lundi 21 novembre 2011

l'Emprise / The Entity. Antenne d'Or, Avoriaz 1983.

de Sidney J. Furie. 1981. U.S.A. 2h05. Avec Barbara Hershey, Ron Silver, David Labiosa, George Coe, Margaret Blye, Jacqueline Brookes, Richard Brestoff, Michael Alldredge, Raymond Singer, Allan Rich.

Sortie en salles en France le 23 Février 1983. U.S: 4 Février 1983

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Sidney J. Furie est un réalisateur, scénariste et producteur canadien, né le 28 Février 1933 à Toronto, en Ontario (Canada). 1959: A Dangerous Age. 1961: Le Cadavre qui tue. The Snake Woman. 1964: La Poupée Sanglante. 1965: Icpress, danger immédiat. 1966: L'Homme de la Sierra. 1970: L'Ultime Randonnée. 1978: Les Boys de la compagnie C. 1981: l'Emprise. 1986: Aigle de Fer. 1987: Superman 4. 1988: Aigle de Fer 2.  1991: La Prise de Beverly Hills. 1995: Aigle de Fer 4. 1997: Les Rapaces. 1997: Les Enragés. 2000: Jeu Mortel. Nuit Infernale. 2003: Détention. 2004: Direct Action. 2005: American Soldiers. 2006: The Veteran (télé-film).

Ce film est l'histoire romancée d'un incident réel qui a eu lieu à Los Angeles, en Californie, en Octobre 1976. Pour les chercheurs, c'est l'un des cas les plus extraordinaires de l'histoire de la parapsychologie. 
La vraie Carla Moran vit aujourd'hui au Texas avec ses enfants. 
Les attaques, moins fréquentes et moins intenses... continuent.

"Carla contre l’invisible".
D’après un roman éponyme de Frank De Felitta (Audrey Rose), Sidney J. Furie transcende en 1981 un troublant cas de hantise inspiré d’un fait divers. Récompensé à Avoriaz de l’Antenne d’or, L’Emprise peut se targuer de figurer parmi les plus grands films de hantise. Il le doit pour beaucoup à la mise en scène avisée de Furie, qui opte pour un réalisme sans fard, et à la prestance criante de vérité de Barbara Hershey, justement couronnée du prix d’interprétation féminine au festival susmentionné.

Le pitch : une nuit, une mère de famille est sexuellement agressée par une présence invisible dans sa chambre. Le lendemain, une seconde attaque, tout aussi violente, survient. Quelques jours plus tard, elle perd le contrôle de son véhicule sans raison apparente. Démunie, terrifiée à l’idée de rentrer chez elle, elle consulte un psychiatre réputé pour tenter de comprendre les tenants d’un phénomène dont l’origine échappe à toute logique.

Avec un argument aussi grotesque en apparence, L’Emprise aurait pu sombrer dans la gaudriole zédifiante, si un réalisateur inspiré et une actrice à la sobriété expressive ne s’étaient alliés pour nous convaincre de l’horreur invisible qui hante cette femme. Et si, quarante ans plus tard, le film demeure aussi terrifiant, inquiétant, oppressant, c’est parce qu’il illustre sans esbroufe le calvaire improbable d’une mère de famille harcelée par une entité lubrique. 

La première partie, entrecoupée de scènes-chocs jamais racoleuses, dépeint avec une intensité psychologique rare le supplice de Carla, victime de viols répétés dans sa propre maison. L’angoisse sourde de Carla — cette peur d’une nouvelle attaque foudroyante — s’infiltre dans l’esprit du spectateur, témoin d’une intrusion du surnaturel dans la banalité du quotidien. Quant aux séquences d’agression, elles sont d’un réalisme malsain, froid, glaçant. Les effets spéciaux, employés avec parcimonie, évitent toute surenchère grotesque pour authentifier les exactions d’un ectoplasme pervers. La menace, insidieuse, s’intensifie à mesure que le surnaturel s’octroie le droit d’agresser une victime réduite à l’état d’objet sexuel.

                                      

Furie, fidèle à sa ligne vériste, privilégie ensuite l’exploration de la psyché de son héroïne, lors de séances de thérapie avec le docteur Sneiderman (Ron Silver, d’une sobriété remarquable, entre scepticisme clinique et rigueur cartésienne). Le corps psychiatrique s’efforce alors de convaincre Carla que ses agressions ne sont qu’un produit de son inconscient traumatique. En sondant les limbes de son passé — père incestueux, relation avortée avec un amant adolescent — Sneiderman tente de rationaliser la névrose. Ces moments d’intimité thérapeutique renforcent la détresse poignante d’une femme seule, que nul ne veut croire.

La seconde partie embrasse alors la piste surnaturelle en donnant la parole à des parapsychologues. Une équipe spécialisée dans l’occultisme viendra prêter main-forte à Carla. Mais chut, n’en disons pas plus. Furie ne cherche pas à nous convaincre du surnaturel : il laisse au spectateur le soin d’embrasser le doute, face à la souffrance d’une femme pourtant saine d’esprit. Soulignons enfin le jeu bouleversant de Barbara Hershey, frémissante d’émotion, à la fois vulnérable et déterminée, dans ce rôle épineux de martyre confrontée à un bourreau sans visage. Elle incarne une humanité chétive, une force vacillante, une volonté de survivre à l’indicible.

 
"Un corps en guerre".
Proprement effrayant dans ses attaques cinglantes venues d’ailleurs, L’Emprise demeure un parangon d’épouvante, transcendé par la densité psychologique de ses protagonistes et une atmosphère anxiogène, à la fois fascinante et oppressante. En évoquant la carte du « fait divers » à la toute fin, ce cauchemar filmique nous confronte à l’idée vertigineuse d’une spiritualité immatérielle, impalpable, perverse. Passionnant, hypnotique, porté par une bande-son tonitruante, ce chef-d’œuvre de la terreur mérite sa place auprès des monuments du genre : La Maison du Diable, Trauma, La Maison des Damnés, L’Enfant du Diable, Les Innocents. Du grand cinéma d’épouvante, comme on n’en fait plus. Hélas.
 
Dédicace à Aurore Drossart
 
*Bruno
03.07.24. 6èx. Vostfr
21.11.11.  

Récompense: Antenne d'or au festival d'Avoriaz en 1983 et Prix d'interprétation Féminine à Barbara Hershey..

samedi 19 novembre 2011

Hatchi (Hachi, A Dog's Story)


de Lasse Haelstrom. 2009. U.S.A. 1h32. Avec Richard Gere, Sarah Roemer, Joan Allen, Cary-Hiroyuki Tagawa, Jason Alexander, Erick Avari, Robert Capron, Daviana McFadden, Kevin DeCoste.

Sortie en salles en France le 9 Juin 2010. U.S: 18 Décembre 2009

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Lasse Haekstrom est un réalisateur et scénariste suédois, né le 2 Juin 1946 à Stockholm (Suède). 1975: A Guy and A gal. 1985: Ma vie de chien. 1991: Ce cher Intrus. 1993: Gilbert Grape. 1995: Amours et mensonges. 1996: Lumièe et compagnie. 1999: l'Oeuvre de Dieu, la part du Diable. 2000: Le Chocolat. 2001: Terre Neuve. 2005: Une vie inachevée. 2005: Casanova. 2006: Faussaire. 2009: Hatchi. 2010: Dear John. 2012: The Danish Girl.


D'après une histoire vraie. 
Le véritable Hachico est né à Odate, au Japon, en 1923. Il est mort en Mars 1934.
Une statue de bronze trône aujourd'hui à sa place habituelle, en face de la gare de Shibuya.

Je vois déjà v'nir certains lecteurs ricaner à la vue de cette affiche puérile mettant en vedette un illustre acteur glamour, ancienne gloire d'hollywood; le regard attendri auprès du toutou à peluche. Et pourtant, dans sa forme canonique à daigner cibler un public familial, le réalisateur de Gilbert Grape évite admirablement le pathos lacrymal souvent redoutée dans ce type de produit. D'autant plus qu'il s'agit ici du traditionnel remake d'un film japonais Hachiko monogatari de Seijiro Koyama, réalisé en 1987. Attention toutefois au crève-coeur inconsolable que nombre de spectateur éprouveront de façon aussi désarmée qu'impuissante ! Le PitchEn revenant du travail, un professeur de musique universitaire trouve sur son chemin un petit chiot errant. En guise d'empathie, il décide de le ramener chez lui contre l'avis de son épouse. Au fil des jours, une amitié se noue entre les deux compagnons. Surnommé Hatchi du fait de ses origines japonaises, le chien accompagne chaque matin son maître jusqu'au quai de la gare et revient l'attendre le soir après sa journée de boulot. Les mois passent, leur relation amicale perdure jusqu'au jour ou le destin décide de les séparer.


Une histoire simple de prime abord, standard diront les indécis car focalisée sur les sentiments intenses que peuvent lier un chien fidèle et son maître. Mais parmi l'intelligence du refus de complaisance, le réalisateur suédois Lasse Haekstrom nous invite à découvrir cette étonnante rencontre que chacun de nous connaît ou a déjà vécu avec son propre animal de compagnie. Ce rapport tendre si affectueux que l'on puisse établir avec un chien entièrement voué à vous rester fidèle, et ce jusqu'à la fin de votre existence. C'est ce que nous narre Hatchi à travers cette relation transcendant l'amitié, l'amour et la reconnaissance au nom de la commune fidélité. La première partie nous illustrant auprès d'une succession de séquences touchantes mais jamais mièvres l'union amicale d'un sexagénaire davantage attendri par le comportement humain de son compagnon canin. Si bien que chaque matinée de la semaine, Parker doit se rendre à la gare pour prendre le train et rejoindre son université afin d'y  enseigner la musique auprès de ses étudiants. Et chaque matin, Hatchi l'accompagne au quai jusqu'à ce que son maître embarque dans le train et revienne le soir même de la journée. Fidèlement, en début de soirée, Hatchi se poste sur la place pour l'attendre à nouveau patiemment face à la curiosité de commerçants surpris par son dévouement aussi vaillant et loyal.

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Spoiler !!! Mais un jour, alors qu'il attend paisiblement son retour, Hatchi ne reverra plus jamais celui qui s'était engagé à adopter un animal en reconnaissance d'amour et d'amitié. Cette seconde partie abrupte et inopinée, bifurquant irrémédiablement vers le drame déchirant nous est illustrée sans excès mais avec une sensibilité écorchée vive (si peu de le surligner). A ce titre, la séquence concise du fameux accident cérébral dont sera victime l'un des protagonistes s'avère d'une sobriété exemplaire car elle refuse de s'attarder sur la douleur affectée des principaux membres de la famille endeuillée. Quotidiennement, nous allons continuer de suivre le destin insensé de Hatchi, déterminé à attendre son maître durant neuf longues années. Chaque jour, le chien solitaire se destinant à imposer cette règle ancrée sur les valeurs de loyauté pour escompter revoir Parker descendant fatalement du train. Fin du Spoiler. Dans un rôle inhabituel, Richard Gere interprète avec un naturel flegme un professeur de musique aussi épanoui dans sa vie professionnelle que conjugale. Les rapports chaleureux et fougueux qu'il entretient communément avec Hatchi permettent de nous toucher lors de séquences futiles aux sentiments nobles. Quand bien même le chien endossé par trois Akita Inus (selon l'âge évolutif d'Hatchi) est sobrement exploité à travers les moments aussi graves que joyeux. Son regard empli d'innocence et sa bonhomie instinctive ne peuvent laisser insensible un spectateur contemplatif envers sa patience immodérée pour la fidélité. Un spectateur peu à peu gagné par une bouleversante empathie à la limite du soutenable (selon la sensibilité de chacun évidemment et de votre passion amoureuse pour la cause animale). 
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Une fidélité légendaire
Récit authentique prônant les valeurs d'amour et d'amitié que peuvent respectivement alimenter un chien et son maître, Hatchi nous désarme le coeur (à vif !) en tolérant une destinée inéquitable. Un portrait alloué à la complicité altruiste de l'homme et de son chien, brutalement dissociés par la mort mais à nouveau unifiés vers un seuil spirituel. Un drame bouleversant d'une acuité émotionnelle singulière, qui plus est, évitant avec intelligence de tomber dans le produit standard conçu pour faire pleurer dans les chaumières. En sus de son émotion fragile impitoyable, et afin d'y transcender cet amour inoxydable, la douceur timorée de sa partition au piano y accompagne sobrement l'ambiance en demi teinte. Par conséquent, à travers l'impact d'une histoire aussi fastueuse qu'insensée, Hatchi risque naturellement de vous faire chavirer dans un déluge d'émotions aussi incontrôlées que rigoureuses (pour ne pas dire traumatiques pour ceux nouant une tendresse indéfectible auprès du "chien"). 
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A Hatchi, Barney et Harvey, mes héros...

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Dédicace à Gilles Roland, Selena de Sade et Isabelle Rocton.
19.11.11
Bruno Matéï
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Ci-dessous, la critique de mes amis Luke Mars et Gilles Roland
http://darkdeadlydreamer.blogspot.com/2011/11/hachi-dogs-tale-aka-hachiko-dogs-story.html?showComment=1322205834540#c3807275587435140473
http://www.shunrize.com/wordpress/critique-hatchi

L'avis de mon ami Mathias Chaput:

Il est des films intemporels que l’on n’oublie jamais, des films si bouleversants qu’ils hantent notre mémoire à jamais, des films d’une force émotionnelle qui balayent tout et qui nous bloquent en quelques minutes où nous avons l’impossibilité de retenir nos larmes : « Hatchi » fait partie de cette race très fermée de métrages…
« Philadelphia », « Le cercle des poètes disparus » sont du même calibre mais « Hatchi » dégage un pouvoir émotionnel encore plus intense que ces deux films…
D’une intensité mélodramatique et d’un jeu d’acteurs bien rôdé (on s’attache très vite aux personnages, le chef de gare, le vendeur de hot dogs, la libraire), on s’habitue à une routine très touchante et de voir ce chien au beau milieu de tout ce petit monde qui parait gentillet et émouvant (le cadre, les habitudes, les saisons qui défilent, filmés intelligemment et sans la moindre redondance)…
Et lorsque tout s’écroule (après la première heure) un sentiment indicible comme une brise glaciale qui nous balayerait littéralement, la c’est le DRAME qui prend place !
Et c’est terrible…
« Hatchi » a une force instantanée de faire virer à 360 degrés la quiétude qui s’était immiscée, la complicité absolue entre un homme et son chien pour aboutir au film le plus lacrymal de tous les temps, à la sensibilité impénétrable et au cœur gros comme ça, nous collapsant de pleurs sans discontinu…
Niveau technique, la mise en scène est très correcte et les décors sont parfaitement adaptés au film…
Richard Gere est bouleversant et prouve une énième fois qu’il est un grand acteur…
Le chien Hatchi est adorable, bref ce film est sublime, superbe et fascinant, mais très difficile en même temps : il en ressort une impression terrible, comme rarement vue au cinéma…
En un mot : DECHIRANT.
on est RETOURNéS !

Note : 10/10
Paix éternelle à Lady, Labelle, Ursa et Barney
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mercredi 16 novembre 2011

Un Monde sans pitié. César de la meilleure première oeuvre, Prix Louis-Delluc.


d'Eric Rochant. 1989. France. 1h24. Avec Hippolite Girardot, Mireille Perrier, Yvan Attal, Jean-Marie Rollin, Cécile Mazan, Aline Still, Paul Pavel, Anne Kessler, Patrick Blondel.

Sortie en salles en France le 22 Novembre 1989. U.S: 31 Mai 1991

FILMOGRAPHIE: Erich Rochant est un réalisateur et scénariste français né le 24 Février 1961.
1989: Un Monde sans Pitié. 1990: Aux Yeux du monde. 1994: Les Patriotes. 1996: Anna Oz. 1997: Vive la République ! 2000: Total Western. 2006: l'Ecole pour tous


"On n'a plus qu'à être amoureux, comme des cons; et ça, c'est pire que tout.."
Récompensé de deux césars et du Prix Louis-Delluc, le premier film d'Eric Rochant est le porte parole d'une génération désabusée. Celle de la fin des idéologies des années 80 auquel une certaine jeunesse désorientée se réfugiait dans les idylles d'un soir alors que d'autres s'improvisaient dealer de shit pour compenser la précarité du RMI.

Synopsis: Hippo est un trentenaire sans illusion résidant en collocation avec son frère vendeur de drogue au sein de leur appartement. Un jour, il rencontre Nathalie, une ambitieuse étudiante auquel il n'est pas insensible à sa simplicité naturelle. Ensemble, ils vont tenter d'envisager une liaison romantique hormis leur personnalité divergente sur leur société contemporaine. 
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Pour un premier essai derrière la caméra, Eric Rochant marqua toute une génération de cinéphiles avec ce portrait aigre doux d'un jeune chômeur avide de liberté mais incapable de s'insérer dans une société individualiste. Régulièrement appréhendé par la police, faute de sa gueule marginalisée et de l'état délabré de son véhicule volé, et coexistant sous le toit de son frère cadet, dealer de shit, Hippo sacrifie son temps dans les festivités amicales entre 2 parties de poker. Or, avec la rencontre impromptue de cette étudiante bon chic bon genre, il se laisse attendrir par ses charmes pour mieux supporter son faible espoir de réussite socio-professionnelle. 


Ainsi, dans une ambiance morose plutôt nonchalante scandée de la mélodie à la fois fragile et timorée de Gérard Torikian, Eric Rochant dresse le portrait d'un chomeur déboussolé par ses angoisses existentielles. Quand bien même ses parents puritains et austères ne comprennent plus leur rejeton fuyant sa responsabilité pour se réfugier dans une solitude atone en dépit de sa tendresse éphémère auprès de sa compagne intello. Ne reste alors pour Hippo que l'amitié fraternelle d'un acolyte bienveillant mais tout aussi défaitiste pour tenter de se prémunir d'une misère sociale toujours plus accrimonieuse. Et si le cheminement aléatoire d'Hippo réussit si sincèrement à nous toucher et interpeller, c'est grâce à la prestance chafouine du comédien novice Hippolite Girardot livrant probablement son rôle le plus vibrant, le plus intensément expressif en toute sobriété. D'un naturel révolté à travers son idéologie misanthrope, il parvient admirablement à retranscrire sa détresse (sous-jacente), ses contrariétés en roue libre, son désarroi face à un monde sans pitié (trop) souvent tributaire de l'égotisme des rapports humains et du chômage qui en découle faute d'une solitude sans espoir.


Baignant dans une poignante mélancolie jamais forcée, d'autant plus palliée d'un humour permanent, notamment auprès du franc-parler facond d'Hippo et de quelques seconds-rôles (néanmoins) enjoués, Un monde sans pitié provoque une émotion naturaliste en demi-teinte face à la désillusion qu'un jeune glandeur encaisse dans sa rage d'exister. Sa conclusion attendue, d'une ironie acerbe enfoncera d'ailleurs le clou quant à son pessimisme sentimental sans lendemain qu'il alimente lui même dans sa condition marginale irréconciliable.   

*Bruno
16.11.11. 
01/04/2025. 4èx

Récompenses: César de la meilleure première oeuvre.
César du Meilleur Espoir Masculin pour Yvan Attal
Prix Louis-Delluc en 1989.


lundi 14 novembre 2011

La Maison près du Cimetière / Quella villa accanto al cimitero


de Lucio Fulci. 1981. Italie. 1h26. Avec Catriona MacColl, Paolo Malco, Ania Pieroni, Giovanni Frezza, Silvia Collatina, Dagmar Lassander, Giovanni De Nava, Daniela Doria, Gianpaolo Saccarola.

Sortie en salles en France le 24 Mars 1982. U.S: 01 Mars 1984
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FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Lucio Fulci est un réalisateur, scénariste et acteur italien, né le 17 juin 1927 à Rome où il est mort le 13 mars 1996. 1966: Le Temps du Massacre, 1969 : Liens d'amour et de sang , 1971 : Carole, 1971: Le Venin de la peur,1972 : La Longue Nuit de l'exorcisme, 1974 : Le Retour de Croc Blanc, 1975: 4 de l'Apocalypse, 1976: Croc Blanc, 1977 : L'Emmurée vivante, 1979: l'Enfer des Zombies, 1980 : la Guerre des Gangs, 1980 : Frayeurs, 1981 : Le Chat noir, 1981 : L'Au-delà, 1981 : La Maison près du cimetière , 1982 : L'Éventreur de New York , 1984 : 2072, les mercenaires du futur, Murder Rock, 1986 : Le Miel du diable , 1987 : Aenigma, 1988 : Quando Alice ruppe lo specchio, 1988 : les Fantomes de Sodome, 1990 : Un chat dans le cerveau, 1990 : Demonia, 1991 : Voix Profondes, 1991 : la Porte du Silence..

Personne ne saura jamais si les enfants sont des monstres ou les monstres des enfants.
Henry James. 

"L’élégie pour un mort qui respire encore".
En 1981, juste après sa fresque morbide L'Au-delà, le maître du macabre renoue pour la quatrième fois avec la thématique du zombie en façonnant La Maison près du Cimetière. Un point d’orgue intimiste qui vient clore sa sarabande de cadavres lépreux, exhumés des portes de l’Enfer dans Zombie, Frayeurs et L’Au-delà. Néanmoins, méfiez-vous aujourd’hui des enfants qui pleurent dans le noir ! Près de Boston, aux États-Unis, un couple emménage dans une demeure avec leur fils. Le jeune Bob possède la faculté de communiquer par télépathie avec une étrange fillette entraperçue sur une photo. Bientôt, d’étranges événements se produisent dans l’ancienne maison des Freudstein. Son ancien propriétaire, jadis chirurgien fasciné par la quête d’immortalité, aurait trouvé l’antidote pour se régénérer...


Avec son prélude concis, presque gratuit, La Maison près du Cimetière insuffle pourtant, dès ses premières secondes, un sentiment d’angoisse latente, insidieuse. Une maison vétuste, de style gothique, s’élève à proximité d’un cimetière hanté par la famille Freudstein. À l’intérieur, un couple d’amoureux entré par effraction s’improvise un cache-cache nocturne… Mais la jeune fille, transie d’inquiétude, est bientôt happée par le maître des lieux : le Dr Freudstein. Fulci distille aussitôt le malaise, insuffle une angoisse tangible dans les recoins funestes de cette demeure antique, et nous alarme sur le danger létal tapi dans le gouffre de la cave. Après avoir esquissé le quotidien de la famille Boyle fraîchement installée, un lien se tisse entre Bob et une enfant du nom de Mae — cette même silhouette préalablement entrevue dans un tableau accroché au mur de leur ancienne maison. Bob est le seul à pouvoir voir, entendre, et parler à cette étrange fillette. Une rouquine contrariée à l’idée qu’il emménage chez les Freudstein… Tandis que Mr Boyle poursuit ses recherches funèbres sur le passé sanglant du chirurgien utopiste, Lucie, Ann — la femme de ménage — et Bob sont confrontés à des phénomènes de plus en plus terrifiants.

En croisant le thème de la maison hantée avec celui du mort-vivant, le réalisateur cisèle un ultime conte macabre où l’innocence enfantine est exposée pour être violemment tourmentée. Certes, le scénario s’égare parfois dans des incohérences (la relation équivoque entre Norman Boyle et la baby-sitter Ann, ou encore ce parquet ensanglanté qu’elle nettoie sans qu’aucune explication ne soit donnée), mais l’intérêt narratif se resserre autour d’un sentiment de terreur palpable, suintant de la cave scellée. En maître de l’effroi, Fulci ravive nos peurs enfantines : le monstre dans le placard, le noir humide d’un sous-sol décrépi, ici métamorphosé en cave cauchemardesque. Jour et nuit, des bourdonnements inquiétants résonnent à travers les cloisons, et une voix d’enfant en pleurs vient importuner les vivants. Malgré une direction d’acteurs toujours aussi terne et hésitante (même si Catriona MacColl et l’ensorcelante Ania Pieroni relèvent sobrement le niveau), c’est le décor mortuaire, véritable personnage à part entière, qui nous hypnotise : cette oubliette souterraine cache des cadavres démembrés, éviscérés, réduits à l’état de chair. Chaque tentative de descente dans la cave s’accompagne d’un frisson d’oppression distillé avec art. Fidèle à sa réputation de maître transalpin du putride, Fulci, entouré de ses fidèles collaborateurs — le maquilleur Giannetto De Rossi et le chef opérateur Sergio Salvati — nous offre deux séquences gores hallucinées : tisonnier enfoncé trois fois dans la chair jusqu’à l’éclatement orgasmique d’une carotide, puis gorges tranchées dans des gerbes de sang ! Ces visions baroques, crues, outrancières, marquent encore par leur impact réaliste et leur audace frontale.

Mais Fulci sait aussi faire preuve de sensibilité : il aborde avec gravité le thème de l’enfance rejetée, discréditée par des adultes sourds à leurs angoisses. Le final, poétiquement élégiaque, révélant la véritable identité de Mae et de sa mère, nous laisse dans une amertume persistante. Car nous ne saurons jamais quelle destinée attend Bob dans sa nouvelle "famille".

 
"De moisissure et de sang".
Avec son scénario nébuleux mais singulier, La Maison près du Cimetière se transcende par l’ambiance pétrifiante de sa demeure photogénique, suintante de souillure. En particulier cette cave, antre d’un monstre solitaire fasciné par les secrets de l’immortalité. Accoutré d’un uniforme saphir moisi, au faciès purulent et famélique, le Dr Freudstein s’impose comme l’une des créatures les plus inquiétantes du cinéma d’horreur. La superbe comptine de Walter Rizzati parachève cette atmosphère nimbée de mélancolie. Là, dans l’ombre, un mort-vivant attend, pleure et chasse. Prisonnier d’un corps qu’il doit nourrir pour survivre, spectre tragique condamné à errer sous les lattes. La peur est une denrée rare au cinéma. Ne vous privez pas d’un détour — ou d’un retour — du côté obscur de La Maison près du Cimetière.

*Bruno
13.01.24. 6èx
14.11.11. 

La critique de Mathias Chaput:
Au carrefour du film de zombies et du métrage de maisons hantées, « La maison près du cimetière » est une franche réussite, combinant tous les codes chers à Lucio Fulci et se dotant de séquences « hardgore » gratinées, avec pour levier dans l’angoisse les peurs enfantines…

Ultime œuvre du segment quadrilogique de films de zombies initié par « L’enfer des zombies », « Frayeurs » et « L’au-delà », « La maison près du cimetière » se démarque de la violence inhérente à ses prédécesseurs pour imbriquer une poésie, un sens du lyrisme macabre et une ode à la putréfaction chers à Fulci et le final évoque des similitudes avec celui de « The Beyond » de par un onirisme et une sensation d’étrangeté au charme certain, rehaussant la « patte » Fulci dans un catharsis aussi soudain qu’inattendu…

Les bambins sont les vecteurs du film et volent la vedette au Docteur Freudstein, héritage des zomblards ralentissants de « Frayeurs » et prétexte à des séquences chocs précises et terrifiantes, bien cadrées dans la continuité du scénario…

Catriona Mac Coll, égérie de Fulci, est toujours aussi fabuleuse et Ania Pieroni déborde d’un charme ténébreux qui allait faire exploser sa (courte) carrière puisqu’Argento la remarqua et l’embaucha pour deux de ses films (« Inferno » et « Ténèbres »)…

Ponctué d’éclairs et de foudroiements (le passage avec la chauve-souris, les morts violentes –notamment le prologue bluffant- ou les découvertes hasardeuses et funestes), « La maison près du cimetière » est un sommet du genre et consolide un peu plus la carrière de Fulci, ce dernier étant toujours en quête d’explorations cinématographiques…

Il clôt ses expérimentations et intègre un pan supplémentaire de sa filmographie tout en n’oubliant pas de faire plaisir à ses fans de la première heure en leur concoctant un film racé et lugubre, dépressif et capiteux…

Encore une fois, il faut le voir pour comprendre et appréhender le genre qui érigea Fulci comme maitre absolu du film horrifique italien…

Note : 10/10


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GAME OF THRONES


Le Trône de fer (Game of Thrones) est une série télévisée américaine créée par David Benioff et D.B. Weiss,  d'après la saga littéraire de fantasy médiévale, Le Trône de Fer de George R.R. Martin, diffusée simultanément aux Etats-Unis et au Canada depuis le 17 Avril 2011 sur HBO et HBO Canada. 
Une deuxième saison, annoncée deux jours après la première diffusion de la série, est en phase de production.
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La série décrit les complots et les rivalités qui se jouent au sein du Royaume des Sept Couronnes, où les familles royales luttent pour s'emparer du Trône de fer, symbole du pouvoir absolu.
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MON AVIS EN 2 MOTS:
Hormis des longueurs récurrentes un peu rébarbatives et des intrigues complexes et abstraites durant ces 4 premiers épisodes, cette série moyennageuse dépasse tout ce qui a été préalablement érigé à la tv et même au cinéma tant elle est d'un réalisme sensorielle bluffant ! Photo, décors, costumes, musique, rien n'a été laissé au hasard pour captiver et fasciner un public totalement immergé par les conflits et trahisons au sein du royaume des 7 couronnes. Mais c'est surtout l'incroyable densité psychologique d'acteurs charismatiques finement développés qui permettent d'élever cette série au rang de chef-d'oeuvre télévisuel. J'ai aimé la manière dont l'inégalité des sexes est traitée et abordée par les mentalités conservatrices, les complots, trahisons et manipulations octroyés aux personnages sournois en quête de mégalomanie, les conflits familiaux mesquins en phase de déclin, les romances déchues, le baroud d'honneur invoqué au thème de la vengeance et l'empathie accordée à d'autres personnages peu reluisants. Erotiquement torride et effronté, barbare, ultra violent (la brutalité qui émane des passages les plus crus impressionnent viscéralement l'esprit), aride, acéré, blafard et doté d'un véritable souffle épique, la série se permet même dans sa seconde moitié de bifurquer vers la fantasy occulte.
Les deux derniers épisodes, capitaux dans les enjeux belliqueux à venir, sont d'une puissance émotionnelle bouleversée alors qu'un coup de théâtre incongru et inéquitable nous laisse dans un état de marasme inconsolable.

La chair et le sang dans toute sa splendeur de décadence et de romance contrariée suggère pour sa seconde saison une suite encore plus palpitante, opaque et effrénée.

Une date dans le paysage télévisuel.

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1ère saison: 


Epis 1:  L'Hiver vient
Epîs 2:  La route royale
Epis 3:  Lord Snow
Epis 4:  Infirmes, bâtards et choses brisées
Epis 5:  Le Loup et le Lion
Epis 6:  Une couronne d'or
Epis 7:  Gagner ou mourir
Epis 8:  Frapper d'estoc
Epis 9:  Baelor
Epis 10: De feu et de sang
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vendredi 11 novembre 2011

LES RUES DE FEU. Prix de la Meilleure Actrice, Amy Madigan à Catalogne, 1984.


de Walter Hill. 1984. U.S.A. 1h33. Avec Michael Paré, Diane Lane, Rick Moranis, Amy Madigan, Willem Dafoe, Deborah Van Valkenburgh, Richard Lawson, Rick Rossovich, Bill Paxton, Lee Ving.

Sortie en salles en France le 14 Novembre 1984. U.S: 1er Juin 1984
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Récompense: Prix de la meilleure Actrice pour Amy Madigan au Festival international du film de Catalogne en 1984.

FILMOGRAPHIE: Walter Hill est un producteur, réalisateur et scénariste américain, né le 10 janvier 1942 à Long Beach, en Californie (États-Unis).
1975 : Le Bagarreur (Hard Times),1978 : Driver,1979 : Les Guerriers de la nuit, 1980 : Le Gang des frères James,1981 : Sans retour, 1982 : 48 heures, 1984 : Les Rues de feu,1985 : Comment claquer un million de dollars par jour,1986 : Crossroads, 1987 : Extrême préjudice, 1988 : Double Détente, 1989 : Les Contes de la crypte (1 épisode),1989 : Johnny belle gueule,1990 : 48 heures de plus,1992 : Les Pilleurs,1993 : Geronimo,1995 : Wild Bill, 1996 : Dernier Recours,1997 : Perversions of science (série TV),2000 : Supernova, 2002 : Un seul deviendra invincible, 2002 : The Prophecy, 2004 : Deadwood (série TV).


Deux ans après son buddy movie célébré par le duo impayable Nick Nolte / Eddy Murphy  (alors qu'il s'agissait pour ce dernier de son 1er rôle à l'écran !), notre briscard invétéré Walter Hill réalise une série B effrénée. Mixture improbable entre le film de bandes des sixties, le western moderne et la romance classique sur fond de musique pop et de rock n'roll. Le tout enraciné dans une époque indéfinissable, à situer à mi-chemin entre la rébellion des blousons noirs des années 50 et 60 et l'excentricité polychrome des néons flashys des années 80. La chanteuse Ellen Aim est kidnappée en plein concert par l'odieux Raven devant une foule médusée ! Après avoir mis à feu et à sang la ville, le gang se réfugie à proximité d'un quartier malfamé. Une barman décide d'écrire à son frère pour l'avertir que son ex petite amie a été enlevée par la bande de motards, les "bombers". Tom Cody, homme solitaire et marginal, se rend fugacement sur les lieux et décide de proposer une transaction avec le manager d'Ellen, Billy Fish. 
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Mis en scène avec une frénésie évoluant au rythme de tubes pop des années 80 et du rock des années 60, Les Rues de feu débute de manière explosive, via un préambule monté de main de maître par un réalisateur assidu à authentifier son univers dérivé de la bande dessinée et du western. En pleine retranscription d'un concert starisé par la mélomane Ellen Aim, une bande de motards affublés de cuir s'empare de la belle tout en foutant le zouc au sein de la petite banlieue, histoire de montrer aux citadins que toute tentative de rébellion est une peine perdue d'avance. Action et violence échevelées sont menées sur un rythme trépidant alors qu'une musique rock vrombissante va exacerber cette estocade culminant sa déchéance explosive en plein centre urbain ! Le suite de l'histoire reste d'une simplicité éculée ! Un rebelle décide de sauver son ex kidnappée par ces "Bikers". Après l'avoir sauvé, notre héros va être confronté à la menace du leader de la bande particulièrement rancunier, ce dernier lui proposant de se battre au corps à corps lors d'un prochain combat. Pour alimenter cette intrigue archi balisée et rendre l'aventure aussi excitante qu'exaltante, Walter Hill privilégie le montage millimétré et compte sur une galerie de personnages irrésistiblement attachants, davantage en nombre grandissant durant l'épreuve de force de la mission périlleuse. Que ce soit la soeur candide et loyale convoquant un héros renfrogné au grand coeur, la chanteuse lascive à la voix langoureuse, la baroudeuse inflexible aux allures de garçonne, le manager imbus et vaniteux, la fan "pot de colle" futilement hystérique de son égérie, et un sympathique groupe de Blacks à la voix uniforme. Alors que du côté antagoniste, la bande des "Bombers" est représentée par une équipée motorisée, menée par la pugnacité d'un dur à cuir impassible du nom ténébreux de Raven. Avec une originalité risquée, le réalisateur fait évoluer nos héros dans une époque indéterminée sans flirter miraculeusement l'invraisemblance. Durant leur trajet semé d'embûches pour s'emparer de la belle Ellen, notre petite communauté va user de subterfuge et stratagèmes pour combattre les "Bombers" mais aussi déjouer les forces de l'ordre déployées en nombre dans les contrées adjacentes. Entrecoupé de morceaux musicaux interprétés par de véritables artistes comme Dave Alvin, Cy Curnin, Stevie Nicks, Jim Steinman, Tom Petty, Kennie Vance ou encore Dan Hartman, l'aventure épique pleine de fantaisies et de réparties cinglantes nous insuffle une irrésistible empathie face à la bonhomie de nos héros aussi chaleureux que vaillants.


Quand au point d'orgue escompté, il s'achemine de manière débridée vers un combat homérique entre Tom et Raven, tous deux armés de pioche pour mieux s'entretuer avant d'achever leur cinglant affrontement à poings nus. Pour parachever cette épopée flamboyante, nous aurons ensuite l'aubaine d'écouter une ultime fois la voix mélodieuse de notre chanteuse confinée dans sa salle de concert à guichet fermé. Niveau interprétation, l'excellent Michael Pare endosse avec sa trogne bellâtre le personnage viril d'un cow-boy solitaire intraitable, quand bien même sa partenaire Diane Lane lui prête la vedette dans une prestance suave et lamentée, car dépitée du caractère téméraire de son ex amant rancunier. Récompensée du Prix de la meilleure actrice à Catalogne pour son rôle inébranlable de soldat de fortune, Amy Madigan crève l'écran et harmonise spontanément l'ambiance de camaraderie engendrée par sa fidèle équipe. L'impayable Rick Moranis s'attribue d'une présence pittoresque dans sa posture de petit patron cupide à l'esprit présomptueux pour s'entacher de mener la bande avec risible autorité. Enfin, en bandit ténébreux vêtu de cuir noir, Willem Dafoe apporte une dimension belliqueuse lors de ses exactions marginales conçues sur l'ultra violence, la perversion et l'égotisme.

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Avec une efficacité optimale pour pallier la maigreur de son script, et une vigueur musicale pour écheveler l'action rocambolesque, Walter Hill rend hommage au cinéma d'action au sein de l'univers hybride du western moderne et de la BD. La multitude des genres imbriqués dans cet époque sans âge et sa flamboyance impartie à la scénographie rutilante édifiant l'ovni en fable romanesque de rock and roll. Pour parachever, pourrait-on omettre de souligner l'omniprésence du score électrique confectionné par l'illustre Ry Cooder !

11/11/11. 6èx
Bruno Matéï
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jeudi 10 novembre 2011

Dracula. Bram Stoker's Dracula. Saturn Award du Meilleur Film d'Horreur en 1993.

                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Francis Ford Coppola. 1992. U.S.A. 2h08. Avec Gary Oldman, Winona Ryder, Anthony Hopkins, Keanu Reeves, Richard E. Grant, Cary Elwes, Bill Campbell, Sadie Frost, Tom Waits, Monica Bellucci, Michaela Bercu.

Sortie en salles en France le 13 Janvier 1993. U.S: 13 Novembre 1992.

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Francis Ford Coppola est un réalisateur, producteur et scénariste américain né le 7 Avril 1939. 1963: Dementia 13. 1966: Big Boy. 1968: La Vallée du Bonheur. 1969: Les Gens de la pluie. 1972: Le Parrain. 1974: Conversation Secrète. Le parrain 2. 1979: Apocalypse Now. 1982: Coup de coeur. 1983: Outsiders. Rusty James. 1984: Cotton Club. 1986: Peggy Sue s'est mariée. 1987: Jardins de Pierre. 1988: Tucker. 1989: New-York Stories. 1990: Le Parrain 3. 1992: Dracula. 1996: Jack. 1997: L'Idéaliste. 2007: l'Homme sans âge. 2009: Tetro. 2011: Twixt.


Enorme succès à sa sortie en salles si bien qu'il engrangea au total 215 862 692 dollars à travers le monde, Dracula fut en 1992 un évènement cinématographique quand on sait que derrière cet ambitieux projet Francis Ford Coppola s'est porté garant à échafauder sa propre version du mythe. Réunissant des têtes d'affiche de prestige et des moyens importants pour remanier la destinée immortelle du plus célèbre des vampires, cette version inscrite dans un classicisme flamboyant se pare d'un romantisme désenchanté.   

Le Pitch: En 1462, en Transylvanie, le comte Vlad Dracul s'engage dans une offensive contre les Turcs alors que sa femme Elizabeta l'attend impatiemment dans son château. Après l'achèvement d'une cruelle bataille sanglante, son épouse reçoit une lettre lui indiquant que son amant est mort au champ d'honneur. Désespérée et anéantie par le chagrin, elle décide de se suicider en se jetant du haut d'un fleuve. Ayant survécu à la guerre, le comte revient dans sa demeure pour apprendre la terrible nouvelle. Fou de haine et de douleur, il décide de renier Dieu et ses sbires pour s'adonner vers les forces occultes et réclamer ainsi vengeance pour la mort inéquitable de son idylle. Quatre siècles plus tard, Jonathan Harker, clerc de notaire est invité à quitter Londres pour se rendre en Transylvanie dans la demeure de Dracula. En effet, le comte est intéressé à racheter l'abbaye de Carfax. Au moment de leur rencontre, le maître des ténèbres entrevoit le portrait de la fiancée de Jonathan, Mina. Frappé de stupeur par sa beauté lascive, il reconnait en elle le parfait sosie de son ancienne épouse. Il décide de partir à Londres pour la retrouver après avoir tendu un traquenard à Jonathan Harker en invoquant ses princesses de la nuit avides de sang frais. 


Enième version d'un des archétypes les plus inaltérables du cinéma d'épouvante, Dracula s'alloue d'un éclat nouveau sous la caméra virtuose de Francis Ford Coppola. Cinéaste notoire cumulant les réussites les plus novatrices de ces dernières décennies, cette réactualisation du fameux vampire des Carpathes apporte son originalité et alimente un nouvel intérêt dans un romantisme éperdu baigné de flamboyance gothique. Un parti-pris formel privilégié de somptueux décors ainsi qu'une photo saturée de pourpre et carmin. La musique orchestrale composée par Wojciech Kilar s'accordant de violons sombres et raffinés, les costumes baroques resplendissant par leur aspect élitiste (surtout pour les personnages ténébreux) et les effets-spéciaux artisanaux étant confectionnés avec rigueur (exit donc la modernité des effets numériques que Coppola réfuta avant l'entreprise du tournage). La mise en scène inventive du réalisateur multiplie les angles de vue alambiqués, les cadrages affinant l'étendue des vastes paysages gothiques ainsi qu'une poésie florissante émanant d'une imagerie fantasmagorique. Au passage, un bel hommage est rendu au cinématographe en pleine ascension victorienne alors qu'au même moment sortit le roman de Bram Stoker. Les comédiens sont plutôt adroitement sélectionnés pour nous enivrer dans une aventure horrifique émaillée de péripéties homériques mais surtout d'aigre romance caractérisée par le couple Dracula / Mina. Nos amants maudits étant remarquablement endossés par l'excellent Gary Oldman en noble vampire lamenté d'un amour éperdu, et la radieuse Winona Ryder, réincarnation de sa maîtresse immolée, destinée à sauver une âme maléfique autrefois vouée à Dieu. A eux deux, ils forment un duo ensorcelant dans leur relation fébrile au souffle romanesque charnel. A négliger toutefois dans une douce mesure le rôle secondaire de l'amant berné, Keanu Reeves, semblant ici transparent car peu à l'aise pour exacerber son amour et son empathie envers sa compagne tributaire du prince des ténèbres.


Une touche d'érotisme est également soulignée durant le cheminement narratif, tel ce livre pornographique que Mina feuillette timidement avec une curiosité fascinée, alors que sa comparse Lucie est plutôt dévergondée à suggérer les positions sexuelles les plus débridées. Enfin, le charme ardent émanant des maîtresses de la nuit dévêtues dans un lit de soie, enlaçant à elles trois de manière torride un Jonathan Harker transi d'excitation, fait sans doute parti des moments les plus vénéneux du film. Parfois, certaines séquences horrifiques surprennent par leur tonalité cruelle comme ce bébé en pleurs offert en sacrifice pour les trois princesses des ténèbres. Il y a aussi cette splendide séquence où nos héros attendent patiemment l'arrivée de Lucie dans la chapelle, alors que la morte devenue vampirisée porte en ses bras un enfant pour s'apprêter à le dévorer avant de s'engouffrer dans son caveau familial. Le final haletant s'octroie d'un caractère épique pour parachever une tragédie de désespoir et de romance. La force psychologique du récit est d'ailleurs d'avoir osé dénaturer le personnage maléfique de Dracula dans sa triste destinée d'amour meurtri. Alors que sa nouvelle compagne réincarnée en la personne de Mina était donc vouée à lui rendre la mise pour l'extraire du monde des ténèbres afin de le repentir à Dieu.

Liens d'amour et de sang
Spectacle grandiose déployant un florilège de séquences aussi flamboyantes et épurées que dantesques et échevelées, Dracula de Coppola tire son impact émotionnel et son originalité par son récit romanesque d'une beauté funèbre lyrique. Le charme lascif de Mina, enlacée dans les bras d'un comte mélancolique rongé de remord, nous entraînant dans un somptueux ballet onirique où l'amour cathartique reste plus fort que tout.

Dédicace à Isabelle Rocton

*Bruno
10.11.11. .
15.08.23. 4èx

Récompenses: Oscar du Meilleur Montage sonore, des Meilleures Costumes et du Meilleur Maquillage en 1992.
Saturn Awards du Meilleur film d'Horreur, du Meilleur Acteur pour Gary Oldman, du Meilleur Réalisateur, du Meilleur Scénario et des Meilleurs Costumes en 1993.