Sortie salles France: 16 Novembre 1966. U.S: 14 Juillet 1966
Voici un film d'Hitchcock très sous-estimé, voire même mésestimé, je trouve ça totalement injuste vu que le monde de l'espionnage avait déjà inspiré le Maître dans le passé, souvenons-nous de les 39 marches, Correspondant 17, Cinquième colonne, les Enchaînés et bien sûr le chef d'oeuvre qu'est la Mort aux trousses... bref Hitchcock a toujours su jouer avec le milieu de l'espionnage, et de mon côté j'aime particulièrement les ambiances de guerre froide, l'action qui se déroule en Allemagne de l'Est, dans une atmosphère grisaille et avec des personnages troubles, où la peur et l'angoisse sont liées.
On a tout ça dans le Rideau déchiré qui souffre depuis sa sortie d'une réputation moyenne on va dire, alimentée par la critique américaine qui trouvait le film banal et sans grand intérêt, il n'a d'ailleurs pas tellement marché au box-office, en dépit d'un duo de vedettes sur lequel Hitchcock comptait se garantir un succès ; en fait, il a déchanté de son choix et fut gêné par Paul Newman qui nullement impressionné par Hitchcock, a servi son jeu Actor's Studio dans une action et une intrigue qui n'en avait pas besoin. Malgré cette déconvenue et quelques autres menus désagréments, on ne peut pas dire que ce film est raté, faut arrêter de taper gratuitement sur un film parce que tout le monde le fait, moi je le trouve très correct, certes c'est bien moins achevé que la Mort aux trousses ou Psychose, mais le film témoigne une fois de plus du brio hitchcockien et de ses touches personnelles qui caractérisent tous ses films.
La perfection de son style et son habileté à mener un récit triomphent d'un scénario pas très fiable et assez embrouillé, Hitchcock est très inspiré avec les pays étrangers et les atmosphères troubles, et le plus drôle c'est que l'action est censée se passer à Berlin, alors que tout a été tourné sur les plateaux de Universal et en extérieurs dans une ferme californienne pour la scène du meurtre, dans un campus et un aéroport à Long Beach en Californie, un véritable exploit donc, seule la scène de l'autocar nécessita des transparences qui sont d'ailleurs trop visibles ; Hitchcock a révélé à Truffaut dans leurs entretiens qu'il était insatisfait de ce travail mais que le studio rognait sur le budget et que ses 2 vedettes lui avaient coûté si cher qu'il ne put faire retourner en Allemagne ces scènes de background par une équipe compétente.
Au final, Hitchcock plonge encore le spectateur dans une aventure dramatique pleine de suspense, d'humour noir, d'espionnage loin des clichés bondiens, et même d'horreur, avec l'une des 2 scènes les plus réussies : la mort de Gromek, qui trouve une mort terrible et dérisoire, et encore une fois, Hitchcock a confié à Truffaut qu'il a voulu montrer par cette scène de meurtre très longue combien il était difficile et pénible de tuer un homme, prenant ainsi le contrepied du cliché qui veut que dans ce type de films, un meurtre va très vite.
L'autre scène très hitchcockienne est celle de l'autocar qui est un magnifique modèle de suspense. D'autre part, le Maître toujours soucieux de la technique, a utilisé ici une photographie spéciale combinant lumière naturelle et filtres gris pour donner un ton plus "guerre froide" et plus austère. Malgré les caprices de Newman, on peut dire quand même que lui et Julie Andrews sont bien dirigés, et bien entourés par un casting homogène où se distinguent Lila Kedrova et David Opatoshu, tous deux habitués des films d'espionnage troubles. Pour moi, c'est donc un bon Hitchcock, efficace et rigoureux qu'il faut réhabiliter.
Ugly 7/10
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