mardi 28 mai 2013

Phenomena

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site stuffpoint.com

de Dario Argento. 1985. Italie. 1h49. Avec Jennifer Connelly, Donald Pleasance, Daria Nicolodi, Patrick Bauchau, Dalila Di Lazzaro.

FILMOGRAPHIE: Dario Argento est un réalisateur et scénariste italien né le 7 septembre 1940, à Rome (Italie).
1969: l'Oiseau au plumage de Cristal, 1971: Le Chat à 9 queues, Quatre mouches de velours gris, 1973: 5 Jours à Milan, 1975: Les Frissons de l'Angoisse, 1977: Suspiria, 1980: Inferno, 1982: Ténèbres, 1985: Phenomena, 1987: Opera, 1990: 2 yeux Maléfiques, 1993: Trauma, 1996: Le Syndrome de Stendhal, 1998: Le Fantome de l'Opéra, 2001: Le Sang des Innocents,2004: Card Player, 2005: Aimez vous Hitchcock ?, 2005: Jennifer (épis Masters of Horror, sais 1), 2006: J'aurai leur peau (épis Masters of Horror, sais 2), 2006: Mother of Tears, 2009: Giallo, 2011: Dracula 3D.


 "Le cygne noir d’Argento : un poème d’insectes et de sang".
Dernière pièce maîtresse du maestro à ce jour, Phenomena est un voyage onirique au pays des songes, sous l’allégeance d’insectes mentors. Sous-estimé lors de sa sortie en 1985, notamment à cause de l’utilisation belliqueuse d’une bande-son parfois hard rock, ce trip féerique s’avère une clef de voûte du fantastique contemporain, transcendée par la virtuosité d’une mise en scène clipesque et par l’interprétation candide de la divine Jennifer Connelly. Du haut de ses quatorze ans, l’actrice néophyte (révélée un an plus tôt sous l’omnipotence de Leone dans Il était une fois en Amérique) parvient, par sa présence gracieuse, à véhiculer une aura trouble, à la mesure de son don surnaturel pour dialoguer avec les insectes. Si le scénario semblait, de prime abord, grotesque et éculé, Dario Argento réussit, avec une ambition d’auteur, à juxtaposer merveilleux et horreur sous l’entremise d’un giallo hybride. Imaginez une seconde qu’une simple mouche puisse débusquer la tanière d’un tueur misogyne, sous l’investigation d’une adolescente télépathe, somnambule de surcroît ! Sur le papier, l’idée prête à sourire, voire à railler. Pourtant, avec une ambition formelle déployant un florilège d’images fastueuses, le maestro élabore des séquences oniriques d’une poésie renversante, qui nous happent dans un trip merveilleux, semi-cauchemardesque (toutes les séquences expérimentales liées à l’hypnose de Jennifer !). 
 
 
Tant et si bien qu’Argento n’oublie jamais de conjuguer suspense intense (l'inoubliable prologue meurtrier au souffle macabre, l’embuscade de Jennifer dans la demeure du tueur puis sa traque vers le lac) et frissons sanglants, avec des meurtres stylisés, acérés — à l’instar de cette tête tranchée dévalant la pente d’une cascade vertigineuse !

Pour autant, Phenomena n’est pas une réussite parfaite, lestée de quelques incohérences narratives (l’inconscience de Jennifer, trop aisément embarquée dans une investigation criminelle sous les conseils d’un entomologiste infaillible, puis son insouciance à accepter l’hébergement d’une enseignante castratrice) et d’un jeu parfois caricatural chez certains seconds rôles (l’inspecteur de routine, transparent, et l’amie de Jennifer, maladroitement naïve). En dépit de ses failles — à l’image de cette musique hard rock, déstabilisante — cette œuvre charnelle ne cesse de nous envoûter par son élégance immaculée (photo limpide, baignée de néons azur et laiteux) et par son audace, presque surréelle, à nous révéler l’univers secret des insectes télépathes. Pour parachever le tout, impossible de passer sous silence la façon dont Argento transcende la beauté surnaturelle d’une nature vernale en clair-obscur (la Transylvanie suisse !), et le rôle majeur qu’il confère à l’impétuosité du vent, acteur invisible, modèle éthéré, souffle ensorcelant.
 

"Phenomena ou le chant d’une nature possédée".
D’une beauté lascive, presque olfactive, Phenomena est une féerie macabre, transfigurée par la candeur d’une adolescente mystique en symbiose avec le monde insecte. Scandée par l’éloquence chorale des mélodies de Simonetti, cette émeraude s’érige en poème naturaliste où l’œil et l’oreille du spectateur fusionnent en une conjonction extatique.

*Bruno
28.05.13. 4èx

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