vendredi 23 mars 2012

Les Tueurs fous / Le Sexe de la Violence / Lonely Killers / Quando il pensiero diventa crimine.


de Boris Szulzinger. 1972. France/Belgique. 1h14. Avec Dominique Rollin, Roland Maden, Georges Aminel, Christian Barbier, Patricia Cornelis, Georges Aubert, Marc Audier, Marc De Georgi, Jean Droze, Daniel Dury, Franz Gouvy.

FILMOGRAPHIE: Boris Szulzinger est un réalisateur et producteur belge.
1969: Nathalie après l'amour (pseudo: Michael B. Sanders). 1972: Les tueurs fous. 1975: Tarzoon, la Honte de la jungle (co-réalisé avec Picha). 1980: Mama Dracula

 
"Bruxelles pour cimetière".
Boris Szulzinger serait resté un cinéaste belge méconnu s’il n’avait co-réalisé le film d’animation égrillard Tarzoon, la Honte de la jungle, d’autant que sa carrière ne compte que quatre longs-métrages. Ainsi, en 1972, sort dans l’indifférence générale une œuvre choc, glaçante de réalisme, retraçant un fait divers sordide : l’équipée meurtrière de deux malfrats dans la grisaille bruxelloise. Les Tueurs Fous, aussi connu sous le titre Le Sexe de la Violence, s’impose comme une petite bande déviante, méconnue, mais à découvrir d’urgence tant elle ausculte la dérive d’un tandem marginal englué dans sa médiocrité.

Le pitch : deux jeunes délinquants prennent les armes et abattent quiconque croise leur route. Dans une quête libertaire amorale, Dominique et Roland fuient leur ennui en commettant leurs sales besognes entre deux rencontres hasardeuses avec des citadins résignés.

Dans la lignée de portraits abrupts de serial killers tristement notoires, et filmé à la manière d’un reportage sec, Les Tueurs Fous retrace froidement le parcours sanglant de deux marginaux profondément esseulés, incapables d’assumer leur homosexualité. Le film débute sur les chapeaux de roue : meurtre gratuit, rire nerveux, poursuite en mobylette, puis exécution à la carabine — une scène d’une brutalité désarmante, qui annonce la couleur blafarde de cette errance meurtrière à travers les nuits pluvieuses de Bruxelles.

Sans morale ni remords, ils décident soudainement de tuer, au hasard, des anonymes croisés au détour d’un trottoir. Entre deux crimes, ils errent dans des bars gays où défilent des travestis, rançonnent les honnêtes gens, cherchent le contact d’un soir avec des paumés, ou tentent d’éveiller une fragile amitié avec un homosexuel mutique. 

"Deux âmes mortes sous la pluie". 
Ces deux âmes mortes, sans parenté ni attaches, n’ont d’autre lien au monde que leur propre reflet. Leur seul élan d’empathie ? Un chat infirme, trouvé dans une voiture volée. Ce petit être fragile, silencieux, devient l’unique témoin d’une tendresse fugace. À ce moment-là, face caméra, leurs visages s’ouvrent — regard d’enfants perdus, dans un monde où l’amour leur a été refusé. En fuite, enragés de solitude, Dominique et Roland exorcisent leur sexualité refoulée et leur vide existentiel par le meurtre, faute d’avoir pu grandir sous un toit aimant. 

 
"L’ombre d’un chat infirme".
Dérangeant, malsain, immergé dans l’humidité grise d’un automne sans fin, renforcé par le jeu brut, presque documentaire, de comédiens à la posture puérile, Les Tueurs Fous dresse un constat terrifiant sur la marginalité des laissés-pour-compte. Sans voyeurisme, sans complaisance, le film tire sa force de son ancrage psychologique, de sa tristesse poisseuse, de cette sidérante impression que n’importe quel individu rejeté pourrait, un jour, sombrer dans la folie la plus lâche.

Oubliez son homonyme racoleur, Le Sexe de la Violence. Découvrez, sans réserve, cette pépite belge noyée dans la désillusion, qui risque bien de vous hanter longtemps après digestion.

Dédicace à Video Party Massacre
23.03.12
Bruno


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