jeudi 22 mai 2014

L'EPREUVE DE FORCE (The Gauntlet)

                                                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Clint Eastwood. 1977. U.S.A. 1h49. Avec Clint Eastwood, Sondra Locke, Pat Hingle, William Prince, Bill McKinney, Michael Cavanaugh.

Sortie salles France: 5 Avril 1978. US: 21 Décembre 1977

FILMOGRAPHIE: Clint Eastwood est un acteur, réalisateur, compositeur et producteur américain, né le 31 Mai 1930 à San Francisco, dans l'Etat de Californie.
1971: Un Frisson dans la Nuit. 1973: L'Homme des Hautes Plaines. 1973: Breezy. 1975: La Sanction. 1976: Josey Wales, Hors la Loi. 1977: L'Epreuve de Force. 1980: Bronco Billy. 1982: Firefox, l'arme absolue. 1982: Honkytonk Man. 1983: Sudden Impact. 1985: Pale Rider. 1986: Le Maître de Guerre. 1988: Bird. 1990: Chasseur Blanc, Coeur Noir. 1990: Le Relève. 1992: Impitoyable. 1993: Un  Monde Parfait. 1995: Sur la route de Madison. 1997: Les Pleins Pouvoirs. 1997: Minuit dans le jardin du bien et du mal. 1999: Jugé Coupable. 2000: Space Cowboys. 2002: Créance de sang. 2003: Mystic River. 2004: Million Dollar Baby. 2006: Mémoires de nos pères. 2006: Lettres d'Iwo Jima. 2008: L'Echange. 2008: Gran Torino. 2009: Invictus. 2010: Au-delà. 2011: J. Edgar. 2014: Jersey Boys. 2015: American Sniper.


Alors que les trois premiers volet de l'Inspecteur Harry (Harry le salopard pour les intimes !) viennent de triompher sur les écrans et révéler une nouvelle icône héroïque, Clint Eastwood casse son image de flicard expéditif avec l'Epreuve de Force. Chargé par son supérieur d'accompagner une jeune prostituée faisant office de témoin lors d'un procès, l'inspecteur Ben Schockley doit se confronter à la corruption policière et la mafia pour l'empêcher d'accéder au tribunal. C'est le début d'une longue course-poursuite que notre duo va devoir sillonner à travers les routes bucoliques de l'Arizona.


Modèle du film d'action réputé pour son fameux canardage final faisant figure d'anthologie (8000 munitions sont déchargées sur la carrosserie d'un autocar blindé !), l'acteur investit cette fois-ci la double fonction d'acteur et de réalisateur parmi l'entremise de sa compagne d'alors, Sondra Locke. A eux deux, ils forment un tandem des plus obtus dans leur discorde sexiste, sachant qu'ici une jeune prostituée ne va avoir de cesse de tenir tête au machisme d'un flic alcoolique et violent. C'est donc ici un policier à contre-emploi que nous taille Clint Eastwood afin de mettre en exergue son initiation courageuse pour se prouver qu'il n'est pas un raté comme sa compagne et ses supérieurs le laissent sous-entendre. Grâce au caractère bien trempé de cette catin d'apparence vulgaire, mais oh combien perspicace et entreprenante, il va pouvoir se remettre en question et se rétablir une confiance en envisageant une mission périlleuse. A travers l'étude de caractère de ce couple en apprentissage, Clint Eastwood illustre également leur ascension amoureuse par l'intermédiaire de leur confiance et leur cohésion mais aussi leur bravoure impartie à contrecarrer la police et la mafia durant leur périple. Impeccablement construit, le scénario alterne donc moments intimistes et action explosive dans une verve de réparties cocasses que n'aurait pas renié Tarantino ! Quand à l'épisode final alloué au baroud-d'honneur, il fait office de grand moment de cinéma lorsque le couple tente de pénétrer dans l'enceinte de la ville à l'aide d'un bus customisé pour défier les barrages policiers ! Ultra spectaculaire dans ses fusillades incessantes assénées au mastodonte, d'une intensité inouïe dans son impact apocalyptique et sa rigueur du montage, cette ultime épreuve de force nous laisse le souffle coupé !


Jouissif et endiablé dans son aventure périlleuse, cocasse mais aussi parfois violent (la scène de viol ne prête pas à plaisanter !)l'Epreuve de Force reste une référence du genre en terme d'esbroufe et une peinture passionnante sur l'évolution humaine de ces personnages. Clint Eastwood accordant autant d'intérêt à retranscrire le superbe portrait d'un couple en quête de légitimité et d'égalité des sexes.  

Bruno Matéï
3èx

mercredi 21 mai 2014

PSYCHOSE 2 (Psycho 2)

                                                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site projectdeadpost.com

de Richard Franklin. 1983. U.S.A. 1h53. Avec Anthony Perkins, Meg Tilly, Vera Miles, Robert Loggia, Dennis Franz, Hugh Gillin.

Sortie salles France: 20 Juillet 1983. U.S: 3 Juin 1983

FILMOGRAPHIE: Richard Franklin est réalisateur et producteur australien, né le 15 Juillet 1948 à Melbourne (Australie), décédé le 11 Juillet 2007.
1972: Belinda. 1973: Loveland. 1975: The True Story of Eskimi Nell. 1976: Fantasm. 1978: Patrick. 1981: Déviation Mortelle. 1983: Psychose 2. 1984: Cloak and dagger. 1986: Link. 1991: FX 2, effets très spéciaux. 1994: Un Agent très spécial (télé-film). 1995: Hotel Sorrento. 1996: Brillliant Lies. 1997: One way Ticket (Télé-film). 1999: Le monde perdu de Sir Arthur Conan Doyle: la découverte (télé-film). 2003: Visitors.


Confectionner une suite 22 ans après une pièce fondatrice de l'épouvante était aussi risqué qu'inutile tant le modèle d'Hitchcock se suffisait à lui même. Une gageure suicidaire que Richard Franklin (habile faiseur beaucoup trop méconnu !) relève pourtant avec adresse dans la construction d'un scénario machiavélique peu avare en coups de théâtre. 22 ans après avoir été interné, Norman Bates ressort libre de l'asile psychiatrique car aujourd'hui considéré comme saint d'esprit. Après avoir trouvé un petit boulot de serveur dans un snack, il décide de reprendre la direction du motel et reloge à la maison de sa mère. Alors que la clientèle se fait discrète, il décide de venir en aide auprès d'une jeune fille sans-logis et l'invite à l'héberger dans sa propriété. Mais d'étranges évènements ne vont pas tarder à bousculer la tranquillité de Norman !


Thriller à suspense et slasher en vogue se télescopent dans Psychose 2, série B d'apparence éculée pour son premier acte mais louablement retorse quand à la tournure des évènements à venir. Alors que d'étranges appels téléphoniques ébranlent la fragilité de Norman et qu'un nouveau meurtre vient d'être perpétré, sa schizophrénie semble reprendre l'avantage parmi la hantise de sa mère ! Avec l'aimable soutien d'une jeune serveuse (Meg Tilly retransmet sobrement douceur et tendresse auprès du désarroi de Norman), il se réconforte tant bien que mal auprès de son amitié afin de pouvoir refréner ses anciennes pulsions meurtrières. En jouant sur l'ascension psychotique de Norman et sur l'autre éventualité d'un mystérieux meurtrier, Richard Franklin insuffle dans sa première partie un suspense assez routinier jusqu'à ce qu'un rebondissement ne vienne relancer l'intrigue. A partir d'une idée de conspiration, le réalisateur réussit à nous convaincre de cette révélation tout en exploitant savamment rebondissements et coups de théâtre (le final s'avère rondement palpitant dans son lot de situations alarmistes et cruelles où les protagonistes sont sévèrement châtiés). Avec dérision macabre (le pauvre Norman est décidément victime de sa malédiction familiale quand bien même l'épilogue nous provoque un rire nerveux !) et un vrai sens du suspense quand à débusquer l'identité du coupable, Psychose 2 réussit à contenir l'intérêt dans une tension en crescendo aux quiproquos sardoniques (victime et meurtrier vont s'inverser les rôles !). Qui plus est, l'attachement que l'on accorde au duo Norman Bates / Mary Loomis nous permet de nous impliquer dans leur intimité avec empathie. D'ailleurs, la superbe mélodie de Jerry Goldsmith renforce le côté fragile de leur complicité en demi-teinte (Mary est aussi attendrie qu'effrayée pour guérir de ses névroses Norman !). Quand au mode opératoire du slasher, et sans doute pour contenter la nouvelle génération, une certaine violence graphique est imposée à deux meurtres particulièrement acerbes dans l'effet gore recherché (tel ce long couteau planté en pleine bouche d'une victime !).


Si Psychose 2 laissait craindre une suite au rabais uniquement vouée à renflouer les caisses, c'était sans compter sur le talent d'un artisan de série B pour confectionner un solide scénario chargé d'ironie macabre et de savoureux clins d'oeil (à l'instar de l'aimable participation de Vera Miles !). Campé avec sincérité par un Anthony Perkins toujours inquiétant et susceptible (alors qu'à la base, il ne souhaitait pas rempiler la combinaison du tueur !) et le charme timoré de Meg Tilly, cette séquelle réussit honorablement à éviter la redite sans esprit de cynisme.  

La Chronique de Psychosehttp://brunomatei.blogspot.fr/2015/06/psychose.html

                         Psychose 3: http://brunomatei.blogspot.fr/2016/08/psychose-3.html

Dédicace à Gérald Shub-Niggurath
Bruno Matéï
5èx



                                              

mardi 20 mai 2014

Link. Prix Spécial du Jury, Avoriaz 86.

                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site backtothemovieposters.blogspot.com

de Richard Franlin. 1986. Angleterre. 1h46 (2h05 version longue). Avec Elisabeth Shue, Terence Stamp, Kevin Lloyd, Steven Garnett, David O'Hara, Joe Belcher.

Sortie salles France: 5 Mars 1986

FILMOGRAPHIE: Richard Franklin est réalisateur et producteur australien, né le 15 Juillet 1948 à Melbourne (Australie), décédé le 11 Juillet 2007. 1972: Belinda. 1973: Loveland. 1975: The True Story of Eskimi Nell. 1976: Fantasm. 1978: Patrick. 1981: Déviation Mortelle. 1983: Psychose 2. 1984: Cloak and dagger. 1986: Link. 1991: FX 2, effets très spéciaux. 1994: Un Agent très spécial (télé-film). 1995: Hotel Sorrento. 1996: Brillliant Lies. 1997: One way Ticket (Télé-film). 1999: Le monde perdu de Sir Arthur Conan Doyle: la découverte (télé-film). 2003: Visitors.


Hit vidéo des années 80 déjà réputé par son Prix Spécial du Jury à Avoriaz, Link emprunte la thématique du singe tueur sous le moule de la série B. A juste titre, car ce slasher simiesque rondement mené ne démérite pas de par son originalité et l'efficacité d'une mise en scène aussi nerveuse qu'inventive. Le pitch: Une étudiante en zoologie est engagée comme stagiaire au sein de la villa du professeur Phillip. A l'arrivée, elle fait la connaissance de deux chimpanzés et de l'orang-outang, Link, faisant office de majordome. Après avoir passé une première journée houleuse parmi l'autorité acariâtre de son propriétaire, Jane Chase se retrouve isolée dans sa demeure en son absence inexpliquée. Toujours plus inquiète, elle finit par se rendre à l'évidence qu'un incident a intenté à la vie du professeur et doit se confronter à l'hostilité toujours plus insolente de Link. Divertissement intelligent dénonçant l'exploitation de l'homme sur le primate à des fins scientifiques (ce dernier pourra-il un jour transcender l'intelligence de l'homme ?), Link renouvelle les codes du slasher et du survival avec une vitalité inspirée. De par la vigueur d'une réalisation virtuose multipliant travellings aériens et exploitant à merveille les recoins du huis-clos, par la construction d'une dramaturgie toujours plus oppressante et par l'interprétation spontanée de la débutante Elisabeth Shue épaulé d'un orang-outang aussi ambigu qu'inquiétant.


Par conséquent, la grande réussite de ce jeu du chat et de la souris intenté entre une jeune fille et un singe émane inévitablement du jeu étonnamment crédible de ce dernier. Link, orang-outang en pleine ascension de maturité, décidant de se rebeller et de se venger de l'autorité de son maître après avoir décelé qu'il était voué au sacrifice. Mais la manière subtile dont Richard Franklin inculque le jeu de la comédie auprès de l'animal s'avère véritablement troublante si bien que ce dernier véhicule une présence particulièrement ombrageuse auprès de son regard sournois et de son comportement autonome livré à la provocation (il est accoutré d'un costard et fume le cigare afin de mieux dévoiler sa suprématie !). Retranchée dans la grande propriété, Jane Chase devra donc user de stratagème et de persévérance afin de se défendre contre son autorité meurtrière. L'intrigue habilement structurée distillant de prime abord un climat d'inquiétude lattent lorsque l'héroïne doit démystifier l'absence prolongée du professeur et assurer le maintien de l'ordre parmi l'insolence des trois primates. Mais c'est après avoir compris le caractère frondeur et nuisible de Link qu'un jeu perfide de domination s'installera entre les deux adversaires, quand bien même quelques invités surprises feront les frais de leur soudaine intrusion. L'action s'avérant ensuite toujours plus effrénée, criminelle et intense du fait de l'agressivité toujours plus véloce de l'animal envers l'étranger (avec une course poursuite anthologique entre Link et le duo de survivants !).


Conçu sur le caractère palpitant du survival multipliant sans répit péripéties et chausse-trappes après nous avoir habilement caractérisé la relation des personnages scientifiques, Link adopte la franchise du divertissement avec efficacité, originalité et intelligence. Son caractère irrésistiblement ludique étant notamment scandé du score de Jerry Goldmisth privilégiant les accents fantaisistes afin d'ironiser sur la prédominance du tueur simiesque. Avec une ultime image en suspens en guise d'épilogue sardonique.

RécompensePrix Spécial du Jury, Avoriaz 1986

*Eric Binford
27.01.22. 5èx. Version Longue, vostfr



lundi 19 mai 2014

Le Dernier Testament / Testament

   Photo empruntée sur Google, appartenant au site t411.me

de Lynne Littman. 1983. U.S.A. 1h28. Avec Jane Alexander, William Devane, Rossie Harris, Roxana Zal, Lukas Haas, Philip Anglim, Lilia Skala.

Sortie salles France: 13 Juin 1984. U.S: Novembre 1983

FILMOGRAPHIE: Lynne Littman est une réalisatrice, scénariste et productrice, née le 26 Juin 1941 à New-York, USA. 1973: In the Matter of kenneth. 1980: Once a Daughter. 1983: Le Dernier Testament. 1999: Freak City (télé-film). 1999: Having our say: the delanys sister's 100 years (télé-film).


Sorti la même année que Le Jour d'Après de manière autrement confidentielle, Le dernier Testament prend le contre-pied du trauma post-apo de Nicholas Meyer pour décrire les effets collatéraux d'une bombe nucléaire sur la population civile. Si bien qu'ici, point de catastrophe spectaculaire et de visions morbides de victimes décharnées sous les effets radioactifs, Lynne Littman optant la sobriété afin de mettre en exergue la fragilité humaine de sa tragédie. Ainsi, dans une petite banlieue de San Francisco, les habitants sont soudainement avertis d'un message télévisuel leur indiquant que des engins nucléaires viennent d'exploser sur leur territoire. Une mère de famille, dont l'époux vient de s'absenter, tente de préserver ses enfants quand bien même le nombre de victimes commence à progresser. Inédit en Dvd (tout du moins à ce jour du 01.06.23), Le Dernier Testament est une modeste production aussi méconnue que l'identité de sa réalisatrice mais qui s'avère pourtant digne d'intérêt de par sa puissance dramatique littéralement intolérable. Car en privilégiant à tous prix la force de suggestion au mépris de l'esbroufe,  Lynne Littman dénonce les effets dévastateurs de la bombe nucléaire avec une pudeur émotive forçant le respect. 


Si bien qu'ici point de pathos pour nous bouleverser d'une situation aussi catastrophiste (bien que cette bourgade de San Francisco n'eut jamais été directement touchée par une explosion !) mais une retenue à imposer un sentiment de désespoir inscrit dans la constance, la décence, lé résilience au sein de l'unité familiale. Par conséquent, ce qui intéresse surtout l'auteur, c'est le cheminement courageux d'une mère de famille pour préserver la vie de ses trois enfants avec son refus de s'y morfondre lorsque ses proches sont voués à l'inévitable. De par son destin galvaudé, la réalisatrice brosse un superbe portrait maternel où accablement et lutte pour l'espoir ne cessent de s'entrechoquer à l'aide d'une dimension humaine davantage difficilement supportable. Car rendue garante depuis l'absence professionnelle de son mari, Carol tente de relever tous les défis moraux pour survivre après les effets secondaires de la radiation. Ainsi, en jouant la carte de l'intimisme la plus prude et laconique, Lynne Littman nous fait pénétrer dans la loyauté de cette famille parmi la responsabilité infantile car y accordant une belle place pour leur solidarité de dernier ressort. Qui plus est, ce qu'il y a d'inévitablement bouleversant, implacable, puis déchirant à travers ce chemin de croix tragique, c'est d'observer en toute impuissance le calvaire psychologique d'une mère toujours plus accablée par la mort de ses progénitures. Et de compter sur le souvenir, la foi (après l'avoir dénigré), la filiation, le soutien, et surtout la rigueur mentale afin d'y tolérer coûte que coûte cet inépuisable fardeau en dépit de l'idée défaitiste de tentative de suicide.


A la fois Bouleversant, déchirant et traumatisant par sa dureté rubigineuse, son refus de concession et sa cruauté irréversible; éprouvant par son climat (subtilement) moribond sous l'impulsion d'un acting remarquable de dignité (Jane Alexander force l'admiration à travers son épreuve de force interminable au point de nous arracher les larmes de délivrance); Le Dernier Testament est un douloureux réquisitoire contre l'holocauste nucléaire inscrit dans une pudeur humaine à fleur de peau. Une oeuvre foncièrement sensible et fragile dédiée au sens de la famille à redécouvrir fissa afin de témoigner de son exceptionnelle rigueur émotionnelle au gré d'une narration programmée (sciemment prévisible) allant droit à l'essentiel. Si bien que son pouvoir dramatique en crescendo demeure aujourd'hui rigoureusement intact.

*Bruno
4èx vostf

jeudi 15 mai 2014

PONTYPOOL

                                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Brice McDonald. 2008. Canada. 1h35. Avec Stephen McHattie, Lisa Houle, Georgina Reilly, Harant Alianak, Rick Roberts, Daniel Fathers.

Sortie salles France (l'Etrange Festival): 5 Septembre 2010. Canada: 6 Septembre 2008 (Festival de Toronto).

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Bruce McDonald est un réalisateur, producteur, acteur, scénariste et monteur canadien né le 28 Mai 1959 à Kingston, dans l'Ontario, Canada.
1989: Roadkill. 1996: Hard Core Logo. 1997: Platinum (télé-film). 2007: The Tracey Fragments. 2008: Pontypool. 2010: Ma Babysitter est un vampire.


Inédit en salles, en dehors de sa sélection dans certains festivals, Pontypool est donc passé discrètement par la case Dtv parmi l'entremise d'un bouche à oreille plutôt élogieux ! A partir du concept en vogue du film d'Infectés (et/ou de Zombies, on ne sait plus trop ce qu'il en est !), cette série B de facture visuelle très "Carpenter" (format scope, unité de lieu et de temps, comédiens hyper photogéniques) est un ovni d'une audace inouïe dans sa manière d'aborder le thème éculé. Au sein d'une station de radio, l'animateur Grant Mazzie et ses deux standardistes diffusent leur programme traditionnel quand l'un de leur collaborateur parti en reportage décrit par téléphone un évènement des plus improbables ! Une horde de patients ont encerclé le cabinet de leur médecin et se comportent comme des déments atteints de cannibalisme ! C'est le début d'une nuit de cauchemar que nos animateurs vont de tenter de déjouer à l'aide de leur propre dialecte ! Amateurs de bizarreries saugrenues imprégnées d'ironie, préparez vous à suivre une expérience hors du commun dans ce huis-clos anxiogène où la menace externe s'avère aussi singulière qu'incompréhensible. Du moins, c'est ce que laisse penser la première partie du film, non exempt de bavardages un peu rébarbatifs afin de distiller une ambiance d'inquiétude latente.


Imaginez le contexte aussi grotesque qu'invraisemblable ! Un nouveau virus d'origine inconnue s'empare de l'esprit des citadins par l'entremise du dialecte oral ! Je m'explique : dès que vous prononcez certains mots spécifiques durant vos conversations (prioritairement les plus affectueux), une menace invisible s'infiltre en vous pour prendre possession de votre cerveau et vous plonger dans une folie meurtrière incontrôlée ! Subitement atteint de démence, et répétant incessamment le mot contaminé, vous devenez une sorte de zombie gesticulant à répétition nombre de divagations, et vous vous empressez d'écouter les paroles de vos voisins afin de vous transmettre le germe ! Réfugiés dans une station de radio, nos trois héros vont donc tenter de se prémunir contre cette menace en évitant de bavasser entre eux, quand bien même, dehors, une foule de quidams enragés commencent à encercler leur station ! Face à cette situation cauchemardesque et apocalyptique (dehors, les incidents en masse se multiplient !), ils vont peu à peu se laisser gagner par la paranoïa et s'efforcer de se réfugier dans le mutisme ! Alors que l'une des standardistes était préalablement infectée, ils vont également s'employer à déchiffrer un remède pour s'y protéger et par la même occasion désinfecter la population ! Réussir à retranscrire une situation improbable dans le domaine du crédible, c'est ce qu'à réussi à entreprendre son réalisateur avec l'alibi de la satire et de la complicité de solides comédiens. Avec l'efficacité du pouvoir de suggestion, Bruce McDonald réussit notamment à distiller une ambiance d'étrangeté toujours plus insaisissable et un climat d'angoisse subtilement diffus afin de faire plonger le spectateur dans l'aberration ! La poésie, l'oxymore et le sens des mots, leur incohérence et effet de contradiction nous plongeant toujours plus dans une situation de psychose !


Parlez vous français ?
Avec pas mal d'ironie et nombre d'idées aussi retorses que débridées, Pontypool ressemble à s'y méprendre à un épisode long format de la 4è dimension. Indubitablement, il ne plaira pas à tous, l'action et le gore s'avérant quasiment absents et son rythme plutôt languissant. Mais la manière atypique dont le cinéaste aborde son sujet, l'effet de surprise inopiné qui en découle et surtout sa crédibilité qu'il réussit finalement à cristalliser redorent la symbolique du film culte ! Une expérience hors-norme faisant office de farce sarcastique et qui ne peut laisser indifférent quelque soit l'opinion encourue ! 

Bruno Matéï
2èx

mercredi 14 mai 2014

THE LOST

                                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site nerdalors.fr

de Chris Sivertson. 2005. U.S.A. 1h59. Avec Marc Senter, Shay Astar, Alex Frost, Megan Henning, Ed Lauter, Robin Sydney, Michael Bowen, Dee Wallace-Stone.

Sortie salles U.S: 18 Mars 2008. Sortie Dvd France: 4 Mars 2009

FILMOGRAPHIE: Chris Sivertson est un réalisateur, scénariste et producteur américain.
2001: All Cheerleaders Die (co-réalisateur). 2006: The Lost. 2006: The Best of Robbers. 2007: I know who killed me. 2011: Brawler. 2013: All Cheerleaders Die.


Premier long, premier coup de maître par l'auteur du méjugé I Know who killed me ! (les Razzie Awards s'en souviennent encore !). Inédit en salles chez nous, The Lost est le genre de péloche sortie de nulle part (bien que tirée d'un roman de Jack Ketchum et produit par Lucky McKee !), vous laissant en état de collapse sitôt le générique écoulé ! Un concentré de violence et d'adrénaline que Chris Sivertson maîtrise avec dynamisme dans sa mise en scène expérimentale exploitant notamment l'architecture d'appartements au design moderne (teintes rouges criardes et noir profond contrastent avec le psyché névrosé du tueur). Autant dire que le réal est plutôt inspiré à fignoler une bande d'ultra-violence méchamment sardonique dans son concept jusqu'au-boutiste à dépeindre le comportement d'un marginal sans vergogne. Il faut dire que ce portrait sulfureux est largement privilégié par la présence magnétique de Marc Senter. Affublé de vêtements ténébreux et maquillé de noir sous les yeux, l'acteur impose une présence new-wave exubérante et véhicule une palette d'émotions contradictoires face à la gente féminine, car alternant accalmies de tendresse et accès de démence ! Le soir d'un feu de camp, Ray Pye et un couple d'amis (des ados paumés trop influençables !) abordent près d'un étang deux jeunes inconnues. Il décide de s'en débarrasser en les assassinant d'un coup de fusil. Quatre ans plus tard, Ray et ses complices restent en liberté car n'ayant pas été incriminés, mais un inspecteur sur le qui-vive commence à suspecter le comportement effronté du jeune leader.  


C'est une descente aux enfers que nous convie Chris Sivertson à travers le portrait d'un sociopathe rongé d'égotisme et de jalousie obsessionnelle envers les femmes. Phallocrate indécrottable, junkie à la petite semaine, ses seules occupations tournent autour du sexe, de la drogue et de l'alcool. Outre sa flânerie quotidienne, sa convoitise principale est d'asservir les minettes insouciantes en accumulant les conquêtes jusqu'au jour où l'une d'elles décide de lui tenir tête afin de se rebeller ! La peinture réaliste que le réalisateur projette à travers une paisible banlieue ricaine est notamment hétérodoxe car elle dévoile une population politiquement incorrecte (à l'instar de la relation non assumée qu'un sexagénaire entretient avec une fille de 18 ans !) où la jeunesse inculte, en quête de coqueluche, est livrée à l'abandon. Dans l'art de conter son récit et une montée progressive de la tension, Chris Sivertson distille une ambiance malsaine d'autant plus vénéneuse du fait du comportement pervers de Ray Pye. Ses jeux de drague improvisés avec des potiches écervelés et surtout sa nouvelle aventure entamée avec une compagne versatile nous place dans une situation inconfortable, sachant que cette dernière voue une fascination morbide pour ce bad boy burné ! Et il aura fallu une contre-attaque féminine pour que ce dernier pète un plomb et se transforme en ange de la mort afin d'accomplir son dernier baroud d'honneur !


Orange Mécanique
Transgressif, malsain et hystérique, The Lost provoque remous et effroi face à l'autorité erratique d'un faux rebelle en pleine crise rancunière. La manière caustique dont Chris Sivertson brode son portrait est notamment privilégié par la vigueur d'un montage redoutablement percutant et l'interprétation hallucinée de Marc Senter (son personnage symbolise une bombe à retardement !). L'explosion de violence finale qui émane de la frustration du tueur risque sévèrement de vous ébranler la rétine car elle déploie la férocité gratuite d'un tempérament capricieux gagné par l'omnipotence. Une satire au vitriol en somme d'un rejeton criminel de nos sociétés modernes, traversée d'une BO rock endiablée !

Pour public averti !

Bruno Matéï
2èx

Le point de vue de Mathias Chaput:
Alors que l’on commençait à assister à une popperisation scénaristique de la part des métrages sortis outre Atlantique, « The Lost » arrive à point nommé et tombe à pic pour redorer le blason des productions « Mi underground – mi entertainment grand public ».
Ce qui frappera d’abord le spectateur, c’est la qualité de la mise en scène !
Des trouvailles incroyables tout le long du film, des comédiens impliqués comme rarement dans leurs rôles, une puissance émotionnelle et un jeu émotif décuplés de manière glaçante, on sent bien que rien n’a été laissé au hasard…
Le personnage principal de Ray surdimensionne l’aspect de dangerosité du psychopathe qu’il incarne, et le réalisateur dresse un portrait sans compromis ni fioritures d’une certaine Amérique, un peu à la manière de Wes Craven dans « The last house on the left » sorti trois décades auparavant, mais en beaucoup mieux et plus pervers !
Ici toutes les conventions et les codes précédemment instaurés volent complètement en éclat !
Un flic presque pédophile d’une soixantaine d’années qui couche avec une lycéenne à peine majeure, des jeunes désoeuvrés et totalement hors parcours, l’alcool, la cocaïne et la dépravation sont légions et ce, en permanence !
Des plans-séquences incroyables de maitrise technique, des travellings graciles et un déroulement scénaristique crescendo confèrent sans nul doute à faire se différencier « The Lost » des autres œuvres…
Il ne s’apparente à aucune autre mais se vit comme une expérience, non sans un certain malaise, certes, mais au final sans grandiloquence ni complaisance, et après tout ? N’est ce pas cela que l’on attend d’un film de ce genre ?
Quant aux vingt dernières minutes, je vous préviens tout de suite, ça déménage !
Pas un temps mort, pas une once de pitié, mais plutôt une approche de la psychopathie et de la pathologie d’un serial killer, magnifiée par des coups d’éclats abrupts dans un déchainement d’ultra violence !
LE film dont les Etats Unis avaient besoin pour « déflétrir » un style qui devenait exsangue et famélique…
Une petite bombe à visionner impérativement pour tout fan aguerri en la matière !
10/10
Dédicace à Pierre et Bruno

mardi 13 mai 2014

LA REINE MARGOT. Prix du Jury à Cannes, 1994

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de Patrice Chéreau. 1993. France/Allemagne/Italie. 2h38 (version intégrale). Avec Isabelle Adjani, Vincent Perez, Jean Hugues Anglade, Daniel Auteuil, Virna Lisi, Dominique Blanc, Pascal Gregory, Claudio Amendola, Miguel Bosé, Asia Argento, Julien Rassam, Jean-Claude Brialy, Jean-Philippe Ecoffey, Thomas Kretschmann, Bruno Todeschini, Emmanuel Salinger.

Sortie salles France: 11 Mai 1994

FILMOGRAPHIE: Patrice Chéreau est un réalisateur, scénariste, acteur, metteur en scène d'opéra et de théâtre français, né le 2 Novelmbre 1944 à Lézigné (Maine-et-Loire), décédé le 7 Octobre 2013 à Clichy (Hauts-de-Seine).
1974: La Chair de l'orchidée. 1978: Judith Therpauve. 1983: L'Homme Blessé. 1987: Hôtel de France. 1991: Contre l'oubli. 1994: La Reine Margot. 1998: Ceux qui m'aiment prendront le train. 2000: Intimité. 2003: Son Frère. 2005: Gabrielle. 2009: Persécution.


Deux millions de spectateurs en salles ! En redécouvrant le film, c'est à se demander comment une oeuvre historique aussi mortuaire ait pu rassembler autant de monde ? Car La Reine Margot fait office de pavé dans la mare dans notre paysage audiovisuel (il s'agit bien d'une oeuvre historico-horrifique !), d'où les critiques mitigées de l'époque, et en dépit de son Prix du Jury décerné à Cannes. Car il faut bien l'avouer, et avertir notamment un public non averti, La Reine Margot incombe au vertige, au malaise viscéral et sous-jacent, car l'oeuvre toute entière transpire le sang et les larmes dans un conflit de religions. Autour de cette reine volage adulée par les hommes, la mort règne par des complots politiques et trahisons compromis au sein même de sa famille.
1572. La guerre de religions entre catholiques et protestants fait rage. Afin de réconcilier les Français, Catherine de Médicis décide de marier sa fille, la catholique Marguerite de Valois, la "reine Margot", avec le protestant Henri de Navarre, le futur roi Henri IV. Au cours de la nuit de la Saint-Barthélemy, alors que le sang coule à flot dans les rues de Paris, la "reine Margot" sauve du massacre le seigneur de la Môle. Entre Margot la catholique et le protestant la Môle naît une passion qui fera basculer leurs destins.


Toute cette débauche sanglante au cours duquel Margot témoigne en impuissante lui permet de s'initier lentement à la tolérance et la compassion, elle qui n'accordait au préalable qu'intérêts pour sa personne et sa beauté. A travers ses conflits religieux incessants et sa passion amoureuse avec le protestant la Môle, Marguerite de France évolue brusquement dans un univers barbare plein de bruit et de fureur où mensonges et trahisons n'auront de cesse de lui nuire afin de provoquer la mort auprès des siens. C'est aussi le portrait d'une famille inscrite dans l'hypocrisie pour la soif de pouvoir que nous relate passionnément Patrice Chéreau, quand bien même les trois frères de Margot sont épris d'un amour incestueux. D'ailleurs, au sein de ces jeux de manigance et de raison d'état menés par sa propre mère, Charles IX en subira malencontreusement les frais lors d'un empoisonnement à l'arsenic restée dans toutes les mémoires. Avec réalisme, le réalisateur insiste sur la déchéance physique de la victime, l'homme suintant de sang car condamné à une lente agonie, et se résignant en dernier ressort à trouver réconfort dans les bras de sa soeur. Si Patrice Chéreau nous avait déjà préalablement impressionné lors du massacre de la Saint-Barthélémy en sublimant un climat de folie particulièrement baroque (choeurs religieux à l'appui !), l'empoisonnement de Charles IX nous impose un malaise aussi viscéral que vertigineux. Et d'enfoncer le clou de la poésie morbide et de la poisse familiale lors d'un final dépressif SPOILER !!! où Marguerite de Valois repartira esseulée en compagnie d'un macabre souvenir ! fin SPOILER


La mariée sanglante
Baroque et exubérant (à l'instar du jeu erratique de Jean-Hugues Anglade !), macabre et fétide, La Reine Margot fascine et répulse à la fois par son atmosphère funèbre prédominante et la présence iconique d'une Adjani entachée de sang. Sa distribution prestigieuse (dont moult figurants en costume dominicain), ses décors d'architecture flamboyante et sa mise en scène ambitieuse configurent un film malade inscrit dans la dégénérescence d'une affaire familiale. On pardonne donc facilement ses quelques longueurs et bavardages redondants (du moins dans la version de 2h38 !) et on préserve en mémoire le portrait sinistré d'une mariée sanglante repentie dans la prudence et la solitude. 

Récompenses: Prix du Jury, Cannes 1994
Prix d'Interprétation féminine: Virna Lisi.
César de la Meilleure Actrice: Isabelle Adjani.
César du Meilleur Second Rôle Masculin: Jean-Hugues Anglade
César du Meilleur Second Rôle Féminin: Virna Lisi
César de la Meilleure Photographie: Philippe Rousselot
César des Meilleurs Costumes: Moidele Bickel

Bruno Matéï
2èx