de Robert Enrico. 1975. France. 1h43. Avec Philippe Noiret, Romy Schneider, Jean Bouise, Joachim Hansen, Robert Hoffmann, Karl Michael Vogler, Caroline Bonhomme, Catherine Delaporte, Madeleine Ozeray.
Sortie salles France: 22 Août 1975. U.S: 29 Juin 1976
FILMOGRAPHIE: Robert Enrico est un réalisateur et scénariste français, né le 13 Avril 1931 à Liévin (Pas-de-Calais), décédé le 23 Février 2001 à Paris. 1962: Au coeur de la vie. 1962: La Belle Vie. 1964: Contre point. 1965: Les Grandes Gueules. 1967: Les Aventuriers. 1967: Tante Zita. 1968: Ho ! 1971: Boulevard du Rhum. 1971: Un peu, beaucoup, passionnément. 1972: Les Caïds. 1974: Le Secret. 1975: Le Vieux Fusil. 1976: Un neveu silencieux. 1977: Coup de foudre. 1979: L'Empreinte des Géants. 1983: Au nom de tous les Miens. 1985: Zone Rouge. 1987: De Guerre Lasse. 1989: La Révolution Française (1ère partie: les années lumières). 1991: Vent d'Est. 1999: Fait d'Hiver.
Synopsis: Alors qu’il mène une vie paisible avec sa femme Clara et leur fille Florence, Julien Dandieu décide de les mettre à l’abri d’une milice française arrogante en les envoyant au château familial, retiré près d’un village champêtre. Resté à l’hôpital pour soigner ses malades, il finit par les rejoindre, inquiet. Mais sur place, l’horreur : les villageois ont été massacrés, rassemblés dans l’église et abattus sans pitié. Dans son château, Julien découvre le corps calciné de sa femme, et celui, ensanglanté, de sa fille. Ravagé par le chagrin, consumé par la haine, il engage une vengeance expéditive. Un à un, il traque les nazis encore présents sur les lieux du drame.
Entrecoupé de flashbacks où Julien se remémore les instants d’un bonheur révolu, Le Vieux Fusil alterne la tendresse des souvenirs angéliques et l’appréhension d’une traque implacable. Dans un huis clos minéral, confiné dans les souterrains du château, Enrico orchestre la métamorphose d’un homme pacifique en bourreau mu par le deuil. La perte brutale, inassimilable, l’horreur d’un viol collectif et d’une immolation crapuleuse font éclater sa moralité. Ces réminiscences élégiaques deviennent alors les contrepoints d’un effondrement. Aux souvenirs lumineux succède une rancune glaciale, irrespirable. Julien tue. Sans pitié. Sans détour. Et chaque balle tirée est un cri rentré, une larme qui ne coule pas.
Ces émotions antinomiques — l’amour, la haine, le passé, le sang — s’enchevêtrent avec une intensité bouleversante. Et si cette œuvre à vif nous étreint si fort, c’est aussi par la complicité vibrante de ses interprètes.
Dans le rôle du médecin submergé par la haine, Philippe Noiret (César du meilleur acteur) incarne l’évidence du mutisme et de la douleur contenue. Son regard perdu, son corps affaissé, traduisent l’implosion d’un homme englouti par la folie. Quant à Romy Schneider, elle illumine l’écran d’un regard pétri de fraîcheur, de bonté. Elle incarne la joie, la tendresse, le désir silencieux. On en tombe amoureux, comme Julien, happé par sa beauté sans emphase. C’est cette lumière, justement, qui rend sa perte si insupportable. Sa mort, puis celle de sa fille, réveillent en nous une répulsion viscérale. Tout cela sonne vrai. Trop vrai.
Il reste, de ce film, une fragilité déchirante, une douleur ciselée dans le marbre. Une quiétude fracassée qui nous poursuit longtemps. Ad vitam aeternam.
Romy, je t'aime.
Récompenses: César du Meilleur Film, du Meilleur Acteur (Philippe Noiret) et Meilleure Musique (François de Roubaix) en 1976.
César des césars en 1985.