Sortie salles France: 16 janvier 1959. U.S: 9 Juillet 1958.
FILMOGRAPHIE: Douglas Sirk, de son nom de naissance Hans Detlef Sierck, né le 26 avril 1897 à Hambourg (Allemagne) et mort le 14 janvier 1987 à Lugano (Suisse), est un réalisateur et scénariste allemand d'origine danoise.1935 : La Fille des marais. 1943 : Hitler's Madman. 1944 : L'Aveu. 1946 : Scandale à Paris. 1947 : Des filles disparaissent. 1948 : L'Homme aux lunettes d'écaille. 1951 : La Première Légion. 1951 : Tempête sur la colline. 1954 : Taza, fils de Cochise (Taza, Son of Cochise). 1954 : Le Secret magnifique. 1954 : Le Signe du païen. 1955 : Capitaine Mystère. 1955 : Tout ce que le ciel permet. 1956 : Demain est un autre jour. 1956 : Écrit sur du vent. 1957 : Les Ailes de l'espérance. 1957 : Les Amants de Salzbourg. 1958 : La Ronde de l'aube. 1958 : Le Temps d'aimer et le Temps de mourir. 1959 : Mirage de la vie.
On confond trop souvent ce qu'est l'essence d'un vrai mélo avec ses excès caricaturaux, ou, pire, avec ses versions outrageusement ratées. Revenir aux fondamentaux est pourtant simple: on retrouve dans ce Sirk la quintessence du genre, débarrassée de de ces aberrations.
Il y a deux aspects passionnants dans l'histoire de cette permission inespérée dont bénéficie un jeune soldat, en pleine débâcle de Russie, qui rencontre l'amour sur le théâtre des ruines encore fumantes de ses souvenirs d'enfance.
La façon parfaite dont se côtoient la romance et la terrible réalité de la guerre, d'abord. Deux dialogues résument, mieux que toute tentative d'analyse, ce mélange divinement dosé.
-Tu as vu l'étoile filante ? Tu as fait un vœu? demande Ernst à Elizabeth (jusque là, plein mélo archétypal, non ?)
-Oui ! (une pause) ... J'espère que ce n'est pas un bombardier.
Un peu plus tard c'est Elizabeth qui interpelle son jeune amant.
- regarde cet arbre qui a bourgeonné avant tous les autres, avant même l'arrivée du printemps ! N'est-ce pas merveilleux ?
- Je pense que c'est la chaleur de la cabane qui a brûlé à côté, qui a du perturber les bourgeons.
Autant dire qu'il n'y a bien qu'un spectateur doté de la mauvaise foi d'un supporter de foot pour ne voir qu'une simple histoire d'amour, au demeurant superbe, dans cet avant-dernier film du réalisateur allemand.
Car voilà l'autre particularité du film. Montrer la guerre du côté des perdants n'est pas chose si fréquente. Au delà d'un ou deux exemples célèbres, comme peut l'être un inoubliable croix de fer, il faut souvent aller du côté des cinémas allemands, japonais ou italiens, de la deuxième moitié du 20ème siècle, pour trouver des histoires de héros dont les actions glorieuses n'ont pas été légitimés par la bénédiction du bon dieu, qui est, comme chacun le sait, toujours du côté de ceux qui font prévaloir la justice et le bien.
Sirk est natif de Hambourg, mais son cinéma est ici américain, et la singularité et la complexité de son message brouille encore un peu plus l'apparence lisse des choses. Le printemps révèle la putrescence des cadavres, les soldats revenus de l'enfer se font traiter de planqués par les populations restées au pays, les repas aux chandelles se finissent au sous-sol sous une pluie de bombes, et les mécanismes de précipitation vers la défaite des futurs vaincus, en cercles vicieux concentriques, sont superbement étudiés.
Depuis le temps, vous devriez pourtant le savoir: les films ne sont pas vieux ou modernes. Ils ne sont pas en noir et blanc, muets, en couleurs ou parlants. Ils ne sont pas asiatiques, européens, africains ou américains. Ils ne sont pas longs ou courts. Ce ne sont pas des westerns, des polars, des mélos ou des péplums. Ils ne sont pas en 3D ou en animations. Les films sont juste intéressants ou non, ratés ou réussis, touchants ou plats. Bref, si vous êtes effrayés par le mélo, soyez rassurés: le temps d'aimer le temps de mourir fait tout simplement partie des (très) bons films.
8/10 guyness
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Critique publiée par Aurea le 26 juillet 2011 sur SENSCRITIQUE
Ce film est adapté du roman de Erich Maria Remarque : Le Temps de vivre et le temps de mourir, Douglas Sirk tenait vraiment à modifier le titre pour rendre encore plus indissociable l'amour et la mort, et l'on ne peut s'empêcher de penser au Prélude à la mort d'Yseult, de Wagner, l'un des plus beaux morceaux dédiés à l'amour éternel et impossible.
Certes il s'agit d'un film de guerre, mais il est filmé avec l'intensité et la beauté d'un mélodrame, l'histoire d'amour étant d'autant plus forte qu'elle se situe dans un décor en ruines, et si dénonciation du nazisme il y a, elle doit céder le pas à l'histoire d'amour entre ce jeune Allemand, Ernst, généreux et idéaliste, incarné par John Gavin, débutant à l'époque, et la touchante Elisabeth, extraordinaire Liselotte Pulver qui ferait fondre un iceberg tant son jeu est naturel et spontané!
Trois semaines de bonheur intense dans les ruines et la clandestinité pour ces deux amants : "seules les choses condamnées peuvent être si douloureusement tendres".
Un film magnifique dont la dernière scène, poignante, semble hantée par ce que le réalisateur imaginait être les dernières semaines de son fils, et qui pour nous reste inoubliable.
10/10 Aurea ·
toutes guerres est sans pitié
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