mercredi 4 mars 2015

The Voices. Prix du Public, Prix du Jury, Gerardmer 2015.

                                                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site comingsoon.net

de Marjane Satrapi. 2014. U.S.A./Allemagne. 1h47. Avec Ryan Reynolds, Gemma Arterton, Anna Kendrick, Jacki Weaver, Ella Smith, Paul Chahidi, Stanley Townsend.

Sortie salles France: 11 Mars 2015. U.S: 6 Février 2015

Récompenses: Prix du Nouveau Genre, l'Etrange Festival, 2014
Prix du Public, l'Etrange Festival, 2014
Prix du Public, Gerardmer 2015
Prix du Jury, Gérardmer 2015

FILMOGRAPHIE: Marjane Satrapi est une réalisatrice française d'origine iranienne et auteur de bande dessinée, née le 22 Novembre 1969 à Rasht, Iran.
2007: Persepolis. 2011: Poulet aux prunes. 2013: La Bande des Jotas. 2014: The Voices.

"Le fait d’être seul dans ce monde est à la source de toutes nos souffrances."

Révélée par Persepolis, Marjane Satrapi avait déçu une partie du public avec ses deux films suivants, Poulet aux Prunes et La Bande des Jotas. La voilà aujourd’hui régénérée, intensément inspirée pour mettre en scène le cas pathologique d’un serial killer dialoguant avec ses animaux familiers. The Voices surgit comme un ovni au vitriol, fusion toxique entre comédie romantique acidulée et horreur décomplexée, éclaboussée d’un gore cru dès le premier meurtre. Récompensé à l’Étrange Festival et à Gérardmer, ce film stylisé n’a pas volé ses prix : il ose une originalité insolente pour esquisser le portrait d’un être désaxé, enfermé depuis l’enfance dans la solitude et les séquelles d’une maltraitance que quelques flash-back viendront éclairer, jusqu’à l’inéluctable passage à l’acte.


En choisissant d’empoisonner la comédie par l’horreur, Satrapi expose avec une audace ludique la poésie macabre tapie dans l’introspection d’un maniaque infantile, Jerry Hickfang, incapable d’assumer sa psychose. Son isolement le pousse à dialoguer avec son chat et son chien, doubles incarnés de sa conscience fracturée : le Bien d’un côté, le Mal de l’autre. Déchiré entre ces deux voix, Jerry s’efforce de retenir l’ombre pour laisser vivre la lumière. Ryan Reynolds, fragile et habité, porte le film dans la peau d’un homme partagé entre amour impossible et désir de rédemption, hanté par les murmures contradictoires de la raison et de la démence. Satrapi enferme son intimité dans un quotidien saturé de malaise, où l’odeur des cadavres enfouis finit par envahir l’air. Oscillant entre tendresse et angoisse, le récit atteint parfois une crudité pathétique - notamment quand Jerry converse avec les têtes de ses victimes. Ce mélange trouble de douceur et de monstruosité nourrit un grand malaise d’autant plus poignant et inconfortable que le personnage, derrière son allure de garçon timide et vulnérable, continue d’attirer notre empathie même lorsque plane l’ombre de sa prochaine exaction.

Comédie horrifique étranglée par une atmosphère glauque et volontairement ubuesque, The Voices provoque une profonde gêne morale constante, lente descente aux enfers vers la psychose. Il en résulte un objet atypique, inventif et d’une étrangeté obsédante, où Ryan Reynolds impose une présence aussi déchirante qu’ambiguë. Farce corrosive et douloureusement dérangeante, le film ne laisse jamais indemne dans sa brutalité tranchée de nous extraire de notre zone de confort. Jusqu'au générique sciemment primesautier ! 

— le cinéphile du cœur noir

17.08.25. 2èx. Vostf

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