jeudi 17 mai 2012

L'Abominable Dr Phibes / The Abominable Dr Phibes. Prix du Meilleur Acteur (Vincent Price) à Catalogne, 1971.

                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant à aaronpolson.net

de Robert Fuest. 1971. Angleterre/U.S.A. 1h34. Avec Vincent Price, Joseph Cotten, Hugh Griffith, Terry Thomas, Virginia North, Peter Jeffrey, Derek Godfrey, Norman Jones, John Cater, Aubrey Woods, John Laurie.

Sortie salles U.S: 18 Mai 1971

FILMOGRAPHIE: Robert Fuest est un réalisateur et scénariste anglais, né le 30 Septembre 1927 à Londres, décédé le 21 Mars 2012. 1967: Just like a Woman. 1970: And soon the Darkness. 1970: Les Hauts de Hurlevent. 1971: L'Abominable Dr Phibes. 1972: Le Retour du Dr Phibes. 1973: Les Décimales du Futur. 1975: La Pluie du Diable. 1977: Three Dangerous Ladies. 1980: Revenge of the Stepford Wives (télé-film). 1981: The Big Stuffed Dog (télé-film). 1982: Aphrodite.

"L'Élégie du Vengeur Muet".

Pitch: Un docteur orchestre une vengeance diabolique pour punir les responsables de la mort de sa femme. S’inspirant des dix plaies d’Égypte, il perpétue une série de meurtres aussi horribles qu’ingénieux, dans l’espoir de rejoindre sa dulcinée dans les ténèbres. La police, impuissante, ne peut que compter les cadavres, déconcertée par la machination morbide.

Classique british des seventies, mondialement célébré, L’Abominable Dr Phibes s’impose comme un jubilatoire jeu de massacre, directement nourri des textes bibliques. L’œuvre se distingue d’abord par l’interprétation mutique de l’extraordinaire Vincent Price, mais aussi par une narration sardonique, habilement charpentée. Par l’ingéniosité des crimes exécutés avec un cynisme froid par un docteur élégiaque, cette farce macabre oscille avec brio entre horreur railleuse et romance dévorante. Fou d’amour et de rage après la perte de sa femme sur une table d’opération, le Dr Phibes — ancienne vedette de music-hall — ourdit une vengeance improbable contre huit chirurgiens, en adaptant les châtiments sacrés à son dessein meurtrier. Au sein d’un décor baroque, inspiré du music-hall des années 30, il érige un temple en sa demeure, accompagné d’une assistante gracile et d’automates musiciens. Mélomane en diable, il compose à l’orgue un cérémonial funèbre, un appel ténébreux à son amour perdu, consumé par le souvenir et la haine. Ce décalage audacieux, entre romantisme éperdu et horreur vindicative, nourri de dérision, fonde toute la puissance séduisante de ce cher Abominable Dr Phibes.

 
Dans le rôle du savant fou, Vincent Price livre l’une de ses performances les plus caustiques, au gré de manigances morbides d’une inventivité incongrue. Les victimes sont sacrifiées de manière sadique, avec la complicité d’insectes (sauterelles, abeilles) ou de mammifères (chauves-souris, rats). D’autres fois, le Dr Phibes applique lui-même ses sévices, vides de sang par transfusion, masques de grenouille mortels, ou congélation à -50 degrés dans une voiture piégée. Défiguré et devenu muet à la suite d’un accident, toute son émotion passe par sa physionomie : un visage pétrifié de douleur romantique, empreint d’une revanche implacable. Sa silhouette, théâtrale et spectrale, renvoie aux figures mythiques du cinéma gothique : l’Homme au masque de cire, le Fantôme de l’Opéra…


Et voici le point d’orgue : une séquence qui, quarante ans avant Saw, en anticipe le sadisme méthodique. Spoiler : un médecin doit sauver son propre fils lors d’une opération d’urgence ! Mais chut, n'en disons pas plus face à cette tension maximale mêlée de suspense acide et de cruauté savoureuse. 


"Le masque et la plaie".  
Formidablement corrosif dans son humour noir british, précurseur du torture porn, L’Abominable Dr Phibes demeure un chef-d’œuvre immuable, aussi frais et vigoureux qu’à sa sortie. Magnifiquement interprété par un Vincent Price aussi patibulaire qu’endeuillé, traversé par la romance et la rancune, le film brille par sa narration débridée et son esthétisme baroque flamboyant. Un canular funeste aux allures d'opéra gothique, où l'amour et la mort se donnent la main sous les rires grinçants des ténèbres.

*Bruno

RécompensePrix du Meilleur Acteur pour Vincent Price au festival du film de Catalogne en 1971.

Un grand merci à Aaronpolson.net
17.05.12. 
10.03.24. 6èx. Vost




2 commentaires: