mardi 29 janvier 2019

L'Ecureuil Rouge. Prix spécial du Jury et de la Critique, Fantastic'Arts 94.

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"La ardilla roja" de Julio Medem. 1993. Espagne. 1h54. Avec Emma Suárez, Nancho Novo, María Barranco, Karra Elejalde, Carmelo Gómez.

Sortie salles France: 16 Février 1994. Espagne: 21 Avril 1993

FILMOGRAPHIEJulio Medem est un réalisateur et scénariste espagnol né à Saint-Sébastien le 21 octobre 1958. 1992 : Vacas. 1993 : L'Écureuil rouge. 1996 : Tierra. 1998 : Les Amants du cercle polaire. 2000 : Lucia et le Sexe. 2003 : La pelota vasca, la piel contra la piedra (documentaire). 2007 : Chaotique Ana. 2010 : Habitación en Roma. 2015 : Ma ma.


Synopsis: Au moment de tenter de se suicider à la suite d'une rupture sentimentale, Jota assiste à l'accident de moto d'une jeune fille sur la plage. Souffrante d'amnésie, celui-ci en profite pour se faire passer pour son petit ami. Au fil des jours, et grâce à leur désir et curiosité de se connaître mutuellement, ils décident de partir en camping le temps de quelques semaines de villégiature. C'est dans ce lieu solaire et paisible qu'ils sympathisent auprès d'un couple et de leurs enfants. Mais aussi énigmatique que rassurante, la jeune inconnue attise toujours plus la curiosité auprès de son l'entourage.

Ovni hispanique honteusement méconnu et oublié en dépit de ses pléthoriques récompenses tant méritées, l'Ecureuil Rouge constitue une oeuvre inclassable de par la forte personnalité du réalisateur Julio Medem résolument inspiré à dépeindre un jeu de pouvoir et de séduction entre les sexes opposés. Ce dernier manipulant l'oeil et l'esprit du spectateur avec la diabolique maîtrise des genres (comédie, romance, mystère, fantastique, érotisme s'entrechoquent), eu égard du ressort fantasmatique de l'intrigue sinueuse abordant les thèmes de l'amour passionnel, du mensonge et de la trahison parmi la singularité d'un surréalisme éthéré. Tant et si bien que le spectateur tente d'y démêler le vrai du faux avec une fascination quasi masochiste, et ce même si on finit par saisir le sens de cette trouble liaison nantie de sentiments équivoques. Sorte de jeu de pouvoir entre le machisme d'un prétendant affabulateur délibéré à conquérir une nouvelle partenaire beaucoup plus retorse qu'elle n'y parait.


D'ailleurs, à ce vénéneux jeu de séduction et de quête identitaire, on peut compter sur la force d'expression sémillante de Emma Suárez crevant l'écran à chacune de ses apparitions, aussi bien faussement innocentes qu'effrontées. Le film dégageant en permanence une érotisme sulfureux tantôt suggéré, tantôt explicite, notamment auprès de ses répliques salaces volontiers provocatrices. Il faut aussi avouer que les postures décalées ou excentriques des personnages (majeurs et secondaires) nous donnent le vertige à travers leur personnalité quelque peu bipolaire si j'ose dire. Notamment auprès de sa seconde partie un peu plus inquiétante, voire même haletante lors d'une course-poursuite sentimentale à récupérer la perle rare. Tant auprès des adultes plutôt accueillants et ironiquement naïfs, mais pour autant un brin suspicieux quant aux véritables profils du couple étranger, que des enfants fureteurs plutôt fascinés par la beauté suave de Lisa. D'ailleurs, à travers une gestuelle provocatrice exercée par un ado en émoi lubrique, Julio Medem ose dépeindre une brève séquence pédo plutôt couillue mais jamais triviale ou putassière lorsque Elisa tente sèchement de le recadrer face à son père médusé ! Mais la grande force de l'Ecureuil Rouge réside avant tout à travers l'intensité de son ambiance indicible étrangement magnétique et vaporeuse. L'"onirisme" le plus imperméable semblant planer sur les épaules de nos protagonistes désorientés à l'instar d'un songe dépourvu de raison.


Psychose des sentiments
Histoire d'amour fébrile imprimée par le talent atypique d'un franc-tireur hétérodoxe, l'Ecureuil Rouge traite des rapports conflictuels hommes/femmes au sein d'un perpétuel jeu d'autorité à la fois badin et sarcastique. Baignant dans une atmosphère hypnotique de surréalisme baroque et de sensualité torride, l'Ecureuil Rouge parvient avec un rare brio formaliste à éveiller nos sens pour nous immerger dans un conte romantique où les névroses du couple ne cessent de nous donner le tournis dans leur désir irrépressible d'approcher la perle rare en y façonnant le simulacre. Dès lors, la soif d'aimer et d'être aimé n'aura jamais paru aussi originale qu'à travers cette perle rare truffée d'humour et de fantasmes obscurs quant à l'inné désir de possession. Du grand art. 

*Bruno
2èx

Anecdote wikipedia: Stanley Kubrick, fasciné par L'Écureuil rouge, recommanda Julio Medem à Steven Spielberg. Celui-ci proposa Le Masque de Zorro au réalisateur basque, lequel préféra continuer ses projets en Espagne

Récompenses:
Quinzaine des réalisateurs du festival de Cannes 1993 : Prix de la jeunesse
Prix Goya : meilleure musique originale pour Alberto Iglesias, et nominations pour les actrices Emma Suárez et María Barranco
Prix Sant Jordi : meilleur film espagnol, et meilleure actrice pour Emma Suárez
Prix Ondas : meilleur film espagnol
Fantastic'Arts 1994 : Prix spécial du jury et Prix de la Critique

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