lundi 12 mars 2012

Christine


de John Carpenter. 1983. U.S.A. 1h50. Avec Keith Gordon, John Stockwell, Alexandra Paul, Robert Prosky, Harry Dean Stanton, Christine Belford, Roberts Blossom, William Ostrander, David Spielberg.

Sortie salles France: 25 Janvier 1984. U.S: 9 Décembre 1983

FILMOGRAPHIE: John Howard Carpenter est un réalisateur, acteur, scénariste, monteur, compositeur et producteur de film américain né le 16 janvier 1948 à Carthage (État de New York, États-Unis). 1974 : Dark Star 1976 : Assaut 1978 : Halloween, la nuit des masques 1980 : Fog 1981 : New York 1997 1982 : The Thing 1983 : Christine 1984 : Starman 1986 : Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin 1987 : Prince des ténèbres 1988 : Invasion Los Angeles 1992 : Les Aventures d'un homme invisible 1995 : L'Antre de la folie 1995 : Le Village des damnés 1996 : Los Angeles 2013 1998 : Vampires 2001 : Ghosts of Mars 2010 : The Ward


"Laisse-moi te dire ce que je pense de l'amour Denis. L'amour à un appétit vorace. Il te bouffe tout. Les amis, la famille. Tout ce que ça bouffe, ça me sidère. Mais ce que je sais maintenant... C'est que si tu le nourris bien, ça peut devenir une belle chose. Et c'est ce qui nous arrive. Quand tu es sûr que quelqu'un croit en toi, tu peux tout faire. Faire tout ce dont tu as envie. Et si en plus tu crois toi-même en l'autre,... mon vieux... Alors attention le monde, personne ne pourra jamais t'arrêter, jamais !". 
 
"Fury amoureuse". 
Un an après l’échec public et critique de The Thing, John Carpenter adapte un roman de Stephen King : Christine. Une œuvre injustement – voire inexplicablement – reléguée au rang de pièce mineure dès sa sortie. Qu’on se le dise ! C’est pourtant une clef de voûte du fantastique moderne, une variation ensorcelante sur le thème du vampirisme, entre un adolescent introverti et sa Plymouth Fury d’un rouge immaculé : Christine.

Le pitch : Arnie, ado timide et gauche, peine à trouver sa place. Son meilleur ami Dennis tente de l'encourager à séduire la nouvelle du lycée, Leigh. Mais un après-midi, alors qu’ils roulent à travers une route bucolique, Arnie tombe sous le charme d’une vieille carcasse rouillée abandonnée dans le jardin d’un vieil homme. Il demande à Dennis de s’arrêter sur le bas-côté, puis décide sur un coup de tête de l’acheter pour 250 dollars. Une étrange relation amoureuse s’initie alors entre Christine et lui.


"Elle sentait bon la voiture neuve, sûrement la meilleur odeur au monde, à part une chatte peut être" 
Avec un postulat à deux doigts du ridicule, Carpenter réussit pourtant l’immense gageure de nous faire croire à l’histoire d’un adolescent vampirisé par une voiture. Porté par un style formel d’une grande élégance et par de jeunes interprètes étonnants de sincérité, Christine fascine d’emblée par son ton résolument fantasmatique – la voiture électrise littéralement chaque apparition – et son essence tragique : la déshumanisation d’Arnie. Carpenter signe ici une tragédie funèbre au pouvoir d’envoûtement indéfectible. L’histoire d’un amour fou entre un adolescent et une Plymouth Fury délabrée. Sous l’emprise de Christine, Arnie se métamorphose : revanchard, orgueilleux, égocentrique – prêt à dévorer quiconque se mettrait entre elle et lui. Désinhibé, il parvient même à séduire la plus belle fille du lycée. Mais Christine, d’une jalousie maladive, n’entend pas partager.
 

En maître-conteur, Carpenter donne chair aux personnages gravitant autour d’Arnie : Leigh, Dennis, les parents démunis... Tous assistent, impuissants, à la mue maléfique de ce garçon rongé par sa passion métallique. Si le récit bouleverse, c’est autant par ses accès de violence que par la sobriété désespérée de ceux qui le peuplent. Lorsque Christine, désossée, affronte le regard de son maître furibond, quelque chose d’étrangement poignant se joue. Dans cette fusion intime entre un garçon solitaire et sa voiture, on touche à l’obsession pure, à la folie amoureuse. Keith Gordon incarne un Arnie bouleversant de rage contenue, le regard illuminé par une ferveur malsaine.

Avec peu d’effets spéciaux, Carpenter livre pourtant des séquences inoubliables : la résurrection de Christine, reconstituée pièce par pièce dans l’obscurité d’un garage désert ; les poursuites nocturnes baignées d’une lumière surnaturelle ; ou cette atmosphère d’outre-monde qui imprègne les rues d’une bourgade américaine trop tranquille. Pour parachever cette ambiance de cauchemar doux, la bande-son composée avec Alan Howarth injecte une mélancolie vénéneuse à chaque plan – un électro funèbre qui tourne chez moi en boucle, chaque mois.


"Rouge passion, chrome sanglant".
Raconté avec une simplicité limpide, Christine n’en demeure pas moins un chef-d’œuvre maudit, d’une beauté baroque et d’une intensité émotionnelle à fleur de métal. À travers les métamorphoses de ses personnages, gagnés par la peur, le désarroi ou la cruauté ; à travers cette atmosphère irréelle, presque indicible ; et surtout à travers sa musique ensorcelante, le film de Carpenter transcende le genre fantastique. Fable sur le fétichisme, la jalousie, l’amour dévorant, Christine devient le portrait d’un vampire de tôle, se nourrissant des sentiments d’un adolescent désarmé. Magnétique, venimeuse, rutilante : Christine crève l’écran – et dans sa dernière course, on en viendrait presque à l’aimer.

* Bruno
12.03.12
6èx


2 commentaires:

  1. Mon Carpenter préféré. J'adore ce film. "Il roulait à tout berzingue , y avait plus rien qui comptait!!!!!!! Merci pour ton article bruno

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  2. Content de savoir que c'est ton film préféré, moi j'en suis fou amoureux alors qu'il est plutôt mésestimé dans la carrière du maître !

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