vendredi 8 avril 2022
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mercredi 6 avril 2022
Ca peut vous arriver demain / Death Game / The Seducers
Quand Knock Knock, d’Eli Roth, est sorti sur les écrans français en 2015, il a peu été fait mention (en tout cas en France) qu’il s’agissait d’un remake et d’ailleurs, ce n’est même spécifié sur la fiche Wikipédia consacrée au film. Pourtant, Knock Knock n’est pas basé sur une scénario original mais bien sur un film daté de 1977, baptisé, sans grande inspiration, Death Game. Le titre français, plus drôle, étant Ça peut vous arriver demain.
Son réalisateur n’est pas vraiment un grand amoureux et artisan du 7ème art. Peter Traynor était en effet vendeur en assurances professionnelles (auprès des médecins) avant d’être cinéaste et producteur, et il ne se décida à travailler dans l’industrie cinématographique que pour faire de l’argent, de son propre aveu. Il déclara en effet dans une interview donnée en 1973 : "Je sais qu’il y a beaucoup de gens dans le business du cinéma qui prétendent y travailler pour faire de l’art. Ce n’est pas mon cas. Je suis là pour faire de l’argent pour mes proches. Je ne sais pas qui est l’Art, mais je parie qu’il a horriblement faim."
Quand on veut faire de l’argent au cinéma à cette époque, les films d’exploitation à petit budget constituent un assez bon filon. Ils coûtent peu et avec un peu de chance, ils trouveront leur public dans les salles de cinéma (dont les fameux grindhouse), alors beaucoup plus nombreuses et fréquentées qu’aujourd’hui. Ça peut vous arriver demain est un bon exemple de ce type de films. Il n’a coûté que 150 000 dollars ; à titre de comparaison, le remake insipide de Roth en a coûté 10 millions…
La démarche vénale revendiquée de Traynor, et son amateurisme total (il ne connaît rien à la technique cinématographique), pourrait laisser croire que le film n’a absolument aucun intérêt. Or, étonnamment, c’est loin d’être le cas.
Sur le plan formel d’abord, Ça peut vous arriver demain tient la route. C’est sans doute, en grande partie, grâce au chef opérateur David Worth, qui contrairement à Traynor possède une certaine expérience sur le plan technique (trois ans plus tard, il travaillera pour Eastwood sur Bronco Billy). Il parvient ici, en usant de jeux d’éclairage et de couleurs, à créer un climat inquiétant, sexuel et étrange qui convient tout à fait au récit, et qui dépasse en intensité celui du remake, plus lisse et convenu. Quant aux comédiens, si on tient compte du fait qu’ils n’ont apparemment reçu que de très vagues indications de la part du metteur en scène, ils s’en sortent très honorablement. C’est en particulier les performances de Sondra Locke (qui fut la compagne d’Eastwood et tourna dans plusieurs de ses films, dont Bronco Billy justement, mais aussi Josey Wales, hors-la-loi et L’Épreuve de force) et de Colleen Camp qu’il faut saluer ; de toute évidence en roue libre, elles y vont à fond dans le registre de la démence, et cela donne des scènes efficaces et assez intenses.
Sur le fond, enfin, Ça peut vous arriver demain est loin d’être un banal home invasion. Si l’on s’en tient au message qui ouvre le film et à la toute dernière séquence (ridicule), on pourrait penser, selon un point de vue assez simpliste, que le malheureux George est un honnête père de famille victime de deux tentatrices dépravées, corrompues par la révolution sexuelle. Mais cela serait ignorer de multiples indices qui suggèrent une lecture plus subversive, selon laquelle ce même père de famille serait en fait l’incarnation d’une figure américaine hypocrite, revendiquant des valeurs qu’il bafoue à la première occasion. En d’autres termes, à travers lui, Agatha et Donna s’attaquent rageusement au symbole d’une autorité masculine et paternaliste qui, sous le verni, est plus vicieuse qu’il n’y parait.
La chanson de générique, Good Old Dad, dépeint d’ailleurs un père (à travers les mots de sa fille) faussement idéal, et sans doute un vrai pervers (il me donne une fessée quand j’agis mal, dit la chanteuse sur un ton enfantin ironique), tandis qu’Agatha et Donna font fréquemment référence, quoique de façon allusive, à un passé familial douloureux, marqué par un père absent ou abusif. Sous cet angle, Ça peut vous arriver demain est le procès d’un mâle coupable (et de tous ses semblables, y compris un spectateur dont le voyeurisme est régulièrement titillé dans le film), et non le calvaire d’un innocent ; d’ailleurs, l’orage que cadre fréquemment Traynor (sans grande finesse) dans la dernière partie du film souligne l’idée d’une forme de justice biblique.
Le critique cinéma John Kenneth Muir vit ainsi dans Death Game un thème féministe, que ne contesta pas, peut-être de façon opportuniste, son auteur ; on peut alors se demander pourquoi celui-ci fit-il le choix d’un dernier plan qui viendrait presque contredire cette interprétation. Mais peut-être ne faut-il pas chercher dans le travail de Traynor de cohérence excessive.
Quoiqu’il en soit, malgré des problèmes de rythme et un côté répétitif, Ça peut vous arriver demain est un grindhouse qui vaut le coup d’œil pour son climat de folie, ses comédiennes finalement assez convaincantes et surtout, sa critique d’une image familiale mensongère.
«Death Game» est un thriller de Peter S. Traynor sorti en 1977, avec la célèbre actrice et regrettée Sondra Locke. J’ai eu envie de voir ce film, car j’ai vu son remake réalisé par Eli Roth «Knock Knock» sorti en 2015. Les deux œuvres sont intéressantes à comparer, tant on n’en retient pas forcément les mêmes choses, ni les mêmes ressenties, malgré un scénario identique.
«Death Game» raconte la terrifiante histoire de Georges Manning (Seymour Cassel), honorable père de famille et homme d’affaire. Se retrouvant seul chez lui le jour de son anniversaire, deux jeunes fille, Agatha (Sondra Locke) et Donna (Colleen Camp) frappe à la porte. Trempées et perdues, elles demandent de l'aide à Georges. Après que les deux jeunes femmes eurent raison de sa fidélité, elles le menacent en lui faisant vivre un véritable calvaire. Sous des aspects de séduisantes jeunes filles, se cache la cruauté incarnée.
Chronique de BaronDuBis chez SENS CRITIQUE:
Une différence de taille avec la version d’Eli Roth: le fond. L’homme est montré ici comme une victime, rien n’indique une charge contre le patriarcat ou la famille traditionnelle, rien ne laisse présager d’une misandrie quelconque, la fin du film ne laisse aucun doute là-dessus. Le remake quant à lui, est clairement une charge contre l’image de l’homme blanc moyen et père d'une famille idéale. L’homme est à la fois objectivement la victime et dépeint comme un coupable. Le film - sous prétexte de comédie noire - cherche clairement à faire plaisir au spectateur en humiliant et culpabilisant l’homme, jusqu’à la scène finale, ce qui rend le tout un peu gênant étant donné la réalité des faits. Là ou «Knock Knock» nous dit «Regarde comment j’humilie le modèle américain», «Death Game» nous dit «Fait attention, les hommes sont faibles, plus que tu ne le crois, tu pourrais te faire piéger».
Dernier détail, le film débute en prétendant que cette histoire est vraie, évidemment, une affirmation invérifiable...
En conclusion, «Death Game» est de l’excellent cinéma bis américain des années 70, un vrai plaisir de voir Sondra Locke en femme tarée et cruelle, usant de ses charmes pour mieux punir ensuite. Une bonne surprise, étant donné la déception que j’avais eue avec version d’Eli Roth, sans saveur particulière. À voir pour les amateurs du genre !
7/10
Chronique de Dahlia issue du blog les Gloutons du Cinéma
Revenons donc à Ça peut vous arriver demain / Death Game : Avertissement en introduction : le film est basé sur des faits réels ! (Rien d'étonnant mais je n'ai point trouvé d'information à ce sujet). Là où je classerai Knock Knock dans la catégorie Thriller, ici, c'est plutôt le Home Invasion auquel je pense tout de suite. Là, où le film fait fort c'est la puissance de l'ambiance anxiogène ressenti. Deux jeunes femmes adorables, puis séductrices se transforment en véritable cauchemars. Cette montée angoissante parfaitement réussie, on la doit bien entendu à Peter S. Traynor, avec sa mise en scène, ses plans fascinants, ses couleurs psychédéliques,... Mais également et presque "surtout" à ses deux actrices : Sondra Locke (ex femme de Clint Eastwood qu'on a pu voir (entre autres) dans le meilleur Dirty Harry : Sudden Impact) et Colleen Camp (vu campant dix mille rôles secondaires de Police Academy, Le Jeu de la Mort à Die Hard 3...). Absolument terrifiantes, personnifiant magnifiquement bien la folie furieuse.
Ici, contrairement au remake, le bon père de famille est clairement "innocent", le but et la finalité sont ici, assez différents. On vous met d'ailleurs en garde en introduction que le mal peut frapper partout. Pas de vengeance particulière, juste de la "malchance" et de la chair faible (malgré le doute subsistant sur une lecture pas très saine)...
En bref, c'est pas une surprise et comme bon nombre de films, l'original surpasse de loin son remake. J'insiste sur une ambiance bien plus folle, anxiogène et même horrifique ! Angoisse et frustration assurées. A voir et revoir le 13 et 18 septembre à l'Etrange Festival !
-Dahlia- (5 Septembre 2022)
mardi 5 avril 2022
Un seul bras les tua tous / Dubei dao
lundi 4 avril 2022
Le Temps d'aimer et le Temps de mourir / A Time to Love and a Time to Die
Sortie salles France: 16 janvier 1959. U.S: 9 Juillet 1958.
FILMOGRAPHIE: Douglas Sirk, de son nom de naissance Hans Detlef Sierck, né le 26 avril 1897 à Hambourg (Allemagne) et mort le 14 janvier 1987 à Lugano (Suisse), est un réalisateur et scénariste allemand d'origine danoise.1935 : La Fille des marais. 1943 : Hitler's Madman. 1944 : L'Aveu. 1946 : Scandale à Paris. 1947 : Des filles disparaissent. 1948 : L'Homme aux lunettes d'écaille. 1951 : La Première Légion. 1951 : Tempête sur la colline. 1954 : Taza, fils de Cochise (Taza, Son of Cochise). 1954 : Le Secret magnifique. 1954 : Le Signe du païen. 1955 : Capitaine Mystère. 1955 : Tout ce que le ciel permet. 1956 : Demain est un autre jour. 1956 : Écrit sur du vent. 1957 : Les Ailes de l'espérance. 1957 : Les Amants de Salzbourg. 1958 : La Ronde de l'aube. 1958 : Le Temps d'aimer et le Temps de mourir. 1959 : Mirage de la vie.
On confond trop souvent ce qu'est l'essence d'un vrai mélo avec ses excès caricaturaux, ou, pire, avec ses versions outrageusement ratées. Revenir aux fondamentaux est pourtant simple: on retrouve dans ce Sirk la quintessence du genre, débarrassée de de ces aberrations.
Il y a deux aspects passionnants dans l'histoire de cette permission inespérée dont bénéficie un jeune soldat, en pleine débâcle de Russie, qui rencontre l'amour sur le théâtre des ruines encore fumantes de ses souvenirs d'enfance.
La façon parfaite dont se côtoient la romance et la terrible réalité de la guerre, d'abord. Deux dialogues résument, mieux que toute tentative d'analyse, ce mélange divinement dosé.
-Tu as vu l'étoile filante ? Tu as fait un vœu? demande Ernst à Elizabeth (jusque là, plein mélo archétypal, non ?)
-Oui ! (une pause) ... J'espère que ce n'est pas un bombardier.
Un peu plus tard c'est Elizabeth qui interpelle son jeune amant.
- regarde cet arbre qui a bourgeonné avant tous les autres, avant même l'arrivée du printemps ! N'est-ce pas merveilleux ?
- Je pense que c'est la chaleur de la cabane qui a brûlé à côté, qui a du perturber les bourgeons.
Autant dire qu'il n'y a bien qu'un spectateur doté de la mauvaise foi d'un supporter de foot pour ne voir qu'une simple histoire d'amour, au demeurant superbe, dans cet avant-dernier film du réalisateur allemand.
Car voilà l'autre particularité du film. Montrer la guerre du côté des perdants n'est pas chose si fréquente. Au delà d'un ou deux exemples célèbres, comme peut l'être un inoubliable croix de fer, il faut souvent aller du côté des cinémas allemands, japonais ou italiens, de la deuxième moitié du 20ème siècle, pour trouver des histoires de héros dont les actions glorieuses n'ont pas été légitimés par la bénédiction du bon dieu, qui est, comme chacun le sait, toujours du côté de ceux qui font prévaloir la justice et le bien.
Sirk est natif de Hambourg, mais son cinéma est ici américain, et la singularité et la complexité de son message brouille encore un peu plus l'apparence lisse des choses. Le printemps révèle la putrescence des cadavres, les soldats revenus de l'enfer se font traiter de planqués par les populations restées au pays, les repas aux chandelles se finissent au sous-sol sous une pluie de bombes, et les mécanismes de précipitation vers la défaite des futurs vaincus, en cercles vicieux concentriques, sont superbement étudiés.
Depuis le temps, vous devriez pourtant le savoir: les films ne sont pas vieux ou modernes. Ils ne sont pas en noir et blanc, muets, en couleurs ou parlants. Ils ne sont pas asiatiques, européens, africains ou américains. Ils ne sont pas longs ou courts. Ce ne sont pas des westerns, des polars, des mélos ou des péplums. Ils ne sont pas en 3D ou en animations. Les films sont juste intéressants ou non, ratés ou réussis, touchants ou plats. Bref, si vous êtes effrayés par le mélo, soyez rassurés: le temps d'aimer le temps de mourir fait tout simplement partie des (très) bons films.
8/10 guyness
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Critique publiée par Aurea le 26 juillet 2011 sur SENSCRITIQUE
Ce film est adapté du roman de Erich Maria Remarque : Le Temps de vivre et le temps de mourir, Douglas Sirk tenait vraiment à modifier le titre pour rendre encore plus indissociable l'amour et la mort, et l'on ne peut s'empêcher de penser au Prélude à la mort d'Yseult, de Wagner, l'un des plus beaux morceaux dédiés à l'amour éternel et impossible.
Certes il s'agit d'un film de guerre, mais il est filmé avec l'intensité et la beauté d'un mélodrame, l'histoire d'amour étant d'autant plus forte qu'elle se situe dans un décor en ruines, et si dénonciation du nazisme il y a, elle doit céder le pas à l'histoire d'amour entre ce jeune Allemand, Ernst, généreux et idéaliste, incarné par John Gavin, débutant à l'époque, et la touchante Elisabeth, extraordinaire Liselotte Pulver qui ferait fondre un iceberg tant son jeu est naturel et spontané!
Trois semaines de bonheur intense dans les ruines et la clandestinité pour ces deux amants : "seules les choses condamnées peuvent être si douloureusement tendres".
Un film magnifique dont la dernière scène, poignante, semble hantée par ce que le réalisateur imaginait être les dernières semaines de son fils, et qui pour nous reste inoubliable.
10/10 Aurea ·
samedi 2 avril 2022
Freaks Out
Sortie salles France: 30 Mars 2022
FILMOGRAPHIE: Gabriele Mainetti est un réalisateur, acteur, compositeur et producteur de cinéma italien, né le 7 novembre 1976 à Rome. 2015 : On l'appelle Jeeg Robot. 2022: Freaks Out.
Reconnu avec le savoureux On l'appelle Jeeg Robot découvert en 2015, l'italien Gabriele Mainetti remet le couvert avec un second film de super-héros aussi hétérodoxe et décalé. Si bien que les prods ricaines usuelles feraient bien mieux de s'en inspirer afin d'y dépoussiérer leurs convenances oh combien rébarbatives (et ce étalées sur plus de 2 décennies si j'ose dire) pour qui privilégie les oeuvres personnelles destinées à honorer le genre. Ainsi donc, beaucoup plus ambitieux qu'avec son excellent 1er essai, Gabriele Mainetti s'alloue ici d'un budget plus conséquent afin de rendre plus vrai que nature la triste période du 3è Reich vers la fin de la seconde guerre mondiale (l'action se situant en 1943). Pour ce faire, il jette son dévolu auprès d'un quatuor d'employés de cirque, des freaks ayant chacun des pouvoirs spécifiques surhumains afin de contenter le public ébaubi. Or, lors d'une représentation en bonne et due forme, un assaut de nazis intervient soudainement en semant morts et désolation. Sans chapiteau et démunis, nos héros accompagnés de leur mentor, Israel, tentent de fuir en Amérique afin de refaire leur vie. Mais un concours de circonstances malchanceuses les contraint à se séparer lorsque Israel embarqué de force dans un train, est envoyé dans un camp d'extermination parmi des juifs. Matilde, Fulvio, Cencio et Mario vont donc tout faire pour sauver leur doyen au moment de se réfugier dans un cirque nazi dirigé par Franz, pianiste à 6 doigts délibéré à exploiter les pouvoirs de ceux-ci afin de dominer le monde.
Un pitch simpliste mais oh combien efficace dans sa structure puisque constamment épique, inventif, belliqueux (préparez vous à un final apocalyptique !), drôle mais aussi dur et cruel, si bien que pour le spectateur non averti, Freaks Out pourrait choquer les plus jeunes par sa violence effrontée dénuée de concession. Gabriele Mainetti dosant avec autant d'audace que d'habileté les composantes du drame, de la tendresse, de la romance et de la cruauté au sein d'un contexte innommable d'épuration ethnique. Car si ce divertissement caustique parvient constamment à surprendre et à amuser, il ne manque pas de brio pour contredire nos sentiments partagés entre rire, joie et larmes. Mais outre son ambiance baroque émaillée de poésie et de féerie que l'on pensait révolues (à la croisée du cinéma de Del Toro et De la Iglesia - en songeant surtout à Ballada Triste -), Freaks Out ne serait pas aussi stimulant sans la caractérisation humaine de ses interprètes aux gueules ordinaires si j'ose dire. Tant et si bien qu'à travers son vibrant plaidoyer pour le droit à la différence, Gabriele Mainetti nous fait aimer ces êtres décomplexés par leur solidarité fraternelle à la fois fragile, incertaine et facétieuse. Les acteurs méconnus chez nous demeurant naturellement attachants sans se laisser déborder par une quelconque outrance gestuelle ou expressive.
*Bruno Matéï
Ci-joint la chronique de On l'appelle Jeeg Robot: http://brunomatei.blogspot.fr/…/on-lappelle-jeeg-robot-prix…
jeudi 31 mars 2022
Impitoyable /Unforgiven. Oscar du Meilleur Film, 93.
Sortie salles France: 9 Septembre 1992. U.S: 7 Août 1992.
FILMOGRAPHIE: Clint Eastwood est un acteur, réalisateur, compositeur et producteur américain, né le 31 Mai 1930 à San Francisco, dans l'Etat de Californie. 1971: Un Frisson dans la Nuit. 1973: L'Homme des Hautes Plaines. 1973: Breezy. 1975: La Sanction. 1976: Josey Wales, Hors la Loi. 1977: L'Epreuve de Force. 1980: Bronco Billy. 1982: Firefox, l'arme absolue. 1982: Honkytonk Man. 1983: Sudden Impact. 1985: Pale Rider. 1986: Le Maître de Guerre. 1988: Bird. 1990: Chasseur Blanc, Coeur Noir. 1990: Le Relève. 1992: Impitoyable. 1993: Un Monde Parfait. 1995: Sur la route de Madison. 1997: Les Pleins Pouvoirs. 1997: Minuit dans le jardin du bien et du mal. 1999: Jugé Coupable. 2000: Space Cowboys. 2002: Créance de sang. 2003: Mystic River. 2004: Million Dollar Baby. 2006: Mémoires de nos pères. 2006: Lettres d'Iwo Jima. 2008: L'Echange. 2008: Gran Torino. 2009: Invictus. 2010: Au-delà. 2011: J. Edgar. 2014: Jersey Boys. 2015: American Sniper. 2016: Sully. 2018 Le 15 h 17 pour Paris. 2018: La Mule. 2019: Le Cas Richard Jewell Richard Jewell. 2021: Cry Macho.
Pour ce faire, il décide de renouer avec son meilleur ami afro Little Bill Daggett après avoir accepté sa transaction avec un jeune étranger zélé, le Kid. Mais faute de leur résurgence criminelle de dernier ressort, le trio infortuné entamera un voyage au bout de l'enfer lors d'un concours de circonstances à la fois morbides et tragiques. D'une intensité dramatique que l'on ne voit pas venir, tant Eastwood, réalisateur, maîtrise à la perfection sa mise en scène studieuse réfractaire à la vulgarisation d'une violence aussi sournoise que bestiale, Impitoyable se vit et se subit tel un uppercut dans l'estomac sous l'impulsion d'une fragilité humaine névralgique. La grande qualité du film découlant de la fine caractérisation de ses personnages en proie à des accès de violence préjudiciables. Tant auprès du Kid endossant le cowboy affirmé avec une maladresse pathétique, de Little Bill fatigué par cette violence contagieuse que son acolyte réanime soudainement, que de William Munny constamment hanté par la mort de son épouse mais aujourd'hui contraint de renouer avec ses vices (l'alcool, la violence) en guise de gain mais aussi de vendetta. Clint Eastwood nous relatant au gré d'une dimension humaine aussi fouillée que chirurgicale l'une des plus rudes réflexions sur le poison de la violence (les conséquences irréversibles qu'elle finit par entrainer en contaminant celui qui l'emploie ainsi que ses proches pour des enjeux d'ego, pécuniaires ou de vengeance). Et ce traité ici sans complaisance et avec une lucidité exemplaire. Tant et si bien que celui qui ose ôter la vie d'un être humain au cours de sa vie demeure à jamais avili par son acte impitoyable sans jamais pouvoir se le pardonner. Eastwood recourant notamment en filigrane durant tout le récit au manifeste contre la maltraitance des femmes exploitées ici à la prostitution mais en proie au désir d'émancipation à travers leur cri d'alarme d'y subir le machisme le plus brutal et couard.
Box Office France: 793 304 entrées
mercredi 30 mars 2022
Massacre at central High
Sortie salles France: 11 Janvier 1978 (int - 18 ans).
FILMOGRAPHIE: René Daalder est un réalisateur, producteur, éditeur, responsable d'effets visuels, compositeur de musique et scénariste américain né le 3 Mars 1944 à Texel, Noord-Holland, Netherlands, décédé le 31 Décembre 2019 en Californie. 1997: Hysteria. 1997 Habitat. 1985 Supertramp: Brother Where You Bound (Music Video). 1976 Les baskets se déchaînent. 1969 De blanke slavin.
On s'immerge donc dans l'action bas de plafond avec une curiosité amusée permanente mêlée de fascination macabre. Le réalisateur recourant par ailleurs à une certaine inventivité dans les stratégies criminelles confectionnées à l'artisanale par un amateur éclairé. Bougrement ludique donc, en zieutant en intermittence les poitrines dénudées de quelques actrices de seconde zone se prélassant avec leurs amants sur la plage ou sous une tente, Massacre at central high est quasi indescriptible dans son savant dosage d'humour très noir, de romance volage, de suspense oppressant (son final explosif durant le bal de promotion !) et de règlements de compte décérébrés tous azimuts. Sans compter l'ambiguïté de certains personnages, à l'instar de la petite amie de Marc lui avouant qu'elle faillit copuler quelques heures plus tôt avec l'étranger David que le spectateur reluqua en mode voyeuriste dans la séquence antécédente ! (Nos 2 amants s'élançant spontanément sur la plage dans leur plus simple appareil). Mais alors que la vengeance méthodique se clôture à mi-parcours de l'intrigue à travers des séquences-chocs plutôt malsaines car dénuées de concession, v'la ti pas que le cinéaste relance l'action improbable lorsque le vengeur décide ensuite de s'en prendre aux copycat du lycée depuis la disparition morbide du quatuor d'harceleurs. Dès lors, une foule d'étudiants subitement zélés s'empressent de se la jouer violemment rebelle afin d'y diriger tout le lycée. S'ensuit une multitude de séquences semi-cocasses, semi-inquiétantes, semi-cintrées alors que les exactions meurtrières s'avèrent toujours plus nombreuses, impromptues (effets de surprise assurés) et sans pitié.
mardi 29 mars 2022
La Rage du Tigre / Xin du bi dao
Sortie salles France: 28 Juin 1973.U.S: 7 Février 1971
FILMOGRAPHIE: Chang Cheh (張徹 en chinois, Zhāng Chè en hànyǔ pīnyīn) est un réalisateur chinois hongkongais, né en 1923 à Hangzhou en Chine et mort le 22 juin 2002 à Hong Kong. 1966 : Le Trio magnifique. 1967 : Un seul bras les tua tous. 1968 : Le Retour de l'hirondelle d'or. 1969 : The Singing Thief. 1969 : Le Bras de la Vengeance. 1969 : The Flying Dagger. 1969 : Le Sabreur solitaire. 1970 : Vengeance. 1970 : Les Treize Fils du Dragon d’Or. 1971 : La Rage du tigre. 1971 : Duel aux poings. 1971 : Duo Mortel. 1972 : Le Justicier de Shanghaï. 1972 : La Légende du lac. 1972 : Le Nouveau justicier de Shanghaï. 1973 : Frères de sang. 1974 : Ceinture noire contre kung-fu. 1974 : Les Cinq Maîtres de Shaolin. 1978: 5 Venins Mortels. 1982 : The Brave Archer and His Mate. 1984 : Shanghai 13. 1993 : Ninja in Ancient China.
Film mythique s'il en est que les vidéophiles des années 80 s'empressèrent de louer sous la bannière de René Chateau, La Rage du tigre est le 3è opus de la trilogie du sabreur manchot interprété en l'occurrence par David Chiang. Ou plus exactement le remake officieux de son 1er opus Un seul bras les tuas tous réalisé en 1967 du même signataire Chang Cheh comme le fut également sa séquelle réalisée 2 ans plus tard, Le bras de la vengeance. Ayant inspiré divers cinéastes parmi lesquels Tarantino pour Kill Bill et Georges Lucas pour sa trilogie Star Wars, La Rage du Tigre est un superbe film d'action célébré pour sa bataille dantesque érigée sur un pont. Et ce en plein décor naturel pour tenir lieu de souci de réalisme historique. Chang Cheh multipliant les affrontements barbares entre le sabreur et ses rivaux avec un art consommé de la chorégraphie épique. Proprement jubilatoire jusqu'au tournis !
Et ce tout en délocalisant en intermittence l'action au sein du manoir de Long depuis que Lei Li est affublé du sentiment de vengeance, Spoil ! faute de la mort de son ami Feng Chun-Chieh Fin du Spoil. L'intrigue étant bâtie sur l'abnégation de Lei Li à employer les arts martiaux depuis sa défaite avec le traitre du manoir, maître Long qui l'incita à se couper le bras pour mieux l'humilier. Or, accablé de honte et de déception, notamment pour la tare de son orgueil, Lei Li s'est réfugié dans une taverne en tant que serveur domestique incapable de se rebeller auprès de la provocation de chevaliers sans vergogne. Ainsi donc, en abordant les thématiques de l'amitié, de l'honneur, de l'humilité et de la vengeance, Chang Cheh compte sur la dramaturgie de ses profils héroïques vaincus (Lei Li et son comparse Feng Chun-Chieh) pour substantialiser l'intrigue plutôt prévisible il faut avouer. La justification de la vengeance (bicéphale) lui permettant de reprendre les armes et combattre au front, Spoil ! tant pour honorer la mort de son meilleur ami que pour punir le responsable de l'amputation de son bras. Fin du Spoil.
Très spectaculaire parmi la juste mesure de soumettre l'action à sa narration latente, La Rage du Tigre brille de 1000 feux sous l'impulsion de ses affrontements barbares perpétrés au sabre avec une intensité exponentielle. A l'instar de son ultime demi-heure jubilatoire s'autorisant tous les excès à l'aide d'une précision chirurgicale. On peut d'ailleurs relever en guise d'audace (nous sommes en 1971) et de trouvaille gorasse une hallucinante séquence morbide lorsqu'un corps en lévitation attaché par des cordes aux extrémités des poignées et des pieds se retrouve sectionné au sabre en deux parties. Outre l'impact de son action dévastatrice magnifiquement improbable comme seuls les hong-kongais ont le secret, il faut enfin louer la prestance sentencieuse de l'acteur David Chiang suscitant un humanisme à la fois accablé, noble et torturé en sabreur maudit peu à peu motivé par le désir de rébellion. Incontournable.
lundi 28 mars 2022
Le Rideau Déchiré / Torn Curtain
Sortie salles France: 16 Novembre 1966. U.S: 14 Juillet 1966
Voici un film d'Hitchcock très sous-estimé, voire même mésestimé, je trouve ça totalement injuste vu que le monde de l'espionnage avait déjà inspiré le Maître dans le passé, souvenons-nous de les 39 marches, Correspondant 17, Cinquième colonne, les Enchaînés et bien sûr le chef d'oeuvre qu'est la Mort aux trousses... bref Hitchcock a toujours su jouer avec le milieu de l'espionnage, et de mon côté j'aime particulièrement les ambiances de guerre froide, l'action qui se déroule en Allemagne de l'Est, dans une atmosphère grisaille et avec des personnages troubles, où la peur et l'angoisse sont liées.
On a tout ça dans le Rideau déchiré qui souffre depuis sa sortie d'une réputation moyenne on va dire, alimentée par la critique américaine qui trouvait le film banal et sans grand intérêt, il n'a d'ailleurs pas tellement marché au box-office, en dépit d'un duo de vedettes sur lequel Hitchcock comptait se garantir un succès ; en fait, il a déchanté de son choix et fut gêné par Paul Newman qui nullement impressionné par Hitchcock, a servi son jeu Actor's Studio dans une action et une intrigue qui n'en avait pas besoin. Malgré cette déconvenue et quelques autres menus désagréments, on ne peut pas dire que ce film est raté, faut arrêter de taper gratuitement sur un film parce que tout le monde le fait, moi je le trouve très correct, certes c'est bien moins achevé que la Mort aux trousses ou Psychose, mais le film témoigne une fois de plus du brio hitchcockien et de ses touches personnelles qui caractérisent tous ses films.
La perfection de son style et son habileté à mener un récit triomphent d'un scénario pas très fiable et assez embrouillé, Hitchcock est très inspiré avec les pays étrangers et les atmosphères troubles, et le plus drôle c'est que l'action est censée se passer à Berlin, alors que tout a été tourné sur les plateaux de Universal et en extérieurs dans une ferme californienne pour la scène du meurtre, dans un campus et un aéroport à Long Beach en Californie, un véritable exploit donc, seule la scène de l'autocar nécessita des transparences qui sont d'ailleurs trop visibles ; Hitchcock a révélé à Truffaut dans leurs entretiens qu'il était insatisfait de ce travail mais que le studio rognait sur le budget et que ses 2 vedettes lui avaient coûté si cher qu'il ne put faire retourner en Allemagne ces scènes de background par une équipe compétente.
Au final, Hitchcock plonge encore le spectateur dans une aventure dramatique pleine de suspense, d'humour noir, d'espionnage loin des clichés bondiens, et même d'horreur, avec l'une des 2 scènes les plus réussies : la mort de Gromek, qui trouve une mort terrible et dérisoire, et encore une fois, Hitchcock a confié à Truffaut qu'il a voulu montrer par cette scène de meurtre très longue combien il était difficile et pénible de tuer un homme, prenant ainsi le contrepied du cliché qui veut que dans ce type de films, un meurtre va très vite.
L'autre scène très hitchcockienne est celle de l'autocar qui est un magnifique modèle de suspense. D'autre part, le Maître toujours soucieux de la technique, a utilisé ici une photographie spéciale combinant lumière naturelle et filtres gris pour donner un ton plus "guerre froide" et plus austère. Malgré les caprices de Newman, on peut dire quand même que lui et Julie Andrews sont bien dirigés, et bien entourés par un casting homogène où se distinguent Lila Kedrova et David Opatoshu, tous deux habitués des films d'espionnage troubles. Pour moi, c'est donc un bon Hitchcock, efficace et rigoureux qu'il faut réhabiliter.
Ugly 7/10