Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr
"The Babadook" de Jennifer Kent. 2014. Australie/Canada. 1h33. Avec Essie Davis, Noah Wiseman, Daniel Henshall, Hayley McElhinney.
Sortie salles France: 30 Juillet 2014. Australie: 22 Mai 2014
FILMOGRAPHIE: Jennifer Kent est une réalisatrice, scénariste, productrice et actrice américain. 2014: Mister Babadook. 2018: The Nightingale
Multi récompensé à Gérardmer (il repart avec 4 trophées) mais aussi ovationné au festival de Catalogne, de New-york et du Kansas City, Mister Babadook n'a pas volé ses prix tant sa génitrice, Jennifer Kent, est parvenu avec une rare intelligence à réactualiser l'horreur adulte sous le pivot d'un modèle de suggestion. A mi-chemin entre Répulsions et Shining, Mister Babadook possède à mon sens deux niveaux de lecture. Car derrière ce conte horrifique aux accents expressionnistes fortement influencés par le Cabinet du Dr Caligari (à ce titre l'incroyable travail sur la lumière et les couleurs désaturées s'avère remarquable de ciselure au sein de décors domestiques faussement rassurants), Jennifer Kent nous transcende un drame psychologique à la fois intense, terrifiant, dérangeant et cruel. Et ce à travers une métaphore sur l'épineuse acceptation du deuil de l'être aimé d'un point de vue aussi bien maternel qu'infantile. Nos deux héros surmenés car sévèrement molestés par un croquemitaine (irrationnel) faisant face à leur propre frayeur depuis leur fragilité de s'être confrontés au deuil inéquitable (le mari est décédé lors d'un accident de voiture au moment où celle-ci était acheminée à l'hôpital pour accoucher de leur fils).
Fort d'un climat anxiogène brillamment ossaturé autour de la psychose d'une veuve en proie à la schizophrénie, Mister Babadook provoque un malaise cérébral tangible à travers des visions horrifiques terriblement impressionnantes. La réalisatrice retardant au possible les apparitions du monstre par le principe de plans concis subtilement suggérés. Un parti-pris perfide afin de titiller notre fascination motivée par la curiosité de l'inconnu. Et pour accentuer ses effets dévastateurs d'une peur oppressante au sein d'une atmosphère d'insécurité davantage malsaine, on peut compter sur le hors-champ sonore strident et sur le jeu transi d'émoi d'Essie Davis résolument habitée par son rôle de mégère erratique depuis sa difficulté à extraire la bête qui sommeille en elle (toute l'intrigue n'étant qu'un combat interne contre elle-même à surpasser sa grave dépression). Alternant quelques moments de tendresse auprès de son rejeton avec des flambées de violence incontrôlées, Essie Davis nous suscite une frayeur primitive de par son intensité expressive jamais outrée. Quant à la performance de Noah Wiseman au visage étonnamment laiteux, il se fond dans le petit corps d'un enfant hyper actif avec une impudence bluffante de spontanéité afin de tenir tête à sa mère, et pour un si jeune âge.
Le cancer de l'affres du noir.
Modèle de mise en scène et de suggestion rappelant à l'ordre nos terreurs nocturnes issues de notre enfance (le fameux monstre du placard), Mister Babadook déstabilise en diable et incise nos nerfs avec un souci formaliste aussi bien consciencieux que géométrique. Fort de la complémentarité de comédiens criants de vérité démunie et d'une nouvelle icone monstrueuse qu'ils combattent pour autant avec pugnacité, Mister Babadook conjugue terreur et malaise avec une intensité vertigineuse en roue libre. Tant et si bien que le public le plus sensible aspire au fil des violents évènements une issue de secours à ce drame (du deuil) familial accablé par la solitude et le chagrin mais engagé à annihiler le démon tapi en chacun de nous.
Dédicace à Guylian Pinchard
* Bruno
Récompenses: Prix du jury, prix du jury jeune, prix du public et prix de la critique au Festival international du film fantastique de Gérardmer 2014.
Festival international du film de Catalogne 2014 : meilleure actrice pour Essie Davis
Kansas City Film Critics Circle Awards 2014 : meilleur film de science-fiction, d'horreur ou fantastique.
New York Film Critics Circle Awards 2014 : meilleur premier film pour Jennifer Kent
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