (né le 21 juillet 1944 à Stockton-on-Tees, Royaume-Uni - ) est un réalisateur, producteur, producteur délégué, directeur de la photographie, monteur et acteur britannique. 1983 : Les Prédateurs, 1986 : Top Gun, 1987 : Le Flic de Beverly Hills 2, 1990 : Vengeance,1990 : Jours de tonnerre,1991 : Le Dernier Samaritain,1993 : True Romance, 1995 : USS Alabama,1996 : Le Fan,1998 : Ennemi d'État, 2001 : Spy Game, 2004 : Man on Fire, 2005 : Domino, 2006 : Déjà Vu, 2009 : L'Attaque du métro 123, 2010 : Unstoppable.

Peut-être l'un des plus grands films fondés sur une vengeance animale avec "Il était une fois dans l'Ouest", "Impitoyable", "Le Vieux Fusil", "Mad-Max", "Carrie", "The Crow", "Conan".

Opéra de sang, de larmes et de mort d'une intensité dramatique à la fois bouleversante et rigoureuse, tant auprès des apartés intimes entre Creasy (Denzel Washington) et Pita (Dakota Fanning) d'une sensibilité à fleur de peau, que des exactions putassières de l'ange exterminateur à bout de souffle lors d'une seconde partie capiteuse, Man on Fire est un chef-d'oeuvre sépulcral dont on ne sort pas indemne. L'ombre de Dieu planant durant tout le récit sur les épaules de Creasy chargé de haine et de remord dans sa condition écorchée vive de s'être avili lorsqu'il fut autrefois agent de la CIA. Or, par la bonté candide d'une fillette qu'il doit protéger en tant que garde du corps au sein d'une ville véreuse apte aux enlèvements, il parvient à retrouver foi en lui de par l'amitié naissante qu'elle lui inculque avec tendresse et intégrité désarmantes. Ainsi, si la première heure, extrêmement attachante auprès de la relation amiteuse entre eux nous hypnotise le coeur sous l'impulsion de comédiens au diapason de leur carrière pour leur naturel instinctif, le second acte funèbre ranimera les pulsions criminelles du garde du corps par le truchement d'une vendetta en roue libre dénuée de concession. 

                                      

Nanti d'une réalisation épileptique rigoureusement expérimentale, notamment afin d'exacerber le profil névrosé, dégénéré mais calculateur du vengeur redresseur de tort d'un calme olympien, Man on Fire nous immerge de plein fouet dans un univers de corruption nécrosée à faible lueur d'espoir. Le Mal et ses sbires demeurant à chaque coin de rue afin d'asseoir leur autorité crapuleuse par l'entremise du rapt d'enfant que la ville occasionne fréquemment (le prologue nous averti que 70% d'entre eux sont retrouvés morts chaque année). Tony Scott ballotant son récit d'ultra violence à l'instar d'un vortex émotif sans que toutefois n'y soit jamais confondu précipitation et efficacité. D'autre part, de par la densité d'une intrigue plus substantielle et impromptue qu'elle n'y parait (tant auprès des révélations auprès des complices et coupables, des confrontations explosives générant un climat furibond parfois proche du chaos que du revirement rédempteur chargé de désespoir), Man on Fire convoque un malaise sous-jacent quasi viscéral, sensoriel. Tant le réalisme opéré aux châtiments punitifs, le parti-pris inventif de l'exprimer de manière furtive au sein d'un climat urbain à la fois trouble, malsain, délétère nous martèlent la vue, l'ouïe, l'esprit sous la mainmise d'une aura religieuse que Creasy a autant de mal à se défaire lors de sa culpabilité morale suicidaire.

Voilà pourquoi Man on Fire demeure aussi puissant et implacable qu'inoubliable et déchirant auprès de sa mise en image aussi odieuse qu'infiniment fragile. Tony Scott distillant durant ce vénéneux chemin de croix une sensibilité infinie pour tenir lieu de la reconversion du justicier habité par l'influence du Mal mais délibéré à contredire son destin d'après une épreuve de force héroïque. Ainsi, de ce torrent d'émotions à la fois douloureuses et vertigineuses, Scott y extrait une réflexion sur la foi religieuse avec un art consommé de la remise en question morale que tout un chacun peut un jour s'autoriser à se questionner lorsqu'il a cédé à ses bas-instincts destructeurs. 

*Bruno
2èx. Vo
Box-Office France: 435 128 entrées

samedi 6 avril 2024

The Neon Demon

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Nicolas Winding Refn. 2016. France/U.S.A/Danemark. 1h57. Avec Elle Fanning, Karl Glusman, Jena Malone, Bella Heathcote, Abbey Lee Kershaw, Desmond Harrington, Christina Hendricks.

Sortie salles France: 8 Juin 2016. U.S: 24 Juin 2016 (Int - 17 ans)

FILMOGRAPHIE: Nicolas Winding Refn est un scénariste, réalisateur, producteur et acteur danois, né le 29 septembre 1970 à Coppenhague (Danemark). 1996: Pusher. 1999: Bleeder. 2003: Inside Job. 2004: Pusher 2. 2005: Pusher 3. 2008: Marple - Nemesis (télé-film). 2009: Bronson. 2010: Valhalla Rising. 2011: Drive. 2012: Only God Forgives. 2016: The Neon Demon.


Mea culpa
(Revoyure d'une) charge féroce contre l'univers pailleté de la mode dans sa forme (ultra) superficielle, The Neon Demon laisse des traces dans l'encéphale après que nous ayons observé (en mode contemplatif) la descende aux enfers d'une mannequin de 16 ans initiée au narcissisme le plus déshumanisant. C'est ce que Nicolas Winding Refn nous relate progressivement lors de son introspection professionnele avec souci esthétique obsessionnel (chaque plan chiadé nous éclate à la figure tel un feu d'artifices nécrosé) tout en lui confrontant en contrepoint un duo de rivales électrisantes de soif de célébrité. Des poupées barbies dénuées d'expressivité dans leur posture ultra guindée entièrement soumise à leur (sur)ego. Discours sur les conséquences dégénératives de l'élitisme, sur l'addiction de la chirurgie et ses apparences fallacieuses et sur la déchéance morale au sein de la compétitivité du mannequinat, The Neon Demon dilue un climat glaçant de bassesse, d'abêtissement, de silence terrifiant n'ayant rien à envier aux univers troubles lynchéens. 

Notamment en se référant aux bizarreries horrifico-fantasmagoriques qui empoisonnent le récit à renfort d'images lascives, léchées, aussi fascinantes que malaisantes ou encore dérangées. Et si l'étrange émotion, qui s'instille au cours du vénéneux récit demeure sciemment timorée, déstabilisante, déconcertante, voir également fréquemment impassible, c'est pour mieux perdre nos repères dans ce dédale charnel de beauté funeste. L'absence d'éthique, d'affection, d'humanité des personnages féminins (mais aussi masculins, à l'exception du petit ami de Jesse non corrompu) nous sautant sournoisement à la figure, tels des androïdes huppés au regard perçant dénués de charité. Leur sensibilité s'étant noyé dans un vivier (d'acide) pécunier faute de s'être dévoyées au concours d'une beauté esthétique asexuée (elles ne sont que des plantes aseptiques soumises à leur hiérarchie castratrice). Et ce avant de se complaire dans un cannibalisme ordurier pour tenter d'accéder en un temps si furtif (passé l'âge de 20 ans, elles sont déjà hors course) à la quintessence artistique. 

Expérience onirico-sensuelle substituée en offrande fétide, The neon Demon ne peut laisser indifférent à travers sa puissance formelle autant que morale faute de nous avoir projeté avec provocation (et une certaine dérision sardonique propre à la satire vitriolée) un tableau dérisoire sur la noblesse féminine la plus sournoise et délétère quand elle ne compte que sur son corps, son apparence pour être aimée et starisée.

*Bruno
2èx. Vo
06.04.24
02.09.16.

jeudi 4 avril 2024

Frenzy

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

d'Alfred Hitchcock. 1972. Angleterre. 1h56. Avec Jon Finch, Barry Foster, Anna Massey, Barbara Leigh-Hunt, Alec McCowen, Vivien Merchant, Billie Whitelaw.

Sortie salles France: 26 Mai 1972

FILMOGRAPHIE: Alfred Hitchcock est un réalisateur, producteur et scénariste anglo américain, né le 13 Août 1899, décédé le 29 Avril 1980. 1935: Les 39 Marches. 1936: Quatre de l'Espionnage. Agent Secret. 1937: Jeune et Innocent. 1938: Une Femme Disparait. 1939: La Taverne de la Jamaique. 1940: Rebecca. Correspondant 17. 1941: Soupçons. 1942: La 5è Colonne. 1943: l'Ombre d'un Doute. 1944: Lifeboat. 1945: La Maison du Dr Edward. 1946: Les Enchainés. 1947: Le Procès Paradine. 1948: La Corde. 1949: Les Amants du Capricorne. 1950: Le Grand Alibi. 1951: L'Inconnu du Nord-Express. 1953: La Loi du Silence. 1954: Le Crime était presque parfait. Fenêtre sur cour. 1955: La Main au Collet. Mais qui a tué Harry ? 1956: l'Homme qui en savait trop. Le Faux Coupable. 1958: Sueurs Froides. 1959: La Mort aux Trousses. 1960: Psychose. 1963: Les Oiseaux. 1964: Pas de Printemps pour Marnie. 1966: Le Rideau Déchiré. 1969: l'Etau. 1972: Frenzy. 1976: Complot de Famille.

Avant dernier métrage du maître du suspense alors que pour la 1ère fois de sa carrière il fut interdit aux - de 17 ans Outre Atlantique, Frenzy est un excellent thriller horrifique émaillé de saillies d'humour noir et de séquences décalées plutôt impayables (les brouets que l'épouse de l'inspecteur Oxford lui occasionne chaque soir). "Tuer quelqu'un est très dur, très douloureux, et très… très long". C'est ce que l'on nous dévoile lors du premier homicide qu'Hitchcock façonne avec une évidente provocation vériste (symptomatique des Seventies) tant l'aura malsaine qui émane du huis-clos et des regards torturés entre tueur et victime invoquent un malaise palpable assez dérangeant (d'où son interdiction aux - 17 ans). Hitchcock ne lésinant pas sur les images d'effroi à la fois cruelles, perverses, violentes lorsque l'assassin s'acharne d'y étrangler sa proie à l'aide d'une cravate après l'avoir violé (corps étonnamment dénudé à l'appui de la part du cinéaste résigné à se renouveler). Or, c'est bel et bien l'unique meurtre que nous subirons si bien que les suivants (clairsemés) seront intelligemment soumis au hors-champs afin de ne pas sombrer dans une horreur gratuite trop complaisante (on peut d'ailleurs relever un superbe plan séquence réalisé en marche-arrière afin de suggérer l'horreur de l'agression que nous redoutions sans ambages). 

Passionnant d'y renouer avec la thématique du faux-coupable que ce dernier subira lors d'un concours de circonstances à la fois insidieuses, infortunées et vindicatives, notamment parmi le témoignage grossier du préjugé (réflexion acide sur les commérages et le faux semblant), l'intrigue est établie du point de vue de cette victime irascible (en somme un connard machiste, pour ne pas dire misogyne) constamment piégée d'une accumulation d'incidents sardoniques qu'Hitchcock ose mettre en exergue sans complexe aucun. D'où l'aspect moderne de son thriller à suspense jonglant avec une alchimie goguenarde auprès d'un humour caustique aussi grinçant que jubilatoire. Quand bien même on reste autant surpris par l'imprévisibilité des prochains meurtres sachant qu'Hitchcock se délecta bien avant ses exactions de nous familiariser auprès de femmes raisonnables afin de mieux nous ébranler lors des passages à l'acte. La franche empathie pour elles fonctionnant à plein régime au point de se dire qu'il n'oserait se permettre pareils sacrifices. Quant aux acteurs british aux visages assez peu habituels, ils jouent autant sur la dérision (tacite pour certains) et la réflexion hésitante que sur la gravité morale de se confondre dans une scénographie Londonienne à la fois inquiétante, malsaine, insécure même si tout est suggéré et qu'aucune délinquance ne vienne entacher le tableau dérisoire.

Brillant, couillu et drôlement noir pour son horreur macabre (tristement) contemporaine. 

*Bruno
2èx

mardi 2 avril 2024

Hellraiser (2022)

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de David Bruckner. 2022. U.S.A. 2h01. Avec Odessa A'zion, Jamie Clayton, Adam Faison, Drew Starkey, Brandon Flynn, Aoife Hinds 

Diffusé sur Paramount + le 15 octobre 2023 

FILMOGRAPHIEDavid Bruckner est un réalisateur, scénariste et producteur de cinéma américain né en 1977 ou 1978. 2007 : The Signal (coréalisé par Dan Bush et Jacob Gentry). 2011 : Talk Show (court métrage). 2012 : V/H/S - segment Amateur Night. 2015 : Southbound - segment The Accident. 2017 : Le Rituel (The Ritual). 2019 : Creepshow (série TV) - 2 épisodes. 2020 : La Proie d'une ombre (The Night House). 2022 : Hellraiser.

Très bonne surprise que ce reboot conçu par David Bruckner (Le Rituel, la Proie d'une Ombre) après avoir été plusieurs fois repoussé par d'autres cinéastes (dont Pascal Laugier en froid avec les producteurs car désireux d'un objet plus conforme et ludique). Et si cet Hellraiser 2022 n'atteint pas à mes yeux le niveau qualitatif des 2 premiers opus dans toutes les mémoires des initiés, il demeure de loin le meilleur opus de tout ce qui a suivi ensuite pour le pire (dans 90% des cas si j'ose dire). Rien qu'au niveau de l'interprétation juvénile fort convaincante (Odessa A'zion en marginale à la fois perplexe, paumée et torturée vampirise l'écran par son humanisme névralgique inspirant d'autre part l'ambiguité morale), du design des nouveaux cénobites régentés par une matrone démoniale assez charismatique pour inspirer appréhension, fascination, dégoût, des séquences gores de tortures extrêmes particulièrement viscérales, Hellraiser 2022 a tout pour séduire en dépit d'un traitement contemporain qui diffère bien que son approche SM s'inscrit dans ce même goût de provocation sulfureuse. Ainsi, à travers le caractère à nouveau intrigant du cube casse-tête, l'efficacité du récit narré sans temps mort (à contrario de ce que j'ai pu entendre auprès de sa première partie - il faut bien planter l'intrigue et faire connaissance avec les personnages -) dépend de l'attitude censée d'une soeur désespérée tentant de retrouver en vie son frère et de le sauver des forces du Mal en s'invitant dans une demeure suspicieuse.

Et ce tout en illustrant de façon toujours plus insécure les réactions fébriles de ses amis mutuellement en proie au doute, à l'espoir, la peur, l'interrogation, la fascination aussi, de se laisser dériver vers un univers singulier échappant à leur raison (et parfois même leur contrôle mental pour les plus véreux et proscrits). David Bruckner exploitant à l'aide d'idées visuelles retorses l'enceinte de cette demeure abandonnée réduite en cage de fer semblable à un cube géant. Avec une judicieuse utilisation d'hallucinations épeurantes que les martyrs perçoivent dans leurs tourments avant l'apparition dantesque d'un Leviathan, clin d'oeil aussi fantasque et disproportionné à l'opus 2 réalisé par Tony Randel, ici réalisé avec des FX numériques tout à fait réalistes afin de s'immerger dans cet univers mortifié autrement blafard. On peut enfin également relever en guise de trouvaille impromptue un rebondissement bien amené vers ses 40 ultimes minutes afin de créer la surprise puis renforcer le caractère insidieux de tout un chacun lorsque l'homme avide de pouvoir est en requête de transaction interdite, de plaisirs corporels les plus trash et déviants. Et sur ce point répulsif, Hellraiser 2022 possède dans sa maudite besace nombre de séquences hardcore quasi émétiques de par son réalisme cru plus vrai que nature explosant dans la dernière demi-heure. Tout du moins dans la majorité des cas car si d'autres séquences numériques font un tantinet tâche, on croit néanmoins à ce que l'on voit et subi avec une répulsion viscérale suscitant le haut le coeur (pour les plus sensibles du moins, ce qui fut facilement mon cas). Et puis comme on dit si bien, plus le méchant est réussi, meilleure l'épreuve sera, si bien que l'acteur croato-américain Goran Višnjić (Urgences !) inspire véritablement le dégoût en collectionneur d'oeuvre d'art nanti entièrement soumis à ses instincts pervers les plus licencieux. L'acteur cassant son image docile avec une haine expressive assez vigoureuse pour inspirer l'aversion. 

Etrange et inquiétant, choquant et révulsif auprès d'un réalisme couillu, Hellraiser 2022 prend son sujet au sérieux pour relancer la machine à frissons SM avec assez d'efficacité et d'intelligence pour s'extirper du produit mercantile. Alors offrez lui sa chance car il mérite bien le coup d'oeil, et au-delà (j'en étais au second visionnage encore plus attrayant). 

*Bruno
2èx. vf

Ambulance

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Michael Bay. 2021. U.S.A. 2h16. Avec Jake Gyllenhaal, Yahya Abdul-Mateen II, Eiza González, Garret Dillahunt, A Martinez, Keir O'Donnell, Moses Ingram, Wale Folarin, Colin Woodell

Sortie salles France: 23 Mars 2022

FILMOGRAPHIE: Michael Benjamin Bay né le 17 février 1965 à Los Angeles (Californie), est un réalisateur, producteur et acteur américain. 1995 : Bad Boys. 1996 : Rock. 1998 : Armageddon. 2001 : Pearl Harbor. 2003 : Bad Boys 2. 2005 : The Island. 2007 : Transformers. 2009 : Transformers 2 : La Revanche. 2011 : Transformers 3 : La Face cachée de la Lune. 2013 : No Pain No Gain. 2014 : Transformers : L'Âge de l'extinction. 2016 : 13 Hours. 2017 : Transformers: The Last Knight. 2019 : Six Underground. 2022 : Ambulance. 

On peut peut-être parler de gageure que d'avoir tenter de nous tenir en haleine 2h14 durant (paradoxalement on ne compte que 2 mns de générique de fin !) sur le concept balisé du road movie (ici alerte). Dans la mesure où Michael Bay parvient à ne jamais relâcher la pression face aux actions d'un duo de braqueurs tentant d'arpenter Los Angeles dans une ambulance dérobée, avec, à bord, un flic grièvement blessé et une infirmière s'efforçant de le maintenir en vie en dépit des courses-poursuites incessantes amorcées entre eux et forces de l'ordre (tant en voiture qu'en hélico) décuplées en masse. Or, afin de nourrir puis relancer l'intensité des enjeux précaires (maintenir en vie l'otage à tous prix, notamment pour éviter de trépasser sous les balles de snipers, déjouer les renforts policiers dépêchés à tous coins de rue), Michael Bay utilise sa caméra tel un joujou technique à travers sa mise en scène expérimentale à donner le vertige. Les angles de caméra ultra alambiqués fusant tous azimuts avec fluidité, les drones survolant l'espace urbain avec vélocité; de manière à dynamiter l'action, maintenir la tension au sein d'une ville tentaculaire filmée tel un documentaire. Michael Bay filmant avec inventivité ses pyrotechnies sous tous les angles expérimentaux au risque parfois d'empiéter sur le plaisir du spectateur "insatiable" privé de l'intégralité de l'action. 

Quant aux acteurs très attachants dans leur fonction (anti)héroïque de braqueurs stoïques multipliant bravoures, risques suicidaires, discordes morales et indulgences auprès de l'infirmière et l'otage en instance de survie, nous éprouvions une inévitable empathie en dépit d'un Jake Gyllenhaal étonnamment à l'aise en braqueur furibard davantage erratique car à deux doigts d'opérer des intentions criminelles lourdes de conséquences. Emaillé de rebondissements aussi dingues qu'improbables (la chirurgie improvisée au sein de l'ambulance, les mafieux mexicains à la rescousse des braqueurs pour mieux dûper la police), Ambulance parvient toutefois à transcender ses idées capilotractées de par son humour parfois hilarant (rien qu'au niveau des répliques cinglantes, me suis surpris à rire nerveusement) qui empiète le récit à juste dose. Et si Ambulance n'est ni un chef-d'oeuvre ni un grand film, ce qu'il ne cherche jamais à être, il reste jusqu'à l'ultime image très efficace pour asseoir une réputation d'excellent divertissement tout en y incluant une véritable émotion dans la fratrie lors de son happy-end à la fois tragique et rédempteur. Des séquences intimistes émouvantes qui parviennent là encore à excuser ses ficelles afin de pardonner les actes répréhensibles d'un des 2 braqueurs. Ambulance s'érigeant également en récit initiatique quant à l'humanisme torturé de Will endossé avec force, incertitude et désarroi par l'afro Yahya Abdul-Mateen II témoignant des incartades de son frère avec un discernement davantage appuyé. Quant à Eiza González, si on ne peut s'empêcher de la comparer à l'actrice Michelle Rodriguez, elle demeure toutefois suffisamment expressive dans ses émotions intimes à la fois caractérielles et démunies pour se détacher de l'emprise de l'avatar. 

Un divertissement exhaustif donc auprès de nos attentes ludiques,  généreusement explosif, émotif, palpitant, que Michael Bay illustre avec une ambition technique aussi personnelle que réfléchie tout en nous faisant vibrer ses personnages peu recommandables.

*Bruno
2èx

samedi 30 mars 2024

Haute Tension. Grand Prix du Film Fantastique, Catalogne 2003.

Photo empruntée sur Google, appartenant au site allocine.fr

d'Alexandre Aja. 2003. France. 1h30. Avec Cécile de France, Maïwenn, Philippe Nahon, Franck Khalfoun, Andreï Finti, Oana Pellea.

Sortie salles France: 18 Juin 2003 (Int - 16 ans)

FILMOGRAPHIE: Alexandre Aja (Alexandre Jouan-Arcady) est un réalisateur, producteur, scénariste, dialoguiste et acteur, né le 7 Août 1978 à Paris. 1999: Furia. 2003: Haute Tension. 2006: La Colline a des yeux. 2008: Mirrors. 2010: Piranha 3D. 2013: Horns. 2016: La Neuvième Vie de Louis Drax. 2019: Crawl.

Un sommet du gore frenchie profondément malsain, infernal, redoutable. 

Considéré comme une bombe lors de sa sortie, tant auprès de la critique que du public, et ce en dépit de son échec commercial, Haute Tension n'a strictement rien perdu de sa vigueur horrifique quelques décennies plus tard. Au point même de reconsidérer son final révélateur tant décrié (si bien que j'en fis parti à 3 reprises) alors qu'aujourd'hui à la revoyure d'une 4è projo je fus littéralement traumatisé par ce rebondissement finalement cohérent Spoil ! quant à l'homosexualité refoulée d'un personnage aussi désarmé que profondément esseulé de ne pouvoir être aimé par l'être cher Fin du spoil. Mais alors pourquoi Haute Tension reste une référence du genre avec cette fameuse réputation d'avoir su rivaliser avec les prods ricaines les plus notoires ? Parce que Alexandre Aja traite son sujet très au sérieux, réinvente les codes avec cette volonté farouche d'y terroriser le spectateur auprès d'un parti-pris jusqu'au boutiste pour son ultra violence gorasse déployée à gros bouillon. Qui plus est, bénéficiant d'une direction artistique irréprochable, Aja soigne son ambiance à la fois insécure et si fétide auprès d'un environnement nocturne aussi étouffant que malaisant. Immersion assurée en y redoutant incessamment la prochaine séquence impitoyable que l'on nous illustre sans fard et encore moins de fioriture. 

Les victimes démunies, paralysés de frayeur tentant désespérément d'échapper au tueur fou (qu'endosse avec une aura aussi viciée que débauchée l'impressionnant Philippe Nahon humecté de sueur chaude sur son visage adipeux) avec une impuissance humaniste à la limite du tolérable. Aja parvenant constamment à entretenir une tension permanente auprès de ses victimes lâchement persécutées, en utilisant notamment des jumps-cares ultra efficaces afin de nous terroriser comme si nous étions à l'intérieur de la demeure champêtre, théâtre d'abominations crapuleuses. Si bien que l'ultra brutalité qui découle des exactions putassières a de quoi franchement choquer, même auprès des spectateurs les plus blasés, en dépit des provocateurs machistes n'ayant peur de rien se vanteront-ils. Quant au tendre duo formé par Cécile de France et Maïwenn, celles-ci parviennent naturellement à donner corps à leur personnage torturé avec une finesse de jeu expressif, entre névralgie apeurée et crises de larmes aux confins de la folie dépressive. Portant le récit sur leurs épaules autour du monstre Nahon, nos deux jouvencelles contournent facilement les clichés de la potiche écervelée avec une fragilité humaniste pour autant débrouillarde et finalement combattive auprès de leur initiation à la survie. 


Schizophrenia
De par son ambiance morbide indécrottable épaulé d'un score funeste aussi monocorde que lancinant qui imprègne chaque image crépusculaire, Haute Tension fascine et dérange au possible à travers son concentré d'horreur licencieuse et d'âpre terreur que le spectateur perçoit entre fascination morbide et malaise viscéral d'une rigueur morale proche du traumatisme. Comme le souligne d'autant mieux son impensable final incongru d'une dramaturgie cérébrale aussi rude qu'accablée. 

*Bruno
4èx

Babysitter Wanted

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de  Jonas Barnes et Michael Manasseri. 2008. U.S.A. 1h26. Avec Sarah Thompson, Matt Dallas, Bruce Thomas, Kristen Dalton, Bill Moseley, Nana Visitor.

DTV

FILMOGRAPHIE: Michael Manasseri (né le 28 février 1974 à Poughkeepsie, New York) est un acteur et réalisateur américain. 2008: Babysitter Wanted. 


Oubliée aujourd'hui, cette sympathique série B demeure si charmante et attachante qu'on jurerait qu'elle fut réalisé fin 80 / début 90 si j'ose dire. D'ailleurs on pense évidemment au chef-d'oeuvre de Fred Walton "Terreur sur la Ligne" mais aussi à "House of the devil", tant pour l'ambiance obscure impartie au psycho-killer "harceleur téléphonique", que de la dérive démoniale du second acte faisant intervenir un rebondissement aussi couillu qu'improbable. Et si à cause d'un certain personnage peu expressif (pour ne pas spoiler) surfe un peu vers le ridicule, il faut reconnaître l'audace du réalisateur de s'écarter des sentiers balisés alors que vers le dernier acte nombre de clichés viennent toutefois contredire ses intentions premières plutôt louables. Ainsi, afin d'apprécier à sa juste valeur ce divertissement bonnard souvent atmosphérique (et sur ce point c'est parfaitement réussi, on est immergé dans l'action bucolique !) il faut savoir le savourer au second degré comme le souligne d'ailleurs les comédiens cabotins se fondant dans le corps de leur personnage avec un plaisir émotif palpable à l'écran. 


On peut aussi en dire autant de l'héroïne principale (catholique dans l'âme auprès d'une mère bigote qui servira par ailleurs de vecteur héroïque quant à l'habileté d'une conclusion assez fun, pour ne pas dire prometteuse), jouant les victimes démunies avec assez d'expression (sciemment) timorée pour s'inquiéter constamment de son sort incertain. Et ce même si plusieurs agressions physiques finissent hélas (et c'est bien dommage) par tomber à plat tant celle-ci demeure stupide à se défendre contre son adversaire en adoptant le moins de détermination et de violence possible (le frapper une seule et unique fois à chaque estocade). Quand aux scènes gores qui irriguent ce survival davantage haletant elle surfe sur la mode du Tortur'porn avec un goût viscéral étonnamment putassier afin de combler nos attentes gentiment perverses. Là aussi c'est particulièrement réussi si bien que les trucages artisanaux font plaisir à voir de par leur charnalité mécanique ici assez dégueulbif (j'ai même songé à D'Amato à un moment propice, toutes proportions gardées). 


Franchement bonnard donc, tout du moins pour les inconditionnels de bisserie sans prétention, Babysitter Wanted mérite à être revu tant le métrage dégage aujourd'hui un charme rétro au point d'établir un trait d'union avec nos divertissements d'exploitation Eighties. Or il est évident que les auteurs y soient férus du genre.

*Bruno
2èx. Vo

mardi 26 mars 2024

La Mort aux Trousses / North by Northwest. Prix Edgar-Allan-Poe du meilleur scénario, 1960

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site posterlounge.fr

d'Alfred Hitchcock. 1959. Angleterre. 2h16. Avec Cary Grant, Eva Marie Saint, James Mason, Jessie Royce Landis, Leo G. Carroll, Josephine Hutchinson, Philip Ober, Martin Landau 

Sortie salles France: 21 Octobre 1959. U.S: 17 Juillet 1959

FILMOGRAPHIE: Alfred Hitchcock est un réalisateur, producteur et scénariste anglo américain, né le 13 Août 1899, décédé le 29 Avril 1980. 1935: Les 39 Marches. 1936: Quatre de l'Espionnage. Agent Secret. 1937: Jeune et Innocent. 1938: Une Femme Disparait. 1939: La Taverne de la Jamaique. 1940: Rebecca. Correspondant 17. 1941: Soupçons. 1942: La 5è Colonne. 1943: l'Ombre d'un Doute. 1944: Lifeboat. 1945: La Maison du Dr Edward. 1946: Les Enchainés. 1947: Le Procès Paradine. 1948: La Corde. 1949: Les Amants du Capricorne. 1950: Le Grand Alibi. 1951: L'Inconnu du Nord-Express. 1953: La Loi du Silence. 1954: Le Crime était presque parfait. Fenêtre sur cour. 1955: La Main au Collet. Mais qui a tué Harry ? 1956: l'Homme qui en savait trop. Le Faux Coupable. 1958: Sueurs Froides. 1959: La Mort aux Trousses. 1960: Psychose. 1963: Les Oiseaux. 1964: Pas de Printemps pour Marnie. 1966: Le Rideau Déchiré. 1969: l'Etau. 1972: Frenzy. 1976: Complot de Famille.


Un grand classique des années 50 qu'on ne présente plus lorsqu'il porte la signature du grand Hitch. Bien que l'on peut toutefois rappeler que si la mise en place de l'intrigue n'accorde que peu de place à l'action 1h28 durant (en dépit de cette fameuse poursuite en avion à proximité d'un champs), les 45 ultimes minutes demeurent un grand moment de cinéma auprès de ses rebondissements, ses cascades vertigineuses sur le mont Rushmore et son intensité plus décomplexée de par la progression du suspense savamment charpenté en dévoilant des indices éloquents sans pouvoir l'anticiper. Et puis quel plaisir distingué de retrouver le duo glamour Gary Grant / Eva Marie Saint à travers leur liaison houleuse si bien qu'Hitchcock se permet notamment d'y parfaire une étreinte érotique d'une élégance ténue auprès des corps tendrement enlacés, et ce sur une durée inhabituellement conséquente d'insister autant auprès de leur commune alchimie sensuelle (ah ces yeux qui se ferment d'émotions épanouies !). 


Des images subtilement concupiscentes plus fondantes les unes que les autres qu'on ne retrouve hélas dans aucun métrage contemporain. Et si on a peut-être connu le maître du suspense un peu plus inspiré auprès d'autres références plus immersives, hypnotiques et affolantes, La Mort aux Trousses n'en demeure pas moins un palpitant suspense d'espionnage truffé de séquences jouissives en insistant à nouveau sur l'élégance d'un final étourdissant, avec, cerise sur la gâteau, des trucages (d'incrustation) encore aujourd'hui bluffant de réalisme. Suffit de poser la question aux spectateurs souffrant véritablement de vertigo pour s'apercevoir du talent perfectionniste d'Hitchcock jamais à court d'idées cruelles afin d'amplifier l'intensité d'affrontements à la fois insidieux et escarpés tout en malmenant sévèrement la femme (éventuellement) fatale. Enfin, il n'y a plus qu'à compter sur  l'orchestration exhaustive de Bernard Herrmann irriguant tout le périple pour renforcer son émotion à la fois exaltante (les séquences intimes entre le couple), inquiétante (notamment auprès de ses moult jeux de regards menaçants) et épique.


*Bruno
3èx

Récompenses:
1959 : coquille d'argent pour Alfred Hitchcock au Festival international du film de Saint-Sébastien
1960 : prix Edgar-Allan-Poe du meilleur scénario pour Ernest Lehman

Mama

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de  Andrés Muschietti. 2013. U.S.A. 1h40. Avec Jessica Chastain, Nikolaj Coster-Waldau, Megan Charpentier, Isabelle Nélisse, Daniel Kash. 

Sortie salles France: 15 Mai 2013

FILMOGRAPHIEAndrés Muschietti est un scénariste et réalisateur argentin, né le 26 août 1973 à Buenos Aires. 2013 : Mama (Mamá). 2017 : Ça (It). 2019 : Ça : Chapitre 2 (It: Chapter Two). 2023 : The Flash. 

Auréolé de 3 prix à Fantasporto et à Gérardmer dont le fameux Grand Prix que l'on peut toutefois trouver discutable, Mama est un charmant divertissement horrifique intelligemment conçu dans son refus de surenchère, de facilité (même si 2 jumpscares inutiles tombent à l'eau), de trivialité. Dans la mesure où Andrés Muschietti exploite son argument fantastique sous l'impulsion de la suggestion d'y retarder au possible la créature qui importune sournoisement les personnages, alors qu'à d'autres moments furtifs nous ne la percevions que dans l'ombre ou à moitié ébruitée par d'astucieux effets de caméra. Et si le scénario plutôt prévisible, voir déjà vu (une vengeance maternelle spectrale) n'a point l'intention de renouveller le genre, le réalisateur table sur l'efficacité et la conduite du récit en accordant nottamment pas mal d'attouts aux traitements moraux des persos. Le genre horrifique n'étant finalement qu'un prétexte ludique pour nous questionner sur l'ambition de la maternité, la maltraitance et la responsabilité parentale par le truchement d'une initiation à la communication, à la confiance et à l'amour. 

En évitant toutefois d'opérer un favoritisme infantile si je me réfère à la rancune de la créature souvent impressionnante, fascinante, voir même quelque peu flippante à travers son apparence décharnée numériquement imposée mais assez réaliste et expressive pour croire en sa furibonde animosité. Outre son efficacité narrative soumise à la parole (timorée) des enfants et à celle des parents adoptifs en questionnemment surnaturel, on peut également compter sur la présence si naturelle des fillettes étonnamment justes, impeccablement dirigées pour s'extirper du stéréotype, comme le souligne par ailleur son final émouvant faisant intervenir une imagerie onirique à la mélancolie tangible sans forcer le trait de sentiments bipolaires. Mama se déclinant en conte horrifique où émotions et frissons finissent pas ne faire plus qu'un dans un vertige de sens émotifs aussi cruels que rédempteurs. Et c'est ce qui rend si attachante (et qui a sans doute tant séduit le public de Gérardmer) cette modeste série B fantastique que d'avoir su conjuguer avec une sensibilité somme toute fragile suspense, frissons, tendresse auprès d'une valeur maternelle souffreteuse. 


*Bruno
3èx

Récompenses:

Festival international du film fantastique de Gérardmer 2013 : Grand prix, prix du public et prix du jury jeunes

Fantasporto 2013 : meilleur film, meilleure actrice pour Jessica Chastain et meilleur réalisateur

jeudi 21 mars 2024

Road House

                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Doug Liman. 2024. U.S.A. 2h04. Avec Jake Gyllenhaal, Daniela Melchior, Billy Magnussen, Jessica Williams, Darren Barnet, Conor McGregor, J. D. Pardo.

Diffusion Prime Video: 21 Mars 2024.

FILMOGRAPHIE: Doug Liman est un producteur, réalisateur et directeur de la photographie américain, né le 24 juillet 1965 à New York (États-Unis). 1994 : Getting In. 1996 : Swingers. 1999 : Go. 2002 : La Mémoire dans la peau. 2005 : Mr. et Mrs. Smith. 2006 : Heist (série télévisée). 2007 : Mr. et Mrs. Smith (pilote série télévisée). 2008 : Jumper. 2010 : Fair Game. 2014 : Edge of Tomorrow. 2017 : The Wall. 2017 : Barry Seal: American Traffic. 2021 : Locked Down. 2021 : Chaos Walking. 2023 : Justice (Documentaire). 2024 : Road House. prochainement : The Instigators. 


L'impensable pochette-surprise.
Remake d'un actionner des années 80 considéré comme culte auprès des afficionados de divertissement bourrin alors que personnellement je ne fus jamais un fervent admirateur (même si à la revoyure, et avec le recul, je l'apprécie beaucoup mieux aujourd'hui), Road House, nouvelle mouture, est à mon sens "subjectif" une formidable surprise au point d'y transcender son modèle (quitte à faire grincer les dents des fans indéfectibles). Si bien qu'en l'occurrence, tout est (à nouveau) réuni pour nous séduire avec cette similaire motivation musicale aussi sincère que décomplexée eu égard de l'ambiance folingue, pétulante, déjantée qui s'y dégage avec un charme exotique luminescent. Doug Liman exploitant à merveille son cadre floridien auprès de cette station balnéaire fréquentée par de gros bras du samedi soir férus d'insolence afin de s'approprier l'enceinte du Road House. Et si le scénario inévitablement minimaliste avait de quoi inquiéter à répéter le même schéma que son modèle, Doug Liman parvient pour autant à le rendre enthousiasmant, sémillant même, jamais ennuyeux, efficace, un tantinet substantiel (pour le profil tourmenté de Dalton que l'on apprend à connaître au fil de son évolution morale suicidaire et criminelle); plutôt bien structuré sous l'impulsion d'une foule de grandes gueules sciemment lunaires, borderline, voir carrément demeurés (le fameux méchant herculéen incarné par Conor McGregor crève littéralement l'écran à travers son show hystérisé jusqu'au point d'orgue d'une sauvagerie inouïe !). 

Quand bien même Jake Gyllenhaal surprend à point nommé en justicier redresseur de tort d'une force tranquille et de sureté aussi bonnard qu'amiteuse. L'acteur dégageant un charme serein, une sympathie résolument attachante, une cool-attitude dépouillée, sans compter les seconds-rôles bon enfant qu'il côtoie afin de les préserver de l'intimidation et d'un danger toujours plus envahissant. Quant aux scènes d'action qui empiètent le récit à juste dose et en crescendo, elles demeurent davantage funs et jouissives, monstrueuses et décadentes auprès d'FX en CGI parfois perfectibles mais d'un réalisme pour autant ébouriffant, notamment de par l'ultra agressivité du montage et de mouvements de caméra ultra fluides (euphémisme) que Doug Liman exploite à la perfection afin de mieux nous impliquer dans une action aussi inventive que virevoltante. Certaines cascades techniques (voiture, hors-bord) s'avérant d'autre part aussi épiques que disproportionnées au point de nous scotcher à notre fauteuil, à l'instar d'un blockbuster régressif symptomatique des plus belles réussites des années 80. D'où le charme exaltant, attentionné, désinhibé qui se dégage de chaque séquence à travers son esprit bon enfant autant cocasse que cartoonesque. Car si Road House demeure tant réussi, immersif, fun, parfois même jubilatoire, il le doit autant à sa dérision assumée en dépit d'une ultra violence terriblement impressionnante auprès des coups échangés avec une hargne infiniment primitive. Un excellent spectacle donc où tous les ingrédients savamment concoctés bout à bout confinent à la réussite, tant technique que formelle, sous l'impulsion d'une foule de personnages disjonctés se prêtant à la déconnade musclée (quelle pagaille métronome !) avec une foi plutôt impayable. 

*Bruno

Ce qu'en a pensé Gilles Rolland[CRITIQUE] ROAD HOUSE (2024) - On rembobine

Ci-joint chronique de son modèle: http://brunomatei.blogspot.fr/2018/04/roadhouse.html

mercredi 20 mars 2024

Crimes au musée des Horreurs / Horrors of the Black Museum

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Arthur Crabtree. 1959. Angleterre. 1h22. Avec Michael Gough, June Cunningham, Graham Curnow, Shirley Anne Field, Geoffrey Keen, Gerald Anderson 

Sortie salles France: 2 Décembre 1959. U.S: 29 Avril 1959 (Int - 16 ans)

FILMOGRAPHIEArthur Crabtree est un directeur de la photographie et réalisateur britannique, né le 29 octobre 1900 à Shipley et mort le 15 mars 1975 à Worthing (Royaume-Uni). 1945 : La Madone aux deux visages. 1945 : Elles étaient sœurs. 1946 : Caravane. 1947 : Dear Murderer. 1948 : The Calendar. 1948 : Quartet. 1949 : Don't Ever Leave Me. 1950 : Lilli Marlene. 1952 : Hindle Wakes. 1953 : The Wedding of Lilli Marlene. 1953 : Stryker of the Yard. 1956 : Les Aventures du colonel March (série TV). 1957 : Morning Call. 1958 : Death Over My Shoulder. 1958 : Ivanhoé (série TV). 1958 : Monstres invisibles. 1959 : Crimes au musée des horreurs.

Production british qui fit scandale à l'époque pour sa violence sanguine et l'audace de son climat malsain, Crimes au musée des horreurs est une formidable série B que domine (amplement) l'illustre Michael Gough en demeuré misogyne à la fois écrivain criminologue et propriétaire d'un musée, épaulé qui plus est d'un étrange assistant (notamment auprès de sa petite posture physiquement "carrée") à qui il perpétue sur lui d'étranges expériences inspirées du cas du Dr Jekyll et My Hyde. Ce qui donne lieu à un alliage assez délirant d'y conjuguer au sein de la même intrigue ce mythe schizo ainsi que l'homme au masque de cire pour le repère d'un musée d'horreurs autrement plus sordides tout en surfant sur les succès néophytes de la Hammer à travers son dosage de sexe et violence au sein d'un scope rutilant. Bien entendu, si les meurtres paraissent aujourd'hui timorés ils n'en demeurent pas moins assez violents et percutants, tant pour l'originalité de l'ustensile utilisé (à l'instar de cette paire de jumelles au pointes acérées ayant réellement existé lors d'un assassinat survenu dans les années 30) que des effets de surprise parfois saisissants lorsque apparait brièvement à 2 reprises (précisément !) le tueur que nous n'attendions pas surgir à un moment aussi furtif qu'inventif. 

D'où l'effet épeurant procuré encore aujourd'hui amplifié d'une violence aussi sadique que brutale, même si souvent hors-champs. D'autant plus jamais ennuyeux de par l'efficacité de la réalisation, si bien que l'on surprend de l'arrivée précipitée du dénouement au bout d'1h22, Crimes au musée des Horreurs fleure bon l'épouvante vintage hélas aujourd'hui révolue. Tant auprès de la stature lunaire des personnages (tant antagonistes que victimes), du récit à suspense (même si étroit et plutôt saugrenu) que du cadre photogénique comme l'illustre, esthétiquement parlant, l'exploitation d'une fête foraine nocturne, le fameux musée expérimental aux mannequins franchement morbides, la boutique de l'antiquaire ou encore l'appartement tamisé d'une jeune blonde cagole au bagout décomplexé. Quant au rappel de ses séquences chocs aussi funs que débridées qui firent tant jaser en 59 (mention "interdit aux - de 16 ans" aux 4 coins du monde) on les savoure aujourd'hui avec autant de curiosité perverse que de fascination malsaine tout en frissonnant de plaisir ludique en dépit de son étonnante brutalité, tout du moins lors de 2 moments assez marquants.    

*Bruno
2èx. vf. 

Remerciement à Warning Zone pour sa copie 1080P de toute beauté. 

mardi 19 mars 2024

Grand Canyon. 1992 : Ours d'or du meilleur film au Berlinale

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Lawrence Kasdan. 1991. U.S.A. 2h14. Avec Danny Glover, Kevin Kline, Steve Martin, Mary McDonnell, Mary-Louise Parker, Alfre Woodard, Jack Kehler, Jeremy Sisto.

Sortie salles France: 26 Février 1992. U.S: 25 Décembre 1991

FILMOGRAPHIE: Lawrence Kasdan est un producteur, scénariste, réalisateur et acteur américain né le 14 janvier 1949 à Miami Beach, Floride (États-Unis). 1981 : La Fièvre au corps. 1983 : Les Copains d'abord. 1985 : Silverado. 1988 : Voyageur malgré lui. 1990 : Je t'aime à te tuer. 1991 : Grand Canyon. 1994 : Wyatt Earp .1995 : French Kiss. 1999 : Mumford. 2003 : Dreamcatcher. 2012 : Freeway et nous.


L'Océan de la Colère.
Totalement oublié depuis sa sortie alors qu'il fut un échec commercial, Grand Canyon est un poignant drame choral s'épanchant sur la destinée d'une poignée de résidants issus de quartiers (huppés et malfamés) de Los Angeles. Traitant des thématiques on ne peut plus actuelles du racisme, de la violence, de la haine et de la délinquance au sein d'une ville chaotique surveillée par un hélico durant chaque nuit, Grand Canyon dégage un climat anxiogène de nonchalance, d'amertume mélancolique auprès de la contrariété existentielle de ces américains s'efforçant de trouver une issue de secours par le pilier de l'amour, de l'amitié, de l'unité familiale. Tous les acteurs excellents de sobriété demeurant suffisamment attachants, voirs parfois même émouvants à travers leurs failles, leurs faiblesses, leurs indécisions, leurs hésitations, leur appréhension pour nous harponner à leur malaise existentielle avec épaisseur cérébrale. Ce qui converge à nous questionner sur nos propres motivations personnelles à concevoir notre existence par le truchement de l'espoir, mais surtout de la chance et de la coïncidence auquel nous nous changions les uns les autres d'après un concours de circonstances solaires, pour ne pas dire solidaires. 


Et même si le tableau imparti à cette insécurité grandissante fait froid dans le dos sans que n'y soit exploité une violence graphique cinématographique (en dépit d'un extrait de série Z sciemment caricatural afin de dénoncer la violence à l'écran et l'influence qu'elle pourrait exercer auprès des esprits fragiles ou ignorants), Grand Canyon dégage toutefois un sentiment positif quant à l'élan de fraternité qui se déploie lors de sa conclusion à la fois lyrique et métaphysique. Et même si on peut déplorer lors de sa première heure quelques bons sentiments un tantinet faciles (accentués d'un score parfois peu subtil alors qu'à d'autres moments l'émotion qui s'y dilue demeure autrement sincère par ses sonorités humbles), Grand Canyon séduit par sa franche loyauté auprès d'adultes fragiles d'un humanisme à la fois meurtri et contrarié mais néanmoins d'une résilience payante pour s'extirper d'une sinistrose (davantage) envahissante. Reflet inquiétant d'une société en déliquescence morale auprès de nos pertes de repères gagnés de solitude, de peur de l'autre, d'appréhension du trépas de la façon la plus inéquitable. Une oeuvre perfectible certes, avec un rythme parfois en dent de scie, mais qui émeut et laisse toutefois des traces par son intensité dramatique à la fois contenue, exaltée et sensiblement élégiaque. 


*Bruno
2èx. Vostfr