de Richard Stanley. 1992. Afrique du Sud. 1h29. Avec Robert John Burke, Chelsea Field, Zakes Mokae, John Matshikiza, Rufus Swart, William Hootkins.
Sortie salles France: 17 Mars 1993
1990: Hardware. 1992: Le Souffle du Démon. 1996: l'Ile du Dr Moreau (remplacé par John Frankenheimer). 2011: The Theatre Bizarre (segment: The Mother of Toads).
Introduction: Je ne vois pas pourquoi les gens attendent d'une oeuvre d'art qu'elle veuille dire quelque chose alors qu'ils acceptent que leur vie à eux ne rime à rien. David Lynch
Il était une fois, à l'époque de la lumière rouge et du vent désertique, un homme comme nous. Jusqu'au jour où, par malheur, des ailes lui poussèrent. Et il s'envola comme un oiseau.
A l'instar de son monologue introductif, on ne peut mieux définir le terme culte à une oeuvre aussi atypique que Le Souffle du Démon ! Déjà responsable de l'étonnant Hardware, un ovni post-apo au rabais inspiré de Terminator et à la photogénie crépusculaire déjà bien prégnante, le second film du sud-africain Richard Stanley se rapproche cette fois de l'onirisme cher à la Forteresse Noire de Michael Mann. Par son climat irréel chargé ici de couleurs ocres et sa partition musicale envoûtante, par l'expérience sensitive que procure les images et par la nonchalance des personnages combattant difficilement les forces du Mal. Dans une petite contrée sud-africaine, un mystérieux tueur sévit en s'en prenant aux victimes damnées. Jusqu'au jour où il fraye sur son chemin une jeune femme en rupture sentimentale. Tandis qu'un homme s'est lancé à sa trace pour essayer de l'anéantir, les deux amants vont échanger une étrange relation.
Poétique, décousu, mystérieux, impénétrable, Le Souffle du Démon est conçu à la manière d'un rêve métaphysique dont le spectateur, perdu de ses repères, se sent irrésistiblement attiré. Par l'entremise de cette icône du Mal surgie de l'autre côté du miroir, Richard Stalney nous invite à une expérience spirituelle dénuée de logique. Au sein de ses plaines désertiques ou en amont de ce petit village enseveli par le sable, un démon à visage humain tente de s'approprier de la nature pour y laisser son empreinte par don surnaturel. Voué à tuer sans répit des quidams véreux afin de pouvoir transmuter et perdurer son itinéraire routier, Dust Devil (c'est ainsi qu'il se prénomme !) semble lui même la victime de son propre fardeau. Celui de se nourrir du mal des autres afin de pouvoir continuer de survivre au sein de notre au-delà terrestre ! Parmi ses ambitions diaboliques, une femme va devenir le fruit de son subterfuge avant qu'elle ne comprenne ses réelles motivations par l'entraide d'un chasseur de démon. A l'instar du bricolé Hardware, Richard Stanley renoue avec les mêmes failles pour son budget modeste et ses maladresses techniques, desservies ici par un montage sporadique partant dans tous les sens (du moins pour cette version cut d'1h24 !). Mais l'ambition du réalisateur bourrée de bonnes intentions et la sincérité de sa démarche de nous livrer un authentique film fantastique 1er degré honore finalement l'entreprise puisqu'il nous cristallise un trip ésotérique pour cette virée diabolique en compagnie d'un cowboy reptilien !
Entre western, fantastique et romance, Richard Stanley joue la carte de l'expérimental et de la métaphysique afin de nous plonger dans un rêve abscons irrésistiblement palpable. Par la beauté de ces images surnaturelles régies autour d'un désert solaire, par le charisme magnétique du démon à visage humain (on songe parfois au regard azur terriblement inquiétant de Rutger Hauer découvert dans Hitcher !) et par l'alchimie qui émane de son ambiance impénétrable, le Souffle du Démon est une expérience de cinéma, le chemin de croix d'un incube en quête de renaissance et d'amour !
Bruno Matéï
3èx
Le "final cut" sera bientôt dispo chez Humungus ;)
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