"The Entity" de Sidney J. Furie. 1981. U.S.A. 2h05. Avec Barbara Hershey, Ron Silver, David Labiosa, George Coe, Margaret Blye, Jacqueline Brookes, Richard Brestoff, Michael Alldredge, Raymond Singer, Allan Rich.
Sortie en salles en France le 23 Février 1983. U.S: 4 Février 1983
FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Sidney J. Furie est un réalisateur, scénariste et producteur canadien, né le 28 Février 1933 à Toronto, en Ontario (Canada). 1959: A Dangerous Age. 1961: Le Cadavre qui tue. The Snake Woman. 1964: La Poupée Sanglante. 1965: Icpress, danger immédiat. 1966: L'Homme de la Sierra. 1970: L'Ultime Randonnée. 1978: Les Boys de la compagnie C. 1981: l'Emprise. 1986: Aigle de Fer. 1987: Superman 4. 1988: Aigle de Fer 2. 1991: La Prise de Beverly Hills. 1995: Aigle de Fer 4. 1997: Les Rapaces. 1997: Les Enragés. 2000: Jeu Mortel. Nuit Infernale. 2003: Détention. 2004: Direct Action. 2005: American Soldiers. 2006: The Veteran (télé-film).
Ce film est l'histoire romancée d'un incident réel qui a eu lieu à Los Angeles, en Californie, en Octobre 1976. Pour les chercheurs, c'est l'un des cas les plus extraordinaires de l'histoire de la parapsychologie.
La vraie Carla Moran vit aujourd'hui au Texas avec ses enfants.
Les attaques, moins fréquentes et moins intenses... continuent.
D'après un roman éponyme de Frank De Felitta (Audrey Rose), Sidney J. Furie nous transcende en 1981 un troublant cas de hantise inspiré d'un fait-divers. Récompensé à Avoriaz de l'Antenne d'or, l'Emprise peut se targuer de figurer parmi les meilleurs films de hantise. Si bien qu'il doit beaucoup de son attrait effrayant grâce à la mise en scène avisée de Furie optant pour un réalisme sans fard et à la prestance criante de vérité de Barbara Hershey justement couronnée du prix d'interprétation féminine au festival susmentionné. Le pitch: Une nuit, une mère de famille se fait sexuellement agresser par une présence invisible dans sa chambre. Après cet incident imbitable, une seconde agression toute aussi violente auprès des sévices sexuels se produit le lendemain. Quelques jours plus tard, en se rendant à son travail, elle perd le contrôle de son véhicule sans pouvoir le maîtriser. Démunie et terrifiée à l'idée de retourner chez elle, elle consulte un éminent psychiatre pour tenter de comprendre les aboutissants de ses multiples agressions. Avec un argument aussi ridicule et grotesque, l'Emprise aurait pu facilement sombrer dans la gaudriole zédifiante si un réalisateur estimable ainsi qu'une actrice sobrement expressive ne s'étaient réunis pour tenter de nous convaincre de la cause inexpliquée d'un phénomène surnaturel. Et si 40 ans plus tard l'Emprise s'avère toujours aussi terrifiant, inquiétant et oppressant, c'est dans sa sobre conviction à nous illustrer sans esbroufe le destin improbable d'une mère de famille harcelée par une entité lubrique.
La première partie, habilement entrecoupée de scènes-chocs jamais racoleuses, nous décrit donc avec intensité psychologique le calvaire de Carla, victime de viols réguliers commis dans sa demeure familiale. Le sentiment d'angoisse sous-jacent émanant de l'anxiété de Carla, car redoutant une nouvelle attaque cinglante, étant parfaitement insufflé à l'esprit du spectateur, communément témoin de l'intrusion du surnaturel dans son quotidien. Quand au caractère incisif des séquences d'agression perpétrées contre la victime, elles se révèlent rigoureuses de réalisme plutôt malsain. L'efficacité des effets-spéciaux est d'autant mieux exploitée à bon escient, à contrario d'une surenchère grand-guignolesque pour essayer d'authentifier les exactions d'un ectoplasme. Ainsi, cette menace insidieuse s'avère d'autant plus frénétique qu'en l'occurrence le surnaturel se permet d'agresser physiquement la même victime réduite à l'objet sexuel ! De par sa nature vériste, Sidney J. Furie privilégie ensuite la psychologie de son héroïne lors de séances de psychothérapie amorcées avec le psychiatre Sneiderman (Ron Silver, épatant de sobriété à travers son esprit à la fois circonspect et terriblement cartésien). La psyché rationnelle du corps psychiatrique tentera évidemment de convaincre Carla que ses agressions sexuelles ne sont que le fruit d'un refoulement. Car en remuant dans son passé auprès d'un père incestueux et d'un échec sentimental avec un amant juvénile, Sneiderman tentera vainement ramener à la raison la névrose de Carla. Ainsi, ces moments intimistes inscrits dans un cadre thérapeutique accentueront la poignante détresse de cette patiente fragile, d'autant plus démunie de ne pouvoir convaincre son entourage.
Spoiler ! La seconde partie alimentera ensuite son potentiel surnaturel en se focalisant sur les points de vue de parapsychologues. Si bien qu'une équipe de scientifiques spécialisés dans l'occultisme vont apporter leur soutien afin d'épauler Carla. Afin de prouver que cette abstraction n'est point une projection psychique de sa part, une expérience jamais pratiquée dans le domaine ésotérique nous conduira dans un vaste hangar afin de reconstituer grandeur nature la demeure de Carla. Leur but étant de daigner emprisonner l'entité grâce à de l'Hélium liquide pour tenter de la geler si cette chose possédait une masse solide. L'armada technologique imputé de manière disproportionnée dans sa tentative inusité d'appréhender l'entité paranormale impressionne autant qu'elle nous questionne sur leur stratégie à la limite du grotesque. Pour autant, Sidney J. Furie réfute à nous convaincre que le surnaturel existe bel et bien, si bien qu'il laisse libre choix au spectateur de distiller le doute et l'interrogation face aux vicissitudes d'une femme apparemment saine d'esprit. De son côté, le psychiatre Sneiderman épris de compassion pour elle tentera d'endiguer cette folle entreprise paranormale pour la protéger d'un éventuel incident mortel. Fin du Spoiler. On peut enfin insister sur le jeu fébrile de Barbara Herschey particulièrement poignante, émouvante, davantage déterminée dans un rôle épineux de victime martyrisée par un bourreau sans visage mais contrainte de lui tenir tête dans la finalité morale. Celle-ci oscillant l'humanité chétive avec une force de caractère dans sa quête rédemptrice d'y balayer son imbitable cauchemar.
Proprement effrayant lors de ces attaques cinglantes d'une cause surnaturelle, l'Emprise demeure un parangon d'effroi transcendé de la densité psychologique de ces protagonistes et d'une ambiance anxiogène aussi bien fascinante qu'inquiétante. Par le biais de l'option "fait-divers" mis en exergue au terme du métrage, ce grand moment de trouille parvient également à nous questionner sur la spiritualité d'une entité immatérielle. Passionnant et hypnotique, notamment sous l'impulsion d'une bande son tonitruante, ce modèle d'appréhension peut sans rougir trôner auprès de ses homologues notoires, La Maison du Diable, Trauma, La Maison des Damnés, l'Enfant du Diable, les Innocents. Du grand cinéma d'épouvante comme on en fait plus, hélas.
*Bruno
Dédicace à Aurore Drossart
03.07.24. 6èx. Vostfr
Récompense: Antenne d'or au festival d'Avoriaz en 1983 et Prix d'interprétation Féminine à Barbara Hershey..