mercredi 5 novembre 2014

LA HORDE SAUVAGE (The Wild Bunch)

                                           
                                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site levafilmworks.com

de Sam Peckinpah. 1969. U.S.A. 2h25. Avec William Holden, Ernest Borgnine, Robert Ryan, Edmond O'Brien, Warren Oates, Jaime Sanchez, Ben Johnson, Emilio Fernandez.

Sortie salles France: 17 Octobre 1969. U.S: 18 Juin 1969

FILMOGRAPHIE: Sam Peckinpah est un scénariste et réalisateur américain, né le 21 Février 1925, décédé le 28 Décembre 1984. 1961: New Mexico, 1962: Coups de feu dans la Sierra. 1965: Major Dundee. 1969: La Horde Sauvage. 1970: Un Nommé Cable Hogue. 1971: Les Chiens de Paille. 1972: Junior Bonner. Guet Apens. 1973: Pat Garrett et Billy le Kid. 1974: Apportez moi la tête d'Alfredo Garcia. 1975: Tueur d'Elite. 1977: Croix de Fer. 1978: Le Convoi. 1983: Osterman Week-end.


« L'enfant est Dieu et le Diable à la fois, et en lui se trouvent mêlées la cruauté et une extrême bonté. Il suffit que les enfants soient témoins de certaines choses pour qu'ils deviennent très vite des adultes, des êtres aussi vicieux, aussi méchants que nous. Tout un système de morale, d'éducation nous empêche de regarder en face un certain nombre de vérités, par exemple qu'il existe déjà chez l'enfant tout ce côté sombre de l'homme. »
Sam Peckinpah


Western mythique vilipendé par la critique dès sa sortie pour l'intolérance de sa violence tranchée, La Horde Sauvage gagna pourtant au fil des décennies un statut de chef-d'oeuvre légendaire. C'est dire si le film de Peckinpah était à contre courant des conventions classiques établies par le western lyrique de John Ford ou celui plus "héroïque" de John Wayne afin de mettre ici en exergue une forme de violence baroque appuyée par des effets de ralentis chorégraphiques. C'est également la réponse ricaine pour tenter d'émuler l'âpreté du western spaghetti, Sam Peckinpah décidant de surenchérir dans la bestialité avec un carnage final d'une intensité rigoureuse toujours aussi acérée aujourd'hui. Magnifiquement mis en scène dans la modernité de son montage véloce, la Horde Sauvage est le témoignage de la traîtrise, de l'avilissement, du chaos, du désordre, faute d'un monde miné par la pauvreté des exclus (les villageois mexicains) et gangrené par la dictature de conflits guerriers. La plupart des personnages étant ici caractérisés par des chasseurs de primes vindicatifs, des bandits autonomes ou des terroristes belliqueux assoiffés d'alcool, de cruauté et de pouvoir. 


Dans cette peinture nihiliste de la nature humaine, le prélude l'anticipe déjà avec ce groupe de bambins mesquins batifolant autour de scorpions pour les regarder se faire dévorer par des milliers de fourmis. Métaphore sur notre instinct pervers et meurtrier dont l'enfant influant se réapproprie naturellement du comportement destructeur des adultes, le film nous achemine lentement vers le baroud d'honneur d'une bande de malfrats délibérés à se sacrifier car épuisés de survivre dans un monde qu'ils ne comprennent plus. A travers leur équipée homérique redoublant d'audaces, de bravoure et de dangerosité, telle cette attaque coordonnée autour d'un convoi ferroviaire, Sam Peckinpah évoque leur anachronisme, leur sentiment intime d'être dépassé par leur univers qu'ils ne reconnaissent plus depuis la révolution technique. A l'instar de la première apparition d'un véhicule sur roue que des mexicains exposent fièrement aux badauds pour dévoiler le progrès industriel. Au fil du cheminement marginal de ces anti-héros sclérosés, le désespoir et l'amertume les rattrapent un peu plus, quand bien même l'humanisme va les rappeler à la raison de la tolérance lorsqu'ils se résignent d'épargner de ses souffrances un de leur camarade torturé par la troupe du général Mapache ! S'ensuit alors leur dernière offensive suicidaire d'aller provoquer par les armes ces centaines de belligérants et de mettre un terme à leur funèbre existence (tels des fantômes errants !) en commun accord, le spectateur éprouvant une inattendue empathie pour leurs ultimes sursauts de bravoure et de loyauté !


D'une brutalité toujours inégalée pour le genre, La Horde Sauvage illustre de manière poisseuse une diatribe sur l'instinct foncièrement mauvais de l'être humain tout en énonçant une réflexion édifiante sur le venin de la violence. Magnifié par la prestance burinée de comédiens inscrits dans une camaraderie marginale, ce chemin de croix reste une épreuve de force d'une intensité éprouvante dans l'expédition pessimiste de ses hors-la-loi livrés à la solitude et la désillusion.  

Bruno Matéï
3èx

« J'ai fait ce film parce que j'étais très en colère contre toute une mythologie hollywoodienne, contre une certaine manière de présenter les hors-la-loi, les criminels, contre un romantisme de la violence [...]. C'est un film sur la mauvaise conscience de l'Amérique.(...) La Horde sauvage est simplement ce qui arrive lorsque des tueurs vont au Mexique. L'étonnant est que vous ressentez une perte immense quand ces tueurs atteignent la dernière ligne droite. »
Sam Peckinpah

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